II. LA RÉORGANISATION DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE ET LE DÉVELOPPEMENT DES NOUVELLES TECHNOLOGIES

A. LA RÉORGANISATION DE L'ADMINISTRATION CENTRALE DU MINISTÈRE

L'administration centrale du ministère de la justice a fait l'objet de deux mesures de réorganisation au cours des années 2007 et 2008.

1. La création d'un comité de gouvernance des systèmes d'information du ministère de la justice

Destiné à se substituer à la Commission de l'Informatique, des Réseaux et de la Communication Electronique (COMIRCE) créée en 1996, le comité de gouvernance des systèmes d'information du ministère de la justice réunit les principaux responsables des directions, des services, des partenaires du ministère de la justice et des représentants des organisations professionnelles.

Ce comité a repris les missions originelles de la COMIRCE visant à définir et conduire la politique informatique globale du ministère en faisant notamment émerger une hiérarchie des besoins. Il lui appartient de piloter les actions de mutualisation et de normalisation, de préparer un schéma directeur des systèmes d'information et de réaliser une veille technologique. Le comité est en outre le correspondant de la CNIL pour l'ensemble du ministère.

La réforme a principalement eu pour objectif de mettre en place une organisation dont la structuration, du fait notamment de la création d'un comité réduit et plus opérationnel, sera à même d'assurer une véritable gouvernance inter-directionnelle sur l'ensemble du système d'information et de communication du ministère de la justice.

2. La réorganisation de l'administration centrale du ministère de la justice

Le décret n° 2008-689 du 9 juillet 2008 a pour objet de mettre en oeuvre la décision prise par le comité de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007 de regrouper au sein du secrétariat général du ministère de la justice des compétences actuellement réparties entre plusieurs directions et services d'administration centrale et de proposer une nouvelle définition des missions des directions du ministère.

Après la publication de ce texte, le secrétariat général du ministère de la justice est désormais composé de cinq services :

- le service de la synthèse et de la programmation dont la mission est principalement d'assurer la synthèse des dossiers et documents stratégiques transversaux visant à mettre en oeuvre les politiques publiques définies par le garde des sceaux ;

- le service du support et des moyens du ministère, qui apportera son concours aux directions du ministère dans les domaines immobilier, informatique, statistique et contentieux ;

- le service de l'administration centrale qui assurera la gestion des personnels et des locaux d'administration centrale du ministère de la justice ;

- le service des affaires internationales et européennes ;

- le service de l'accès au droit et aux victimes dont les missions sont inchangées.

Par ailleurs, le décret du 9 juillet 2008 entérine la disparition de l'actuelle direction de l'administration générale et de l'équipement, dont l'emploi de directeur a été transféré au secrétariat général sur l'emploi de secrétaire général adjoint, et du service central d'information et de communication, dont les compétences ont été réparties entre le bureau du cabinet, un département de l'information et de la communication au sein du service de l'administration centrale et la direction des services judiciaires.

Le périmètre des missions des autres directions du ministère de la justice n'a pas été sensiblement modifié. Cette réforme est entrée en vigueur le 1 er septembre 2008.

Le rôle du secrétaire général du ministère de la justice

M. Gilbert Azibert, auparavant procureur général près la cour d'appel de Bordeaux, a été nommé secrétaire général du ministère de la justice par décret du 4 juillet 2008.

Le secrétaire général assiste le ministre, en liaison avec les directions, dans la définition et la mise en oeuvre de la stratégie de modernisation du ministère, de son organisation territoriale et de sa politique de gestion des ressources humaines.

Responsable des ressources humaines et des affaires financières du ministère de la justice, il anime et coordonne l'action des responsables de programme de la mission « Justice » et prépare les arbitrages ministériels dans le domaine budgétaire. Il assure la coordination des actions intéressant plusieurs directions, ainsi que la synthèse des dossiers et documents stratégiques transversaux.

Chargé de mettre en oeuvre la politique de l'informatique et des technologies de l'information et de la communication au sein du ministère, il élabore par ailleurs le programme d'équipement immobilier judiciaire. A ce titre, le secrétaire général assure la maîtrise d'ouvrage des schémas directeurs immobiliers des cours d'appel, ainsi que la réalisation des opérations de construction et de rénovation des bâtiments judiciaires, qu'il confie à l'agence pour l'immobilier de la justice et aux antennes régionales de l'équipement.

