C. LES PERSPECTIVES DE FINANCEMENT DE L'AEFE SUR LES PROCHAINES ANNÉES SONT PRÉOCCUPANTES

1. Le coût croissant de la prise en charge des cotisations patronales des personnels détachés

Le décret n°2007-1796 du 19 décembre 2007 a transféré à l'AEFE la part des cotisations patronales de pensions des personnels détachés, dont l'Agence était auparavant exonérée.

Depuis le 1 er janvier 2009, l'AEFE doit donc assurer la prise en charge au titre de la pension civile des personnels civils de l'Etat.

Pour compenser le transfert de cette charge, l'Etat avait prévu d'allouer à l'AEFE une dotation annuelle supplémentaire d'un montant de 120 millions d'euros en 2009, 2010 et 2011.

Or, la part patronale des pensions des personnels détachés, pour un coût estimé à 126 millions d'euros pour 2009, devrait fortement augmenter en 2010 et 2011, sous l'effet de la hausse des taux de cotisations (passant de 60% en 2009 à 66% en 2010 et 71% en 2011), pour atteindre 143 millions d'euros en 2010 et 153 millions d'euros en 2011. A dotation constante, ce transfert aurait engendré des surcoûts de respectivement 23 et 33 millions d'euros, comme l'illustre le tableau suivant :

Source : AEFE

2009

2010

2011

Coût de la pension civile estimé en vue du PLF 2009 au printemps 2008

126,5

143

153,02

Montant de la compensation basé au PLF 2009 dans la subvention du programme 185

120

120

120

Écart en valeur

6,5

23

33,02

Écart en %

5,14%

18,18%

26,10%

L'augmentation de la dotation à l'AEFE pour 2010 sera donc largement insuffisante pour couvrir le surcoût de la prise en charge de la part patronale des pensions des personnels détachés (estimée à 23 millions d'euros pour 2010).

Votre rapporteur pour avis continue de penser que l'Etat devrait compenser intégralement le transfert de cette charge à l'AEFE.

Le coût de cette prise en charge a, en effet, été intégralement compensé par l'Etat pour les établissements situés en France.

2. Le coût exponentiel de la prise en charge des frais de scolarité des élèves français

En 2009, la dotation au titre de l'aide à la scolarité des élèves français (bourses scolaires et prise en charge des frais de scolarité) s'est élevée à 85,6 millions d'euros dans le cadre de la loi de finances pour 2009 et a été ramenée, après application de la réserve de précaution, à 81,82 millions d'euros.

Or, pour l'année scolaire 2009, les besoins sont à ce jour estimés à 87,02 millions d'euros (58,83 millions d'euros au titre des bourses scolaires et 28,19 millions d'euros au titre de la prise en charge), soit un écart de près de 6 millions d'euros.

Pour 2010, le montant de la dotation devrait s'élever à 106,2 millions d'euros , soit une augmentation de 20 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale de 2009. Elle devrait passer à 126,9 millions d'euros pour l'exercice 2011.

Au titre des années scolaires 2008 (pays du rythme sud) et 2008/2009 (pays du rythme nord) 19 844 élèves français (hors classes ouvrant droit au dispositif de la prise en charge) ont bénéficié d'une bourse scolaire pour un montant de 54,44 millions d'euros, soit un coût moyen de 2 744 euros. S'ajoute à ce montant le coût des bourses parascolaires aux élèves boursiers scolarisés dans les classes ouvrant droit à prise en charge : 1,36 million d'euros, soit au total 55,80 millions d'euros.

Au titre des années scolaires 2009 (pays du rythme sud) et 2009/2010 (pays du rythme nord, chiffres provisoires après 1ère commission nationale), le nombre de boursiers s'établit à 17 850 pour un montant de 56,27 millions d'euros soit un coût moyen de 3 152 euros (+ 14,87 %). A ce montant s'ajoute le coût des bourses parascolaires pour les 2 950 boursiers pris en charge : 2,59 millions d'euros, soit au total 58,86 millions d'euros .

