ANNEXE 1 -
AUDITION DE M. MICHEL BARNIER,
MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
SUR LES CRÉDITS DE SON MINISTÈRE POUR 2005

&&Mardi 9 novembre 2004 - PJLF pour 2005 - Audition de M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères&&

M. Michel Barnier a ensuite présenté les grandes lignes du budget de son ministère pour 2005.

Il a d'abord relevé l'augmentation des crédits d'interventions et la maîtrise des coûts et a rappelé que le budget des affaires étrangères bénéficiait d'une augmentation de 4,3 % (4,408 millions d'euros) par rapport à la loi de finances initiale de 2004, notamment grâce à la priorité donnée à l'aide publique au développement. A périmètre constant, l'augmentation ne s'élève cependant qu'à 1,20 %, soit plus de 50 millions d'euros. Le ministère des affaires étrangères a largement pris sa part dans l'effort de réduction du train de vie de l'Etat depuis 10 ans, notamment en termes d'effectifs (10 % de baisse en 10 ans) et d'évolution du réseau, passé de 457 à 422 implantations de 1994 à 2004 (soit - 8,2 %), particulièrement par des fermetures d'établissements culturels et de consulats. Il était donc grand temps de stopper cette décrue des moyens alloués à notre diplomatie, la productivité du ministère ayant par ailleurs bénéficié de la réduction des coûts de structures.

Détaillant les priorités du budget 2005, le ministre des affaires étrangères a d'abord cité l'aide publique au développement qui, pour le ministère des affaires étrangères, passe de 2 044 à 2 233 millions d'euros (+ 9 %), l'objectif fixé par le Président de la République d'atteindre 0,5 % du PIB en 2007 sera donc tenu. Cette augmentation repose sur des transferts de charges : 150 millions d'euros provenant du ministère de l'économie et des finances pour le Fonds mondial contre le Sida et 15 millions de l'Agriculture pour l'aide alimentaire. Il s'y ajoute l'augmentation du FED (565 à 628 millions d'euros), celle des crédits alloués aux ONG et à la coopération décentralisée, enfin celle des bourses de coopération scientifique. Des financements manquent cependant à l'égard du FED (77 millions d'euros) ou pour améliorer les contributions volontaires de la France au système des Nations unies. A cet égard, sur 30 millions d'euros nécessaires, 20 millions devraient être obtenus dans le cadre de la prochaine loi de finances rectificative. Il manque enfin 104,5 millions d'euros en autorisations de programme pour garantir la progression de l'Aide publique au développement en cas de réduction des remises de dettes.

Le ministre des affaires étrangères a souligné par ailleurs la nécessité d'assurer une meilleure lisibilité de notre aide publique au développement : responsabilité principale en la matière conférée au ministre délégué qui préside un conseil d'orientation stratégique et de programmation ; présentation d'un document annuel récapitulant les crédits d'aide au développement ; sélectivité et concentration accrues de l'aide ; document-cadre de partenariat pour chaque pays ; enfin clarification des responsabilités entre le ministère des affaires étrangères et l'AFD.

Deuxième priorité, l'influence de la France en Europe : M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères , a évoqué la préparation d'une campagne ambitieuse de promotion de l'Europe et d'information sur le traité constitutionnel européen, la mise en place du service diplomatique européen ainsi que la mutualisation de nos réseaux consulaires, culturels et, éventuellement, diplomatiques avec les Etats qui le souhaitent, à commencer par les Allemands ou les Espagnols.

Troisième priorité, la préservation de nos moyens d'intervention afin de poursuivre dans l'état d'esprit d'action et d'initiative voulu par son prédécesseur. Il s'agit d'être présents dans les grandes enceintes internationales et d'ajuster le niveau de nos contributions obligatoires, à ce stade simplement reconduites.

Quatrième priorité, le financement de la réforme du droit d'asile : l'objectif, a précisé le ministre, est que la commission de recours des réfugiés traite les dossiers en trois mois d'ici fin 2005, ce qui suppose une augmentation de 18 % des crédits de l'OFPRA.

