CHAPITRE II : LES MESURES RELATIVES AUX RECETTES ET AUX DÉPENSES DES DIFFÉRENTES BRANCHES

Votre rapporteur pour avis ne s'est pas saisi des mesures relatives à l'organisation des branches, qui n'ont aucun impact financier, ni de la partie relative à l'ONDAM médico-social, compte tenu de la mise en place de la mission commune d'information du Sénat sur le cinquième risque 18 ( * ) .

I. LES MESURES RELATIVES AUX RECETTES

A. L'INSTAURATION D'UN FORFAIT SOCIAL

L'article 13 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale tend à créer une contribution à la charge des employeur, dite « forfait social », sur les éléments de rémunération qui sont à la fois exclus de l'assiette des cotisations de sécurité sociale et assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG) .

1. Le droit existant

a) La nature des « exemptions d'assiette » actuelles

En vertu de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, l'assiette des cotisations sociales de sécurité sociale du régime général comprend l'ensemble des salaires et avantages versés au salarié en contrepartie de son activité professionnelle.

Le même article prévoit cependant certaines exceptions pouvant être regroupées en quatre catégories selon la classification retenue par la commission des comptes dans son rapport de juin 2008 :

- les dispositifs d'épargne salariale qui peuvent prendre deux formes : l'actionnariat salarié (stock-options et actions gratuites) et la participation financière (plan d'épargne d'entreprise, plan d'épargne retraite, participation, intéressement) ;

- les aides directes au financement de besoins précis des salariés : titres-restaurant, chèques-vacances, chèque emploi service universel (CESU), chèques-transport ;

- les dispositifs de prévoyance complémentaire et de retraite supplémentaire : depuis la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, seules les contributions des employeurs à des régimes présentant un caractère collectif et obligatoire sont exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale dans certaines conditions ;

- les indemnités versées dans certains en cas de rupture du contrat de travail, à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu.

Bien qu'exclus de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, ces rémunérations ou gains particuliers sont, pour la majorité d'entre eux, assujettis à la CSG et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

b) Des mesures récentes visant à réduire les « exemptions d'assiette »

Il est à noter que certaines de ces « exemptions d'assiette » ont été révisées récemment, notamment par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 :

- l'article 16 de la loi précitée a ainsi institué, à la charge des employeurs et au profit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), une contribution de 50 % sur les avantages de préretraites ou de cessation anticipée d'activité versés à d'anciens salariés (article L. 137-10 du code de la sécurité sociale) ;

- l'article 13 de cette même loi a créé deux contributions, l'une à la charge des employeurs, l'autre à celle des salariés, sur les stock-options et les actions gratuites, applicables aux options consenties à compter du 16 octobre 2007 (article L. 137-13 du code de la sécurité sociale).

c) Une perte d'assiette évaluée à 46,1 milliards d'euros pour 2009

Selon les données du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, les « exemptions d'assiette » s'élèveraient à 46,1 milliards d'euros en 2009. Les pertes de cotisations sociales afférentes représenteraient 9,8 milliards d'euros - avant mise en place du « forfait social ».

Montant des exemptions d'assiette en 2009

Dispositifs

Montants des exemptions d'assiette

I. Participation financière et actionnariat salariés

20

Dont :

Participation

8,7

Intéressement

7,9

Plan d'épargne en entreprises (PEE)

1,3

Stock-options

2,1

II. Aides directes consenties aux salariés

5,4

Dont :

Titres restaurant

2,4

Chèques vacances

0,3

Avantages accordés par les comités d'entreprise (2004)

2,6

Chèque emploi service universel (2006)

0,1

III. Prévoyance complémentaire, retraite supplémentaire

17,1

Dont :

Prévoyance complémentaire

13,1

Retraite supplémentaire

3,8

Plan d'épargne retraite collective (PERCO)

0,2

IV. Rupture du contrat de travail (2002)

3,5

Dont :

Indemnités de licenciement

3,2

Indemnités de mise à la retraite

0,4

TOTAL

46,1

Source : annexe 5 du présent projet de loi de financement

Dans son rapport de juin 2008, la commission des comptes de la sécurité sociale soulignait, par ailleurs, le dynamisme de ces dispositifs. Elle relevait, en particulier, que le taux moyen d'évolution annuelle des sommes versées au titre de la participation financière s'est élevé, entre 2000 et 2005, à 8,3 %, soit un taux nettement supérieur à celui de l'évolution annuelle moyenne de la masse salariale sur la même période (+ 3,2 %).

On relèvera néanmoins le manque de fiabilité des données en la matière. La commission des comptes de la sécurité sociale notait ainsi : « ces dispositifs ne faisant pas l'objet de déclarations systématiques par les employeurs et n'étant pas enregistrés isolément en comptabilité, leurs montants financiers sont moins bien connus que ceux des exonérations . »

2. Le dispositif proposé par l'article 13

Le I de l'article 13 pose le principe général d'un assujettissement à une nouvelle contribution à la charge de l'employeur de l'ensemble des rémunérations ou gains à la fois soumis à la CSG et exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, telles que définies à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et à l'article L. 741-10 du code rural.