Sur cette base, les besoins au titre de l'exercice budgétaire 2010 sont estimés à 115,7 millions d'euros pour une dotation fixée à ce jour à 106,2 millions d'euros, soit un écart de près de 10 millions d'euros .

Dans ce contexte, et compte tenu de l'augmentation du nombre de demandes, de la crise internationale, des parités entre monnaies moins favorables à l'euro, des mesures de régulation paraissent inévitables.

D'ores et déjà, l'AEFE a annoncé que les dispositions suivantes vont être mises en oeuvre à la rentrée 2010 :

- les dossiers déposés hors délais seront désormais jugés irrecevables ;

- la part du revenu disponible des familles affectée aux frais de scolarité (coefficient k) progresse de 5 % ;

- pour les fratries éligibles aux deux dispositifs d'aide à la scolarité, les droits à bourse seront calculés en excluant le montant des frais couverts par la prise en charge ;

- le montant de la prise en charge dans les établissements privés homologués est cristallisé sur la base des tarifs en vigueur lors du lancement de la réforme présidentielle ;

- lorsque les contrôles sur l'utilisation des bourses parascolaires laissent apparaître leur inutilité il sera mis fin à leur versement.

L'augmentation des besoins en financement des bourses est largement due à la prise en charge des frais de scolarité des élèves français, voulue par le Président de la République.

L'AEFE s'est organisée rapidement pour permettre le démarrage de cette mesure dès la rentrée scolaire de 2007 pour les élèves de terminale. Ainsi, 1 270 élèves de terminale ont bénéficié de la prise en charge en 2007-2008, plus 826 qui étaient déjà bénéficiaires d'une bourse avant la réforme, soit un total de 2 096 élèves de terminale.

Lors de la rentrée scolaire 2008-2009, le dispositif a été étendu aux classes de première, puis aux classes de seconde à partir de la rentrée 2009.

Sur un montant total de 67,2 millions d'euros consacré aux bourses scolaires en 2008, le coût de la prise en charge des frais de scolarité des élèves français des classes de terminale et de première a donc représenté au total 14,7 millions d'euros en 2008, soit un montant conforme aux prévisions.

Le bilan de la prise en charge stricto sensu (hors demandes de bourses des élèves scolarisés dans des classes ouvrant droit à prise en charge) s'établit à ce jour comme suit :

Période

Nombre de dossiers déposés

Nombre de dossiers acceptés

Montant total accordé

2007/2008 (rythme nord)

1 514

1 271

4,46 M€

2008 (rythme sud)

154

132

0,49 M€

2008/2009 (rythme nord)

4 049

3 366

13,02 M€

2009 (rythme sud)

300

273

1,17 M€

2009/2010 (rythme nord, après 1 ère CNB)

6 038

5 281

22,99 M€

Au total, le coût de la prise en charge des frais de scolarité des élèves français s'élève donc à plus de 42 millions d'euros .

Le bilan global de la prise en charge (demandes de prise en charge et demandes de bourses scolaires présentées au bénéfice d'élèves scolarisés dans des classes ouvrant droit à prise en charge) s'établit à ce jour comme suit :

Période

Nombre de dossiers déposés

Nombre de dossiers acceptés

Montant total accordé

2007/2008 (rythme nord)

2 398

2 097

6,72 M€

2008 (rythme sud)

286

254

0,91 M€

2008/2009 (rythme nord)

5 877

5 041

17,62 M€

2009 (rythme sud)

518

482

2,03 M€

2009/2010 (rythme nord, après 1 ère CNB)

8 671

8 137

31,68 M€

Cela représente donc un montant de 58,9 millions d'euros .

