II. L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

A. L'ÉVOLUTION DES EFFECTIFS

Les effectifs de l'enseignement supérieur agricole long relevant du ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sont passés de 11 235 étudiants en 1997-1998 à 13 045 étudiants -y compris les formations de 3 e cycle- en 2002-2003 , ce qui représente pour cette période une hausse de 16,1 % , contre 18 % sur la période 1996-2001.

La tendance au tassement de l'augmentation des effectifs de l'enseignement supérieur agricole continue à se marquer.

Le tableau ci-dessous donne la répartition des effectifs en 1997-1998 et en 2002-2003 par type de formation :

FAMILLE DE FORMATIONS

1997-1998

2002-2003

I. Enseignement public

 
 

Écoles d'ingénieurs agronomes (ENSA)

2 562

2 635

Écoles d'ingénieurs des travaux (ENIT et assimilée)

2 024

2 249

Centres de 3 e cycle et écoles d'application

543

740

Écoles vétérinaires (ENV)

2 244

2 554

Formation de paysagistes

178

194

Formation d'enseignants

247

694

Total

7 798

9 066

II. Enseignement privé

 
 

Écoles d'ingénieurs en agriculture

3 437

3 979

Total

3 437

3 979

TOTAL ENSEIGNEMENT PUBLIC ET PRIVÉ

11 235

13 045

1. Les effectifs de l'enseignement public

Dans l'enseignement supérieur public , on constate un accroissement des effectifs de 16,2 % en cinq ans .

S'agissant des écoles d'ingénieurs, trois facteurs expliquent pour l'essentiel cette croissance :

- les directives gouvernementales en vue d'augmenter le nombre annuel d'ingénieurs diplômés ;

- l'importance du développement des études doctorales dans les ENSA et les écoles d'application ;

- la mise en place des licences professionnelles dans les écoles d'ingénieurs et à l'ENFA (l'Ecole nationale de formation agronomique de Toulouse, qui forme les enseignants du technique).

Dans le secteur vétérinaire, les effectifs augmentent en raison de la création de formations de spécialisation (certificats d'études approfondies vétérinaires et diplômes d'études spécialisées vétérinaires, internats cliniques).

A l'ENFA, l'augmentation des effectifs est essentiellement conjoncturelle car liée aux recrutements organisés dans le cadre du plan de résorption de l'emploi précaire (dit « plan Sapin »). Il convient, par ailleurs, de souligner que cet établissement a également développé des licences professionnelles.

2. Les effectifs de l'enseignement supérieur privé

Dans l'enseignement supérieur privé , on note une hausse des effectifs de 15,8 % en cinq ans qui résulte de l'augmentation du nombre d'ingénieurs formés pour répondre aux directives gouvernementales et la mise en place, à la rentrée 2001, d'une nouvelle formation d'ingénieurs en agro-santé à l'Institut supérieur agricole de Beauvais.

B. UNE RÉNOVATION À POURSUIVRE

L'enseignement supérieur agricole a profondément évolué au cours des dernières années. Les différentes actions en faveur de la rénovation de ses formations, engagées depuis le début des années 1990, se sont attachées à rapprocher cet enseignement du dispositif relevant du ministère de l'éducation nationale, rapprochement qui a été consacré par la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999.

Depuis, le ministre de l'agriculture a défini, dans le cadre d'une communication en Conseil des ministres le 3 janvier dernier, les quatre axes qu'il entend mettre en oeuvre en matière d'enseignement agricole. Ces axes, que votre rapporteur ne peut que soutenir, s'appliquent également à l'enseignement supérieur :

- adapter l'enseignement agricole aux demandes émergentes de la société ;

- développer les liens entre enseignement technique et enseignement supérieur ;

- renforcer et adapter les cycles de formation supérieure en cohérence avec l'ouverture internationale ;

- mettre en oeuvre une politique contractuelle entre l'Etat et les établissements d'enseignement supérieur.

1. La rénovation pédagogique : l'enseignement supérieur agricole face au défi européen

Dans le cadre d'une internationalisation croissante de l'offre de formation, mais également dans la perspective de la mise en oeuvre de l'Espace européen de l'enseignement supérieur, votre rapporteur soulignera l'importance pour l'enseignement supérieur agricole de réorganiser ses formations afin de les rendre conformes au modèle dit « LMD » (licence-master-doctorat).

