B. ENCOURAGER LA CONSOMMATION CITOYENNE

Pour permettre à la consommation citoyenne de progresser et favoriser ainsi l'émergence de pratiques plus responsables dans les entreprises, il faudrait en définir les critères, les coûts et les procédures de diffusion. Une amélioration des conditions actuelles de vente pourrait certainement être obtenue par la standardisation des produits éthiques, autour d'une définition unique et partagée par tous. Mais une mesure plus précise du « juste prix » (niveau de marge du distributeur et surcoût à payer par le consommateur) doit être menée afin que le coût de la solidarité (estimé autour de 10 à 15 %) soit réparti d'une manière supportable par les deux parties. Si la consommation d'un produit dont on connaît l'histoire engendre pour le consommateur une plus grande utilité, il n'est pas aisé de la mesurer en terme de coût. L'élaboration d'un prix juste favoriserait le développement des volumes et l'optimisation des gammes de produits proposés. Une information unique et uniforme sur toutes les étapes de la fabrication et de la commercialisation du produit permettrait de mieux sensibiliser le consommateur.

D'ores et déjà, il existe des initiatives privées ou associatives riches et variées. Des entreprises s'engagent dans une politique éthique et en tirent des bénéfices, non seulement en termes d'image mais aussi de rentabilité. La consommation citoyenne pourrait être appelée à se développer très fortement. Selon une enquête du Centre de Recherche pour l'Etude et l'Observation des conditions de vie (CREDOC), menée en 2000, 58 % des Français se disent prêts à acheter un produit dont le fabricant soutient une cause humanitaire. Selon un sondage BVA-CCFD, 90  % des Français seraient prêts à acheter en priorité les produits d'entreprises respectant partout les droits sociaux 15 ( * ) .

Pourtant, le chiffre d'affaires de la « consommation engagée », strictement entendue, n'est estimé par le CREDOC qu'entre 0,1 % et 1 % selon les marchés. Ces mesures sont toutefois à prendre avec précaution tant les notions de « commerce équitable » ou de « consommation citoyenne » sont protéiformes, recouvrant des critères aussi divers que le respect de l'environnement, la conformité à une charte sociale voire même, si l'on en croit le slogan « Nos emplettes sont nos emplois », la fabrication sur le territoire français.

C. LE RÔLE DES POUVOIRS PUBLICS

Votre rapporteur pour avis invite le Gouvernement à informer les acteurs et à les éduquer au développement de la démarche éthique, à encadrer celle-ci réglementairement puis à contrôler le respect des normes. Votre rapporteur pour avis estime que l'Etat devrait, de ce point de vue, donner l'exemple.

Le décret n° 2001-210 du 7 mars 2001 portant réforme du code des marchés publics innove puisqu'il prévoit explicitement, en ses articles 14 et 30, la possibilité de prendre en compte les conditions sociales et environnementales de l'exécution d'un marché public. Les entreprises candidates ne seront pas sélectionnées sur un critère de « mieux-disant social », mais le maître d'ouvrage peut énoncer les conditions sociales d'exécution du marché dans son cahier des clauses administratives particulières. En outre, le nouveau code des marchés publics consacre la possibilité pour les maîtres d'ouvrage publics de s'exonérer du formalisme concurrentiel pour des marchés dont l'objet est d'ordre social.

Ces dispositions nouvelles représentent un motif de satisfaction pour votre rapporteur pour avis, qui approuve ce souci d'ouvrir la commande publique à des préoccupations importantes qui n'étaient qu'imparfaitement prises en compte jusqu'alors. L'exemplarité de ce pas vers une économie solidaire et vers une consommation engagée mérite d'être soulignée.

Votre commission invite toutefois le Gouvernement à veiller à ce que le commerce équitable ne serve pas d'alibi protectionniste et que le souci de respecter des chartes de bonne conduite ne conduise pas à réduire l'accès des pays les moins développés au marché communautaire ou celui des PME aux marchés publics.

Il faut, par ailleurs, remarquer que cet élan s'inscrit en France dans un contexte de crise de l'engagement militant et qu'il ne saurait remplir à lui seul l'exigence d'une nouvelle dynamique de l'engagement de citoyenneté que les pouvoirs publics doivent chercher à insuffler.

* 15 Le Monde , 22 novembre 2002.

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