Avertissement : Cette étude correspond à l'état de la législation en décembre 1996, elle a été remplacée par l'étude LC 133 de mars 2004.

ALLEMAGNE



Les infractions sexuelles font l'objet de la section du code pénal qui est intitulée " Infractions contre l'autodétermination en matière sexuelle " et qui résulte d'une loi de novembre 1973. Les profondes innovations apportées par cette loi ont été largement contestées et n'ont pas été votées par l'opposition chrétienne-démocrate de l'époque. En effet, toutes les références à la protection des idées morales traditionnelles ont été écartées au profit du " développement sexuel harmonieux de la jeunesse " et le champ des infractions a été restreint, en même temps que les sanctions.

Les abus sexuels sur les mineurs sont sanctionnés par les articles 176, 182 et 174 du code pénal qui concernent respectivement les " enfants ", c'est-à-dire les " personnes de moins de 14 ans ", les jeunes de moins de 16 ans et les " personnes protégées ", c'est-à-dire les jeunes de moins de 18 ans dans la mesure où ils sont confiés à un tiers pour leur formation, leur éducation, leur surveillance...

Comme par ailleurs de nombreuses dispositions du code pénal remontent à 1871, un nouveau code est en cours d'élaboration . Ce dernier prévoit notamment une aggravation des sanctions applicables en cas d'abus sexuel sur un mineur . Le projet de loi relatif au nouveau code pénal ne sera pas examiné par le Parlement avant l'année 1997.

Le code pénal sanctionne les " actes sexuels " commis sur ou devant certaines personnes (mineurs, prisonniers, personnes internées...) à condition qu'ils revêtent une " certaine importance ". Le code ne définit pas le terme " acte sexuel " mais cette formulation élimine l'élément subjectif compris dans les dispositions antérieures à la loi de 1973 qui évoquait les " actes impudiques ". La jurisprudence est en effet unanime pour qualifier d'" acte sexuel " toute relation sexuelle consistant en un contact physique, quelle que soit l'intention de son auteur : seul compte l'élément objectif.

Quant au critère d'importance, la jurisprudence l'interprète comme étant à la fois quantitatif et relatif.

Pour qu'il y ait infraction, il faut que l'" intérêt protégé par la loi ", en l'occurrence la libre disposition de soi en matière sexuelle, ait été mis en danger de façon considérable. Cette atteinte est estimée en fonction du moyen utilisé, de son intensité et de sa durée. Le critère d'importance pris sous son aspect quantitatif permet de distinguer les infractions sexuelles des actes dénotant une absence de tact par exemple. Par ailleurs, l'âge de la victime conduit le juge à apprécier différemment l'acte incriminé.

De façon générale, la tentative d'abus est punissable . En revanche, celui qui commet un abus sur un mineur sans intention de commettre un tel acte, c'est-à-dire sans connaître l'âge de la victime se voit infliger une peine plus légère que celui qui agit en connaissance de cause.

Pour les infractions relevant de l'article 176, c'est-à-dire les abus commis sur des enfants de moins de 14 ans, le délai de prescription de l'action publique commence à courir le jour du dix-huitième anniversaire de l'enfant.

I - LE VIOL

Le code pénal définit le viol comme l'acte sexuel hors mariage auquel une femme est contrainte par la violence ou la menace. Le droit allemand n'envisage donc explicitement que le viol des femmes et ne considère pas comme un viol un acte de pénétration orale ou anale.

Cependant, à l'article 176, relatif aux abus sexuels commis sur des enfants de moins de 14 ans, il qualifie de " particulièrement grave " le fait d'avoir un rapport sexuel avec un enfant de moins de 14 ans. On peut donc assimiler au viol de mineur cette infraction qui est sanctionnée par une peine de prison comprise entre un et dix ans (1( * )). La durée de l'emprisonnement est comprise entre cinq et quinze ans lorsque les faits entraînent la mort de l'enfant.

Par comparaison, il faut noter que :

- le viol d'une femme est sanctionné par une peine de prison d'au moins deux ans et qui ne peut être inférieure à cinq ans lorsque le viol a entraîné la mort ;

- l'homicide est puni d'une peine de prison qui ne peut être inférieure à cinq ans, l'homicide par imprudence étant sanctionné par une peine de prison d'au plus cinq ans ;

- les coups et blessures sont sanctionnés par une peine de prison d'au plus trois ans ou par une amende.

Dans certaines circonstances, l'abus sexuel ayant entraîné le décès peut être puni par la réclusion à perpétuité. Il faut pour cela que la qualification de " meurtre " ait été retenue. D'après l'article 211 du code pénal, le meurtrier est celui qui " par instinct sanguinaire, pour satisfaire ses pulsions sexuelles, par cupidité ou pour n'importe quel mobile abject tue un être humain sournoisement, cruellement, en employant un moyen constituant un danger public ou encore pour permettre ou dissimuler une autre infraction ".

II - LES AUTRES AGRESSIONS SEXUELLES

1) Sur des enfants de moins de 14 ans

D'après l'article 176 du code pénal, les " actes sexuels " commis sur des enfants de moins de 14 ans sont sanctionnés par une peine de prison d'une durée comprise entre six mois et dix ans . Dans les cas les moins graves, la peine de prison est plafonnée à cinq ans.

Les " actes sexuels " qui entraînent une lésion grave sont qualifiés de " particulièrement graves " et donc punis de la même façon que le viol. Sont également qualifiés de " particulièrement graves " par la jurisprudence les abus répétés.