Aussi le secrétaire général est-il chargé de piloter la réforme de la carte judiciaire, compte tenu de ses implications multiples en matière de ressources humaines, d'immobilier (350 opérations de regroupement de juridictions), d'accompagnement social des magistrats et des fonctionnaires, ainsi que d'aide à l'adaptation de l'exercice de la profession d'avocat aux conditions nouvelles résultant de la suppression de juridictions. Une mission « carte judiciaire » a d'ailleurs été constituée auprès du secrétaire général.

Le secrétaire général a en outre été chargé d'une mission de maîtrise de l'évolution des frais de justice, nécessitant la mise en place d'outils informatiques, l'élaboration d'outils de contrôle de gestion et la définition d'un traitement comptable de ces crédits. Le premier bilan de cette dernière ayant fait apparaître une maîtrise globale de la dépense, cette action est à présent directement menée par la direction des services judiciaires.

Le secrétaire général mène enfin une politique de développement des nouvelles technologies dans les juridictions. Elle se traduit notamment par le déploiement de Cassiopée, application destinée à mettre en place une véritable chaîne pénale pour améliorer l'exécution des décisions de justice. Elle donne également lieu au développement de la visio-conférence entre les juridictions et les établissements pénitentiaires, afin de limiter les transfèrements de détenus.

B. LA MODERNISATION DE LA FORMATION DES MAGISTRATS ET DE LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

La loi organique n° 2007-287 du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats adoptée à la fin de la XIIème législature a pour objet de moderniser le statut des magistrats pour répondre aux critiques suscitées par les dysfonctionnements de la justice constatés par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale lors du procès d'Outreau.

L'entrée en vigueur de cette réforme est effective depuis le 1 er juin 2007, à l'exception de deux mesures, subordonnées à un décret en Conseil d'Etat non encore publié. Ainsi, le volet relatif à la formation et au recrutement des magistrats est partiellement applicable.

Certaines innovations prévues par la loi organique du 5 mars 2007 telles que l'instauration de la mobilité obligatoire ou le renforcement des règles déontologiques, ont en outre conduit le ministère de la justice à moderniser sa gestion des ressources humaines.

1. Le lancement de la réforme de la formation des magistrats

->  La généralisation de l'obligation de formation continue à l'ensemble de la magistrature

Le décret n° 2008-483 du 22 mai 2008 modifiant le décret n° 72-355 du 4 mai 1972 relatif à l'Ecole nationale de la magistrature et le décret n° 94-199 du mars 1994 relatif au Conseil supérieur de la magistrature rend applicables les dispositions de la loi organique relatives à l'obligation de formation continue.

Ce texte prévoit que tout magistrat doit suivre chaque année cinq jours de formation et impose dans l'année suivant un changement de fonction de suivre une session de formation correspondant à la nouvelle affectation.

Ainsi, en 2008, 6.487 magistrats soit 80 % du corps se sont inscrits pour suivre au moins une action de formation continue sur les 465 actions proposées, soit un taux d'augmentation de 56 % par rapport à 2007.

Selon le ministère de la justice, le coût global de cette mesure atteint 1 à 1,5 million d'euros.

Pour faire face à cette augmentation, l'ENM étudie actuellement deux orientations :

- une meilleure organisation des calendriers d'inscription de la formation nationale et déconcentrée. Ainsi, à la demande du conseil d'administration de l'école, les conseils régionaux de formation ont arrêté au cours de l'été leur programme de formation de l'année n-1 pour l'année n, la demande de budget étant ainsi soumise lors du dernier conseil d'administration de l'année.

Aussi les magistrats pourront-ils s'inscrire conjointement grâce au logiciel d'inscription, en formation continue nationale ou dans le cadre de la formation proposée par leur cour, le nombre de jours demandés pouvant être cumulés et permettre aux magistrats de remplir leur obligation de 5 jours sur l'ensemble des deux formations ;

- la modernisation du statut des magistrats délégués à la formation.

