EXAMEN DES ARTICLES

CHAPITRE IER - Dispositions modifiant le code de la propriété intellectuelle
Article 2 - Organisation et missions de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet

Le droit en vigueur

Cet article complète le chapitre Ier (« Dispositions générales ») du titre III (qui concerne les « Procédures et sanctions ») du livre III (intitulé « Dispositions générales relatives au droit d'auteur, aux droits voisins et droits des producteurs de bases de données ») de la première partie du code de la propriété intellectuelle (consacrée à la propriété littéraire et artistique) par une section 3, dédiée à la « Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet », nouvelle dénomination de l'Autorité de régulation des mesures techniques.

Section 3- Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet

Cette section comporte les articles L. 331-12 à L. 331-36 du code de la propriété intellectuelle. Votre commission pour avis a focalisé son attention sur les principaux articles ainsi créés, relatifs aux missions de la Haute autorité, à sa composition, et aux pouvoirs qui lui sont confiés, notamment en termes de sanctions et de traitement des données personnelles : articles L. 331-13, L. 331-15, L. 331-24 à L. 331-34.

Sous-section 1- Compétences, composition et organisation

Article L. 331-13

Le texte du projet de loi

L'article L. 331-13 détaille les trois missions de la nouvelle autorité administrative indépendante instituée à l'article précédent : la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet:

- la protection des oeuvres auxquelles est attachée un droit d'auteur ou un droit voisin, à l'égard des atteintes à ces droits commises sur les nouveaux réseaux de communication ;

- l'observation de l'offre légale et de l'utilisation illicite des oeuvres sur ces réseaux ;

- la régulation dans les domaines des mesures techniques de protection (MTP) et d'identification des oeuvres.

La position de votre commission

Dans l'esprit des conclusions de la mission conduite par M. Denis Olivennes, votre commission pour avis estime que le projet de loi doit être rééquilibré afin de dissuader le recours au téléchargement illégal, non seulement par la répression, mais aussi grâce au développement de l'offre légale. C'est pourquoi il juge indispensable de renforcer la mission confiée à l'HADOPI en ce domaine et se félicite de l'amendement n°5 de la commission des affaires culturelles, qui substitue à une simple mission d'observation de l'offre légale une mission d'encouragement au développement de cette offre.

Elle vous propose toutefois un sous-amendement à cet amendement n° 5 dont l'objet est de compléter cette mission confiée à l'HADOPI d'encourager l'offre légale en l'invitant à veiller également à ce que soit garanti le bénéfice des exceptions au droit d'auteur et aux droits voisins: ceci pourrait favoriser une utilisation innovante des oeuvres et accompagner la montée en puissance des contenus générés par les utilisateurs.

En outre, elle considère que la mission de l'HADOPI définie à l'article L.331-13, s'agissant de la protection des oeuvres, ne saurait excéder son objet. Ce sous-amendement vise donc à resserrer la mission de l'HADOPI en la calant sur l'unique fondement de son action: l'obligation, pour un abonné à internet, de veiller à ce que son accès internet ne soit pas utilisé d'une manière portant atteinte aux droits d'auteur (obligation créée à l'article L. 336-3). La mission de protection des oeuvres qui incombe à l'HADOPI ne concerne pas toutes les atteintes au droit d'auteur commises sur les réseaux de communications électroniques, mais exclusivement les atteintes à ces droits commises par les titulaires d'accès internet.

Enfin, dans le domaine des mesures techniques de protection, votre commission pour avis note le glissement opéré par rapport à la mission de l'Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT), à qui l'article L. 331-17 actuellement en vigueur (issu de la loi DADVSI de 2006) confie une mission de « veille » en ce domaine : ici, le projet de loi préfère parler d'une mission de régulation, ce glissement sémantique n'étant pas neutre aux yeux de votre commission, soucieuse de ne pas hypothéquer la réflexion que notre pays doit mener sur le mode de régulation adapté à l'internet 13 ( * ) . Ce sous-amendement propose donc aussi de revenir, concernant la mission de l'HADOPI dans le domaine des mesures techniques de protection, aux termes retenus par la loi DADVSI de 2006 pour qualifier la mission de l'autorité que l'HADOPI vient remplacer.

Article L. 331-15

Le texte du projet de loi

Cet article précise la composition du collège de la Haute Autorité, qui devrait comprendre neuf membres puisque le texte prévoit d'ajouter aux cinq membres actuels du collège de l'ARMT (un conseiller d'Etat désigné par le vice-président du Conseil d'Etat, un conseiller à la Cour de cassation désigné par le premier président de la Cour de cassation, un conseiller maître à la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes, un membre désigné par le président de l'Académie des technologies, un membre du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique désigné par son président) quatre personnalités qualifiées, désignées sur proposition conjointe des ministres chargés des communications électroniques, de la consommation et de la culture.

Le Président de la Haute autorité sera nommé parmi les trois membres du collège qui sont magistrats ou chargés de fonctions juridictionnelles et pour six ans. Le mandat des huit autres membres sera d'une durée de trois ans pour la moitié d'entre eux, de six ans pour l'autre, ce qui assure la permanence de l'institution. Ce mandat n'est ni révocable, ni renouvelable sauf s'il n'a pas excédé deux ans.

La position de votre commission

Afin d'assurer la représentativité du collège de l'HADOPI, votre commission pour avis propose un amendement afin de confier à chaque ministère concerné (communications électroniques, consommation, culture mais aussi recherche et enseignement supérieur) le soin de proposer une personnalité qualifiée, au lieu de prévoir une proposition conjointe de ces ministères pour la nomination des quatre personnalités qualifiées.

En outre, elle propose un amendement visant à prévoir, pour la nomination du président de l'HADOPI, la consultation des commissions permanentes du Parlement compétentes, à savoir celles chargées de la culture et celles chargées des communications électroniques.

Cet amendement reprend ainsi l'esprit de la révision opérée cet été de l'article 13 de la Constitution (par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008), qui n'entrera en vigueur que dans les conditions fixées par la loi organique nécessaire à son application, et qui prévoit que, pour certains emplois, « le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions . »

Sous-section 2 - Mission de protection des oeuvres et objets auxquels est attaché un droit d'auteur ou un droit voisin

Article L. 331-24

Le texte du projet de loi

C'est cet article qui fonde le processus de « riposte graduée ». Ce mécanisme de prévention et de sanction du piratage sera mis en oeuvre par une commission, dite de protection des droits, indépendante du collège de l'HADOPI, et exclusivement composée de magistrats. Les saisines qui lui seront adressées par les ayant-droits 14 ( * ) ou par le Procureur de la République seront reçues et traitées par des agents publics, spécialement habilités à cet effet et astreints au secret professionnel.

La commission ne pourra être saisie de faits remontant à plus de six mois. Lorsqu'elle est saisie de faits susceptibles de constituer un manquement, la commission de protection des droits peut d'abord envoyer à l'abonné, par l'intermédiaire de son fournisseur d'accès, une « recommandation » par courrier électronique, lui rappelant l'obligation de surveillance de son accès internet (qui lui incombe au titre de l'article L. 336-3 dont la rédaction est proposée par l'article 6 du présent texte) et l'avertissant des sanctions qu'il encourt si son accès internet servait à nouveau à l'utilisation illicite d'oeuvres protégées.

Ensuite, en cas de renouvellement dans les six mois, la commission peut assortir l'envoi électronique d'une nouvelle recommandation d'une lettre remise contre signature.