On constate que :

- le nombre d'inscription d'élèves français dans les classes de lycées augmente sensiblement (+ 8% lors de la dernière rentrée scolaire) et davantage que le nombre d'élèves, sans qu'il soit encore possible à ce stade d'affirmer que cette augmentation est due à l'instauration de la gratuité ;

- de plus en plus de familles déposent un dossier en régularisation en cours d'année, rendant le chiffrage prévisionnel incertain ;

- plusieurs employeurs privés se désengagent du paiement des frais de scolarité des enfants de leurs expatriés. Cela concerne en particulier les entrepreneurs individuels qui imputaient jusqu'à présent les frais de scolarité de leurs enfants sur les comptes de leur société. Pour les grandes entreprises, le désengagement reste limité même s'il apparaît progressivement s'étendre.

Votre rapporteur pour avis ne reviendra pas ici sur les nombreux effets pervers de cette mesure, comme l'éviction des élèves étrangers ou l'effet d'aubaine pour les entreprises, qu'il avait longuement présentés dans ses précédents avis budgétaires.

Il constate simplement que la généralisation de cette mesure à toutes les classes, telle que souhaitée par le Président de la République, ne paraît tout simplement pas soutenable sur le plan budgétaire.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées, puis le Sénat à une large majorité, et contre l'avis du gouvernement, avait adopté, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2009, un amendement visant, d'une part, à prévoir un plafonnement de cette prise en charge, et, d'autre part, à instaurer un « moratoire », selon lequel une éventuelle extension de la prise en charge au-delà des classes de lycées devrait être précédée d'une étude d'impact transmise au Parlement précisant notamment les modalités de son financement.

Si le principe du plafonnement avait été écarté par le Gouvernement lors d'une seconde délibération, en revanche, le principe du « moratoire » a bien été inscrit dans la loi de finances pour 2009 (article 133) et continue donc de s'appliquer.

Ayant dès l'annonce de cette mesure, dénoncé ses effets pervers, comme l'éviction des élèves étrangers ou le désengagement des entreprises, votre rapporteur pour avis constate que, aujourd'hui, tout le monde ou presque s'accorde sur la nécessité d'encadrer cette mesure.

Un large consensus s'est exprimé à ce sujet lors des états généraux de l'enseignement français à l'étranger, qui se sont tenus à Paris le 2 octobre 2008, et le ministre des Affaires étrangères et européennes, M. Bernard Kouchner, a lui-même appelé plusieurs fois de ses voeux un réexamen de cette mesure.

Toutefois, même s'il s'agit d'un moindre mal, votre rapporteur pour avis s'interroge sur l'idée fréquemment avancée d'un double plafonnement de cette mesure , en fonction des revenus des familles et en fonction du montant des droits de scolarité.

A titre personnel, votre rapporteur pour avis reste convaincu qu'il serait préférable de se fonder sur les critères sociaux comme pour la délivrance des bourses, qui reposent sur les revenus nets des familles, ce qui permet de tenir compte des différences de niveau de vie entre les pays, et il continue de plaider pour l'affectation des ressources disponibles aux bourses sur critères sociaux et à la politique immobilière de l'agence, qui bénéficient à toutes les familles.

C'était d'ailleurs la position exprimée par le président de la Fédération de parents d'élèves des établissements d'enseignement français à l'étranger (FAPEE), M. François Denis, dans sa lettre adressée en 2007 au Président de la République :

« Il nous semble certainement préférable que l'on utilise le montant qu'aurait représenté la mise en oeuvre d'une mesure générale, soit un maximum de 50 millions d'euros, soit plutôt utilisé au moins jusqu'à hauteur d'environ 20 millions pour abonder le budget des bourses pour l'ensemble des cycles, en en assouplissant les critères d'attribution, permettant ainsi de mieux répondre aux grandes difficultés des nombreuses familles qui ne peuvent aujourd'hui en avoir le bénéfice, dans le souci, que nous partageons, qu'aucun enfant français ne soit écarté de l'enseignement français pour des raisons financières. Les besoins de l'enseignement français à l'étranger, notamment en matière immobilière, sont tels que le reste du montant pourrait aisément y trouver son meilleur emploi ».

C'est également le sens de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2010, présenté par le député François Rochebloine, au nom de la commission des Affaires étrangères.