Cette réorganisation apparaît comme une condition nécessaire pour permettre aux étudiants de disposer d'une formation reconnue sur le plan international, et donc d'accroître leurs chances d'insertion, mais également de renforcer l'attractivité des établissements auprès des étudiants étrangers.

• Le diplôme national de master

Les établissements d'enseignement supérieur agricole se sont engagés dans une réflexion sur la mise en place de cursus de master.

Cette réflexion a d'ores et déjà débouché sur des résultats concrets : deux projets de master à finalité professionnelle sont en cours d'habilitation et devraient accueillir des étudiants dès cette rentrée.

Par ailleurs, d'ici la rentrée 2004, une quinzaine de projets de master à finalité professionnelle ou de recherche seront mis en oeuvre par les établissements d'enseignement supérieur agricole, seuls ou en co-habilitation avec l'université.

La prise en compte par les établissements de cette dimension européenne des formations qu'ils dispensent s'accompagne de la semestrialisation des cursus et de l'application du système européen de transfert de crédits.

Votre rapporteur insistera sur la nécessité d'accroître le rythme de cette réforme et de la généraliser à l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur agricole, afin que ces derniers ne prennent pas de retard par rapport à leurs partenaires européens de manière à maintenir ou à accroître l'attractivité de leurs formations.

• Les licences professionnelles

Le ministère de l'agriculture a été associé à la mise en place des licences professionnelles, formations nouvelles ayant vocation à permettre une insertion professionnelle des diplômés de fin de cursus.

Ces diplômes, dont la pédagogie accorde une large place à la familiarisation avec le milieu professionnel, doivent préparer à de nouveaux emplois intermédiaires entre techniciens supérieurs et cadres supérieurs et ingénieurs.

Le succès remporté par ces formations témoigne de leur adaptation à la demande tant des étudiants que du milieu professionnel.

Les établissements d'enseignement supérieur agricole peuvent être co-habilités à délivrer ces diplômes.

A la rentrée universitaire 2003, 68 licences professionnelles faisant intervenir un établissement d'enseignement agricole sont ouvertes. Parmi celles-ci, on en compte 14 proposées en co-habilitation par les dix établissements suivants de l'enseignement supérieur agricole : Etablissement d'enseignement supérieur agronomique de Dijon (ENESAD), Ecole nationale de formation agronomique (ENFA), Ecole nationale du génie de l'eau et de l'environnement de Strasbourg (ENGEES), Ecole nationale du génie rural, des eaux et des forêts (ENGREF), Ecole nationale d'ingénieurs des travaux agricoles de Bordeaux (ENITAB), Ecole nationale d'ingénieurs des travaux agricoles de Clermont-Ferrand (ENITAC), Ecole nationale d'ingénieurs des techniques des industries agricoles alimentaires de Nantes (ENITIAA), Ecole nationale supérieure agronomique de Montpellier (ENSAM), Ecole nationale supérieure des industries agricoles et alimentaires de Massy (ENSIA) et Ecole nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT).

Les dénominations nationales couvertes par ces licences sont les suivantes : agronomie, aménagement du paysage, aménagement du territoire et urbanisme, biotechnologies, commerce, industrie alimentaire et alimentation, management des organisations, productions animales, productions végétales, protection de l'environnement.

Votre rapporteur insistera à nouveau sur la nécessité d'assurer un suivi de ces formations au niveau national afin d'assurer la cohérence des diverses voies professionnelles.

• La réforme des classes préparatoires vétérinaires

A la rentrée 2003, la réforme des classes préparatoires vétérinaires a été mise en oeuvre.

Cette réforme, que votre rapporteur avait évoquée l'an dernier, vise à supprimer les actuelles classes préparatoires en un an au profit de l'ouverture aux écoles nationales vétérinaires des classes préparatoires « biologie, chimie, physique et sciences de la Terre » (BCPST) en deux ans aux candidats. On notera que les programmes des classes préparatoires BCPST ont été modifiés pour tenir compte des changements intervenus dans les programmes de seconde, première et terminale de l'enseignement secondaire.