Enfin, l'article précise que l'internaute ne peut contester le bien-fondé de ces recommandations qu'à l'appui d'un recours dirigé contre une décision de sanction. En effet, le Gouvernement estimant que les recommandations, simples rappels à la loi, ne font pas grief par elles-mêmes et ne peuvent, à ce titre, faire l'objet d'un recours juridictionnel en propre.

La position de votre commission

A cet article, votre commission pour avis propose quatre amendements :

- le premier vise à sécuriser le déclenchement d'une procédure HADOPI en l'asseyant non pas sur des « faits susceptibles de constituer un manquement » à l'obligation de sécurisation de l'accès internet, mais sur des faits qui constituent un tel manquement, et, mieux, dont l'HADOPI a vérifié qu'ils constituaient un tel manquement. En effet, afin d'éviter la sanction d'internautes innocents, l'HADOPI ne doit pas se contenter de présomptions de piratage: certains des outils utilisés par les sociétés mandatées par les ayant-droits pour effectuer des relevés se limitent à interroger les serveurs qui fournissent la liste des dernières adresses IP ayant partagé tel fichier piraté. Or des pirates peuvent glisser dans ces listes des adresses IP prises au hasard et détourner ainsi la sanction vers des internautes innocents; afin d'éviter ces « faux positifs », l'HADOPI doit vérifier systématiquement les faits en interrogeant chacune des adresses IP pour initier un téléchargement et constater ainsi que le suspect partage effectivement l'oeuvre pour laquelle son adresse a été prélevée ;

- le deuxième tend à imposer à la commission de protection des droits de fournir au destinataire d'une de ses recommandations la liste des oeuvres ou objets qu'il lui est reproché d'avoir utilisés illicitement en ligne. Il est en effet normal que la personne recevant une recommandation de la commission de protection des droits l'enjoignant à sécuriser son accès internet soit informée par la commission de protection des droits du fondement de l'infraction constatée ;

- le troisième a pour objet mettre en oeuvre une riposte effectivement graduée en imposant à la commission de protection des droits, si elle décide d'envoyer une nouvelle recommandation à un internaute utilisant illicitement des oeuvres, d'accompagner cet avertissement électronique d'une lettre recommandée ;

- le dernier doit permettre à l'abonné de contester toute recommandation qu'il estime recevoir à tort et à imposer à la commission de protection des droits de justifier son envoi.

Article L. 331-25

Le texte du projet de loi

Dans le cas où l'internaute « récidive » encore dans l'année suivant la réception d'une recommandation qu'elle lui a adressée, la commission peut prendre deux types de sanctions, « en fonction de la gravité des manquements et de l'usage de l'accès », selon les termes du projet de loi :

- suspendre l'accès à internet pour une durée de trois mois à un an et interdire parallèlement l'abonné de souscrire pendant cette période un autre contrat de même nature auprès de tout fournisseur ;

- enjoindre l'abonné de prendre des mesures « de nature à prévenir le renouvellement du manquement » et d'en rendre compte à l'HADOPI, le cas échéant sous astreinte. L'exposé des motifs du projet de loi indique que cette sanction serait plus adaptée en cas d'usage professionnel de l'accès internet de l'abonné. Le texte du projet de loi précise que cette mesure peut faire l'objet d'une publication aux frais de l'abonné.

Il est également prévu la possibilité d'intenter un recours contre ces décisions de sanction devant les juridictions judiciaires. Enfin, le texte renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les conditions dans lesquelles ce recours est suspensif.

La position de votre commission

A nouveau, votre commission vous propose quatre amendements à cet article :

- l'un pour assurer le caractère gradué de la riposte : il impose donc à la commission de protection des droits de ne prendre une sanction qu'après l'envoi d'une recommandation assortie d'une lettre recommandée ;

- le deuxième amendement vise à assurer l'information des personnes qui seraient sanctionnées par l'HADOPI , notamment s'agissant du traitement de données personnelles les concernant. Il prévoit ainsi que la commission de protection des droits notifie à l'abonné la sanction prise à son encontre et l'informe des voies et délais de recours, et, lorsque la sanction consiste en la suspension de l'accès à internet, de son inscription au fichier et de l'impossibilité temporaire de souscrire pendant la période de suspension un autre contrat d'accès à internet auprès de tout opérateur;

- un autre amendement propose de n'appliquer systématiquement la coupure d'accès, qu'à l'issue du recours éventuel que l'abonné pourrait être amené à intenter, par exemple si sa connexion a été utilisée par un tiers et qu'il n'est pas l'auteur du téléchargement illicite qui lui est reproché. Il s'agit ici de prendre en compte les conséquences de la coupure sur l'abonné et sur le fournisseur d'accès.

En effet, il convient de garantir que l'abonné qui subit une suspension de son accès internet est bien coupable: si son innocence était avérée au terme du recours et que le recours n'était pas suspensif, il aurait déjà subi sa peine puisque la coupure de l'accès aurait déjà été opérée. Cette injustice doit absolument être évitée.

En outre, pour les fournisseurs d'accès à internet, il ne serait pas gérable de recevoir de l'HADOPI une injonction visant à suspendre l'accès internet de l'un de leurs abonnés puis de recevoir quelque temps après l'ordre inverse si, à l'issue du recours, il apparaissait qu'en fait, l'abonné n'était pas coupable ;

- enfin, un dernier amendement, particulièrement important, vise à substituer à la coupure de l'accès internet une amende administrative comme sanction ultime de la riposte graduée.

Ce faisant, cet amendement sécurise juridiquement le dispositif de riposte graduée, qui pourrait, en l'état, faire l'objet d'une censure par le Conseil constitutionnel: en effet, l'architecture de réseau de certains fournisseurs d'accès ne permet pas de couper seulement le flux internet, en cas d'offre « triple play ». C'est notamment le cas en zones non dégroupées. Plus d'un million d'abonnés, s'ils étaient ainsi sanctionnés par l'HADOPI, se trouveraient privés de téléphone et de télévision sur IP, alors même que le service universel des communications électroniques exige de préserver l'accès aux services d'urgence par téléphone fixe. Le Conseil général des technologies de l'information, organe gouvernemental d'expertise, consulté sur ce point, confirme l'existence de cette difficulté dans un récent rapport remis au Gouvernement.

La sanction de coupure d'accès internet présente donc des « effets de bord » qui la rendront plus sévère pour certains de nos concitoyens, rompant ainsi le principe d'égalité devant la loi et exposant ce système de riposte graduée à une nouvelle censure par le Conseil constitutionnel après celle du dispositif de contravention pénale créé par la loi DADVSI en 2006. De ce point de vue, l'amende apporte une sécurité juridique en s'appliquant sans discrimination à tous les internautes. D'ailleurs, en frappant tous les téléchargements, effectués par logiciels de pair à pair ou par d'autres procédés techniques, elle ne contrevient pas à cette décision du Conseil constitutionnel de 2006, qui avait censuré la contravention, non pas du fait qu'elle était sanctionnée par une amende mais du fait qu'elle visait le téléchargement illégal par une technologie précise.

En outre, comment défendre la coupure d'accès internet quand le Président de la République qualifie le haut débit de « commodité essentielle » au même titre que l'eau ou l'électricité et que la France plaide à Bruxelles pour inclure l'accès internet à haut débit dans le service universel?