Enfin, M. Michel Barnier , ministre des affaires étrangères, a souligné l'effort du gouvernement pour l'enseignement français à l'étranger et pour la communauté des Français expatriés, leurs entreprises, leurs associations et leurs écoles étant des leviers indispensables de notre action extérieure ; l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) ayant reconstitué son fonds de roulement, elle allait mettre en oeuvre l'année prochaine une politique d'investissements immobiliers grâce à une dotation de subventions en capital de l'ordre de 10 millions d'euros ; par ailleurs, 300 000 euros supplémentaires pourraient, en 2005, être consacrés aux bourses scolaires dont 19 200 enfants avaient déjà bénéficié en 2004.

Le ministère des affaires étrangères, a poursuivi le ministre, reste solidaire de l'effort global de maîtrise budgétaire, particulièrement à travers la réduction de l'emploi public, avec le non-renouvellement de 50 % des départs en retraite, la redynamisation de la politique immobilière, caractérisée par le rassemblement des actuelles implantations sur un site unique à Paris, réalisable à coût constant et générant des économies de structure. Une relance des sessions immobilières permettrait de dégager à terme quelque 50 millions d'euros. Enfin, la restructuration de nos réseaux à l'étranger avec nos partenaires européens participera aux efforts d'économies de fonctionnement.

Le ministre a conclu en soulignant que la présentation du budget selon le format LOLF permettrait de mettre à la disposition des parlementaires des indicateurs de performance clairs et simples et que cette loi serait aussi l'occasion de rationaliser les compétences budgétaires des ministères.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur des crédits du ministère des affaires étrangères, a souhaité savoir dans quelle mesure la baisse des indemnités de résidence, décidée lors de la dernière loi de finances, avait permis une augmentation des primes des agents affectés en administration centrale. Il s'est interrogé sur la possibilité d'étendre à d'autres Etats européens que l'Allemagne les expériences de mutualisation de postes consulaires. Il a considéré que le regroupement des implantations du ministère des affaires étrangères sur un site unique à Paris devait pouvoir se faire sans moyens nouveaux. Il a enfin estimé que, s'agissant de l'influence extérieure de la France, il convenait de conforter la présence des parlementaires dans les assemblées internationales et singulièrement aux postes de responsabilité.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam a évoqué la situation en Afghanistan, insistant sur le respect des engagements financiers pris par la communauté internationale et a fait part de son inquiétude devant le regain des tensions inter-ethniques.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga a regretté la diminution du nombre des emplois dans le réseau culturel. Elle s'est interrogée sur l'adéquation entre le discours et les moyens alors que les alliances françaises, censées se substituer dans certains cas aux centres culturels et aux instituts, ne disposent pas de moyens accrus. Les alliances subissent en effet une diminution de 2,7 millions d'euros et de 10 emplois. Rendant hommage à la mémoire de Serge Adda, président de TV5 Monde, récemment décédé, elle a souhaité que l'audiovisuel extérieur puisse bénéficier de crédits supplémentaires pour faire face aux défis technologiques et commerciaux à affronter.

M. Didier Boulaud a rappelé que la France n'était que le 23 e contributeur aux opérations humanitaires menées sous l'égide des Nations unies. Il a souhaité que notre pays rejoigne un rang plus conforme à ses ambitions. Evoquant les ventes immobilières projetées par le ministère, il a souhaité savoir si la résidence de l'ambassadeur de France à Bonn avait pu être vendue.

Mme Catherine Tasca a salué l'ambition du ministre de promouvoir l'influence de la France. Elle a cependant exprimé son inquiétude devant la décrue constante des moyens accordés au réseau culturel à l'étranger dont le rôle de promotion du dialogue des cultures est pourtant essentiel. A la veille du sommet de Ouagadougou, elle a par ailleurs regretté que les moyens dévolus à la francophonie, qui a servi de relais à l'engagement de la France pour la diversité culturelle, ne soient pas renforcés et s'est interrogée sur les perspectives à moyen terme.

M. Daniel Goulet a souligné la nécessaire adéquation des moyens budgétaires à l'ambition de la France sur la scène internationale, qui se trouve soumise à une vive concurrence. Il s'est interrogé sur les priorités géographiques de la diplomatie française, considérant que le ministère des affaires étrangères devait figurer au nombre des premières priorités du budget de l'Etat.

