Groupe interparlementaire d'amitié

France-Inde (1 ( * ))

Inde :
Approche d'un marché-continent

Actes du colloque Sénat - Ubifrance du 10 octobre 2013

Sous le haut patronage de
M. Jean-Pierre BEL, Président du Sénat

Palais du Luxembourg
Salle Clemenceau



INDE

INDICATEURS ÉCONOMIQUES

PIB : 1,842 milliard de dollars en 2012 ( Banque mondiale ), soit la 10 ème puissance mondiale

Population totale : 1,243 milliard en 2013 ( FMI ) soit le deuxième pays le plus peuplé après la Chine

Taux de croissance annuelle de la population : 1, 4% en 2011 ( Banque mondiale )

PIB par habitant : 1 530$ pour 2012 ( Banque Mondiale )

Part de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté (2$ PPA/jour) : 24, 5% en 2010 contre 29,5 % en 2005 (Banque mondiale)

Taux de croissance : 3,2 % en 2012 contre 6,8 % en 2011 ( FMI ) ; prévisions 3,8 % en 2013 ( FMI )

Taux d'inflation (des prix à la consommation) : 10,4% en 2012 ( FMI )

Solde budgétaire : -3,4 % du PIB en 2011 ( FMI )

Dette nationale : 48,5 % du PIB pour l'année 2011 ( Banque mondiale )

Balance commerciale : -168 milliards de dollars pour 2011( FMI )

Principaux partenaires (en parts de marchés en 2011) : Chine (11,8 %), États-Unis (5 %), Émirats Arabes Unis, Arabie Saoudite, Allemagne (3,3 %), Singapour, Royaume-Uni, Italie (1,1 %), France (0,9 %) ( DG Trésor )

Part des principaux secteurs d'activités dans le PIB :

agriculture : 17 % en 2012 contre 23% en 2000 ( Banque mondiale )

industrie : 26 % en 2012 contre 26 % en 2000 ( Banque mondiale )

services : 57 % en 2012 contre 51 % en 2000 ( Banque mondiale )

Exportations françaises vers l'Inde : 3,3 milliards d'euros en 2012, soit une hausse annuelle de 17,3 % ( DG Trésor )

Importations françaises depuis l'Inde : 4,7 milliards d'euros en 2012, soit une baisse annuelle de 2,1 % ( DG Trésor )

Volume total des échanges commerciaux bilatéraux : 7,9 milliards d'euros en 2012, soit une hausse annuelle de 5,1 % ( DG Trésor )

Déficit commercial de la France vis-à-vis de l'Inde : 1,4 milliard d'euros en 2012 contre 2 milliards d'euros en 2011 ( DG Trésor )

OUVERTURE

Message du Président du Sénat, M. Jean-Pierre BEL, lu par M. François MARC, Président du groupe d'amitié France-Inde

M. François MARC. - Le Président du Sénat, M. Jean-Pierre Bel, m'a chargé de vous transmettre le message suivant :

« Monsieur l'Ambassadeur,

Chers collègues,

Mesdames et Messieurs,

Je me réjouis que le Sénat accueille cette rencontre économique sur l'Inde. Elle s'inscrit dans le cadre du partenariat fructueux que nous poursuivons depuis une quinzaine d'années avec Ubifrance et, désormais, avec la nouvelle Banque publique d'investissement. L'année dernière, c'est sur l'Asie du Sud-Est et les perspectives de marchés qu'elle représente que nous échangions ici même.

Je voudrais en premier lieu remercier les membres du groupe d'amitié France-Inde, et notamment son président, François Marc, qui a su insuffler une vraie dynamique au sein de ce groupe pour développer nos relations avec un pays en pleine expansion. Les perspectives et les travaux de ce groupe d'amitié s'étendent d'ailleurs sur un large champ.

La précédente édition de cet évènement dédié à ce « pays-continent » remonte à fin 2007. Six ans, déjà ! Des relations fortes se sont engagées entre nos deux pays dès les années 1980. Elles se sont approfondies depuis cette date, en particulier avec la conclusion d'un partenariat stratégique en 1998. L'Accord de coopération nucléaire civil, entré en vigueur en 2010, en est une des illustrations. Notre coopération en matière spatiale ou de défense s'est également accrue. Enfin, nos relations économiques se développent dans de nombreux secteurs.