Enfin, puisque la démarche de riposte graduée se veut pédagogique, il est paradoxal de couper internet à des internautes que l'on souhaite inciter à télécharger légalement... De ce point de vue, la sanction financière paraît plus adaptée: à préjudice économique, réponse de même nature. La Chancellerie elle-même, dans une circulaire du 3 janvier 2007, relève que « des peines de nature exclusivement pécuniaire apparaissent parfaitement adaptées et proportionnées à la répression du téléchargement illicite, qui est essentiellement motivé par un souci d'économie: éviter l'achat d'un CD ou d'un DVD. »

Un argument majeur plaidant pour l'amende est aussi son caractère moins attentatoire aux libertés publiques: en effet, si l'on renonce à priver d'internet certains abonnés, il n'est plus besoin de les inscrire sur une liste noire que les fournisseurs d'accès devraient interroger afin que ces abonnés privés d'accès internet par l'HADOPI ne puissent pas souscrire un nouvel abonnement chez un autre fournisseur d'accès.

Concernant le montant de l'amende, sa fixation est renvoyée à un décret en Conseil d'Etat. Il devra être assez élevé pour rester dissuasif et assurer l'efficacité des deux premières étapes de la riposte graduée (courriel puis lettre recommandée). Dans le cas où la commission de protection des droits propose une transaction à l'abonné avant de le sanctionner, l'amende infligée pourra être deux fois moindre que celle prévue en cas de sanction.

L'amendement propose en outre de majorer le montant de cette amende quand l'internaute a téléchargé un fichier par ailleurs disponible en offre légale, c'est-à-dire quand il avait finalement le choix entre télécharger licitement ou illicitement. C'est aussi un moyen d'inciter les ayant-droits à développer l'offre légale.

Enfin, cet amendement propose que le montant des amendes recouvrées par l'HADOPI, qui pourrait être non négligeable vu la volumétrie de sanctions envisagée par la ministre de la culture 15 ( * ) , fasse l'objet d'une répartition équitable entre ayant-droits, l'HADOPI devant veiller à une juste rémunération des auteurs, compositeurs, et artistes interprètes.

Articles L. 331-26 et L. 331-27

Le texte du projet de loi

Le premier de ces articles permet à l'HADOPI de proposer à l'abonné, avant d'engager une procédure de sanction, une transaction, qui peut donner lieu à un écourtement de la durée de suspension de l'accès au service (pour un à trois mois) ou à une simple obligation de prendre des mesures de nature à éviter un nouveau manquement à l'obligation de sécurisation de l'accès internet.

Le second prévoit que, si l'abonné n'exécute pas la transaction, il retombe sous le régime des sanctions prévues à l'article L. 331-25.

La position de votre commission

Ces articles n'appellent pas d'observation de la part de votre commission pour avis.

Article L. 331-28

Le texte du projet de loi

L'article prévoit que, si l'abonné est sanctionné par une suspension de son accès internet, il demeure redevable du paiement de l'abonnement à son fournisseur. S'il résilie son contrat, les frais de résiliation sont à sa charge.

Il est ensuite précisé que la suspension s'applique uniquement à « l'accès à des services de communication au public en ligne », c'est-à-dire non pas l'accès à l'ensemble des services de communications électroniques, mais seulement l'accès à internet, les services de messagerie étant exclus puisqu'ils relèvent de la correspondance privée.

L'objectif affiché par le Gouvernement est de permettre aux abonnés des offres « triple play » de conserver l'accès à la télévision et au téléphone en mode IP ainsi qu'à la messagerie électronique.

La position de votre commission

Le projet de loi évite de sanctionner le fournisseur d'accès internet (FAI) pour les fautes commises par son abonné : de ce fait, la coupure d'internet n'exonère pas ce dernier de payer son abonnement.

Toutefois, l'exposé des motifs du projet de loi précise que l'abonné demeure bien entendu libre de mettre fin à son abonnement, selon les modalités de résiliation prévues par son contrat.

Votre commission pour avis propose sur ce point un amendement pour, dans le cas où la suspension de l'accès internet serait prononcée par la commission de protection des droits, écarter alors l'application des dispositions générales prévues par le code de la consommation concernant les contrats de services de communications électroniques: en effet, la suspension constitue une modification contractuelle or, au titre de l'article L. 121-84 du code de la consommation, le fournisseur de services devrait normalement informer le consommateur de ce projet de modification au moins un mois avant son entrée en vigueur et lui indiquer qu'il peut, tant qu'il n'a pas expressément accepté les nouvelles conditions, résilier le contrat sans pénalité de résiliation et sans droit à dédommagement, jusque dans un délai de quatre mois après l'entrée en vigueur de la modification. Ces dispositions sont évidemment inapplicables en cas de suspension imposée par l'HADOPI à titre de sanction.

S'agissant de la coupure de l'accès aux services de communication au public en ligne, il semble que le voeu du Gouvernement ne puisse être exaucé : comme le reconnaît le CGTI lui-même, les modalités techniques envisageables pour la suspension ne permettent pas d'isoler les services de communication au public en ligne des autres services présents sur Internet (services audiovisuels, messageries électroniques).

L'ARCEP confirme qu'en l'état actuel des architectures de réseaux des opérateurs, il est impossible d'assurer sur toutes les lignes une coupure de l'accès sans que d'autres services soient affectés, notamment en zones non dégroupées.

Pourquoi peut-il arriver que 1a coupure d'accès Internet d'un client affecte d'autres services ? Eléments de réponse techniques fournis par l'ARCEP

Il apparaît que pour certains types d'accès, les accès commercialisés en zones non dégroupés, les opérateurs n'ont pas la capacité technique de maintenir actifs certains services comme le service téléphonique, tout en supprimant ou en inhibant l'accès à Internet.

Contrairement aux zones dégroupées, où les opérateurs disposent de leurs propres équipements réseaux (notamment les DSLAM), les équipements actifs utilisés en zones non dégroupés sont ceux de France Télécom. Les opérateurs alternatifs n'y disposent donc pas nécessairement de la même capacité qu'en zones dégroupées de contrôler finement les différents trafics au sein de plusieurs circuits virtuels (VC) différenciés.

France Télécom propose néanmoins dans ces zones, dans le cadre de ses offres dites « bitstream » (offres de gros), des offres dites « bi-VC », c'est à dire des accès constitués de deux circuits virtuels, l'un spécifiquement dédié aux flux Internet (le VC dit « Best effort »), l'autre permettant d'acheminer la voix sur IP dans des conditions optimales de qualité (VC dit « premium »). Le recours à ces prestations de gros, permettant a priori la coupure du seul VC « best effort », donne en théorie aux opérateurs alternatifs la possibilité de couper l'accès Internet des abonnés concernés, tout en maintenant le service de voix sur IP.

Néanmoins, malgré l'écart de prix facial désormais extrêmement faible par rapport aux offres mono-VC (0,1€ de plus par abonné et par mois), les offres bi-VC n'ont jamais été souscrites par les opérateurs. Historiquement, leurs tarifs étaient très supérieurs et une migration forcée par les opérateurs de leurs abonnés en zones non dégroupées sur des accès bi-VC serait extrêmement coûteuse (duplication des équipements sur lesquels ils prennent livraison des offres « bitstream » de France Télécom) et complexe techniquement (interventions « physiques » pouvant engendrer des coupures et des désagréments pour le consommateur final). En outre, les opérateurs sont tout à fait en mesure d'assurer une qualité satisfaisante de la voix sur IP pour leurs accès mono-VC, simplement en dimensionnant correctement leurs réseaux.

