2. L'activité civile des juridictions

En matière civile, les juges des enfants ont été saisis en 2006 de 105.329 mineurs en danger , soit une baisse de 5,7 %. 68.600 saisines émanaient du parquet, 11.500 des familles et 7.497 étaient des saisines d'office.

La situation de danger pour un mineur demandant un accompagnement qui dure souvent plusieurs années, le nombre total des mineurs en danger suivis (217.678 fin 2006, soit +1,1 %) est nettement supérieur au nombre de nouveaux mineurs suivis dans l'année.

Avec environ 330.000 mesures éducatives prononcées en 2006, l'activité civile des juridictions des mineurs s'est encore accrue par rapport à 2005.

29,8 % des nouveaux mineurs suivis en assistance éducative avaient moins de sept ans et 61 % moins de treize ans.

Mineurs en danger : activité des juges des enfants

2001

2006

Évolution/
2005

Évolution/
2001

Mineurs en danger dont les juges des enfants ont été saisis dans l'année

108.801

105.329

-5,7 %

-3,2 %

Âgés de 0 à 6 ans

31.787

31.403

-7,5 %

-1,2 %

Âgés de 7 à 12 ans

33.722

32.716

-4,6 %

-3,07 %

Âgés de 13 à 15 ans

26.111

25.320

-4,1 %

-3,1 %

Âgés de 16 à 17 ans

16.481

15.401

-6,9 %

-7 %

Mesures individuelles prononcées par les juges des enfants

293.010

329.412

+1,06 %

+12,4 %

- mesures nouvelles

149.720

153.929

-1,3 %

+2,8 %

- mesures renouvelées

143.290

175.483

+3,2 %

+22,4 %

Dont mesures d'investigation
- mesures nouvelles
- mesures renouvelées
Dont décisions d'AEMO prononcées
- mesures nouvelles
- mesures renouvelées
Dont décisions de placement prononcées
- mesures nouvelles
- mesures renouvelées


49.631
7.533

60.480
64.990

39.609
70.767


49.901
8.816

64.217
79.196

39.811
87.471


-3,1 %
-9,1 %

-0,7 %
+4,3 %

+0,1 %
+3,7 %


+0,05 %
+17 %

+6,1 %
+21,8 %

+0,05 %
+23,6 %

Source : Tableaux de bord des juridictions des mineurs

3. Les décisions de prise en charge judiciaire des jeunes majeurs

Pour atténuer les effets de l'abaissement de l'âge de la majorité civile en 1974, le décret du 18 février 1975 a permis aux jeunes âgés de 18 à 21 ans et « éprouvant de graves difficultés d'insertion sociale » de demander eux-mêmes au juge des enfants la prolongation ou l'organisation d'une action de protection judiciaire . Leur prise en charge est alors financée par l'Etat.

Ils ont également la possibilité, en vertu d'un décret n° 75-1118 du 2 décembre 1975 relatif à la protection sociale de l'enfance en danger, de demander au département un placement approprié ou une action éducative , en cas « de graves difficultés d'insertion sociale faute de ressources ou d'un soutien familial suffisant ». Leur prise en charge est alors financée par le conseil général, qui détient une compétence de droit commun en matière d'aide sociale et de protection administrative de l'enfance depuis les lois de décentralisation 3 ( * ) , compétence réaffirmée par les lois n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et n° 2007-293 du 5 mars 2007 relative à la protection de l'enfance s'agissant de la prise en charge des jeunes majeurs 4 ( * ) .

Ces deux décrets ne permettent pas d'établir une ligne de partage claire entre les hypothèses où une protection judiciaire s'avère nécessaire et celles où une protection administrative suffit . Dans les deux cas, la mesure de protection doit répondre à une difficulté d'insertion sociale et faire l'objet d'un accord du jeune.

