3. L'assurance maladie confrontée à une crise de régulation des dépenses
L'assurance maladie n'a jamais connu un déficit
équivalent à celui d'aujourd'hui. En outre, quelle que soit la
situation économique, ce déficit persiste, ce qui conduit
à penser que le système de protection sociale est
confronté à une crise de dépenses et non à une
crise de recettes et que la priorité doit être donnée
à la maîtrise des dépenses de santé, d'autant plus
qu'il ne faut pas s'attendre à un ralentissement spontané de leur
dynamique, compte tenu des besoins croissants liés à
l'évolution de la société (allongement de la durée
de la vie, progrès médicaux, débat récurrent sur la
création d'un cinquième risque pour couvrir la dépendance).
Le déficit actuel de l'assurance maladie ne résulte pas
essentiellement du fléchissement des recettes, contrairement à ce
qui avait été observé en 1992-1993, mais de
l'accélération des dépenses, tenant à un ensemble
de décisions publiques et aux dysfonctionnements plus profonds de la
régulation. Il en résulte que,
même le retour d'une
croissance
forte ne suffirait pas à rétablir
l'équilibre : au-delà des mesures immédiates
d'ajustement, des progrès dans la régulation, tant de court que
de long termes, sont indispensables
.
La valorisation du vote de la loi de financement par le Parlement et la
fixation d'objectifs de dépenses réalistes doit aujourd'hui
figurer parmi les priorités de la réforme de notre système
de santé : la sous-estimation des dépenses en loi de
financement a en effet été si forte qu'elle a dispensé de
prévoir dans la loi des mesures de nature à financer les
dépenses ou à les limiter.
En outre, à moyen terme et à long terme, la mise en oeuvre d'une
réelle politique de régulation des dépenses de
santé est indispensable.
La mise en oeuvre de réformes structurelles de l'assurance maladie ainsi
que la définition et l'application de nouveaux outils de
régulation des dépenses devraient permettre de maîtriser,
en partie, l'évolution des dépenses sociales, tout au moins de ne
pas ajouter à la croissance tendancielle et inéluctable des
dépenses de santé, une croissance injustifiée, fruit de
l'échec des mécanismes de régulation mis en place au cours
des dix dernières années.
Des mécanismes de régulation obsolètes
Dans le
domaine des mécanismes de régulation mis en oeuvre depuis les
années 1970, trois leviers d'actions existent mais n'ont pas produit les
effets escomptés :
-
l'ajustement par les prélèvements obligatoires et les
déremboursements
est contrebalancé par le fait que 90 %
de la population bénéficie d'une complémentaire
santé que six millions de malades en ALD bénéficient d'une
prise en charge à 100 % ;
-
la limitation des dépenses par la détermination d'enveloppes
ou de lettres clé flottantes
a été largement
obérée par l'impossibilité de mettre en application des
dispositifs instables et contestés sur le plan juridique ;
-
la politique conventionnelle avec les professions de santé
aurait dû constituer le support de la maîtrise
médicalisée des dépenses. Divers instruments,
malheureusement peu opératoires, ont ainsi été mis en
place, tels l'accréditation de seulement 400 établissements sur
3.000, la formation médicale continue obligatoire mais sans texte
d'application, l'évaluation des pratiques médicales fondée
sur le volontariat qui ne concerne que 180 praticiens sur 130.000 en exercice.
Source : Cour des comptes. rapport sur la sécurité
sociale, septembre 2003