Il apparaît ainsi que, dans certains cas, les opérateurs alternatifs ne peuvent suspendre l'accès à Internet d'un de leurs clients qu'en interrompant tous les flux en provenance et à destination de ces abonnés, y compris la voix sur IP.

Au 30 juin 2008, il y avait 2,2 millions d'accès résidentiels commercialisés par les opérateurs alternatifs en zones non dégroupées, dont 1,1 million en ADSL nu c'est-à-dire disposant du service de voix sur IP comme unique ligne téléphonique du foyer. La part d'accès en ADSL nu au sein des accès haut débit commercialisés dans les zones non dégroupées ne cesse d'augmenter en pratique.

En outre, quand bien même il serait possible de ne suspendre que le canal Internet, cette coupure aurait des effets qui débordent la suspension visée par le texte (priver l'abonné de la faculté de télécharger), puisque même les services de messagerie se trouveraient suspendus.

Le CGTI estime que des solutions techniques existent, comme le déploiement d'une infrastructure spécialisée, orientant l'abonné vers un serveur 16 ( * ) à partir duquel seuls certains sites ou services sont accessibles, mais il reconnaît que « le problème est là plus financier que technique ». Il juge aussi que « force est de reconnaître que le kaléidoscope technique de l'internet haut débit apporte, en France comme ailleurs, des limitations diverses à une mise en oeuvre opérationnelle (d'une coupure d'accès empêchant exclusivement le téléchargement) ; elles ne peuvent être ni rapidement ni pleinement surmontées. »

C'est pourquoi votre commission pour avis propose un amendement , dans le cas où l'amende ne serait pas substituée à la coupure d'accès comme sanction ultime, qui cherche à assurer la conciliation entre les impératifs du service universel des communications électroniques et le dispositif de riposte graduée. La sanction ne pouvant être la même pour tous, il convient au moins de prévoir qu'elle ne sera pas appliquée si elle entraîne la coupure du téléphone. Ceci garantit le droit des abonnés à un accès ininterrompu aux services d'urgence, droit établi à l'article L. 35-1 du code des postes et des communications électroniques.

Dans ce cas, l'amendement prévoit que la commission de protection des droits se tourne vers la seconde sanction qu'elle est autorisée à prendre: l'injonction de prendre des mesures de nature à prévenir le renouvellement du manquement constaté et à en rendre compte à l'autorité, le cas échéant sous astreinte.

Article L. 331-29

Le texte du projet de loi

L'article L. 331-29 prévoit que le fournisseur d'accès à internet, auquel la commission de protection des droits notifie la décision de suspendre l'accès d'un abonné, doit la mettre en oeuvre dans les quinze jours, sauf à encourir une sanction pécuniaire d'au plus 5.000 € par manquement constaté. Cette sanction pécuniaire lui est infligée à l'issue d'une procédure contradictoire et peut faire l'objet d'un recours en annulation ou en réformation devant le juge judiciaire. Un décret détermine les juridictions compétentes pour connaître de ces recours et un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles ces sanctions peuvent faire l'objet d'un sursis à exécution.

La position de votre commission

Votre commission pour avis propose, si la suspension de l'accès n'est pas remplacée par une amende, un amendement pour supprimer la précision selon laquelle la sanction pécuniaire est appliquée « par manquement constaté »: cette précision apparaît inutile puisque le texte précise déjà que la sanction est infligée si le FAI « ne se conforme pas à l'injonction » de la commission de protection des droits. Elle est en outre source de confusion, pouvant laisser entendre que le FAI subit cette sanction à chaque manquement constaté de l'abonné à son obligation de surveillance de son accès internet, créée à l'article L. 336-3.

Article L. 331-30

Le texte du projet de loi

Cet article L. 331-30 confie à la Haute Autorité le soin d'établir une liste de moyens de sécurisation « regardés comme efficaces » pour prévenir les manquements à l'obligation qui incombe à tout abonné de sécuriser son accès internet.

La position de votre commission

Votre commission pour avis relève la contradiction sous-jacente à cet article : s'il existe des moyens de sécurisation « efficaces » pour éviter toute atteinte aux droits d'auteur en ligne, la solution ne serait-elle pas de les imposer plutôt que d'organiser un mécanisme de prévention et de sanction et de créer une autorité administrative indépendante pour le faire fonctionner ?

Jugeant essentiel d'encadrer l'action de l'HADOPI, votre commission pour avis propose un amendement visant à déterminer les moyens de sécurisation de l'accès internet dont la mise en oeuvre permet au titulaire de s'exonérer valablement de sa responsabilité en matière de sécurisation de son accès. En effet, ces outils de sécurisation, dont la simple mise en oeuvre évitera toute sanction au titulaire d'un accès internet, même si cet accès a permis l'utilisation illicite d'oeuvres protégées, ne sont absolument pas caractérisés dans la rédaction initiale du projet de loi.

Cet amendement vise donc à:

- imposer à l'HADOPI de consulter les parties intéressées expertes dans le développement de ces moyens de sécurisation (les fournisseurs de ces moyens) et dans l'utilisation de ces moyens (les fournisseurs de technologies et services tributaires de ces moyens) avant de définir les spécifications fonctionnelles que ces moyens doivent présenter pour être considérés comme exonérant valablement le titulaire de l'accès de sa responsabilité en matière de sécurisation de son accès; dans cette optique, et conformément à l'exposé des motifs du projet de loi (relatif à l'article 8), l'amendement précise que ces moyens sont destinés à prévenir l'utilisation de l'accès internet par un tiers,

- instaurer une procédure d'évaluation et de labellisation des outils admis comme exonérant la responsabilité du titulaire d'accès internet: cette procédure doit prendre en compte non seulement l'efficacité de ces moyens, au regard de leur conformité aux spécifications définies par l'HADOPI, mais aussi leur coût, leur caractère respectueux de la vie privée et leurs effets sur la performance et la sécurité des réseaux de communications électroniques.

L'amendement renvoie enfin à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser cette procédure, devant permettre la révision périodique de cette labellisation afin de tenir compte des évolutions technologiques.

Article L. 331-31

Le texte du projet de loi

Cet article charge l'HADOPI d'établir un répertoire national des personnes dont l'accès à un service de communication au public en ligne a été suspendu à sa demande. Il prévoit aussi que chaque fournisseur d'accès à internet vérifie, lors de la conclusion de tout nouveau contrat, que l'abonné prêt à signer ce contrat ne figure pas sur ce répertoire. Il encourt sinon une amende pouvant atteindre 5000 euros par manquement constaté. Il en est de même s'il conclut un contrat avec un abonné interdit d'accès internet par l'HADOPI.

Comme à l'article L. 331-29, il est précisé que cette sanction est infligée à l'issue d'une procédure contradictoire, peut faire l'objet d'un recours devant le juge judiciaire. Un décret détermine les juridictions compétentes pour connaître de ces recours, dont le caractère suspensif est admis dans certaines conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.

La position de votre commission

Votre commission pour avis propose un amendement destiné à assurer la possibilité, pour les internautes, de consulter le répertoire des personnes qui font l'objet d'une suspension de leur accès internet, établi par l'HADOPI, pour vérifier qu'ils n'y figurent pas.

En effet, s'agissant d'un fichier sensible, qui peut causer préjudice en cas de mention erronée (impossibilité de s'abonner ou de recevoir internet pendant un certain temps), il est indispensable de prévoir un processus de consultation de ce répertoire par les citoyens, et de retrait du nom de la personne en cas d'erreur.