Nous le savons, l'Inde est, elle aussi, affectée par la crise économique. La croissance indienne, si spectaculaire pendant longtemps, a connu un ralentissement ces dernières années. Mais l'Inde est un pays jeune, où émerge une classe moyenne dynamique. Elle a engagé des réformes structurelles, offrant la perspective d'opportunités nouvelles. Et dans une vingtaine d'années, l'Inde sera une des quatre premières économies mondiales. C'est pourquoi nous devons capitaliser sur l'excellence des relations politiques entre nos deux pays - encore renforcées par la visite du Président de la République en Inde, en mars dernier - et l'expérience des entreprises françaises implantées dans ce pays, parfois depuis longtemps.

Les besoins du pays sont immenses, dans tous les domaines. La situation devrait nous permettre d'inverser la tendance qui a vu notre part de marché à l'exportation baisser ces dernières années. À cet égard, un rééquilibrage des échanges commerciaux civils pourrait naître de l'Accord de libre-échange en cours de finalisation entre l'Union européenne et l'Inde. Nos entreprises implantent un nombre croissant de filiales en Inde. La France y figure parmi les trois premiers investisseurs étrangers. Nos entreprises y emploient environ 240 000 personnes dans des secteurs variés.

Bien sûr les difficultés existent, mais c'est dans la durée que nous devons inscrire nos efforts car le marché indien offre des opportunités colossales de développement. L'amitié entre nos deux peuples passe aussi par des échanges culturels forts, ou encore des partenariats dans le domaine de la recherche. La visite du Président de la République en début d'année a permis de lancer de nouvelles initiatives dans ces domaines. J'en suis persuadé : au-delà des intérêts économiques, notre avenir commun passe surtout par les liens humains que nous aurons su tisser et la confiance que nous aurons su établir.

C'est dans cet état d'esprit que je vous propose d'aborder ce colloque. Je remercie encore notre président de groupe d'amitié pour son implication au service du développement des relations franco-indiennes. Mes remerciements vont aussi à toutes celles et ceux qui ont contribué à l'organisation de cette manifestation : nos chefs de missions économiques, les représentants de la BPI et d'Ubifrance, tant en France qu'en Inde, nos partenaires. Les institutions publiques ont pour vocation de fournir le cadre et les outils pour permettre le développement des relations économiques ; ce sont des facilitateurs ! Mais de ces relations, vous êtes, Mesdames et Messieurs, les acteurs.

À tous, je souhaite de fructueux et bons travaux. »

M. François MARC, Président du groupe d'amitié France-Inde

Je reprends ma casquette de Président du groupe d'amitié France-Inde pour vous exposer brièvement quelques conclusions des deux missions que j'ai effectuées dans ce pays en mars dernier : l'une, en accompagnant le Président de la République ; l'autre, en conduisant une délégation de notre groupe d'amitié.

On sait que le contexte actuel est assez chahuté, tant sur le plan économique que politique. Le propos du Président Bel évoquait le ralentissement de la croissance. Celui-ci résulte à la fois de l'impact de la crise mondiale sur les exportations, d'un affaiblissement de la demande intérieure et du déficit en infrastructures. Par ailleurs, dans l'attente des prochaines élections, au printemps 2014, le contexte est assez paralysant pour la coalition parlementaire au pouvoir. Ces élections constitueront donc une étape essentielle sur le plan institutionnel et politique.

Mais le printemps 2014, c'est demain. Et cette conjoncture du moment ne doit pas masquer les évolutions structurelles encourageantes pour ce pays.

Premièrement, l'Inde envisage des réformes d'ampleur dans le triple objectif de diminuer le déficit public, de stimuler l'investissement et de réduire sa vulnérabilité aux chocs extérieurs. Un guichet interministériel destiné à accélérer les autorisations pour les projets d'investissement importants a été mis en place pour faciliter l'ouverture aux investisseurs étrangers du secteur de la grande distribution, ainsi que l'ouverture du capital des compagnies aériennes privées et des compagnies d'assurances.

Deuxièmement, le modèle économique du pays va rapidement évoluer : si un Indien sur trois vit toujours avec moins de 1 dollar par jour, d'ores et déjà 5 à 10 % de cette population de 1,2 milliard d'habitants ont rejoint la classe moyenne. Cette évolution est exponentielle ; elle ouvre un champ d'opportunités considérable. Nos entreprises peuvent produire en Inde, au coût de production local, des produits adaptés à la demande indienne, et, de plus en plus, y exporter des produits et services répondant aux nouvelles demandes de cette classe moyenne.

