3. Les propositions de votre commission

a) Assurer la cohérence de la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités

Le projet de loi confie au maire le rôle de chef de file en matière de prévention de la délinquance, dans le prolongement de ses compétences en matière de police générale sur le territoire de la commune et votre commission ne peut qu'approuver ce choix. Et c'est sans doute pour être en cohérence avec ce rôle de coordination en matière de prévention de la délinquance fixé au niveau communal que le texte confie également au maire un rôle de coordination en matière d'action sociale et donc de prévention éducative et sociale.

Mais ce faisant, le texte fait abstraction des compétences d'ores et déjà attribuées à d'autres échelons de collectivité en la matière. Or, la coordination de l'action sociale relève, depuis les premières lois de décentralisation, du département et, malgré certaines imperfections, on ne peut que se féliciter de la façon dont les conseils généraux assurent cette mission.

Par ailleurs, il convient d' éviter une confusion des rôles qui pourrait conduire à des malentendus regrettables : l'action sociale en faveur des familles en difficulté a une vocation beaucoup plus large que d'assurer la seule prévention de la délinquance. Ainsi, si le maire est le mieux placé pour veiller à la sécurité au niveau local, il n'est pas certain qu'il en aille de même en matière d'action sociale, car la plupart des moyens d'intervention disponibles en la matière ne relèvent pas de la commune.

Votre commission estime donc au total qu'il serait paradoxal de voir le maire coordonner l'intervention de services qui relèvent pour l'essentiel d'autres collectivités, au premier rang desquelles le département . Pour autant, elle comprend le souci du Gouvernement d'associer les maires à la cohérence de l'action sociale en direction des familles en difficulté car ils sont souvent les premiers informés et les premiers sollicités pour remédier aux situations difficiles.

Or, le présent projet offre par ailleurs, dans son article 2, un moyen de concilier ces impératifs, en assouplissant les possibilités de délégations de compétences entre les différents niveaux de collectivités : là où les textes actuels imposent des délégations par blocs entiers de compétences, le présent texte permet une délégation « à la carte ».

Grâce à cette nouvelle mesure que votre commission approuve entièrement, il est possible d'atteindre les objectifs fixés par le Gouvernement d'amélioration de la coordination de l'action sociale à destination des familles en difficulté et d'implication des maires dans cette action sociale, sans bouleverser et complexifier la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivité.

C'est en s'appuyant sur ce principe que votre commission propose :

- de charger non pas les maires mais les présidents de conseil général , conformément à leur rôle de chef de file en matière d'action sociale, d'assurer la coordination des interventions auprès d'une même famille ;

- de confier à ces mêmes présidents de conseils généraux le soin de désigner à titre principal qui, parmi les différents travailleurs sociaux, assumera le rôle de coordonnateur ;

- de prévoir explicitement la possibilité pour les départements de déléguer à une commune cette compétence de coordination sur son territoire.

b) Permettre au contrat de responsabilité parentale de faire ses preuves

Votre commission s'est toujours montrée favorable au développement des outils d'aide à la parentalité, estimant que ceux-ci apportaient un soutien particulièrement adéquat aux parents confrontés à des difficultés relationnelles avec leurs enfants.

S'agissant cependant de l'accompagnement parental proposé par le projet de loi, elle ne peut que s'interroger sur la manière dont il s'articule avec le contrat de responsabilité parentale (CRP), entré en vigueur depuis seulement quelques mois.

Dans les deux cas, en effet, les mesures concrètes susceptibles d'être proposées aux familles sont similaires : suivi individualisé, aide à domicile, participation à des actions collectives d'aide à la parentalité, médiation familiale... De même, les situations susceptibles de conduire le maire à proposer un accompagnement parental sont très proches de celles prévues pour la mise en place d'un CRP.

Dans ces conditions, l'accompagnement parental risque soit de faire double usage avec le CRP, soit de constituer une sorte de premier échelon avant la conclusion de ce dernier, sans que la nécessité de cet échelon supplémentaire n'apparaisse d'ailleurs clairement justifiée. La multiplication des mesures intermédiaires pourrait au contraire retarder inutilement la mise en place de mesures plus fermes.

Si elle comprend la volonté du Gouvernement d'associer davantage les maires à l'action sociale en faveur des parents en difficulté, votre commission estime préférable que cette association se fasse dans le respect des compétences de chaque niveau de collectivités et en laissant le temps au nouvel instrument que constitue le CRP de faire ses preuves.

C'est la raison pour laquelle elle propose de remplacer l'accompagnement parental par une possibilité, pour le maire, sur délégation de compétence du département, de passer lui-même des CRP .

Votre commission s'interroge également sur la valeur ajoutée du conseil pour les droits et les devoirs des familles. Elle considère en effet que rendre obligatoire un tel conseil ne ferait qu'engendrer des lourdeurs administratives pour les maires et leur ferait perdre en réactivité et en proximité, sans leur donner en réalité des moyens supplémentaires pour aider plus efficacement les familles.

Consciente toutefois que des expériences locales de ce type ont pu être menées avec succès, elle propose d'en laisser la mise en place à la libre initiative des communes qui le souhaiteront, en supprimant de la loi toute référence à ces conseils.

c) Mettre en place un secret professionnel partagé qui offre de véritables garanties aux familles

Votre commission attache une grande importance à la sécurisation des règles de partage d'informations entre travailleurs sociaux intervenant auprès d'une même famille.

Tel qu'il est rédigé, le texte soulève de nombreuses difficultés, au regard notamment des obligations liées au secret professionnel. Il est en effet ambigu sur la nature des informations susceptibles d'être partagées et semble ouvrir la possibilité de partager des données confidentielles avec des professionnels par ailleurs non soumis au secret professionnel. De la même manière, la procédure retenue pour la révélation d'informations au maire offre des garanties insuffisantes.

En outre, il met en place une procédure de partage d'informations qui risque de semer la confusion parmi les travailleurs sociaux dans la mesure où elle diffère de celle retenue dans le cadre de la protection de l'enfance.

C'est pour résoudre ces difficultés que votre commission propose de prévoir un dispositif de secret professionnel partagé sur le modèle de celui retenu par le projet de loi relatif à la protection de l'enfance .

A cet effet, il est nécessaire de limiter le partage d'informations aux seules personnes préalablement et également soumises au secret professionnel, de conditionner ce partage à une stricte nécessité pour l'accomplissement des missions d'action sociale et de subordonner, enfin, la transmission d'informations au maire par le coordonnateur à une double condition d'accord préalable de l'auteur de l'information et de respect de la confidentialité à l'égard des tiers.

Si le code pénal protège de façon si ferme le secret professionnel, c'est parce qu'il constitue une garantie fondamentale pour les intéressés. Il vise à rendre possible la relation de confiance entre ces personnes, souvent placées en situation de vulnérabilité (malade face à son médecin, famille en difficulté face à une assistante sociale...), et le professionnel. C'est la raison pour laquelle votre commission est attachée à l'existence d'une information préalable des intéressés en cas de partage d'informations.

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