Cet amendement prévoit, en effet, un transfert de crédits à hauteur de 10 millions d'euros prélevés sur l'enveloppe destinée au financement des bourses et à la prise en charge des frais de scolarité pour abonder les crédits destinés au programme immobilier de l'agence.

Ce transfert serait rendu possible par la mise en oeuvre, par l'AEFE et sa tutelle, d'un plafonnement à fixer par voie réglementaire en fonction des revenus bruts des familles selon un barème variable par pays de résidence, sur le même modèle que celui appliqué aux bourses ordinaires.

Tout en partageant le souci des députés d'encadrer la prise en charge des frais de scolarité et d'augmenter les crédits consacrés à l'immobilier, votre rapporteur pour avis s'interroge sur les effets de cette diminution de 10 millions d'euros des crédits destinés aux bourses sur critères sociaux et à la prise en charge des frais de scolarité, alors que la dépense prévue est de 114 millions d'euros et que l'administration durcit les critères d'attribution des bourses sur critères sociaux. N'aurait-il pas été préférable d'instaurer un tel plafonnement tout en consacrant l'ensemble des économies ainsi dégagées aux bourses sur critères sociaux ?

3. La politique immobilière de l'agence risque de servir de variable d'ajustement

Jusqu'en 2005, les biens occupés par les établissements scolaires français à l'étranger en gestion directe (EGD) étaient gérés par l'Etat. Avec deux décrets du 23 décembre 2003 et du 19 mai 2005, l'AEFE s'est vue reconnaître la possibilité d'engager des opérations immobilières en biens propres et de recevoir en dotation les biens appartenant à l'Etat. Pour assurer cette compétence, l'Agence a créé en 2005 un service immobilier qui comprend désormais six agents basés à Paris.

La problématique immobilière repose de l'agence sur les deux impératifs suivants :

- rénover le patrimoine existant qui est longtemps resté sans entretien, ce qui impose d'importants travaux de mise aux normes et d'adaptation des infrastructures,

- accompagner le développement du réseau du fait de l'augmentation sensible des effectifs des élèves à chaque rentrée scolaire (près de 20 000 élèves en quatre ans), ce qui rend nécessaire la réalisation de nouvelles installations dans le cadre de projets d'extension ou de relocalisation.

L'Agence a ainsi engagé depuis 2005 un programme ambitieux d'opérations immobilières de constructions neuves (Munich, Dakar, Ho Chi Minh ville, Ankara, Le Caire, Alger, Pékin, Amman, etc.) ou d'extension de sites existants (Londres, Madrid, Francfort, Tananarive, Vienne, etc.).

Au titre du transfert de gestion des biens de l'Etat, elle s'est vue remettre en dotation jusqu'ici douze sites pour lesquels elle a engagé de vastes programmes de remise à niveau (Bruxelles, Valence, Barcelone, Lisbonne, Buenos Aires, Vienne, etc.).

Enfin l'Agence a participé au développement des établissements conventionnés en subventionnant leurs projets immobiliers et en se portant acquéreur des terrains devant accueillir les nouvelles constructions, comme à Brasilia et bientôt à Panama, Vientiane, Bogota et Abidjan.

Ces opérations représentent depuis 2005 un montant total d'environ 200 millions d'euros. Les financements nécessaires ont pu être réunis du fait d'une importante participation de l'Agence à ces projets, le complément nécessaire étant assuré par des emprunts dont le remboursement, à la charge des établissements bénéficiaires et donc des parents d'élèves, a supposé une hausse sensible des droits de scolarité.

Cette politique ambitieuse n'a été rendue possible que par une adaptation du rythme des remises en dotation des biens de l'Etat. En effet, en quatre ans, seule une douzaine d'établissements sur les 138 sites recensés a été transférée à l'Agence, soit un patrimoine d'environ 90 000 m² sur un total de près de 490 000 m 2 . Les sites retenus pour ces remises en dotation n'étaient en outre pas les plus coûteux à reprendre en gestion.

