III. TROIS CHANTIERS À SUIVRE

Ces trois chantiers -le développement de la police scientifique, le recentrage des forces de sécurité sur leur coeur de métier et la réduction du format des forces mobiles- étaient déjà au premier rang des priorités de la LOPSI. Des progrès ont été accomplis sur le premier sujet, mais les évolutions techniques obligent à un effort constant. En revanche, les deux autres sujets sont sans doute ceux sur lesquels les avancées ont été les moins importantes. Telles sont les raisons pour lesquelles ces trois chantiers sont les priorités de la future LOPPSI, l'année 2009 étant par anticipation sa première année de mise en oeuvre.

On notera qu'à la différence de la LOPSI de 2002, la future LOPPSI s'exécutera à moyens constants, voire en baisse. Elle n'offrira pas de moyens supplémentaires, mais elle fixera des priorités.

Enfin, il faut relever que ces trois chantiers ont de nombreux liens avec le rapprochement police-gendarmerie déjà évoqué.

A. POURSUIVRE LE DÉVELOPPEMENT DE LA POLICE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE

1. Une priorité reconduite

Lors de son audition, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, a rappelé que le développement des nouvelles technologies dans la police nationale figurait au premier rang de ses priorités.

Votre rapporteur qui consacre depuis deux ans une partie de son avis à la police technique et scientifique ne peut que souscrire à cet objectif.

En effet, le renforcement de la police technique et scientifique (PTS) est au coeur de différents enjeux :

- accompagner le passage d'une culture de l'aveu à une culture de la preuve pour confondre les délinquants ;

- adapter les forces de sécurité intérieure aux évolutions technologiques ;

- répondre à la sophistication des méthodes employées par les délinquants.

La LOPSI avait déjà fait de la PTS une priorité, notamment en mutualisant et en étendant l'accès aux fichiers de police, en développant considérablement le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) et le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Les moyens humains et matériels ont été accrus, de même l'organisation a été rationalisée avec la création d'un établissement public regroupant les différents laboratoires de police scientifique de la police nationale et l'Institut national de la police scientifique.

L'objectif avoué est de faire de la police scientifique et technique un outil quotidien de travail pour l'ensemble des policiers et gendarmes et pour tout type d'infractions .

L'effort de formation continue est essentiel. Chaque service ou unité doit être en capacité de procéder à des relevés de traces de bonne qualité.

A cet égard, pour répondre aux préconisations du comité de suivi du plan d'action national relatif à la police technique et scientifique, il a été décidé la mise en place d'un réseau de techniciens en identification criminelle de proximité (TICP) à raison de deux par communauté de brigades ou brigade autonome. Ces 3.600 TICP devraient être formés en 2009 en recevant 3 jours d'enseignement dispensé localement par des TIC spécialement désignés à cet effet.

On rappellera que le plan d'action triennal 2008-2010 fixe des objectifs ambitieux :

- 100 % de signalisations papillaires sur les personnes placées en garde à vue ;

- 100 % de signalisations biologiques pour les infractions entrant dans le périmètre du FNAEG.

Par ailleurs, les objectifs en matière de police technique et scientifique de la direction centrale de la Sécurité publique sont de pratiquer les recherches de traces et indices sur :

- 100 % des découvertes de véhicules volés ;

- 100 % des cambriolages ;

- 80 % des vols à la roulotte.

Le projet annuel de performances pour 2009 prévoit également de nouveaux indicateurs ciblés sur l'efficacité de la police scientifique. Il s'agit du taux de signalisation au FNAEG des individus mis en cause et du taux d'identification des traces papillaires exploitables recueillies sur les scènes d'infraction. Votre rapporteur regrette seulement que le mode de calcul de ces indicateurs ne soit pas identique pour la police et la gendarmerie. Les premiers chiffres semblent indiquer que les objectifs de 100 % de signalisations en 2010 seront difficiles à atteindre.

Votre rapporteur avait également salué l'intensité de la mutualisation des moyens entre la police et la gendarmerie nationales.