Enfin, s'agissant des secteurs stratégiques comme celui des infrastructures et du développement durable (transports, énergie, eau...), les insuffisances entraînent, certes, des difficultés pour l'activité économique et commerciale. Mais les entreprises françaises sont particulièrement bien placées pour répondre aux besoins vitaux gigantesques de l'Inde. Leur expertise, reconnue, doit permettre de développer un nombre croissant de projets dans ces secteurs clefs.

Les enjeux liés à la qualité de l'eau et à son accès sont considérables : avec 16 % de la population mondiale, l'Inde ne dispose que de 4 % des réserves d'eau douce. Cette ressource vitale conditionne la croissance, le développement (tant urbain qu'agricole) et la qualité environnementale du pays. Elle conditionne aussi, bien sûr, l'état sanitaire de ses habitants. L'expertise française dans ce secteur constitue un réel atout, à tous les niveaux (recherche amont, stockage, traitement, assainissement, distribution, ...). De nouveaux financements (des autorités publiques indiennes comme de la Banque mondiale), doivent permettre d'amplifier les partenariats et les investissements.

On peut aussi évoquer l'agroalimentaire et la chaîne du froid, secteurs dans lesquels les besoins de l'Inde sont immenses : sachez qu'aujourd'hui, entre 30 et 50 % des denrées alimentaires sont perdus en raison du manque d'équipements et de logistique ! L'excellence des entreprises françaises devrait, dans ces domaines, pouvoir apporter des réponses appropriées.

Je veux aussi attirer votre attention sur les situations contrastées que l'on peut rencontrer dans ce pays-continent : 28 États et 7 territoires, ce qui crée une complexité d'approche mais aussi l'opportunité de développer des « marchés de niche », y compris pour de petites ou moyennes entreprises. Pondichéry, par exemple, compte parmi ces territoires spécifiques, où des Français investissent dans le secteur touristique.

Monsieur l'Ambassadeur, suite à notre mission de mars dernier, nous avons évoqué avec votre prédécesseur les obstacles qu'il serait souhaitable de lever pour que les investisseurs français puissent s'engager davantage encore sur le sol indien. Je citerai notamment :

- le niveau élevé des droits de douane, en particulier dans les secteurs agroalimentaire et automobile ;

- des obstacles juridiques à l'accès des capitaux étrangers ;

- les conflits liés aux acquisitions foncières, qui retardent les projets industriels d'importance ;

- certains problèmes de formation, de disponibilité et de forte rotation de la main d'oeuvre.

Mais vous reviendrez certainement sur ces sujets, et bien d'autres, aujourd'hui.

Ce colloque, j'en suis sûr, vous donnera quelques clefs pour parvenir à exporter dans ce pays fascinant ou pour vous y implanter. Et je ne résiste pas à l'envie de citer le Mahatma Gandhi : « Vis comme si tu devais mourir demain. Apprends comme si tu devais vivre toujours. » Je suis sûr que nous apprendrons tous beaucoup aujourd'hui.

Je vous remercie de votre attention.

M. Christophe LECOURTIER, Directeur général d'Ubifrance

Monsieur l'Ambassadeur d'Inde en France, Monsieur le Président du groupe d'amitié, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Monsieur le Consul général de France à Bombay, Mesdames et Messieurs, c'est un honneur pour nous d'organiser ce colloque dans ce lieu prestigieux qu'est le Sénat. La présence de très nombreuses entreprises témoigne de l'utilité de ce type de manifestation.

En dépit de vicissitudes, l'Inde est un acteur majeur de l'économie mondiale. C'est un « pays-continent » qui compte la deuxième population mondiale avec 1,2 milliard d'habitants et sera la nation la plus peuplée dès 2030. L'Inde est également la première démocratie de la planète et se classe en quatrième position s'agissant du PIB en parité de pouvoir d'achat, derrière les États-Unis, la Chine et le Japon, avec un taux de croissance annuel moyen de 5-6 % ces dernières années.

L'Inde compte 53 villes de plus de 1 million d'habitants et autant de pôles de consommation émergents. La classe moyenne représente plus de 200 millions de personnes, soit davantage que la population brésilienne ; la classe moyenne supérieure 70 millions de personnes, plus que la population française.