Liste des établissements dont l'Agence a reçu la gestion immobilière « en dotation »

Les établissements remis en dotation à l'agence sont les suivants :

En 2006 :

- lycée français de Barcelone,

- lycée français Jean Monnet de Bruxelles,

- lycée français Jean Mermoz de Buenos Aires,

- lycée français Jean Mermoz de Dakar,

- lycée français de Francfort,

- lycée français Charles Lepierre de Lisbonne,

- lycée français de Valence,

- lycée français de Vienne.

En 2008 :

- école Saint-Exupéry à Madrid

- lycée français de Tananarive

- le terrain destiné à la construction du nouveau lycée français du Caire

- le site de l'ancienne école Max Marchand à Alger.

Source : AEFE

Le décret n°2008-1248 du 1 er décembre 2008 relatif à l'utilisation des immeubles domaniaux a supprimé la procédure d'attribution à titre de dotation au profit des établissements publics et l'a remplacée par un nouveau régime de conventions d'utilisation par lesquelles l'Etat met à la disposition des établissements publics des immeubles domaniaux. Ces conventions conclues pour une durée limitée déterminent les obligations de l'utilisateur, notamment en ce qui concerne l'entretien de l'immeuble et les travaux à réaliser.

La mise en place de cette nouvelle règlementation, qui doit être effective dans un délai de cinq ans mais que France Domaine souhaite mener rapidement, pourrait conduire, dans un délai rapproché, à un transfert à l'AEFE de la gestion de la totalité des établissements scolaires français à l'étranger.

Cette hypothèse avait été examinée en 2006 dans le cadre de l'audit de modernisation sur la compétence immobilière de l'AEFE effectué sur proposition du ministère des Affaires étrangères et européennes par un contrôleur général économique et financier et par un inspecteur général des affaires étrangères (rapport Autié - Kahn).

Dans leur rapport, les auditeurs avaient conclu à un besoin de financement de l'Agence évalué à environ 240 millions d'euros pendant les premières années de gestion, se décomposant en 100 millions d'euros pour le financement de projets de rénovation du patrimoine existant (dans l'hypothèse d'une remise en dotation à l'Agence de l'ensemble des biens appartenant à l'Etat) et en 140 millions d'euros pour le financement des projets de construction neuve.

Les besoins annuels étaient estimés à 50 millions d'euros les premières années, puis à 30 millions d'euros les années suivantes.

Les principales recommandations de cette mission étaient les suivantes :

- étendre les compétences immobilières de l'agence aux immeubles des établissements conventionnés et homologués appartenant à l'Etat ;

- accompagner le transfert de charges par le transfert de ressources correspondantes et consacrer les prélèvements sur le fonds de roulement à des opérations d'investissements ;

- créer un budget annexe au budget général de l'AEFE pour sécuriser le financement et assurer la transparence de la programmation pluriannuelle des opérations immobilières.

L'AEFE a investi 56,35 millions d'euros en 2006 et 39,85 millions d'euros en 2007, soit au total 96,2 millions d'euros pour sa politique immobilière.

Pour sa part, le ministère des Affaires étrangères avait investi en 2006, 2007 et 2008 respectivement 10 millions d'euros, 9 millions d'euros et 8 millions d'euros, soit au total 27 millions d'euros dans ces opérations immobilières.

On reste donc loin de l'objectif fixé par la mission d'audit de modernisation, qui était de 48 millions d'euros par an.

L'expérience acquise depuis cet audit, notamment dans la gestion des sites remis en dotation, permet d'avancer que l'estimation des travaux de remise en état des sites remis en dotation est sous évaluée. A titre indicatif, les travaux de rénovation des établissements de Barcelone, Bruxelles, Lisbonne, Valence et Vienne ont représenté une dépense de plus de 20 millions d'euros alors qu'ils ne concernent que cinq sites sur les 81 sites recensés. Quant aux projets de relocalisation, le montant estimé pourrait s'avérer insuffisant si le réseau continue de progresser au rythme de ces dernières années.

Enfin, s'agissant des dotations pour amortissement, l'évaluation du patrimoine qui serait transférée à l'Agence est d'environ 700 millions d'euros. L'obligation d'amortir ces biens conduira à une dotation budgétaire aux amortissements d'au moins 14 millions d'euros par an.

