C. LES VISAS : UNE ESPÉRANCE À NE PAS CONDAMNER

La Bosnie-Herzégovine et l'Union européenne ont signé un accord de facilitation de délivrance des visas, entré en vigueur le 1 er janvier 2008. la Bosnie-Herzégovine a depuis, entrepris des démarches en vue d'obtenir un régime d'exemption totale et s'est engagé à respecter un certain nombre de critères techniques et politiques.

Ces critères peuvent être regroupés au sein de quatre ensembles ou blocs : Sécurité des documents officiels (bloc 1), migration illégale y compris les questions de réadmission (bloc 2), ordre public et sécurité (bloc 3) et relations extérieures et droits fondamentaux (bloc 4). A l'heure actuelle, 72 recommandations de l'Union européenne sur 120 ont été adoptées. De simples mesures techniques permettraient de respecter 38 autres dispositions.

La dizaine de critères restant à respecter nécessite par contre un consensus politique qu'il apparaît délicat de trouver dans le contexte actuel. Si la gestion des frontières ou les lacunes de la législation locale concernant la lutte contre les discriminations posent problème, la majeure partie des difficultés est liée au bloc 3. Les insuffisances en matière de lutte contre le blanchiment d'argent, la corruption ou le trafic de stupéfiants comme l'absence d'harmonisation totale de la législation pénale bosnienne avec le droit international sont en effet des obstacles a priori insurmontables. La Commission a, à cet égard, décidé le 15 juillet de repousser de six mois voire un an la libéralisation totale des visas à destination de la Bosnie-Herzégovine. Il appartiendra au Conseil de se prononcer définitivement en octobre prochain.

Le groupe interparlementaire est assez partagé sur cette question. Dans un premier temps, il ne semble pas logique d'accéder à la demande de la Bosnie-Herzégovine si elle ne respecte pas des critères importants. Ce refus doit permettre une prise de conscience au sein de l'appareil d'État bosnien et l'obliger à faire aboutir, à court terme, une véritable réforme de sa législation pénale. Le fait que la Bosnie-Herzégovine soit le seul pays de l'ancienne Yougoslavie à ne pas bénéficier d'un régime d'exemption à compter du 1 er janvier 2010 incite néanmoins à réviser un tel jugement. L'absence de libéralisation porte, en effet, un sérieux coup à la citoyenneté bosnienne. Rappelons que les bosno-croates ont pour la plupart la double nationalité croate et bosnienne et bénéficient à ce titre d'un régime d'exemption accordé à Zagreb. Belgrade devrait bénéficier de telles mesures à compter du 1 er janvier prochain. Les bosno-serbes de la Republika Sprska qui disposent souvent de la double nationalité pourraient également bénéficier par ce biais du régime d'exemption. Seuls les déplacements de la majorité bosniaque vers l'Union européenne seraient donc soumis à l'obtention d'un visa.

Les bosniaques, enclins à une réforme de l'État central en vue de faire émerger une véritable citoyenneté bosnienne, se retrouveraient donc les premiers pénalisés par ce refus. Perçu comme une mesure vexatoire, il renforcerait une défiance latente à l'égard de l'Union européenne. Il convient donc de s'interroger sur l'opportunité politique d'un report, fut-il réduit à six mois. L'Union européenne a prouvé sa souplesse lors de la signature de l'accord de stabilisation et d'association. Elle devrait en faire à nouveau preuve sur cette question délicate. Il ne s'agit plus de raisonner en termes techniques mais bien de réfléchir au sens qu'il convient d'accorder au concept de citoyenneté bosnienne. L'absence de libéralisation totale du régime des visas reviendrait à conclure que les déplacements ne sont aisés que pour les personnes bénéficiant de la double nationalité et que la citoyenneté bosnienne est synonyme d'enfermement.

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