C. LES AXES D'INTERVENTION DES AGENCES DE L'EAU À TRAVERS LES VIIIE PROGRAMMES

1. Rappel sur la durée et les objectifs des VIIIe programmes

La concomitance des délais nécessaires à l'adoption du projet de loi confortant les fondements législatifs des redevances des agences de l'eau tout en les adaptant aux nécessités nouvelles de l'action publique, de la préparation de la mise en oeuvre concrète de la directive du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, et le besoin d'accentuer les évolutions des politiques d'intervention des agences de l'eau ont amené le gouvernement à décider le principe de l'élaboration de programmes d'une durée de 4 ans, soit de 2003 à 2006. Sera ensuite rétablie l'échéance quinquennale initiale, dans un cadre juridique profondément rénové.

De plus, la fin de ces programmes coïncidera également avec la fin de la mise en oeuvre du deuxième programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA 2), des contrats de plan Etat-Région, de la réalisation de l'état des lieux et des premiers plans de gestion prévus par la directive-cadre.

Les VIII e programmes d'intervention des agences de l'eau contribuent donc à l'application des objectifs de résultats fixés par la directive cadre sur l'eau en vue d'atteindre un bon état écologique des masses d'eau à l'horizon 2015. Ils privilégient la mise en oeuvre des engagements communautaires de la France, notamment le renforcement de l'application des directives Nitrates et Eaux résiduaires urbaines dans le cadre d'une stabilité globale des prélèvements obligatoires en matière de redevances de bassin.

Par ailleurs, en accord avec le ministre du budget, seront conclus des contrats d'objectifs déclinant, pour la période 2003-2006, les priorités des agences de l'eau et leur contribution aux objectifs gouvernementaux de réforme de l'Etat.

2. Les engagements financiers des VIIIE programmes

Conformément aux objectifs gouvernementaux de maîtrise des prélèvements obligatoires, une baisse progressive du coefficient de collecte constitue une des hypothèses de construction des équilibres des VIII e programmes des agences de l'eau.

Montant des aides et des redevances du VIII e programme (2003-2006)

( en millions d'euros)

Agences

AP 2003

AP 2004

AP 2005

AP 2006

Total AP

Total Redevances

Adour-Garonne

182,72

181,92

170,32

166,22

701,18

457,5

Artois-Picardie

133,8

131,2

132,1

133,1

530,2

468,38

Loire-Bretagne

321,5

341

327,4

323,4

1 313,3

875,8

Rhin-Meuse

164,58

164,88

155,19

155,51

640,16

511,08

Rhône-Méditérranée-Corse

457,9

448

445

435,5

1 786,4

1 435,1

Seine-Normandie

783,7

784,4

785,2

788,7

3 142

2 266,5

TOTAL

2 044,2

2 051,4

2 015,21

2 002,43

8 113,24

6 014,36

L'objectif de maîtrise de la progression des redevances est correctement pris en compte, puisque leur montant annuel programmé s'élève à 1,5 milliard d'euros contre 1,713 milliard d'euros en 2002 .

La différence entre le montant des aides distribuées et des redevances perçues est partiellement compensée par les remboursements des prêts et avances remboursables, qui représentaient 354,01 millions d'euros en 2002, soit 17 % du total des recettes des agences et par des recettes de gestion courante.

Mais surtout, il convient de rappeler que les VIII e programmes sont volontairement construits en déséquilibre, afin de mobiliser une partie des réserves de trésorerie des agences . L'une des priorités des contrats d'objectifs conclus pour 2003-2006 entre l'Etat et les agences est de définir en concertation des ratios de trésorerie plus conformes à leurs besoins.