-> La formation des magistrats à titre temporaire

Le projet de décret d'application de l'article 12 de la loi organique du 5 mars 2007 -qui rend obligatoire le suivi d'une formation probatoire par les candidats aux fonctions de magistrat à titre temporaire- est en cours de préparation, afin de déterminer les modalités d'organisation et la durée de la formation, ainsi que les conditions dans lesquelles sont assurées l'indemnisation et la protection sociale des candidats.

S'agissant des conditions de dépôt et d'instruction des candidatures, celles prévues par les articles 35-1 et 35-2 du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 pris pour l'application de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature, ne devraient pas être modifiées.

-> La mise en oeuvre de la réforme de la formation initiale

La rénovation de la formation initiale (qui dépassait le strict cadre de la loi organique) n'est pas encore achevée. Les premières orientations retenues pour la mise en place de cette réforme ont été approuvées le 17 juin 2008 par le Conseil d'Administration de l'Ecole nationale de la magistrature. Les projets de textes nécessaires actuellement en cours de rédaction par la Chancellerie devraient prochainement être soumis au Conseil d'Etat.

Le nouveau dispositif devrait permettre d'assurer une meilleure cohérence entre d'une part le recrutement, la formation initiale et la formation continue des magistrats, et d'autre part leurs compétences et capacités. Il devrait s'articuler de la façon suivante :

- un concours recentré sur les fonctions du magistrat, le coeur de métier et les besoins du corps judiciaire, et renforçant la part des épreuves juridiques ;

- un concours prenant davantage en compte la personnalité des candidats, en particulier par la mise en oeuvre de tests de personnalité, ainsi que d'une épreuve de mise en situation collective, suivant l'exemple de nombreuses grandes écoles, suivie d'un entretien avec le jury ;

- une plus grande diversité du corps judiciaire assurée par la création de trois classes préparatoires intégrées (CPI) à Bordeaux, Paris et Douai, l'assouplissement des modalités de mise en oeuvre des cycles préparatoires aux concours, prenant la forme d'une préparation par correspondance, tant pour les fonctionnaires, que pour les candidats issus du secteur privé et l'élargissement de la composition du jury.

Il convient de souligner que ces mesures mettent largement en oeuvre les recommandations formulées par la mission d'information conduite par nos collègues Pierre Fauchon et Charles Gautier au nom de la commission des lois 19 ( * ) .

2. La nouvelle organisation de la gestion des ressources humaines de la magistrature

->  La création d'une sous-direction des ressources humaines

Un service en charge des ressources humaines a été créé auprès du directeur des services judiciaires, avec la nomination d'un chef de service, qui a pris ses fonctions en février 2008.

La sous-direction de la magistrature a été réorganisée en 2007 en sous-direction des ressources humaines de la magistrature. Cette sous-direction, rattachée au service des ressources humaines, assure le recrutement et la gestion administrative des magistrats, instruit les dossiers disciplinaires et élabore les textes statutaires et indemnitaires. Il lui revient en outre d'élaborer et de conduire une gestion plus dynamique et plus personnalisée des ressources humaines. Elle est composée de 54 agents.

Au sein du département de la mobilité interne, de l'évaluation et de la valorisation des compétences, a été intégrée une section de la gestion prévisionnelle des emplois et du suivi des carrières, composée de quatre magistrats spécialisés dans la gestion des ressources humaines. Cette section a pour objectif de développer une gestion personnalisée des magistrats en assumant une fonction de « conseiller carrière ».

Au total, ce sont une quinzaine de magistrats en poste à la DSJ qui sont amenés à rencontrer leurs collègues aux différentes étapes de leur carrière.

Par ailleurs, une stratégie de mise en oeuvre de la gestion des ressources humaines de la magistrature a été élaborée et le programme concernant la carrière des magistrats se décline en quatre projets :

- mise en place d'un référentiel des emplois et des compétences de la magistrature ;

- organisation de forums de gestion des ressources humaines au sein des 35 cours d'appel ;

- développement d'un plan de gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences ;

- déploiement de programmes transversaux de coordination des ressources humaines dans les domaines du recrutement, de la mobilité, de la formation et des questions indiciaires.

En outre, pour assurer la mise en place de la mobilité extérieure instituée par la loi organique du 5 mars 2007, la sous-direction des ressources humaines de la magistrature comprend un département d'appui et de suivi des mobilités externes, des nominations à l'administration centrale et en outre-mer.