Par ailleurs, un autre amendement est proposé qui, comme celui présenté à l'article L. 331-29, clarifie l'application de la sanction pécuniaire prévue à l'adresse des FAI qui n'auraient pas consulté le répertoire, en suppriment la mention « par manquement constaté ».

Article L. 331-32

Le texte du projet de loi

Cet article prévoit que les fournisseurs d'accès à internet mentionnent, dans les nouveaux contrats conclus avec leurs abonnés, la nature de l'obligation qu'ils ont désormais de sécuriser leur accès internet ainsi que les mesures de recommandation et de sanction que peut prendre l'HADOPI.

La position de votre commission

Cet article n'appelle aucun commentaire de la part de votre commission pour avis, qui estime normal d'informer l'abonné des règles en vigueur.

Article L. 331-33

Le texte du projet de loi

Afin d'exercer ses missions de prévention et de sanction, la commission de protection des droits se voit autorisée par cet article à conserver les données techniques mises à sa disposition pour la durée nécessaire à l'exercice des compétences qui lui sont confiées et, au plus tard, jusqu'à l'exécution entière de la coupure d'accès qu'elle aura pu décider.

La position de votre commission

Votre commission pour avis n'a pas d'observation à faire sur cet article sans lequel la procédure de riposte graduée par l'HADOPI ne peut fonctionner.

Article L. 331-34

Le texte du projet de loi

Cet article important autorise l'HADOPI à créer un traitement automatisé de données à caractère personnel concernant les personnes faisant l'objet d'une procédure initiée par la commission de protection des droits.

Ce traitement de données à caractère personnel vise à permettre à la commission de protection des droits de mettre en oeuvre le mécanisme de riposte graduée et d'établir le répertoire national des personnes dont l'accès à internet a été suspendu.

Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, doit fixer les modalités d'application de cet article. Il est néanmoins précisé que ce décret fixera : les catégories de données conservées et la durée de cette conservation, les destinataires de ces données (notamment les FAI) et les conditions dans lesquelles les internautes pourront exercer leur droit d'accès à ces données.

La position de votre commission

L'exposé des motifs du projet de loi précise qu'afin de garantir la protection de la vie privée des internautes, la consultation du répertoire sera faite par les FAI sous la forme d'une simple interrogation, portant sur la présence ou non du cocontractant. Toutefois, cette disposition, protectrice des libertés publiques, pourrait utilement figurer dans le texte même de la loi.

C'est pourquoi votre commission pour avis propose un sous-amendement à l'amendement n°35 de la commission des affaires culturelles, afin d'expliciter ce point.

Elle propose aussi un amendement visant à préciser que c'est auprès de l'HADOPI que les internautes peuvent exercer leur droit d'accès aux données personnelles les concernant et relatives aux mesures prises par l'HADOPI, et non pas auprès des fournisseurs d'accès internet, qui n'ont pas à être les premiers interlocuteurs des internautes : en effet, les fournisseurs d'accès, qui agissent sur ordre de l'HADOPI, n'ont pas à traiter les réclamations des abonnés faisant l'objet d'une procédure initiée par l'HADOPI.

Article L. 331-35

Le texte du projet de loi

L'article L. 331-35 renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les règles applicables à la procédure et à l'instruction des dossiers devant le collège et la commission de protection des droits de la Haute Autorité.

La position de votre commission

Cet article n'appelle pas de commentaire de la part de votre commission pour avis.

En revanche, elle propose un amendement créant, après cet article L. 331-35, un nouvel article dans le code pour prévoir d'assurer une juste compensation financière aux fournisseurs d'accès internet concernant leurs prestations pour le compte de l'HADOPI.

En effet, le principe d'une juste rémunération des prestations assurées par les opérateurs au titre de la sauvegarde de l'ordre public est expressément mentionné aux articles L. 33-1 et L. 35-6 du code des postes et des communications électroniques, en matière de réquisitions judiciaires.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision DC n°2000-441 du 28 décembre 2000, confirme que les coûts que représente pour les opérateurs le concours apporté à la sauvegarde de l'ordre public, dans l'intérêt général de la population, ne sauraient leur incomber directement dès lors que les dépenses qui en résultent sont étrangères à l'activité d'exploitation des réseaux. Par extension, il en est de même pour les fournisseurs d'accès Internet.

Les coûts envisagés comprennent, d'une part, les coûts d'étude et de développement et, d'autre part, les coûts de traitement quotidien des injonctions de l'HADOPI.

Sous-section 3 - Mission d'observation de l'offre légale et de l'utilisation illicite d'oeuvres et d'objets protégés par un droit d'auteur ou par un droit voisin sur Internet

Article L. 331-36

Le texte du projet de loi

Cet article prévoit que la Haute Autorité publie des indicateurs, dont un décret fixera la liste, au titre de sa mission d'observation de l'offre légale et de l'utilisation illicite des oeuvres et des objets protégés.

La position de votre commission

Ce maigre article compose à lui seule toute la sous-section consacrée à la mission d'observation de l'offre légale et du téléchargement illicite.

Sans doute assure-t-il un suivi de son développement mais il n'est pas en mesure d'encourager ce développement, alors même que les accords de l'Elysée reposait sur deux piliers d'importance équivalente : réprimer le piratage d'une part, rendre attractive l'offre légale d'autre part.

Des progrès sont attendus en la matière de la part des ayant-droits, d'une part en termes de délais de mise à disposition du public des films et des oeuvres et programmes audiovisuels, d'autre part en termes d'interopérabilité des fichiers musicaux.

A cet égard, votre commission pour avis soutient pleinement l'amendement n°5 de la commission des affaires culturelles, qui précise que la mission de l'HADOPI en matière d'offre légale ne consiste pas seulement en une mission d'observation mais aussi d'encouragement du développement de cette offre.

Toutefois, les moyens de l'HADOPI à cet effet sont limités et c'est pourquoi votre commission pour avis propose, par des amendements à d'autres articles du projet de loi ou portant article additionnel, d'appuyer plus concrètement ce développement indispensable.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 5 - Procédure devant le juge pour faire cesser les atteintes aux droits d'auteur et aux droits voisins sur les services de communication en ligne

Le droit en vigueur

L'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle en vigueur a été créé par la loi DADVSI n°2006-961 du 1 er août 2006 au sein du chapitre VI, consacré à la prévention du téléchargement illicite, du même titre du code la propriété intellectuelle que celui dans lequel s'insèrent les dispositions créant l'HADOPI: il oblige les fournisseurs d'accès à internet à adresser aux internautes, à leurs frais, des messages de sensibilisation aux dangers que représentent le téléchargement et la mise à disposition illicites pour la création artistique.

Il renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de déterminer les modalités de diffusion de ces messages. Ce décret n'a pas encore été pris, en raison même du projet gouvernemental d'organiser l'envoi de messages ciblés en direction des « pirates ».

Le texte du projet de loi

L'article 5 propose une nouvelle rédaction pour cet article L.336-2, qui se lit comme le pendant de la suppression, proposée à l'article 4, du 4° de l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle. En effet, ce faisant, l'article 4 prévoit de supprimer une disposition insérée dans le code par la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique : cette disposition créait un dispositif ad hoc pour traiter la contrefaçon en ligne, en donnant au président du tribunal de grande instance le pouvoir, dans la même forme [ordonnance sur requête], d'ordonner « la suspension, par tout moyen, du contenu d'un service de communication au public en ligne portant atteinte à l'un des droits de l'auteur, y compris en ordonnant de cesser de stocker ce contenu ou, à défaut, de cesser d'en permettre l'accès ».