3. Les priorités en matière d'investissements dans le domaine de l'eau

Le montant des investissements retenus au titre des VIII e programmes des agences de l'eau montre que les priorités restent centrées sur la collecte et l'assainissement des eaux usées et la lutte contre les pollutions diffuses d'origine agricole.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner qu'il reste dans ce domaine des progrès importants à réaliser pour respecter les normes communautaires concernant la réduction de la pollution des eaux tant en ce qui concerne le traitement des eaux urbaines résiduaires que les rejets de nitrates d'origine agricole, ce qui suppose des investissements importants .

(en millions d'euros)

Montant de travaux aidés

(années 2003 à 2006)

Moyenne annuelle

collectivités locales :

alimentation en eau potable

1 700

340

collectivités locales :

collecte des eaux usées

3 100

620

collectivités locales :

épuration des eaux usées

4 260

852

Total assainissement et

épuration des eaux usées

7 360

1 472

industriels :

épuration des eaux usées

1 560

312

lutte contre les pollutions liées aux activités agricoles :

2335

467

gestion des ressources en eau

455

91

restauration des milieux aquatiques

640

128

Investissements totaux retenus

14 050

2 810

a) Le respect de la directive 91-271 du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires

Les principaux textes d'application français de la directive du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires sont la loi sur l'eau du 3 janvier 1992, le décret du 3 juin 1994 et les arrêtés du 22 décembre 1994.

Les premières échéances fixées par la réglementation s'adressent aux 800 agglomérations les plus importantes qui rassemblent plus de 70 % de la population relevant de l'assainissement collectif.

La première échéance au 31 décembre 1998, concerne les 340 agglomérations de plus de 10.000 équivalents-habitants (EH) qui rejettent leurs effluents dans des zones sensibles à l'eutrophisation ou à la pollution microbiologique ou utilisées pour la production d'eau potable.

La deuxième échéance au 31 décembre 2000 concerne les 460 agglomérations de plus de 15.000 EH qui ne rejettent pas leurs effluents en zone sensible.

La troisième échéance au 31 décembre 2005, concerne les 3.000 agglomérations de plus de 2.000 EH ainsi qu'environ 10.000 petites agglomérations de moins de 2.000 EH.

Malgré la progression constante des performances de traitement des stations d'épuration enregistrée depuis le début des années 80, des efforts importants restent à consentir pour achever cette mise aux normes européennes.

Selon les enquêtes menées par la direction de l'eau, il est estimé que :

- environ 54 % des 281 agglomérations soumises à l'échéance du 31 décembre 1998 avaient un équipement de traitement des eaux usées conforme à la réglementation européenne au 31 décembre 2000 ,

- environ 65 % des 486 agglomérations soumises à l'échéance du 31 décembre 2000 avaient un équipement de traitement des eaux usées conforme à la réglementation européenne au 31 décembre 2001.

Les retards pour la mise en conformité réglementaire du parc de stations d'épuration sont nombreux et importants : ils sont en moyenne de 4 à 5 ans mais pourront atteindre, dans certains cas, 10 ans.

Les obligations fixées par la directive ont nécessité un effort financier important des collectivités locales en termes d'équipement en stations d'épuration et en réseaux d'assainissement. Sur les 2,28 milliards d'euros investis chaque année par les collectivités publiques pour leur assainissement près de la moitié correspond directement aux dépenses nécessaires aux stations d'épuration de plus de 2.000 EH pour répondre aux exigences minimales de la directive européenne.

Le coût d'achèvement de la « mise aux normes européennes » des agglomérations de plus de 2.000 EH a été réévalué à 9,15 milliards d'euros à partir de l'an 2000, ce qui représentera un coût global de 16 milliards d'euros depuis 1992 . Les moyens des agences de l'eau ont été multipliés par deux depuis 1992 pour leur permettre d'aider les agglomérations urbaines à respecter les normes européennes.