Au sein de ce département, a été créée une section des mobilités externes comportant un pôle chargé des mobilités externes vers les trois fonctions publiques, un pôle chargé de la mobilité externe vers le secteur privé national et un pôle chargé de la mobilité externe vers les organisations ou entités publiques internationales. Cette section est chargée de mettre en oeuvre la politique de mobilité externe des magistrats.

->  La systématisation des entretiens de carrière

Les magistrats ayant deux ans de fonction se voient proposer systématiquement un entretien de carrière. Cet entretien est l'occasion de faire le point sur les éventuels problèmes rencontrés dans l'exercice de leurs activités professionnelles et d'échanger sur leurs souhaits d'évolution professionnelle.

Si les entretiens de carrière, fondés sur le volontariat, ont été mis en place sans réforme statutaire, l'instauration d'entretiens obligatoires à certaines étapes de la carrière du magistrat rendrait nécessaire une modification du statut de la magistrature. Les entretiens de carrière sont proposés depuis 2008 aux magistrats et visent à aborder la situation individuelle, dresser un bilan des acquis, procéder à une synthèse du parcours professionnel du magistrat, en soulignant ses principales compétences et appétences, et dégager des perspectives de carrière et des choix de formation.

Ces entretiens de carrière se déroulent à la Chancellerie et dans le cadre de forums organisés en cours d'appel : quatre forums se sont déjà tenus à Poitiers, Dijon, Lyon et Metz ; six autres seront organisés d'ici la fin de l'année. Au total, plus de 500 entretiens de carrière auront été conduits en 2008.

L'exploitation globale des informations recueillies à l'occasion des entretiens individuels permettra une meilleure connaissance des compétences et attentes des magistrats et une meilleure adéquation entre le profil du magistrat et le poste à pourvoir.

Les affectations des auditeurs de justice doivent évoluer parallèlement à la réforme de l'Ecole Nationale de la Magistrature applicable au 1 er janvier 2009 20 ( * ) .

En outre, le regroupement de certains tribunaux dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire et l'instauration des pôles de l'instruction contribuent d'ores et déjà à rompre l'isolement de certains magistrats.

->  Le lancement d'une réflexion sur l'évolution des métiers de la magistrature

Par ailleurs, dans le cadre de la réforme de l'Etat et de la modernisation du service public, la direction des services judiciaires a prévu d'installer en décembre 2008 un comité de réflexion sur l'évolution des métiers de la magistrature.

Ce « Comité emploi-compétences de la magistrature » a pour mission de procéder à un recensement des métiers de la magistrature et des compétences nécessaires, afin d'assurer une gestion rationnelle et prévisionnelle plus satisfaisante des emplois et des carrières des magistrats.

Le référentiel des emplois et des compétences de la magistrature qui sera élaboré dans les prochains mois devrait permettre une gestion des carrières plus cohérente. Il sera à la fois un outil à la disposition des chefs de cour et de juridiction pour l'évaluation des magistrats, un document de travail pour l'élaboration des projets de nominations de la Chancellerie, un guide pour les magistrats, ainsi qu'un outil à la disposition de l'Ecole Nationale de la Magistrature pour l'élaboration de ses programmes de formation.

La direction des services judiciaires a également engagé un plan d'action en lien avec l'Ecole Nationale de la Magistrature autour du recrutement, de la mobilité interne (fonctionnelle et géographique) et externe, de la promotion, de la formation continue et de la rémunération.

C. LE DÉVELOPPEMENT DE NOUVELLES APPLICATIONS INFORMATIQUES ET DE L'UTILISATION DES MOYENS VIDEOS

1. Un important effort de développement informatique

L'informatique des services judiciaires est financée sur les crédits de fonctionnement du programme « Justice judiciaire » et sur les crédits de fonctionnement du programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice ».

Les dépenses en matière informatique financées par le programme « Justice judiciaire » se sont élevées, en 2007, à 12,3 millions d'euros.