2) Sur des jeunes de moins de 16 ans

L'article 182 du code pénal condamne " l'abus sexuel des jeunes ". Il punit les " actes sexuels " commis sur une personne de moins de 16 ans :

- par une personne de plus de 18 ans, quel que soit son sexe, qui met à profit une situation de détresse ou rémunère le mineur ;

- par une personne de plus de 21 ans, qui profite de " l'insuffisante capacité d'autodétermination du mineur ".

Dans le premier cas, les faits sont sanctionnés par une peine de prison d'au plus cinq ans ou par une amende, et dans le second, par une peine de prison d'au plus trois ans ou par une amende.

Le tribunal peut cependant s'abstenir de punir le coupable si son tort est " limité ".

3) Sur des jeunes de moins de 18 ans par des personnes à qui ils ont été confiés

Sont qualifiés d'" infractions contre l'autodétermination en matière sexuelle " par l'article 174 du code pénal, et à ce titre sanctionnés par une peine de prison d'au plus cinq ans ou par une amende, les " actes sexuels " commis sur :

- un jeune de moins de 16 ans par une personne chargée de son éducation, de sa formation, ou plus généralement chargée de s'occuper de lui ;

- un jeune de moins de 18 ans par une personne chargée de son éducation, de sa formation ou liée avec lui par une relation quelconque (de travail par exemple) dans la mesure où cette personne se prévaut de la dépendance créée entre eux par la relation qui les lie ;

- un enfant, biologique ou adoptif, de moins de 18 ans.

Si le jeune a moins de 16 ans, l'agression est donc punissable même si la personne ne s'est pas prévalue de la supériorité dans laquelle elle se trouve par rapport au mineur. Les termes de l'article 174 excluent les abus sexuels commis par des adultes se trouvant momentanément en relation avec le mineur. Ne sont ainsi pas concernés le camionneur qui prend en auto-stop une jeune fille pour un trajet de quelques heures ou le gérant d'une auberge de jeunesse. Dans ce cas, l'infraction tombe sous le coup des dispositions générales du code pénal sur les coups et blessures. En revanche, les dispositions du code pénal relatives aux infractions sexuelles sont susceptibles de s'appliquer au responsable d'un camp de vacances par exemple.

Si les torts du coupable sont " limités ", le tribunal peut ne pas le punir.

III - LES ATTEINTES SEXUELLES

Le code pénal n'établit pas de différence entre les divers " actes sexuels " selon qu'ils supposent ou non le recours à la force ou à l'intimidation. En revanche, il les distingue selon leur gravité. Les atteintes commises sur des enfants de moins de 14 ans sont donc sanctionnées comme les " actes " les moins graves, c'est-à-dire par une peine de prison d'au plus cinq ans ou par une amende.

Cependant, le code individualise deux infractions relatives à l' exhibition sexuelle .

Le fait de se livrer à des actes à caractère sexuel nettement marqué devant des enfants de moins de 14 ans ou devant des " personnes protégées " est puni d'une peine de prison de un à trois ans ou d'une amende.

En revanche, le simple exhibitionnisme (qui, d'après le code, est nécessairement le fait d'un homme) est sanctionné par une peine de prison d'au plus un an ou par une amende.

IV - LA PREVENTION DE LA RECIDIVE

1) La castration chimique

Plusieurs affaires récentes ont relancé le débat sur l'introduction d'une nouvelle sanction pour les hommes coupables d'abus sexuels sur des mineurs : la castration chimique , qui, à la différence de la castration chirurgicale, n'est pas irréversible. En effet, la castration chimique produit ses effets aussi longtemps que dure la prise des médicaments destinés à abaisser la production de l'hormone mâle testotérone.

En Allemagne, la castration chimique volontaire existe depuis la loi du 15 août 1969 .

La castration chimique est autorisée si :

- l'intéressé est volontaire et a plus de 25 ans ;

- elle est pratiquée, après expertise, par un médecin, en fonction des connaissances médicales ;

- elle ne présente aucun inconvénient physique ou psychologique pour l'individu ;

- elle peut prévenir, guérir ou soulager " des maladies graves, des troubles psychiques ou des souffrances causés par son instinct sexuel anormal " ou si l'intéressé s'est rendu coupable de certaines infractions au code pénal, parmi lesquels l'abus sexuel envers des enfants, tel que le définit l'article 176.

2) L'extraterritorialité des dispositions pénales

L'Allemagne a introduit dans son code pénal (article 5-8), en septembre 1993, la possibilité de poursuivre ses ressortissants résidant en Allemagne et coupables d'avoir entretenu des rapports sexuels à l'étranger avec des enfants de moins de 14 ans.

Les faits sont alors punissables comme s'ils s'étaient produits en Allemagne. La difficulté à réunir les preuves et l'absence de coopération de la justice locale font que cette disposition est rarement appliquée. En trois ans, une seule condamnation a été prononcée sur cette base. Quinze autres procédures sont en cours.

Cette disposition peut également s'appliquer lorsque l'abus sexuel est commis à l'étranger sur un jeune de moins de 18 ans lié à un adulte par une relation d'autorité. Dans ce cas, il faut que la victime soit elle aussi de nationalité allemande et qu'elle réside en Allemagne.

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Le groupe S.P.D. propose deux mesures pour lutter contre la récidive : le traitement des délinquants sexuels incarcérés et l'examen par des experts avant toute libération anticipée.

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