En lieu et place, l'article 5 propose donc une nouvelle rédaction concernant les pouvoirs du juge saisi de la circulation sur internet de contenus attentatoires aux droits d'auteur ou droits voisins : le tribunal de grande instance, le cas échéant en la forme des référés, peut ordonner « toute mesure de suspension ou de filtrage » de ces contenus, ainsi que « toute mesure de restriction de l'accès à ces contenus, à l'encontre de toute personne en situation de contribuer à y remédier ou de contribuer à éviter son renouvellement ».

Le Gouvernement justifie cette modification, dans l'exposé des motifs, par un souci de meilleure efficacité et de renforcement du caractère contradictoire de la procédure devant le juge destinée à faire cesser ou prévenir le renouvellement d'une atteinte à un droit d'auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d'un service de communication au public en ligne. D'une part, le caractère non contradictoire de la procédure semble inapproprié à la matière en cause, ce qui plaide pour ouvrir la voie du référé qui assure en même temps la rapidité indispensable s'agissant de la diffusion d'oeuvres et d'objets protégés sur internet. D'autre part, l'insertion de la procédure actuelle dans l'article L. 332-1 consacré à la saisie contrefaçon oblige le demandeur à saisir la juridiction au fond, ce qui induit des complications jugées inutiles par le Gouvernement. La nouvelle rédaction propose donc de supprimer la procédure subséquente au fond, tout en garantissant au nouveau dispositif un caractère désormais contradictoire.

La position de votre commission

Votre commission pour avis propose à cet article un amendement qui vise à assurer l'orthodoxie juridique et sémantique de cet article relatif aux pouvoirs du juge, notamment vis-à-vis des directives européennes :

- il supprime les termes « filtrage des contenus », comme le propose aussi l'amendement n°42 de la commission des affaires culturelles, mais également les termes « restriction de l'accès à ces contenus »: ces deux expressions cumulées offrent en effet au juge la possibilité d'imposer aux fournisseurs d'accès la mise en oeuvre de mesure de filtrage portant sur les contenus mais aussi sur les réseaux (restriction d'accès). La référence au filtrage dans la loi n'est pas orthodoxe: que ce soit dans la directive communautaire « commerce électronique » (n° 2000/31 du 8 juin 2000) ou dans la directive « Droit d'auteur », c'est la formule habituelle « toutes mesures de nature à prévenir ou faire cesser le dommage » qui prévaut. C'est aussi cette formule qui figure dans la loi n°2004-575 pour la confiance dans l'économie numérique (article 6), puisque les Etats membres ne sont pas autorisés à imposer aux hébergeurs et fournisseurs d'accès internet une obligation générale de surveiller les informations qu'ils transmettent ou stockent. Le terme de « filtrage » n'est d'ailleurs pas défini en droit et son interprétation technologique est multiple;

- en outre, il rétablit le principe de subsidiarité établi par la loi pour la confiance dans l'économie numérique, conformément aux directives communautaires: le juge doit d'abord viser une action en direction des hébergeurs puis, à défaut, si l'hébergeur est hors d'atteinte, en direction des fournisseurs d'accès à internet. La rédaction initiale du projet de loi semble ignorer cette responsabilité en cascade et élargit même l'action du juge en direction de « toute personne en situation de contribuer à remédier » à l'atteinte aux droits d'auteur, et même « de contribuer à éviter son renouvellement », ce qui apparaît excessivement vague et donc inacceptable.

Enfin, les conclusions de la mission Olivennes reposent sur un équilibre d'obligations entre les ayant-droits et les fournisseurs d'accès, qui ne prévoit pas d'évoquer le sujet du filtrage dans la loi « création et internet ». Au contraire, les parties prenantes ont conclu sur la nécessité d'expérimentations empiriques avant tout. En effet, la mise en oeuvre de mesures de filtrage des réseaux supposerait que soient établies leur efficacité et leur viabilité technico-économique, alors même qu'elles présentent des risques de dommages collatéraux (risque de suppression de contenus légaux), peuvent facilement être contournées par des mesures de cryptage et mettent en péril le secret des correspondances (risquant d'atteindre, selon la CNIL, aux libertés individuelles, au rang desquelles figure la liberté d'expression) ainsi que la qualité de services en ralentissant les flux sur les réseaux.

Le rapport rendu en 2007 par le Professeur Jean Cédras au ministre chargé de la culture rappelle en outre qu'« un tel filtrage serait également sans efficacité, tant sont nombreuses les possibilités de communication (messageries, newsgroups, forum, etc.) » 17 ( * ) .

Il n'est donc pas question d'introduire aujourd'hui la notion de filtrage dans la loi et il serait prématuré et dangereux de confier à un juge cet outil dont l'efficacité n'a jamais été démontrée.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 6 - Obligation de surveillance de l'accès à Internet?par le titulaire de l'abonnement

Le texte du projet de loi

L'article 6 propose d'ajouter un troisième article au chapitre VI du même titre du code de la propriété intellectuelle, l'article L. 336-3.

Cet article est fondamental puisqu'il crée l'obligation à laquelle tout manquement est passible de sanction par l'HADOPI. Il constitue donc le socle du dispositif de riposte graduée.

Il ne s'agit pas d'une création ex nihilo , puisque l'actuel article L. 335-12, créé par la loi DADVSI en 2006, oblige déjà le titulaire d'un accès internet à « veiller à ce que cet accès ne soit pas utilisé à des fins de reproduction ou de représentation d'oeuvres de l'esprit sans l'autorisation des titulaires des droits prévus aux livres Ier et II, lorsqu'elle est requise, en mettant en oeuvre les moyens de sécurisation qui lui sont proposés par le fournisseur de cet accès ».

Toutefois, aucune sanction n'était prévue en cas de manquement à cette obligation.

A l'inverse, la nouvelle rédaction proposée à l'article L. 336-3 qualifie une obligation, prévoit de sanctionner le manquement à cette obligation et prévoit aussi des cas d'exonération de responsabilité de l'internaute.

L'obligation visée est très proche de celle existant à l'article L. 335-12 en vigueur, quoiqu'un peu plus large, puisque l'abonné doit empêcher l'utilisation de son accès internet à des fins de reproduction ou de représentation d'oeuvres protégées mais également de mise à disposition ou de communication au public de ces oeuvres.

Ainsi, les faits de piratage peuvent être sanctionnés à plusieurs titres : au titre du manquement à l'obligation de sécurisation de l'accès internet ainsi créée, sanctionné par une autorité administrative (l'HADOPI), ou au titre du délit de contrefaçon (créé par la loi DADVSI) qui se distingue par son caractère intentionnel et que sanctionne le juge pénal.

Le deuxième alinéa de l'article L. 336-3 assortit cette nouvelle obligation d'une sanction, dans les conditions définies à l'article L. 331-25.

Il est ensuite prévu d'exonérer l'abonné de sa responsabilité au titre du manquement à cette obligation dans trois circonstances :

- s'il a mis en oeuvre les moyens de sécurisation définis par l'HADOPI (à l'article L. 331-30) ;

- si l'atteinte au droit d'auteur commise via son accès internet est le fait d'une personne qui a frauduleusement utilisé son accès (sauf si cette personne est placée sous son autorité ou sa surveillance);

- en cas de force majeure.