Il revient donc au juge lorsqu'il est saisi d'apprécier , au vu de l'importance et de la nature des difficultés du jeune majeur, s'il doit donner suite à la demande de protection judiciaire . Dans l'affirmative il peut prescrire une ou plusieurs mesures parmi les suivantes : observation par un service de milieu ouvert ; action éducative en milieu ouvert ; maintien ou admission dans un établissement d'hébergement. Dans tous les cas, l'accord du jeune est nécessaire. La protection judiciaire peut être interrompue à tout moment soit à l'initiative du juge des enfants soit, de plein droit, à la demande du bénéficiaire. Elle s'interrompt à l'âge de 21 ans.

Or, s'agissant de la protection judiciaire, les dépenses liées à l'hébergement des jeunes majeurs ont représenté 109 millions d'euros en 2004, soit près de 40 % de l'ensemble du financement par l'Etat des mesures confiées au secteur associatif, alors que les 2.500 jeunes majeurs pris en charge représentaient à peine 5 % des jeunes confiés à ce secteur .

Dans un rapport spécial de juillet 2003 consacré à la protection judiciaire de la jeunesse, la Cour des comptes avait dénoncé cette situation 5 ( * ) et appelé de ses voeux une modification du décret du 18 février 1975 pour prévoir une prise en charge judiciaire des jeunes majeurs qui étaient déjà suivis par les services de l'Etat lorsqu'ils étaient mineurs et une prise en charge administrative de ceux qu'ils n'avaient jamais suivis.

Cette recommandation a été reprise dans une circulaire adressée le 21 mars 2005 par le ministère de la justice aux directeurs régionaux de la protection judiciaire de la jeunesse et aux chefs de cours d'appel. Il y est indiqué que la prise en charge judiciaire des jeunes majeurs doit être réservée à ceux qui nécessitent véritablement un accompagnement éducatif et étaient déjà suivis par les services de l'Etat pendant leur minorité, en mettant l'accent sur un accès rapide à l'autonomie, et que les autres doivent être réorientés vers les dispositifs de droit commun financés par les conseils généraux.

Les chefs de cour ont également été invités à sensibiliser les magistrats prescripteurs sur le caractère limitatif des crédits du secteur associatif habilité.

Enfin, des contacts ont été noués entre les directeurs départementaux et régionaux de la protection judiciaire de la jeunesse, les services des conseils généraux, parfois réticents vis-à-vis de cette prise en charge, et les associations, afin :

- d'une part, d'assurer la complémentarité du dispositif judiciaire avec les prises en charge administratives et les dispositifs d'action sociale de droit commun (comités locaux pour le logement autonome des jeunes, Fonds d'aide aux jeunes, dispositif CIVIS introduit par la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale) ;

- d'autre part, de mettre en place une tarification différenciée pour les mesures de placement des jeunes majeurs. Le prix de journée a ainsi été réduit de 110 euros à 70-90 euros par jour, contre 125 euros pour un mineur délinquant, dont les besoins de prise en charge et d'encadrement sont sans commune mesure.

Il ressort du tableau ci-dessous que les juges des enfants semblent avoir été sensibles aux arguments du ministère de la justice.

Protection des jeunes majeurs

2001

2004

2005

2006

Mesures prises par les juges des enfants

6.470

7.738

8.681

6.849

- mesures nouvelles

3.425

4.177

4.101

3.250

- mesures renouvelées

3.045

3.561

4.580

3.599

Source : Tableaux de bord des juridictions des mineurs

* 3 Cf loi n° 83-663 du 22 juillet 1983, complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat et loi n° 86-17 du 6 janvier 1986 adaptant la législation sanitaire et sociale aux transferts de compétences en matière d'aide sociale et de santé.

* 4 Article L. 112-3 du code de l'action sociale et des familles.

* 5 Elle avait notamment constaté que « lorsque le mode de prise en charge financière par le département est moins généreux que celui des certaines mesures judiciaires financées par l'Etat, il peut arriver que les travailleurs sociaux incitent le jeune majeur à solliciter une décision de protection judiciaire. »

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