Dans le cadre du plan de développement des nouvelles technologies au sein des services judiciaires lancé le 20 juin 2007 par la garde des sceaux, l'ensemble des cours d'appel et des tribunaux de grande instance a été doté au 31 décembre 2007 d'au moins un outil de numérisation des procédures pénales (NPP). Cet outil permet aux juridictions de numériser leurs dossiers et de classer les procédures au sein d'un système de gestion électronique de documents. Mme Rachida Dati, ministre de la justice, a expliqué lors de son audition que la numérisation permettrait aux greffiers qui étaient naguère accaparés par la photocopie des dossiers de se consacrer à leur véritable métier. La numérisation facilite par ailleurs la transmission des dossiers, désormais possible par voie électronique.

L'outil de numérisation et de gestion électronique des documents doit être relié avec le nouveau logiciel Cassiopée, lorsque cette application aura été déployée dans les juridictions, à partir de 2010.

Les dépenses prévisionnelles au titre de l'année 2008, sont évaluées à environ 12 millions d'euros. Ces dépenses sont essentiellement destinées à financer le renouvellement des postes de travail. Le niveau de dépenses devrait être identique en 2009.

Sans recenser la multitude d'applications informatiques utilisée par les services judiciaires, votre rapporteur souhaite examiner les applications en cours de développement, auxquelles la Chancellerie accorde une importance particulière. Les magistrats rencontrés à la cour d'appel et au tribunal de grande instance de Rouen ont notamment salué l'utilité de la base de données Jurica, qui regroupe l'ensemble des décisions de la Cour de cassation et des cours d'appel.

Mais c'est actuellement le logiciel Cassiopée qui mobilise plusieurs juridictions pilotes à Angoulême, Bordeaux, Caen et Rouen .

En effet, le logiciel Cassiopée doit remplacer les applications pénales vieillissantes actuellement en fonctionnement au sein des tribunaux de grande instance et des cours d'appel. Le périmètre de Cassiopée correspond à la gestion de l'ensemble du contentieux pénal des TGI et des cours d'appel, y compris l'assistance éducative du juge des enfants, à l'exception du domaine de l'application des peines. Elle aura donc vocation à remplacer à terme les applications mini et micro pénale, NCP (nouvelle chaîne pénale), WINEURS, WINSTRU et INSTRU 21 ( * ) .

Cette application se trouve au début de sa phase d'implantation. A ce jour, elle est installée au TGI d'Angoulême et dans les TGI des cours d'Appel de Caen et de Rouen. Elle devrait être mise en place au TGI de Bordeaux en janvier 2009.

Selon la Chancellerie, son implantation dans les 175 TGI cibles devrait être achevée à la fin de l'année 2009.

Les juridictions parisiennes équipées de la nouvelle chaîne pénale (NCP) ainsi que les juridictions des départements et des collectivités d'outre-mer ne font pas partie des TGI cibles en raison d'études techniques supplémentaires (reprises de données sur la nouvelle chaîne pénale et problème de liaison et de décalage horaire pour la bascule de sauvegarde des serveurs pour les juridictions d'outre mer).

Le cahier des charges prévoit une communication de Cassiopée (par échange de données structurées) avec plusieurs applications :

- APPI (application des peines, probation et insertion) dès septembre 2008 ;

- le Casier Judiciaire (demande de bulletins n°1 et envoi des données des pièces d'exécution) entre octobre 2008 et mars 2009 ;

- les logiciels police et gendarmerie (Ardoise sous réserve de démarrage effectif de cette application, Icare et Ariane) courant 2009 ;

- le Trésor public (bordereaux d'amendes) courant 2009 ;

- MINOS 22 ( * ) courant 2009 ;

- le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles (FIJAIS) et le système national des permis de conduire (SNPC), fin 2009.

Il est prévu à moyen terme des échanges avec les logiciels de la protection judiciaire de la jeunesse (GAME) et de la direction de l'administration pénitentiaire (GIDE nouvelle génération).

