III. LE CURSUS DES ÉTUDES ET LA VIE ÉTUDIANTE

Votre rapporteur évoquera plus particulièrement cette année trois sujets au coeur des préoccupations et des débats : la mise en place du dispositif Licence-Master-Doctorat (LMD), le logement étudiant et la mobilité internationale des étudiants.

A. LA MISE EN PLACE DE L'ESPACE EUROPÉEN DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

1. Un rappel des objectifs

Rappelons que le « Processus de La Sorbonne/Bologne » est une initiative intergouvernementale lancée à La Sorbonne (en 1998), amplifiée et poursuivie à Bologne (1999), puis à Prague (2001). La Conférence de Berlin (2003) a constitué un point d'étape avant le prochain sommet interministériel de Bergen, en 2005.

Impulsée par 4 pays (Allemagne, Grande-Bretagne, Italie et France), cette initiative concerne désormais 38 Etats européens. Tout en préservant la culture propre à chaque pays, elle vise à construire, d'ici à 2010, un espace européen de l'enseignement supérieur permettant de développer et de démocratiser la mobilité des étudiants, des enseignants et des chercheurs, de favoriser la reconnaissance des diplômes dans toute l'Europe, et par là même de rendre cet espace lisible et attractif à l'échelle internationale.

La « déclaration de la Sorbonne », en 1998, évoque également « l'employabilité » des étudiants et votre rapporteur insiste sur l'importance de cet enjeu.

2. La mise en oeuvre du LMD

Rappelons que l'architecture LMD (licence-master-doctorat) est fondée sur ces trois grades situés à respectivement 3, 5 et 8 ans après le baccalauréat.

Dans notre pays, l'ajustement du système d'enseignement supérieur aux objectifs européens a été initié dès 1999 avec la création, d'une part, du grade de « master » et d'autre part, de la licence professionnelle qui est venue enrichir l'offre de formation située à bac+3 en application du principe de professionnalisation du premier cursus d'études.

En 2002, une réforme globale de notre enseignement supérieur est intervenue dans la perspective de cet Espace européen de l'enseignement supérieur que le Gouvernement s'est engagé à construire d'ici à 2010. Le décret n° 2002-482 du 8 avril 2002 définit à cet effet les principes majeurs qui sous-tendent l'organisation de ce système :

une architecture des études supérieures fondée sur 4 grades (au lieu de 3) : le baccalauréat, la licence, le nouveau grade de master et le doctorat ;

la semestrialisation et l'organisation modulaire des enseignements ;

la généralisation du système de « crédits » d'unités d'enseignement capitalisables et transférables (dit ECTS) ;

la délivrance du « supplément au diplôme » ou annexe descriptive au diplôme, pour tout étudiant souhaitant effectuer une mobilité internationale.

C'est donc à une véritable recomposition en profondeur de l'offre de formation que les établissements d'enseignement supérieur en France se livrent afin de proposer, pour chaque cursus, un ensemble de parcours flexibles et cohérents dans des champs disciplinaires établis en fonction de la stratégie propre à chaque établissement.

Compte tenu des calendriers retenus, au plan national, pour les « vagues » de négociation des prochains contrats quadriennaux entre l'État et les établissements relevant de la tutelle du ministère en charge de l'éducation, cette réforme devrait être effective sur l'ensemble du territoire en 2005-2006 .

Le souhait d'une certaine régulation dans un cadre national s'exprime cependant aujourd'hui, afin en particulier que la diversité des dénominations retenues pour les formations (domaines et diplômes) ne nuise pas à la lisibilité du système et à la mobilité, tant nationale qu'internationale, des étudiants.

Il est également important que le ministère et les établissements renforcent leurs efforts d'information sur le contenu et les enjeux de la réforme.

Se pose, par ailleurs, la question de la délicate application du système LMD aux cursus hors universités , qui relèvent de la tutelle d'autres ministères. Tel est le cas, notamment, pour un certain nombre de formations médicales (kinésithérapie, soins infirmiers, etc).

Quelles solutions le Gouvernement envisage-t-il pour ces formations ?

3. Le positionnement des IUP, des licences professionnelles, des DEUG et des maîtrises

Les Instituts universitaires professionnalisés (IUP ), créés il y a 12 ans, proposent une formation originale rapprochant enseignements théoriques et stages professionnels. En 2003, environ 44 000 étudiants étaient inscrits dans cette filière ; ils représentaient le tiers de l'ensemble des inscrits des formations professionnalisées de l'université. L'évolution du dispositif s'est poursuivie de manière régulière : à la rentrée 2003, cinq filières nouvelles ont été ouvertes, ce qui en a porté le total à 397.

Pour les universités qui ont basculé dans le LMD et dans le cadre de leur autonomie pédagogique, le positionnement des IUP varie d'un établissement à l'autre. Certains d'entre eux ont fait le choix du maintien d'une structure IUP parallèle non intégrée à l'offre de formation LMD, d'autres ont pris le parti de les intégrer.