La position de votre commission

Votre commission pour avis relève que l'abonnement donnant accès à Internet est la pièce centrale sur laquelle se construit toute l'économie du projet de loi.

L'obligation de sécuriser cet accès crée une forme de présomption de culpabilité à l'égard de son titulaire, qui ne peut y échapper que par trois moyens. Le premier, relatif aux moyens de sécurisation, fait l'objet de précisions via l'amendement proposé par votre commission pour avis à l'article L. 331-30 rédigé par l'article 2 du présent projet de loi.

Si le dernier (le cas de force majeure) n'appelle aucune observation, le deuxième apparaît en revanche plus discutable. Avec la généralisation de la technologie Wi-Fi, qui permet un accès internet sans fil, dans les ordinateurs portables et l'extension de la couverture territoriale en haut débit grâce à des bornes Wi-Fi, il n'y a pas de caractérisation simple pour l'ensemble des utilisateurs derrière un même accès à l'internet. Le CGTI lui-même en est convenu dans les conclusions qu'il a rendues au ministre chargé de la culture.

En effet, les réseaux domestiques situés en aval du point de terminaison de la boucle locale sont de plus en plus souvent des réseaux Wi-Fi, cette fonctionnalité étant généralement intégrée aux modems des différents FAI (« boxes »).

Si cette norme de réseau sans fil permet en théorie un haut niveau de sécurisation 18 ( * ) , il est fréquent que l'utilisateur ne parvienne pas à configurer correctement son équipement, laissant son réseau accessible à des tiers. Dans ce cas, des individus mal intentionnés sont susceptibles d'utiliser la connexion Internet ainsi rendue accessible, soit directement, soit au moyen de programmes de déverrouillage.

Les sanctions envisagées dans le projet de loi modifient drastiquement le statut de ces systèmes de protection. Alors qu'il s'agit initialement d'une simple mesure technique de protection de son réseau domestique, le projet de loi rend leur utilisation obligatoire et impliquerait un niveau de connaissance technique de l'utilisateur relativement élevé. Si aujourd'hui tout le monde connaît les dangers des virus, troyans 19 ( * ) et autres logiciels espions, l'intégralité des internautes n'est cependant pas équipée des logiciels de protection correspondants ou n'en maîtrise pas l'utilisation. Finalement, en cas d'utilisation frauduleuse de son accès par un tiers, un abonné éprouverait sans doute les plus grandes difficultés à apporter la preuve matérielle que son réseau domestique a été piraté.

Par ailleurs, certains réseaux Wi-Fi sont par nature ouverts. C'est le cas des « hotspots » Wi-Fi disponibles dans certaines bibliothèques ou jardins ainsi que dans d'autres lieux ouverts au public, les restaurants Mac Donald's par exemple. Dans le cas de réseaux Wifi ouverts mis en oeuvre par les collectivités territoriales, celles-ci pourraient faire l'objet de sanction en l'état actuel du projet de loi en cas de téléchargement illicite par un usager.

Enfin, dans les cas de colocation, le projet de loi conduirait à sanctionner le titulaire de l'abonnement pour « défaut de surveillance », même si celui-ci n'est à l'origine d'aucun téléchargement illégal.

Dans tous ces cas, il serait en pratique très difficile, voire impossible, pour le titulaire de l'accès de s'assurer de la légalité de l'utilisation qui en est faite.

Votre commission pour avis relève en outre que la CNIL, lors de son audition par votre rapporteur pour avis, a fait observer que le respect, par l'employeur, de l'obligation de sécurisation des postes informatiques des employés comporte un risque de surveillance individualisé de l'utilisation d'internet.

C'est pourquoi votre commission pour avis propose un amendement visant à circonscrire aux seules personnes physiques le champ des titulaires d'accès internet que l'HADOPI pourrait sanctionner pour manquement à l'obligation de sécurisation de l'accès.

En effet, il est impossible pour une entreprise, et a fortiori pour une collectivité territoriale qui aurait installé des réseaux Wi-fi à grande échelle (par exemple en résidence universitaire), de s'assurer de l'usage licite d'internet par l'ensemble des ses employés ou administrés.

En outre, si la sanction infligée était la suspension de l'accès internet, la survie de l'entreprise serait menacée. De toute manière, les personnes morales auteurs d'un délit de contrefaçon resteraient passibles des sanctions pénales prévues par le code de la propriété intellectuelle: les ayant-droits conserveraient donc deux voies de recours à leur encontre : au pénal et au civil (pour réparation du préjudice subi).

Votre commission pour avis propose également un deuxième amendement à cet article, pour sécuriser un motif essentiel d'exonération de la responsabilité de l'internaute: le cas où son accès a été frauduleusement utilisé par un tiers. Dans un système où l'abonné à internet est présumé coupable, la définition des cas l'exonérant de sa responsabilité par rapport à son obligation de sécuriser son accès internet est décisive. Or le caractère frauduleux de cet accès par un tiers serait difficile voire impossible à établir pour l'internaute et la simple précision que le tiers en question n'est pas placé sous son autorité ou sa surveillance doit suffire à l'exonérer de toute responsabilité du fait d'autrui.

Ce point est particulièrement important dans le contexte actuel de développement du Wi-Fi, système de connexion sans fil de courte portée qui peut être utilisé par des tiers pour bénéficier, parfois sans l'autorisation de son titulaire, d'un accès internet.

Enfin, en guise de contrepartie à la nouvelle obligation de surveillance de l'accès internet des consommateurs, votre commission propose un dernier amendement pour assurer leur information sur la légalité d'une oeuvre qui circule sur internet, ainsi que sur « les conditions de son utilisation, son aptitude à l'usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation », conformément à l'article L. 121-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.

L'amendement prévoit que ces caractéristiques essentielles figurent dans un fichier associé à l'oeuvre, l'information ne pouvant, par exemple dans le cas d'un fichier musical, être directement attachée au son lui-même.

Ainsi, le consommateur sera éclairé à la fois sur l'usage qu'il est autorisé à faire de cette oeuvre (nombre de copies, par exemple) et sur les supports matériels sur lesquels il pourra l'utiliser. Cette transparence en matière de mesures techniques de protection pourrait permettre, par le biais du jeu concurrentiel, d'améliorer la diffusion des oeuvres et l'interopérabilité.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

CHAPITRE II - Dispositions modifiant la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique
Article 8- Information des abonnés, par les fournisseurs d'accès à Internet, sur les moyens techniques de sécurisation de cet accès

Le texte du projet de loi

Cet article vise à insérer un alinéa dans le 1° du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. Il s'agit de prévoir que les fournisseurs d'accès informent leurs abonnés de l'existence de moyens techniques permettant de prévenir l'utilisation de leur accès à internet pour porter atteinte aux droits d'auteurs et droits voisins.

En revanche, il ne prévoit pas les fournisseurs d'accès proposent de tels dispositifs, contrairement à ce que prévoit le même article de loi du 21 juin 2004 pour ce qui concerne les moyens techniques permettant de restreindre l'accès à certains services ou de les sélectionner (dits « de contrôle parental »).

La position de votre commission

Cet article n'appelle pas d'observation de la part de votre commission pour avis.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

CHAPITRE III - Dispositions modifiant le code des Postes et des communications électroniques
Article 9- Modification du code des postes et des communications électroniques

Le droit en vigueur

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques (CPCE) que tend à modifier cet article 9 pose le principe de l'effacement ou de l'anonymisation des données de trafic par les opérateurs de communications électroniques, et notamment les FAI.