Par dérogation à ce principe, le nouvel article L. 137-15, qu'il est proposé d'introduire dans le code de la sécurité sociale, énumère limitativement les rémunérations ou gains qui seraient exclus du dispositif :

- les stock-options et actions gratuites (article L. 137-13 du code de la sécurité sociale), déjà soumises à une contribution patronale de 10 % ;

- les contributions des employeurs au financement de prestations complémentaires de prévoyance (2° de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et 2 ° de l'article L. 741-10 du code rural), assujetties à une contribution de 8 % (article L. 137-1 du code de la sécurité sociale) ;

- les indemnités versées à l'occasion de la rupture d'un contrat de travail (12 e alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et 3 e alinéa de l'article L. 740-10 du code rural) ;

- les contributions des employeurs aux chèques vacances dans les entreprises de moins de 50 salariés (article L. 411-9 du code du tourisme) : contrairement aux autres aides directes consenties aux salariées (titres restaurant, chèques emplois service universel) qui ne sont pas assujetties à la CSG et sont donc exclues du champ de la mesure proposée, les chèques vacances sont, eux, soumis à la CSG et exonérées de cotisations de sécurité sociale et devraient dès lors entrer dans le champ du forfait social.

Le dispositif retenu permet ainsi de soumettre automatiquement toute nouvelle exemption d'assiette de cotisations de sécurité sociale au « forfait social ». Pour en être exonérée, celle-ci devra être explicitement définie dans le code de la sécurité sociale.

Dans l'état actuel du droit et par déduction, seront ainsi soumis au « forfait social » :

- les sommes versées au titre de l'intéressement , du supplément d'intéressement et de l'intéressement de projet ;

- les sommes versées au titre de la participation et du supplément de réserve spéciale de participation ;

- les abondements de l'employeur aux plans d'épargne (plan épargne en entreprise (PEE) et plan d'épargne retraite collectif (PERCO)) ;

- les contributions des employeurs au financement des régimes de retraite supplémentaire 19 ( * ) .

Le présent article prévoit de fixer le taux de la contribution à 2 % .

Le produit de cette nouvelle contribution, d'un rendement estimé par le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique à 400 millions d'euros pour 2009 , sera affecté à la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

Le II de l'article 13 prévoit que la mesure est applicable aux sommes versées à compter du 1 er janvier 2009 .

L'Assemblée nationale n'a pas apporté de modifications au dispositif du forfait social et, en particulier, a rejeté un certain nombre d'amendements visant à soumettre au dispositif du forfait social les stock-options et actions gratuites ou encore les « parachutes dorés ».

En revanche, elle a adopté, à l'initiative de notre collègue député, Yves Bur, rapporteur pour les recettes et les équilibres généraux, l'article 13 bis qui prévoit d'assujettir « au premier euro », aux cotisations de sécurité sociale :

- les indemnités versées en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux et de dirigeants de société ;

- les indemnités versées à l'occasion d'une rupture conventionnelle de contrat de travail ;

- les indemnités de départ volontaire versées aux salariés dans le cadre d'un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences,

lorsque le montant de ces indemnités est supérieur à trente fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit près de 1 million d'euros - selon le montant du plafond de la sécurité sociale fixé au 1 er janvier 2008.

En l'état actuel du droit , comme l'a indiqué M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement à l'Assemblée nationale, ces indemnités ne sont assujetties aux cotisations de sécurité sociale qu'au delà d'un montant supérieur à 6 fois le plafond de la sécurité sociale, soit environ 200.000 euros . En effet :

- entre zéro euros et un montant légal ou conventionnel, ces indemnités ne sont assujetties ni la CSG, ni aux cotisations de sécurité sociale ;

- entre le montant légal ou conventionnel et 200.000 euros, ces indemnités sont assujetties à la CSG et à la CRDS ;

- au delà de 200.000 euros, elles sont soumises à la CSG, à la CRDS et aux cotisations de sécurité sociale au même taux que celui s'appliquant sur les salaires.

3. La position de votre rapporteur pour avis

Votre rapporteur pour avis est favorable à la présente mesure qui s'inscrit dans le cadre de nombreux travaux menés, notamment par la Cour des comptes 20 ( * ) et par notre collègue député, Yves Bur, rapporteur de la mission d'information commune sur les exonérations de cotisations sociales 21 ( * ) , sur la question des « niches sociales ».

Votre rapporteur pour avis est favorable à cette disposition qui tend ainsi à réduire le champ de celles-ci.

S'agissant plus particulièrement de l'assujettissement au forfait social des abondements réalisés par les employeurs aux plans d'épargne entreprise, notamment le PERCO, ainsi qu'aux régimes de retraite supplémentaires, il ne paraît pas illégitime eu égard au faible taux de la nouvelle contribution. Par ailleurs, dans la mesure où il s'agit de revenus différés pour le salarié, leur imposition, en l'occurrence au forfait social, évite un effet de substitution aux salaires.

Votre rapporteur pour avis note également la volonté d'exclure du dispositif les rémunérations ou gains, certes exclus de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, mais déjà soumis à un prélèvement spécifique.

Il tient néanmoins à souligner le manque de cohérence de cette mesure avec celles envisagées, dans le même temps, dans le cadre du projet de loi sur les revenus du travail et visant à favoriser le développement de la participation et de l'intéressement.

* 18 Philippe Marini (président), Alain Vasselle (rapporteur), « Construire le cinquième risque : le rapport d'étape », rapport d'information n° 447 (2007-2008).

* 19 A l'exclusion des retraites supplémentaires régies par l'article 82 du code général des impôts dont seule une partie à un montant fixé par décret est exclue de l'assiette de cotisations de sécurité sociales.

* 20 Rapport de la Cour des comptes sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale de septembre 2007.

* 21 Rapport d'information n° 1001 (XIII ème législature).

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