Les universités pourront offrir aux étudiants engagés dans des formations IUP des parcours de formation professionnalisés jusqu'au niveau master. Ces parcours masters seront organisés en 120 crédits après le grade de licence, en étroite liaison avec le monde professionnel selon les principes de professionnalisation.

Créée fin 1999, la licence professionnelle participe à la poursuite de la professionnalisation de l'enseignement supérieur.

Les cursus de formation se distinguent tant des licences « classiques » que des formations professionnalisées « spécialisées » à bac + 2. Ces licences d'un nouveau type se situent souvent à l'interface de plusieurs domaines de qualification, associant divers types de savoirs et de savoir-faire, de compétences dans les domaines techniques et des sciences humaines.

A la rentrée 2003, ce sont 747 licences professionnelles qui ont été offertes aux étudiants. A la rentrée 2004, un millier de licences professionnelles ont été ouvertes. En effet, la campagne d'habilitation 2004 a été marquée par un fort accroissement des demandes d'ouverture de ces formations, dont environ 250 ont été expertisées positivement.

Les universités se sont donc résolument positionnées sur ce dispositif de professionnalisation, qui répond à un besoin de qualification de niveau II de la part des professionnels et à une demande des étudiants, qui souhaitent que leur soit offerte une formation à bac+3 permettant une insertion professionnelle immédiate.

Après les trois années d'expérimentation (2000, 2001, 2002), le dispositif mis en place a recueilli l'adhésion de l'ensemble des partenaires. C'est pourquoi les instances spécifiques d'évaluation (commission nationale d'expertise et comité de suivi de la licence professionnelle) ont été maintenues.

Le positionnement dans le système des DEUG et des maîtrises apparaît moins évident.

L'absence de réponse du ministère à cette question précise de votre rapporteur n'est-elle d'ailleurs pas révélatrice de cette difficulté qu'il avait déjà relevée dans son précédent rapport budgétaire ? C'est pourquoi, comme l'an dernier, votre commission souhaite que le ministre précise et évalue les conséquences de la mise en place du système LMD sur les bacs + 2, et singulièrement sur les DEUG, ainsi que sur les bacs + 4.

4. La reconnaissance des formations dispensées par les écoles consulaires

Par ailleurs, le ministère semble opposer une forte réticence à l'habilitation des offres de formation proposées par les écoles dépendant des organismes consulaires. Certaines d'entre elles, malgré leurs demandes répétées ne peuvent, pour l'instant, basculer dans le système LMD en proposant un master, alors que très souvent leurs partenaires européens l'ont déjà intégré. Quid d'une situation où le Gouvernement oblige à entrer dans un nouveau système tout en interdisant à certains acteurs d'y accéder ?

Votre rapporteur interrogera le ministre sur les solutions qu'il envisage d'apporter à ce problème.

5. Les écoles d'ingénieurs et les écoles de commerce et de gestion

Le master n'identifie pas un niveau de formation mais valide un contenu de formation dont le programme fait l'objet de la procédure d'habilitation par le ministère. Sauf à être dûment habilités, les diplômes dispensés par les établissements non universitaires à l'issue de cinq années d'études sont donc de facto exclus du champ du master.

A l'issue de ce processus, le ministre fixe par arrêté la liste des diplômes conférant à leur titulaire le grade de master, ceci après l'avis consultatif du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER).

Le bilan des habilitations pour l'année 2004 est le suivant :

- pour les écoles d'ingénieurs, la commission a retenu 32 dossiers sur les 62 examinés ;

- s'agissant des écoles de commerce et de gestion, 33 écoles ont reçu un avis favorable de la commission.

La faculté pour ces écoles de délivrer des masters provoque parfois quelques réticences et inquiétudes quant au niveau réel de formation des étudiants qui, grâce au système LMD, pourraient se voir délivrer, par exemple, un master de droit en ayant suivi des cours de droit pendant seulement deux ans.

Votre rapporteur appelle à la vigilance pour que le processus d'harmonisation et d'habilitation ne débouche pas sur une dégradation du niveau d'études.

De même, la perspective pour ces écoles de délivrer le doctorat soulève deux types de difficultés :

- d'une part, les universités, très attachées à leurs prérogatives en la matière, peuvent craindre que des écoles de médiocre qualité scientifique en revendiquent la possibilité ou que, à l'inverse, les étudiants les plus brillants ne les quittent au profit d'une école ;

- il existe, d'autre part, un obstacle juridique à cette faculté, la législation ne permettant que l'habilitation des établissements publics.

Sans doute la solution se situe-t-elle dans une politique de site , de nature à associer au sein d'écoles doctorales de qualité toutes les forces scientifiques disponibles et à donner à la fois une garantie de qualité et une visibilité au cursus concerné.

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