Il faut donc considérer que le chiffre avancé par les auditeurs de 50 millions d'euros pendant deux ans, puis 30 millions d'euros par an, est probablement sous évalué, pour toutes les raisons évoquées précédemment et notamment la non prise en compte des amortissements dans cette estimation.

L'Agence a pu jusqu'à présent financer les opérations immobilières car elle disposait de réserves financières qu'elle avait constituées dans la perspective de ces investissements.

Aujourd'hui, l'Agence n'a plus les ressources suffisantes pour assurer seule la nouvelle charge liée au transfert de la totalité du patrimoine des établissements scolaires appartenant à l'Etat. De la même façon, ces établissements, à qui un important effort a déjà été demandé pour compenser les nouvelles charges de l'Agence, notamment la part patronale des pensions civiles, ne pourront financer ces projets, sauf à devoir augmenter les droits d'écolage au-delà du raisonnable.

L'Agence ne pourra donc assurer cette nouvelle charge que si des mesures d'accompagnement sont prises pour lui permettre d'entretenir correctement ce patrimoine.

Ces mesures devront concerner :

- un transfert de moyens financiers au profit de l'Agence, pour un montant annuel de 30 à 50 millions d'euros, au moins les premières années ;

- la garantie de loyers nuls sur les biens transférés.

Sans de telles mesures, l'Agence se verra transférer la charge d'un patrimoine vétuste qu'elle ne pourra remettre à niveau, ce qui la placera, sur le plan des responsabilités, dans une situation d'une grande fragilité, et sur le plan de l'image, en situation de faiblesse manifeste vis-à-vis des établissements anglo-saxons qui disposent généralement d'installations performantes et entretenues.

La programmation pluriannuelle (2006-2010) en matière de crédits d'investissements immobiliers, votée par le Conseil d'administration de l'agence le 9 mai 2009, porte sur un montant total de 233 millions d'euros sur cinq ans. Pour 2010, l'agence prévoit de consacrer 60 millions à ses programmes d'investissement immobiliers.

Or, l'agence ne pourra plus comme par le passé compter sur son fonds de roulement puisque celui-ci a fortement diminué ces dernières années, passant de 75 millions d'euros en 2005 à 45 millions d'euros en 2009.

Le fonds de roulement pour les services centraux de l'Agence devrait être de 18,9 millions d'euros, ce qui ne représente que 11 jours de fonctionnement.

Le fonds de roulement de l'AEFE

En application des dispositions du décret n° 2003-1288 du 23 décembre 2003 relatif à l'organisation administrative, budgétaire et comptable de l'AEFE, le fonds de roulement global de l'agence est constitué, depuis 2004, de l'agrégation du fonds de roulement des services centraux et des fonds de roulement des 35 groupements de gestion comptable des établissements en gestion directe. Toutefois, les fonds de roulements des établissements doivent être distingués de celui des services centraux car ils sont constitués localement par les frais de scolarité versés par les familles.

Il importe de bien mesurer que le fonds de roulement de chaque établissement est considéré par la communauté scolaire comme représentant les économies de l'établissement. Il n'y a donc pas de caractère d'unicité du fonds de roulement.

Le fonds de roulement des services centraux :

Ø Historique du fonds de roulement comptable au 31 décembre (en millions d'euros).

2002 : 12,47

2003 : 30,02

2004 : 60,63

2005 : 75,68

2006 : 56,77

2007 : 47,53

2008 : 45,13

Depuis 2002, l'abondement du fond de roulement est alimenté par les ressources propres des établissements, issues pour l'essentiel de la contribution des familles, pour une partie très minoritaire de contributions des entreprises ou des Etats hôtes. L'agence peut, sous contrainte forte, recourir à ses fonds propres afin de garantir l'équilibre de son fonctionnement. Dans le même temps, la montée en puissance de la politique immobilière et les besoins croissants de maintenance, de modernisation et d'accroissement du parc immobilier des lycées français à l'étranger conduisent l'agence à financer son investissement par prélèvement sur fonds de roulement.