Compte tenu du périmètre étendu du logiciel (parquet dont exécution des peines, juge d'instruction, juge des libertés et de la détention, juge des enfants, scellés), il est prévu un dispositif de formation et d'accompagnement sur site :

- une formation de 5 jours pour chaque personnel de greffe pénal (et des magistrats volontaires) assurée par la société Atos Origin et supervisée par l'équipe implantation du projet ;

- une formation d'une demi-journée pour les magistrats (consultation du Bureau d'ordre national) ;

- une assistance sur site de 15 jours pour les sites des cours d'appels de Caen et Rouen et le tribunal de grande instance de Bordeaux, et de 8 jours pour les autres tribunaux de grande instance, assurée par un ou plusieurs intervenants de la société Atos et un ou plusieurs intervenants de l'équipe implantation ministère (greffiers et greffiers en chefs), selon la taille de la juridiction ;

- une aide en ligne et un didacticiel (32 leçons interactives) sont intégrés dans le logiciel ;

- une assistance téléphonique sera assurée par la société Atos Origin en support des utilisateurs, en plus d'une cellule support organisée au sein du projet pour les questions « métier ».

- l'ENG et l'ENM disposeront d'une base de formation Cassiopée pour leurs élèves, tant en formation initiale que continue.

Lors de sa visite à la cour d'appel et au tribunal de grande instance de Rouen, votre rapporteur a pu constater que la mise en place de l'application Cassiopée perturbait le bon fonctionnement de cette juridiction pilote.

En effet, la réception de cette nouvelle application, reportée à trois reprises, a fait apparaître d'importantes difficultés techniques, en particulier en matière de reprise des données des applications préexistantes. L'application, ne reprenant pas certaines données, pouvait ainsi faire apparaître que les personnes détenues avaient disparu.

Pour pallier cette carence grave, les greffiers seraient conduits à reprendre la totalité des 580 dossiers en stock, à raison d'une demi-journée à trois jours de traitement par dossier en fonction de son volume. Il apparaît donc que cette saisie ab initio ne peut être entreprise.

L'application Cassiopée mise en place dans cette juridiction pilote apparaissant incomplète, les magistrats et fonctionnaires subissent une phase de test. Aussi les services doivent-ils continuer à entrer des données sur les anciens modules informatiques, qui offrent toute satisfaction, et mettre à jour les données de Cassiopée afin de poursuivre le test. Cette expérience est vécue comme une régression par les services, qui consacrent une grande partie de leur temps à régler les difficultés que pose Cassiopée.

Votre rapporteur estime qu'il convient d'apporter aux juridictions pilotes tout le soutien logistique nécessaire lorsqu'elles sont confrontées à la mise en place d'une nouvelle application de cette ampleur. A fortiori, il serait souhaitable que cette mise en place n'intervienne qu'au moment où la fiabilité de la nouvelle application paraît suffisamment assurée.

2. L'utilisation des moyens vidéos dans les juridictions

La loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale a rendu obligatoire :

- à compter du 1 er juillet 2007 l'enregistrement des auditions des mineurs se déclarant victimes de l'une des infractions visées à l'article 706-47 du code de procédure pénale (délits et crimes de nature sexuelle), tant au cours de l'enquête que de l'instruction ;

- à compter du 1 er juin 2008 l'enregistrement par le juge d'instruction des interrogatoires en matière criminelle.

Ces mesures sont entrées en vigueur à budget constant.

Compte tenu des contraintes relatives à la procédure de marché public, les juridictions se sont vu proposer, dans un premier temps, l'acquisition d'une solution légère, à raison d'un matériel au minimum par tribunal, de façon à répondre à l'application des textes au 1 er juillet 2007.

Ainsi 213 équipements légers comprenant un ordinateur portable, une caméra vidéo (webcam) un micro et un graveur de disque, ont été fournis aux juridictions, pour un coût total de 213.000 euros.

Un groupe de travail a par la suite arrêté une solution technique unique pour l'ensemble des juridictions, répondant aux contraintes de confidentialité, de simplicité et de fiabilité. Le matériel retenu est constitué d'une caméra, d'un écran et d'un multiplexeur enregistreur graveur numérique, d'un coût unitaire de 3.425 euros TTC pour les juridictions de métropole et de 5.265 euros TTC pour celles d'outre-mer, compte tenu, selon la Chancellerie, de coûts majorés de formation et de livraison, ainsi que des taxes spécifiques.