M. Yves Pozzo di Borgo a estimé que les sites parisiens du ministère mis sur le marché devaient contribuer à diminuer les tensions sur le marché immobilier de la capitale et non être transférés à d'autres acteurs institutionnels.

M. Jean-Pierre Plancade s'est dit déçu du budget du ministère des affaires étrangères, en dépit de quelques points positifs. Il s'est par ailleurs interrogé sur la répartition des compétences entre le ministère de la défense et celui des affaires étrangères en matière de coopération militaire.

M. Jean-Louis Carrère a évoqué les difficultés de la démarche d'adoption internationale.

M. Robert Del Picchia , considérant que le budget du ministère des affaires étrangères n'était pas si insatisfaisant, a estimé que les contributions volontaires, notamment humanitaires, devaient être abondées.

M. Michel Barnier a apporté les éléments de réponse suivants :

- une partie des crédits dégagés par la baisse des indemnités de résidence a pu être affectée à une revalorisation de 11 % des indemnités des agents affectés en administration centrale ; une nouvelle diminution des indemnités de résidence n'a pas été acceptée par le ministère pour l'année prochaine, compte tenu des difficultés réelles rencontrées par de nombreux agents ;

- l'instauration du paiement a priori pour les demandes de visas a fait baisser le nombre des demandes de 25 %, qui s'élèvent néanmoins à près de 2,5 millions ; de ce fait, le taux de refus opposé aux demandes de visas est passé de 30 à 20 % ;

- le ministère adapte sa stratégie de vente immobilière à l'état du marché local et aux perspectives d'évolution des implantations à moyen terme ; à Bonn, la résidence de l'ambassadeur n'a pas été vendue en raison de la dépression qui affecte actuellement le marché immobilier en Allemagne. D'une façon générale, le ministère des affaires étrangères récupère l'intégralité du produit des cessions immobilières réalisées. Le cas de cet immeuble à Karikal (Inde) sera vérifié ;

- en Afghanistan, l'engagement militaire français n'a pas baissé. La France soutient par ailleurs un projet de culture du coton. Elle participera à la coopération parlementaire ainsi qu'au développement du lycée français de Kaboul ;

- s'agissant des alliances françaises, dont le nouveau président est de nationalité belge, il convient de distinguer entre le site parisien, dont les ressources sont affectées par une baisse des inscriptions, et le réseau international dont les crédits sont stabilisés ;

- le niveau des contributions volontaires n'atteint que la moitié de ce qu'il était il y a dix ans. Le ministère a obtenu un abondement de crédits à hauteur de 20 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2004. Ce redressement devra être poursuivi ;

- la diminution apparente de certains chapitres de crédits d'intervention est imputable, pour l'essentiel, aux transferts liés aux expérimentations réalisées pour la mise en place de la LOLF ; à périmètre constant, les crédits d'intervention du chapitre 42.15 (coopération et assistance technique) progressent de 7,3 millions d'euros ;

- la priorité géographique est donnée à l'Europe et à l'Afrique sub-saharienne, mais le département réfléchit à une stratégie pour l'Asie en liaison avec les intérêts économiques de notre pays ;

- un des sites parisiens du ministère intéresse effectivement l'Assemblée nationale qui y trouvera le moyen de regrouper également ses implantations. Le ministère souhaite une vente au prix du marché pour l'ensemble des cessions projetées ;

- mille enfants français sont adoptables chaque année, pour 23 000 candidats à l'adoption et 8 000 nouveaux agréments délivrés chaque année ; 80 % des adoptions réalisées en 2003 ont été faites à l'étranger. La France a créé une agence française de l'adoption et souhaite accompagner les pays d'origine des enfants dans leurs démarches d'organisation des adoptions. Ce travail a été réalisé avec le Viêtnam et la Roumanie, il reste à effectuer avec le Cambodge ;

- les dotations consacrées à la coopération militaire ont été stabilisées. Il convient désormais de les renforcer.

En conclusion de ses propos, le ministre a rendu hommage à Serge Adda, pour son remarquable travail à la tête de TV5, soulignant qu'il s'appuierait sur le contenu de ses travaux pour poursuivre le développement de la chaîne.

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