Une enveloppe de crédit de 2,2 millions d'euros a été inscrite au budget pour 2009 pour financer le projet de construction sur un nouveau site pour le lycée français de Barcelone. Par ailleurs 23,864 millions d'euros de crédits immobiliers ont été reportés sur la gestion 2009 par prélèvement sur fonds de roulement. Il s'agit d'opérations prévues et non réalisées en 2008.

Les perspectives à fin 2009 laissent apparaitre un fonds de roulement pour le siège de l'Agence de 18,991 millions d'euros, ce qui représente 11 jours de fonctionnement.

Face à l'absence de transfert de moyens de la part de l'Etat pour la gestion de la politique immobilière, des projets de partenariats public/privé ont été lancés pour la construction de plusieurs établissements français à l'étranger mais il faut reconnaître qu'ils n'ont pas produit les résultats escomptés.

Ainsi, les leçons de l'échec du projet du Caire doivent être analysées afin de déterminer à quelles conditions ce mode de financement pourrait fonctionner.

On peut émettre l'hypothèse que seuls de très grands projets implantés dans des pays de l'OCDE ou émergents peuvent être négociés à des conditions suffisamment lucratives pour l'investisseur mais supportables par le budget de l'établissement et donc par les familles.

Dans ce contexte, votre rapporteur pour avis ne peut que s'interroger : L'AEFE pourra-t-elle faire face à ses obligations en matière immobilière sans augmenter les frais de scolarité ?

Afin d'attirer l'attention du gouvernement sur cette question, et sans se faire d'illusions sur le sort d'une telle proposition, votre rapporteur pour avis entend donc proposer un amendement prévoyant de transférer des crédits à hauteur de 10 millions d'euros prélevés sur les contributions internationales et destinés à abonder les crédits destinés au programme immobilier de l'agence.

4. La mise en place par l'AEFE d'une contribution de 6 % sur les droits de scolarité des établissements en gestion directe et conventionnés et de 2 % pour les établissements homologués

Pour faire face à l'accroissement de ses charges lié, au-delà de la prise en charge des pensions des personnels détachés, à l'expansion du réseau et à la compétence immobilière désormais exercée en propre par l'agence, l'AEFE a mis en place une contribution financière supplémentaire assise sur les frais de scolarité et les droits d'inscription perçus par les établissements. Cette contribution devrait être appliquée au taux de 6 % pour les établissements en gestion directe et conventionnés à compter du 1er septembre 2009 et de 2 % pour les établissements homologués à partir du 1er septembre 2010.

Votre rapporteur pour avis s'interroge sur la faisabilité juridique de cette mesure, notamment au regard du statut de certains établissements, sur son application indifférenciée à tous les établissements en gestion directe et conventionnés, sans tenir compte par exemple des investissements immobiliers, et sur la différence de traitement avec les établissements homologués, qui peut faire craindre une augmentation des procédures de déconventionnement, ce qui conduirait à un délitement progressif du réseau.

En outre, le produit de cette contribution sera en tout état de cause insuffisant pour couvrir les besoins liés à la politique immobilière de l'agence.

Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, cette contribution pourrait rapporter à l'AEFE environ 10 millions d'euros en 2009 (ce qui correspond à 3,5 % des droits de scolarité de 350 millions d'euros). En tenant compte de la contribution de 2 % sur les droits de scolarité des établissements homologués, cela représenterait sur deux ans un montant de 60 millions d'euros. Le produit de cette contribution devrait être affecté pour moitié aux investissements immobiliers dans le réseau. Avec 30 millions d'euros sur deux ans, on reste cependant loin des besoins immobiliers.

Enfin, cette mesure se traduira par une augmentation des frais de scolarité payés par les familles. Or, toute augmentation des frais de scolarité entraînera mécaniquement une hausse du coût pour l'Etat de la prise en charge des frais de scolarité des élèves français. C'est une spirale inflationniste infernale.

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