Par dépêche en date du 18 janvier 2008, les cours d'appel ont été invitées à faire connaître leurs besoins en matériel d'enregistrement audiovisuel, en tenant compte d'une part des équipements « légers » acquis en 2007 pour les juges des enfants. Les cours ont été incitées à prendre en considération la création des pôles de l'instruction et à envisager la mutualisation des appareils, par exemple en les plaçant dans des salles dédiées à leur utilisation.

Au mois de juillet 2008, les 588 stations commandées pour les cabinets de juges, dont 406 cabinets d'instructions, ont été livrées sur les 168 sites recensés par les cours, pour un montant total de 2.089.088 euros. Aucun crédit n'a été octroyé pour l'aménagement de salles d'enregistrement, les auditions étant réalisées dans le cabinet du juge.

La Chancellerie considère avoir mis l'ensemble des juges en situation d'appliquer la loi, en raison de la possibilité de mutualisation des appareils, que ce soit entre les cabinets des juges pour enfants ou entre les cabinets des juges pour enfants et des juges d'instruction.

Ainsi, selon les données transmises par les cours d'appel lors du recensement des besoins, sur un effectif de 1.028 juges concernés à la date du 1 er janvier 2008, dont 583 juges d'instruction et 445 juges pour enfants, il apparaît que les premiers disposent de plus de deux appareils pour trois magistrats et les juges des enfants d'un peu plus d'un appareil pour deux, soit des taux d'équipement respectifs de 88 % et 59 %.

Pour le ministère de la justice, les équipements livrés au cours des années 2007 et 2008 permettent aux magistrats concernés de travailler de manière satisfaisante, dans le respect des textes. Par conséquent, aucun crédit spécifique n'a été prévu en 2009. Les cours d'appel qui souhaiteraient acquérir du matériel supplémentaire devront le faire figurer dans leurs demandes budgétaires, au même titre que les autres dépenses de fonctionnement.

Lors de sa visite au tribunal de grande instance de Rouen, votre rapporteur a observé que les cinq cabinets d'instruction en fonctionnement, auxquels il convient d'ajouter un cabinet de juge d'instruction non pourvu, ne disposaient que de deux stations d'enregistrement vidéo reçues en 2008.

Trois des cinq cabinets d'instruction en fonctionnement sont donc conduits à utiliser le dispositif léger. Constitué d'un caméscope à l'autonomie limitée, ce dispositif conduit le juge à interrompre fréquemment l'interrogatoire afin de remplacer le disque gravé par un disque vierge. Par ailleurs, les stations livrées en 2008 n'ont pu être mutualisées, le tribunal ne disposant d'aucune salle qui pourrait être affectée à cet usage.

Toutefois, les juges d'instruction ont expliqué que les stations livrées en 2008 ne perturbaient aucunement le déroulement des interrogatoires, le dispositif, discret, étant rapidement oublié par les personnes mises en examen. Ils considèrent que le recours à l'enregistrement, qui permet d'observer l'attitude générale des personnes, est un élément positif pour l'instruction.

* 19 Rapport fait au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale par la mission d'information sur le recrutement et la formation des magistrats de carrière, n° 383 (2006-2007). http://www.senat.fr/noticerap/2006/r06-383-notice.html

* 20 Cette réforme introduit notamment le tutorat pendant les premières années de fonction et le stage de changement de fonction a été redéfini dans son contenu et sa durée.

* 21 Le domaine judiciaire pénal est composé des applications de la chaîne pénale micro-pénale, mini-pénale (pour les 174 tribunaux de grande instance de province), et NCP (nouvelle chaîne pénale pour les 7 parquets des tribunaux de grande instance de la région parisienne), ainsi que des applications destinées aux juges d'instruction (WINSTRU-INSTRU) et aux juges des enfants (WINEURS).

* 22 L'application pénale MINOS, développée dans le cadre du projet interministériel pour le contrôle automatisé, assure la gestion des procédures des tribunaux de police. Cette application s'inscrit dans le cadre du système informatique de contrôle automatisé permettant des échanges de données structurées entre les services judiciaires et les services des officiers du ministère public d'une part et les services des trésoreries générales d'autre part, ce qui évite autant de saisies manuelles au greffe de police tant en amont de la procédure lors de l'engagement des poursuites par l'officier du ministère public, qu'en aval de la procédure pour la mise à exécution des sanctions pécuniaires.

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