Trois raisons ont motivé cette réforme des classes préparatoires vétérinaires :

- l'actuel concours A vétérinaire (option générale) sélectionne des candidats passés par une classe préparatoire vétérinaire en un an, dont les profils sont très souvent identiques : la plupart d'entre eux entendent, en effet, s'orienter vers la médecine vétérinaire de ville. Or, les débouchés dans ce secteur sont plus limités qu'auparavant, les perspectives d'emploi se situant désormais essentiellement dans les industries agro-alimentaires (qualité et sécurité alimentaires, nutrition animale), l'industrie du médicament et le conseil en élevage. La réforme permettra précisément de préparer les futurs vétérinaires à ces nouveaux métiers ; les élèves vétérinaires passeront alors par les classes préparatoires BCPST qui dispensent une formation scientifique générale plus solide que celle donnée dans les classes préparatoires vétérinaires en un an, et suivront durant leur scolarité en école un enseignement adapté en conséquence ;

- le nombre de recalés définitifs au concours A est important et les élèves ayant suivi la classe préparatoire spécifique au concours d'entrée dans les ENV ne pouvaient jusqu'ici s'inscrire qu'à ce seul concours et cela, pas plus de deux fois, dans un délai de deux ans suivant l'obtention du baccalauréat. Tous les autres concours d'accès aux autres grandes écoles (écoles d'ingénieurs, écoles de chimie) leur étaient de fait interdits. La réforme supprimera ce goulot d'étranglement en permettant aux candidats de se présenter à ces concours, qu'il s'agisse des concours d'admission aux écoles nationales supérieures ou des concours d'admission aux écoles d'ingénieurs.

- En outre, on notera que cette réforme, en permettant aux élèves ingénieurs et aux élèves vétérinaires d'acquérir une même culture scientifique de base, rendra possible la mise en place d'un certain nombre d'enseignements communs aux écoles d'ingénieurs et aux ENV et facilitera les passerelles entre les deux types de formations.

De ce fait, une réforme du cursus des études vétérinaires est nécessaire. Le travail de rénovation des programmes est déjà engagé pour une application à la rentrée universitaire 2005.

2. La rénovation structurelle : une politique qui reste encore largement à conduire

• Une réforme bien engagée : la refonte du statut des établissements d'enseignement supérieur agricole publics

En application de l'article 128 de la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, codifié à l'article L. 812-3 du code rural, les établissements d'enseignement supérieur agricole ont, soit un statut d'établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPCSCP) -c'est le cas de l'un d'entre eux, l'Etablissement national d'enseignement supérieur agronomique de Dijon (ENESAD), soit un statut d'établissement public à caractère administratif dont un décret en Conseil d'Etat définit les dispositions communes.

Actuellement, les dix-huit établissements concernés relèvent de huit statuts différents et se répartissent en pratique en deux catégories : on y distingue, d'une part, les établissements relevant de l'un des trois statuts « généraux » suivants : écoles nationales supérieures agronomiques, écoles nationales d'ingénieurs des travaux, écoles nationales vétérinaires, et, d'autre part, les écoles possédant un statut propre (Ecole nationale du génie rural, des eaux et des forêts -ENGREF- ; Centre national d'études agronomiques des régions chaudes de Montpellier -CNEARC- ; Ecole nationale supérieure du paysage de Versailles -ENSP- et Institut national d'horticulture d'Angers -INH-).

Un décret procédant à une remise en ordre de ces statuts, conformément aux dispositions du code rural, devrait intervenir dans le courant de l'année 2004.

Sans s'éloigner des statuts actuellement en vigueur, le décret devrait apporter un certain nombre d'aménagements visant principalement :

- à accroître l'autonomie laissée aux établissements pour ce qui concerne leur organisation et leur fonctionnement ;

- à leur accorder la possibilité de créer des structures externes ou, dans des conditions précisément définies, de réaliser des activités lucratives pour l'accomplissement de leurs missions ou pour assurer la valorisation de la recherche ;

- à assouplir les modalités d'administration des établissements en prévoyant la possibilité pour le conseil d'administration de déléguer une partie de ses attributions à une commission permanente assistée de trois conseils consultatifs.

Parallèlement, un décret modifiera les règles de composition des conseils d'administration de ces établissements, afin de les rapprocher de celles applicables aux EPCSCP et d'appliquer les dispositions de l'article L. 812-3 du code rural prévoyant que :

- les enseignants détiennent au moins 20 % du total des sièges et qu'au sein de cette représentation, le nombre de professeurs et de personnels de niveau équivalent est égal à celui des autres personnels ;

- le président du conseil est élu parmi les personnalités extérieures à l'établissement n'assurant pas la représentation de l'Etat.

Cette rénovation et cette harmonisation des statuts doivent s'accompagner d'une politique visant à contractualiser les rapports entre l'Etat et les établissements.