La Commission européenne ayant déclaré qu'elle engagerait systématiquement des procédures d'infraction envers les Etats membres qui manquent à leurs obligations et si les retards constatés perdurent au-delà de 2005, il est probable que les procédures judiciaires donneront lieu à des arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes condamnant au paiement d'astreintes financières. Comme d'autres Etats membres, pour n'avoir pas suffisamment fourni, à la Commission européenne, d'informations sur l'application de cette directive, la France a fait l'objet en décembre 2002 d'un avis motivé.

Il est impératif que les communes, responsables de l'assainissement des eaux usées, se conforment à leurs obligations en la matière sans alourdir le retard constaté à ce jour, notamment celles concernées par les échéances des 31 décembre 1998 et 2000 .

b) Les obligations qui demeurent pour appliquer la directive Nitrates

La condamnation de la France 8 ( * ) pour non-respect de la directive relative à la qualité des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire, confirme la nécessité de renforcer la lutte contre la pollution par les nitrates, en particulier en Bretagne.

En ce qui concerne la directive européenne 91/676/CEE pour les rejets de nitrates d'origine agricole, la France a délimité les zones vulnérables et défini, dans ces zones, des premiers programmes d'action dont la mise en oeuvre s'est achevée en 2001.

La Cour de justice des communautés européennes a toutefois condamné la France le 27 juin 2002 sur le caractère incomplet de la désignation des zones vulnérables. La Cour a critiqué la méthode d'identification des eaux touchées par l'eutrophisation et l'absence de classement de la baie de Seine. La troisième délimitation des zones vulnérables achevée en mars 2003 intègre les conséquences de cette décision, et s'appuie également sur les résultats de la troisième campagne de surveillance de la qualité des eaux.

Les deuxièmes programmes d'actions sont entrés en vigueur progressivement depuis l'été 2001 pour s'appliquent aux zones vulnérables existantes. Ils comportent des mesures et actions complémentaires ayant pour objectif de restaurer la qualité de l'eau dans les zones les plus polluées où sont prélevées des eaux superficielles destinées à être potabilisées pour la consommation humaine, notamment la fixation d'objectifs chiffrés pour la gestion de la fertilisation et de l'interculture, ainsi qu'un renforcement des contrôles.

La réforme du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) a été approuvée par la Commission européenne, sous condition qu'il contribue à accélérer l'application de la directive Nitrates. Il est donc mis en oeuvre la priorité dans les zones vulnérables, où il devra être achevé au 1 er décembre 2006, et, conformément aux accords passés avec la Commission européenne, 20 % seulement des crédits publics peuvent être affectés au traitement d'élevages situés hors des zones vulnérables.

Près de 105.000 élevages sont susceptibles de bénéficier de ce programme pour la période 2003-2006, la décision d'engagement devant se faire avant le 31 décembre 2002. L'ensemble des financements publics devrait s'élever à 1,3 milliard d'euros jusqu'en 2006, la participation de l'Etat étant de l'ordre de 80 millions d'euros par an.

Dans ce contexte, votre rapporteur pour avis se félicite des mesures de simplification administrative adoptées par la circulaire du 15 mai 2003 pour l'instruction et l'attribution des subventions versées au titre du PMPOA2 en vue d'une adhésion rapide des éleveurs au programme et d'un redémarrage de ce programme clé s'agissant de la gestion des effluents d'élevage .

Ces mesures concernent :

- la simplification du dossier de demande de subvention par la suppression notamment de certaines pièces à fournir,

- la méthode de diagnostic,

- le projet agronomique par la diminution du nombre d'indicateurs agronomiques par exemple,

- l'harmonisation des documents d'enregistrement (plan d'épandage, cahier d'enregistrement) pour le PMPOA, la directive nitrate et la réglementation "installations classées",

- enfin la mise en place du versement de deux acomptes pouvant atteindre 80% du montant total de la subvention.

* 8 Cour de justice des communautés européennes -8 mars 2001- affaire C-266/99 -Manquement d'Etat- Qualité des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire -Directive 75/440/CEE- Conditions de la production d'eau de consommation humaine en Bretagne.

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