II. LES ORIENTATIONS DU PROJET DE LOI

Pour autant, ces progrès ne peuvent conduire au risque zéro. La catastrophe de Toulouse en témoigne là encore. Il s'agit, en effet, de l'accident professionnel le plus grave survenu en France depuis 50 ans, mais il semble pourtant -et sous toutes réserves puisque l'enquête judiciaire est encore en cours- que la réglementation sur la sécurité au travail ait été, pour l'essentiel, respectée.

A. LA TRIPLE INSUFFISANCE DE NOTRE POLITIQUE DE PRÉVENTION

Parallèlement au lancement d'un débat national sur la prévention du risque industriel et à la constitution d'une commission d'enquête à l'Assemblée nationale, le précédent gouvernement avait mis en place un groupe de travail réunissant les partenaires sociaux et présidé par M. Michel Roux, président honoraire de la section sociale du Conseil d'Etat. Il avait pour mission d'engager une première réflexion sur les voies et moyens d'un renforcement de la prévention des risques industriels dans le domaine de la sécurité au travail.

Les travaux de ce groupe de réflexion ont permis de mettre en lumière une triple insuffisance de notre politique de prévention .

D'abord, notre législation prend encore insuffisamment en compte les conséquences de l'externalisation et du recours croissant à la sous-traitance . L'externalisation apparaît, en effet, comme un facteur aggravant. Non par elle-même, car elle peut conduire à une maîtrise des risques grâce au recours à des professionnels très qualifiés, mais par les interférences que peut générer l'intervention de plusieurs entreprises sur un même site et par la méconnaissance qu'ont les intervenants extérieurs des risques spécifiques à l'établissement. Comment, en effet, garantir une réelle sécurité lorsque jusqu'à 800 entreprises différentes interviennent sur un même site ? Et les salariés des entreprises extérieures sont directement exposés au risque propre à un site : à Toulouse, 13 des 22 salariés morts dans l'enceinte de l'usine AZF étaient des salariés d'entreprises sous-traitantes.

Ensuite, l'association des salariés et de leurs représentants à la maîtrise des risques n'est sans doute pas optimale . A cet égard, les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) constituent des instruments reconnus et utiles, mais leur implantation est encore très diverse, leur fonctionnement concret demeure encore très inégal et surtout leur capacité à appréhender le risque industriel dans les établissements les plus dangereux reste limitée. Ainsi, dans le cas de Toulouse, il semble que le CHSCT de l'usine AZF fonctionnait correctement au regard du droit actuel. Mais cela n'a pas empêché la catastrophe.

L'implantation des CHSCT
selon la taille de l'établissement

(en pourcentage)

CHSCT

50 à 99 salariés

60

100 à 199 salariés

85

200 à 299 salariés

94

500 à 999 salariés

96

1000 ou plus

96

Ensemble

73

Champ : établissements de 50 salariés ou plus

Source : MES-DARES, enquête Réponse 98.

Enfin, la coordination des services de l'Etat compétents en matière de prévention des risques industriels -à savoir principalement l'inspection du travail et l'inspection des installations classées- demeure insuffisante , compte tenu du cloisonnement relatif de leurs interventions respectives.

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