Cette démarche de contractualisation s'appuie sur la loi, puisque l'article L. 711-1 du code de l'éducation mentionne la possibilité d'établir des relations contractuelles entre les établissements publics d'enseignement supérieur et l'Etat, et que l'article L. 812-1 du code rural étend à l'enseignement supérieur placé sous l'autorité du ministre chargé de l'agriculture, les principes applicables aux universités. De plus, la contractualisation s'inscrit dans les principes et les orientations définis par la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

Le contrat, établi pour quatre ans sur la base du projet de l'établissement, doit porter sur les moyens budgétaires programmés, l'offre pédagogique, la structuration de la recherche et le patrimoine des établissements. Précédé d'une analyse des demandes de chaque établissement, il fera l'objet, en cours de réalisation, d'un bilan par l'établissement et la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) du ministère de l'agriculture.

Six établissements, qui ont adopté leur projet d'établissement, vont prochainement passer un contrat avec la DGER. Il s'agit de l'École nationale de formation agronomique (ENFA), de l'École nationale d'ingénieurs des travaux agricoles de Bordeaux (ENITAB), de l'École nationale d'ingénieurs des travaux agricoles de Clermont-Ferrand (ENITACF), de l'École nationale supérieure agronomique et de l'Institut national supérieur de formation agro-alimentaire de Rennes (ENSAR-INSFA), de l'École nationale d'ingénieurs des techniques des industries agricoles et alimentaires de Nantes (ENITIAA) et, enfin, de l'Institut national agronomique Paris-Grignon (INA PG).

Les autres écoles devraient finaliser leur projet d'établissement d'ici le début de l'année 2004 puis passer un contrat avec la DGER dans l'année qui suit cette signature. A terme, après la phase d'expérimentation, tous les établissements auront adopté un projet d'établissement et devront s'engager dans une négociation avec la DGER en vue de signer un contrat quadriennal.

Une circulaire du 29 octobre 2002 définit les axes de cette politique, nécessaire pour passer de relations fondées sur l'exercice par les services du ministère d'un pouvoir de tutelle à des rapports reposant sur la négociation et la définition d'objectifs communs.

Sans remettre en cause le bien-fondé de cette politique de contractualisation, votre rapporteur considère qu'elle ne pourra déboucher sur des résultats concrets que si deux conditions sont remplies : d'une part, la réaffirmation de la part du ministère d'une ambition réelle pour l'enseignement supérieur agricole et, d'autre part, une réévaluation des dotations -notamment d'investissement- attribuées aux établissements.

• Les pôles régionaux : une priorité qui tarde à se concrétiser

Depuis plus de 10 ans, différentes formules de regroupement entre établissements d'enseignement supérieur et de recherche agricole ont visé à la mise en place de pôles de compétences régionaux ou interrégionaux disposant d'une lisibilité suffisante au plan international ou consacrés à la mise en oeuvre de projets collectifs.

On citera ainsi Agromip (Agro Midi-Pyrénées), qui a son siège à Toulouse. Constitué en 1985, il rassemble 9 organismes de recherche et d'enseignement supérieur, 3 800 étudiants et 750 enseignants-chercheurs et chercheurs. Agropolis, dont le siège est à Montpellier, a été créé pour sa part en 1986, représente 17 organismes et 2 300 chercheurs et enseignants-chercheurs. Agrena enfin, qui a été créé en 1988 et a son siège à Rennes, fédère 10 organismes, 2 125 élèves et 730 enseignants-chercheurs et chercheurs.

Afin de soutenir la mise en place d'une politique cohérente de pôles d'enseignement supérieur et de recherche, la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 a prévu la possibilité pour les établissements publics d'enseignement supérieur agricole de recourir à la formule du groupement d'intérêt public (GIP), seuls ou en association avec d'autres personnes morales de droit public ou de droit privé. La loi a introduit, par ailleurs, une nouvelle catégorie de groupement, dénommée « pôles de compétences à vocation internationale », créés sur proposition du ministre de l'agriculture.

Cependant, en dépit de ces expériences et de ce cadre législatif, et pour bénéfiques qu'elles soient, ces collaborations restent encore peu nombreuses et méritent incontestablement d'être amplifiées, dans le cadre de la priorité affirmée par le ministre visant tant à adapter les formations aux besoins de la société qu'à renforcer leur attractivité internationale.

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