Son II prévoit de déroger à ce principe pour une durée maximale d'un an « pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales, et dans le seul but de permettre, en tant que de besoin, la mise à disposition de l'autorité judiciaire d'informations ». Il précise aussi qu'un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, détermine « ces catégories de données et la durée de leur conservation, (...) ainsi que les modalités de compensation, le cas échéant, des surcoûts identifiables et spécifiques des prestations assurées à ce titre, à la demande de l'Etat, par les opérateurs ».

Le texte du projet de loi

Cet article 9 modifie le II de l'article L. 34-1 du CPCE :

- d'une part, il ajoute un motif supplémentaire de conservation des données, en plus des besoins liés aux infractions pénales : le manquement à l'obligation de sécurisation de l'accès internet, définie à l'article L. 336-3 du code de propriété intellectuelle ;

- d'autre part, il étend à la Haute Autorité le bénéfice de cette dérogation au principe de l'effacement des données de connexion, aujourd'hui réservé au juge.

Désormais, la possibilité de disposer d'informations sur les données de connexion des douze derniers mois sera également ouverte à la Haute Autorité, pour les besoins de la procédure qu'elle a engagée au titre du manquement à l'obligation posée à l'article L. 336-3.

La position de votre commission

Bénéficiant d'une exception jusque là réservée au juge pénal, l'HADOPI se trouve ainsi habilitée à recueillir et traiter, sous une forme nominative, les données de trafic, hors donc de toute procédure judiciaire, garantie jugée pourtant essentielle par le Conseil constitutionnel 20 ( * ) . Votre commission pour avis se demande donc si le projet de loi assure un équilibre satisfaisant entre le respect de la vie privée et le respect des droits d'auteur.

Sous réserve de ces observations, elle vous propose d'adopter cet article en l'état.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 9- Chronologie des médias

Dans le souci, qu'elle partage avec votre commission pour avis, de rendre attractive l'offre légale en ligne, la commission des affaires culturelles propose un amendement n°50 qui concerne la chronologie des médias, c'est-à-dire les règles définissant l'ordre et les délais dans lesquels l'exploitation d'une oeuvre cinématographique peut intervenir sur les différents supports. Les accords de l'Elysée prévoient en effet un réaménagement négocié de la chronologie des médias, notamment afin de permettre une disponibilité plus rapide en ligne des oeuvres cinématographiques. A cette occasion, il est prévu d'aligner le délai dans lequel un film est rendu disponible en vidéo à la demande, sur le délai de sortie d'un film en DVD.

Aujourd'hui, seul ce délai de sortie d'un film en DVD est encadré par une disposition législative, l'article 89 de la loi du 29 juillet 1982, qui prévoit un délai-plancher de 6 mois entre la sortie d'un film en salles et son exploitation en DVD.

Si l'amendement n° 50 prévoit bien l'abrogation de cette disposition législative, il prévoit de ne rendre effective cette abrogation qu'à compter de la date d'entrée en vigueur d'un arrêté qui étendra à l'ensemble des opérateurs l'accord professionnel qui aura pu être conclu ou à compter de l'entrée en vigueur du décret qui, à défaut d'un tel accord professionnel, devra prévoir un délai applicable de plein droit. La date de l'abrogation du « taquet légal » sur le DVD reste donc tributaire de l'évolution des négociations entre professionnels.

Or ces négociations n'ont toujours pas commencé, les exploitants de cinéma ayant fait annuler les réunions initiées en ce sens par le Centre national de la cinématographie.

C'est pourquoi, pour stimuler la négociation, votre commission pour avis propose un sous-amendement à l'amendement n° 50 convient de prévoir que l'abrogation de ce « taquet légal » sur le DVD sera effective dès l'entrée en vigueur de la présente loi, ce qui n'est pas excessivement sévère, dans la mesure où un autre amendement de votre commission pour avis propose de prévoir un délai de six mois, à compter de sa publication, pour l'entrée en vigueur de la loi.

Votre commission vous propose d'adopter ce sous- amendement à l'amendement n° 50 de la commission des affaires culturelles portant article additionnel.

Article additionnel avant l'article 10 - Subordination des aides du Centre national de la cinématographie à la distribution en ligne des films

Votre commission pour avis propose un amendement destiné à encourager le développement de l'offre légale de vidéo à la demande (VOD) en conditionnant l'octroi, par le Centre national de la cinématographie (CNC), de subventions au bénéfice d'une oeuvre cinématographique, à l'exploitation de cette oeuvre sur un service de VOD, en plus de sa distribution usuelle. Il traduit l'un des engagements pris par les ayant-droits dans les accords de l'Elysée de novembre 2007, ceux-ci s'étant alors engagés à « faire leurs meilleurs efforts pour rendre systématiquement disponibles en vidéo à la demande les oeuvres cinématographiques ».

Votre commission vous propose d'adopter cet amendement portant article additionnel.

Article additionnel après l'article 11- Date d'entrée en vigueur de la loi

Votre commission pour avis vous propose cet amendement qui vise à prévoir un délai pour permettre à l'HADOPI de mener à bien la procédure d'évaluation et de labellisation des moyens de sécurisation dont la mise en oeuvre exonérera de leur responsabilité les internautes et pour laisser aux fournisseurs d'accès internet le temps d'adapter leurs systèmes d'information existants afin de satisfaire à leurs nouvelles obligations, notamment s'agissant de la nécessaire automatisation des demandes d'identification des abonnés.

Votre commission vous propose d'adopter cet amendement portant article additionnel.

*

* *

Au cours de sa réunion du mardi 28 octobre 2008, votre commission des affaires économiques a donné un avis favorable aux dispositions du présent projet de loi, sous réserve de l'adoption des amendements proposés par son rapporteur .

* 13 Sur ce point, cf. le point C du II de l'exposé général du présent rapport.

* 14 Précisément, par des agents assermentés désignés par les organismes de défense professionnelle, les sociétés de perception et de répartition des droits, le centre national de la cinématographie et les titulaires de droits exclusifs sur des oeuvres protégées.

* 15 1000 décisions de suspension par jour (ainsi que 3000 lettres recommandées et 10000 courriels par jour).

* 16 L2TP Network Server (LNS).

* 17 L'expertise rendue dans le jugement SABAM c/ SA Scarlet, Tribunal de première instance de Bruxelles, 29 juin 2007, affirme également à propos de la solution de filtrage proposée que sa « pérennité est loin d'être assurée », que la solution n'est « pas dimensionnée pour répondre au volume de trafic d'un FAI », que le « coût d'acquisition et d'exploitation est élevé pour compenser ce sous dimensionnement » ce qui la rend « inefficace dans le cadre du filtrage en transit » et qu'elle sera très rapidement dépassée, notamment car les internautes choisiront vite des solutions chiffrées.

* 18 Chiffrement 128 bits, filtrage des adresses MAC...

* 19 Programme qui permet au pirate informatique de s'introduire dans un ordinateur et de prendre son contrôle à distance.

* 20 Cf. décision n°2004-499 DC du 29 juillet 2004 où le Conseil constitutionnel a validé un article de la loi du 6 janvier 1978 au motif que « les données recueillies ne pourraient, en vertu de l'article L . 34-1 du CPCE, acquérir un caractère nominatif que dans le cadre d'une procédure judiciaire (...) ».

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