Le système de dépistage salivaire de consommation de stupéfiants est le dernier exemple d'un marché passé conjointement par la police et la gendarmerie. Au terme d'une procédure de dialogue compétitif prise en charge par la police mais menée en commun pendant plus de deux ans, le marché a été notifié au mois de juillet dernier. Il prévoit la possibilité d'acquérir jusqu'à 210.000 dispositifs de dépistage salivaire par an pendant 3 ans.

Toutefois, si les coopérations doivent être approfondies, votre rapporteur ne juge pas opportune une fusion de l'institut national de la police scientifique (INPS) et de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) 15 ( * ) .

Indispensable, la PTS est également coûteuse . La LOPPSI devra intégrer une croissance structurelle prévisible de l'activité et des coûts de la PTS, même si ponctuellement certains tarifs peuvent baisser brutalement comme ceux des analyses génétiques.

Le bilan coûts/avantages en matière de PTS doit prendre en compte le fait qu'en l'absence d'une preuve scientifique, certaines affaires requéraient la mobilisation de nombreux enquêteurs pendant de long mois, là où une simple comparaison d'empreintes peut permettre d'élucider une affaire.

L'Etat a fait un effort considérable pour équiper les laboratoires dans le domaine de la biologie (analyses génétiques) afin de faire face à la très forte augmentation d'activité résultant de l'évolution législative. L'équipement dans ce domaine est d'un niveau très satisfaisant. En revanche l'effort doit être poursuivi pour l'ensemble des autres activités où les laboratoires de l'INPS souffrent d'une forte obsolescence des matériels scientifiques lourds.

Une ressource de trois millions d'euros par an pendant trois ans serait nécessaire pour remettre les six laboratoires de la PTS à un niveau comparable à ceux de nos voisins européens et prétendre à l'accréditation.

Or, pour 2009, ces crédits semblent insuffisants. Il en va de même pour les laboratoires de la gendarmerie. Plusieurs projets immobiliers sont également reportés.

En réalité, ce budget fait le choix de cibler les crédits relatifs à la modernisation technologique des forces de sécurité sur :

- le FNAEG qui continue d'absorber une part importante de la hausse des coûts de fonctionnement de l'INPS ou de l'IRCGN ;

- le FAED qui sera modernisé pour notamment intégrer les empreintes palmaires ;

- le projet ARIANE qui remplacera les fichiers de police judiciaire STIC et JUDEX ;

- le développement du système de lecture automatique des plaques d'immatriculations (LAPI).

2. La police scientifique à Paris

En mars 2007, votre rapporteur s'était rendu, avec plusieurs de ses collègues, dans les locaux des laboratoires de Paris (laboratoire de police scientifique de la préfecture de police et laboratoire de toxicologie).

Tout en saluant la qualité des personnels, la délégation de la commission avait constaté l'extrême vétusté, voire l'insalubrité des locaux. Ainsi, certains laboratoires sont installés dans des appentis au niveau du sol et donnant directement sur le métro aérien qui passe à seulement quelques mètres. Ces conditions inadaptées à une police scientifique moderne appellent une réimplantation immobilière rapide, d'autant qu'elles rendent impossible la certification européenne des analyses réalisées.

Le budget pour 2008 prévoyait 12 millions d'euros, afin de lancer les opérations de relogement de quatre laboratoires (le laboratoire de police scientifique de Paris, le laboratoire de toxicologie, le laboratoire central de la préfecture de police et le centre technologique de la sécurité intérieure).

Le coût total de ce projet est estimé à 85 millions d'euros pour les trois laboratoires de l'Etat, qui seraient totalement financés par le ministère, et à 30 millions d'euros pour le laboratoire municipal de police scientifique de Paris, dont la clé de répartition avec la ville de Paris reste à déterminer.

Toutefois, un an plus tard, ce projet avance lentement. Il demeure un des projets immobiliers prioritaires de la LOPPSI au titre de l'année 2009.

* 15 Voir le II.C de cette partie.

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