L'Inde, c'est aussi vingt-trois langues officielles, le berceau de quatre religions majeures et un territoire de plus de 3 millions de km 2 , soit cinq fois la France. Il convient ainsi d'apprécier ce pays dans toute sa diversité.

L'Inde constitue un marché d'environ 500 milliards de dollars d'importations annuelles. La France y détient une part de marché comprise entre 1,5 et 2 %, soit moitié moins que l'Allemagne.

Nos grandes entreprises sont implantées depuis de nombreuses années et développent leurs activités dans des secteurs aussi divers que la finance (BNP Paribas), les services (Sodexo et Cap Gemini), la gestion énergétique (Schneider) ou l'industrie (Renault, Alcatel, Alstom). Les 750 implantations françaises sur place, 350 entreprises et 400 sous-filiales, emploient autour de 250 000 salariés, ce qui les place - collectivement - parmi les principaux employeurs privés indiens.

Nos échanges sont néanmoins encore fortement dépendants de l'aéronautique, qui pèse pour 25 % des exportations, alors même que les besoins et les priorités de l'Inde sont considérables dans les secteurs des infrastructures, de l'environnement, de l'électricité, mais aussi des dispositifs médicaux, des produits pharmaceutiques, de l'électronique, sans compter les domaines où la France bénéficie d'une excellente réputation comme les produits de luxe ou cosmétiques.

Dans ce contexte, il est indispensable de mieux déterminer les offres de produits et de services qui correspondent au développement économique et social indien. La Ministre du Commerce extérieur, Mme Nicole Bricq, a rassemblé ces offres au sein de « familles » afin de mieux promouvoir l'offre française. Les familles « mieux se soigner », « mieux vivre en ville » et « mieux communiquer » semblent, à cet égard, parfaitement adaptées au marché indien. L'offre et la demande doivent être rapprochées. C'est notamment la mission d'Ubifrance et des équipes de M. Pierre Lignot. Trente-deux experts sectoriels travaillent au sein de quatre bureaux : à New Delhi au sein de l'Ambassade de France, à Bombay, à Bangalore et à Chennai. Nous accompagnons plus de 400 entreprises françaises chaque année et organisons 25 salons professionnels sur l'ensemble du territoire indien.

L'objectif est de concentrer nos efforts sur les entreprises françaises dans les secteurs les plus porteurs et les accompagner dans la durée. Le rythme indien de conclusion des affaires est en effet souvent long. Notre stratégie doit être adaptée en conséquence. C'est en aiguisant nos outils en fonction du contexte que nous serons plus efficaces et obtiendrons des success stories inspirantes.

Ubifrance n'a toutefois pas la clef, seule, du succès des entreprises françaises en Inde. C'est pourquoi de nombreux intervenants débattront ce matin autour des questions suivantes : Pourquoi s'implanter en Inde ? Quels sont les grands secteurs porteurs et les niches émergentes ? Comment en pratique développer son activité ? Comment investir et trouver des financements ?

Je remercie l'ensemble des intervenants, et en particulier nos partenaires.


* ( 1 ) Membres du groupe d'amitié France-Inde : M. François MARC, Président ; Mme Leila AÏCHI, M. Bertrand AUBAN, M. Jean BESSON, M. Michel BILLOUT, M. Gérard CÉSAR, M. Jean-Pierre CHAUVEAU,  M. Jean-Pierre CHEVÈNEMENT, M. Yvon  COLLIN, M. Ronan DANTEC, M. Ambroise DUPONT, M. Jean-Léonce DUPONT , M. Vincent EBLÉ, Mme Jacqueline FARREYROL, M. Jean-Luc FICHET , M. François FORTASSIN, M. Jean-Paul FOURNIER, M. Yann GAILLARD, Mme Sylvie GOY-CHAVENT, Mme Sophie JOISSAINS, M. Philippe KALTENBACH, Mme Christiane KAMMERMANN, M. Daniel LAURENT, M. Jean-Yves LECONTE, M. Jacques LEGENDRE, Mme Valérie LÉTARD, M. Hervé MAUREY, Mme Catherine MORIN-DESAILLY, M. Jean-Marc PASTOR, M. Alain RICHARD, M. Yves ROME, Mme Laurence ROSSIGNOL, M. Bernard SAUGEY, Mme Patricia SCHILLINGER, M. Jean-Pierre SUEUR, Mme Catherine TROENDLE, M. Jean-Marie VANLERENBERGHE, M. Maurice VINCENT.

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N° GA 111 - Octobre 2013

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