4. L'incertitude relative à la compensation des créations de compétences

La loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 a inséré un article 72-2 dans la Constitution, disposant, dans son quatrième alinéa, que « tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

Il nous revient pour la première fois de tirer dans la loi les conséquences de cet article 72-2 de la Constitution.

Votre commission des finances considère qu'il est nécessaire de prévoir les conditions dans lesquelles sont évaluées les accroissements de charges résultant des créations et extensions de compétences.

Pour les charges transférées, le principe de la compensation est posé par l'article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales, qui dispose que : « tout accroissement net des charges résultant des transferts de compétences (...) est accompagné du transfert concomitant par l'Etat aux communes, aux départements et aux régions des ressources nécessaires à l'exercice normal de ces compétences ». Par ailleurs, « ces ressources sont équivalentes aux dépenses effectuées, à la date du transfert, par l'Etat au titre des compétences transférées et évoluent chaque année, dès la première année, comme la dotation globale de fonctionnement. Elles assurent la compensation intégrale des charges transférées ».

De même, « toute charge nouvelle incombant aux collectivités du fait de la modification par l'Etat, par voie réglementaire, des règles relatives à l'exercice des compétences transférées est compensée » (article L. 1614-2 du code général des collectivités territoriales).

L'article L. 1613-3 du même code prévoit la procédure de détermination de la compensation des accroissements et diminutions de charges, en disposant que « le montant des dépenses résultant des accroissements et diminutions de charges est constaté pour chaque collectivité par arrêté conjoint du ministre chargé de l'intérieur et du ministre chargé du budget, après avis d'une commission présidée par un magistrat de la Cour des comptes et comprenant des représentants de chaque catégorie de collectivités concernées 21 ( * ) ».

Votre commission des finances vous propose d'adopter un amendement ayant pour objet d'introduire un article L. 1614-1-1 dans le code général des collectivités territoriales disposant que « toute création ou extension de compétence ayant pour conséquence d'augmenter les charges des collectivités territoriales est accompagnée des ressources nécessaires à son exercice normal ». Il s'agit d'inscrire la compensation des créations et extensions de compétences dans le droit commun des transferts de compétences.

L'introduction de cet article dans le code général des collectivités territoriales permet d'appliquer le principe de la compensation des créations et des extensions de compétences, prévu par le quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution. Sa rédaction, mentionnant « l'augmentation des charges », permettra de rendre applicables les modalités de détermination du montant des dépenses, prévues à l'article L. 1613-3 du même code.

Par ailleurs, le Sénat a introduit, lors de l'examen de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, sur proposition de votre rapporteur pour avis, un article L. 1614-3-1 dans le code général des collectivités territoriales pour permettre à la Commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) de se prononcer sur les charges imposées aux collectivités territoriales par des modifications législatives des conditions d'exercice des compétences transférées. Il s'agissait de donner compétence à la CCEC pour évaluer l'évolution du coût pour les départements de l'allocation personnalisée d'autonomie, considérée par le gouvernement de l'époque comme une modification par voie législative des conditions d'exercice de la compétence des départements en matière d'action sociale.

Cet article prévoit également la présentation de l'évolution de ces charges, pour chaque collectivité s'agissant des départements et des régions, dans le bilan sur l'évolution du coût des compétences transférées aux collectivités territoriales que la commission doit établir chaque année, depuis 1995, à l'intention du Parlement.

Votre commission des finances vous propose d'adopter un amendement ayant pour objet de prévoir que les charges résultant, non seulement des modifications par voie législative des conditions d'exercice des compétences transférées, mais également des créations et extensions de compétences, sont constatées par la commission consultative sur l'évaluation des charges prévue au premier alinéa de l'article L. 1614-3 du code général des collectivités territoriales, et retracées dans le bilan mentionné au même article. Cette disposition permettra au Parlement de suivre, chaque année 22 ( * ) , l'évolution de la charge correspondant aux créations de compétences, et, le cas échéant, de demander au gouvernement de prévoir l'inscription des crédits permettant de couvrir la dépense supplémentaire ainsi constatée.

* 21 Soit huit représentants des communes, quatre représentants des conseils généraux et quatre représentants des conseils régionaux.

* 22 Le deuxième alinéa de l'article L. 1614-3 du code général des collectivités territoriales prévoit que « la commission consultative [sur l'évaluation des charges] établit à l'intention du Parlement, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances de l'année , un bilan de l'évolution des charges transférées aux collectivités locales ». Cette obligation législative est toutefois rarement respectée.

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