N° 103

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2009

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2010 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME VI

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

Par M. Paul BLANC,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : Mme Muguette Dini , présidente ; Mme Isabelle Debré, M. Gilbert Barbier, Mme Annie David, M. Gérard Dériot, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Raymonde Le Texier, Catherine Procaccia, M. Jean-Marie Vanlerenberghe , vice-présidents ; MM. Nicolas About, François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Gisèle Printz, Patricia Schillinger , secrétaires ; M. Alain Vasselle, rapporteur général ; Mmes Jacqueline Alquier, Brigitte Bout, Claire-Lise Campion, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mme Jacqueline Chevé, M. Yves Daudigny, Mme Christiane Demontès, M. Jean Desessard, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Guy Fischer, Mme Samia Ghali, MM. Bruno Gilles, Jacques Gillot, Adrien Giraud, Mme Colette Giudicelli, MM. Jean-Pierre Godefroy, Alain Gournac, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, M. Claude Jeannerot, Mme Christiane Kammermann, MM. Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Jacky Le Menn, Jean-François Mayet, Alain Milon, Mmes Isabelle Pasquet, Anne-Marie Payet, M. Louis Pinton, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, MM. René Teulade, François Vendasi, René Vestri, André Villiers.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 1946, 1967 à 1974 et T.A. 360

Sénat : 100 et 101 (annexe n° 30 ) (2009-2010)

Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour 2010

Programmes

Crédits de paiement (en euros)

Variation 2010/2009 (en %)

Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales

1 684 500 000

+ 189,1 %

Revenu de solidarité active (libellé modifié)

1 674 500 000

+ 9689,2 %

Expérimentation sociale et autres expériences en matière sociale et d'économie sociale (libellé modifié)

10 000 000

- 0 ,8 %

Généralisation du revenu de solidarité active (supprimée)

-

-

Actions en faveur des familles vulnérables

407 563 277

- 51,3 %

Accompagnement des familles dans leur rôle de parents

14 577 268

- 6,5 %

Soutien en faveur des familles monoparentales

164 210 000

- 72,7 %

Protection des enfants et des familles

228 776 009

+ 4,3 %

Handicap et dépendance

9 103 754 725

+ 5,5 %

Evaluation et orientation personnalisée des personnes handicapées

21 700 000

+ 45,9 %

Incitation à l'activité professionnelle

2 532 900 000

+ 2,3 %

Ressources d'existence

6 524 200 000

+ 6,8 %

Compensation des conséquences du handicap

17 154 725

- 5,7 %

Personnes âgées

2 000 000

- 19,0 %

Pilotage du programme

5 800 000

- 0,1 %

Egalité entre les hommes et les femmes

29 497 358

+ 1,3 %

Accès des femmes aux responsabilités et à la prise de décision

527 738

- 6,0 %

Egalité professionnelle

5 513 647

=

Egalité en droit et en dignité

10 563 718

+ 1,4 %

Articulation des temps de vie

168 113

=

Soutien du programme égalité entre les hommes et les femmes

12 724 142

+ 2,2 %

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

1 145 915 291

+ 5,5 %

Etat-major de l'administration sanitaire et sociale

63 047 403

+ 18,1 %

Statistiques, études et recherche

31 589 128

- 7,6 %

Gestion des politiques sociales

212 419 677

- 36,2 %

Gestion des politiques sanitaires

333 608 879

+ 3,2 %

Pilotage de la sécurité sociale

36 572 348

- 10,6 %

Soutien de l'administration sanitaire
et sociale

301 050 182

- 17,1 %

Financement des Agences régionales de santé (nouveau)

271 088 872

-

Total mission « Solidarité et intégration »

12 371 230 651

+ 10,8 %

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

A périmètre constant, les crédits de paiements de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » s'élèvent, pour 2010, à 12,37 milliards d'euros , soit une hausse de 10,8 % par rapport à 2009.

Celle-ci aurait dû être contenue à 4 %, la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2011 ayant fixé le plafond des engagements pour 2010 à 11,64 milliards d'euros. Son montant a été relevé de 735 millions, pour faire face aux conséquences de la crise économique et financière et, en particulier, à l'accroissement des dépenses relatives à certaines prestations sociales telles que :

- l'allocation de parent isolé (+ 41 millions) ;

- l'allocation aux adultes handicapés (+ 260 millions) ;

- le revenu de solidarité active (+ 434 millions).

A ces crédits s'ajoutent 11,9 milliards de dépenses fiscales , ce qui permet de doubler les moyens alloués aux actions conduites dans le cadre de cette mission et d'accorder des exonérations ou déductions fiscales aux familles aux revenus modestes et aux personnes âgées et handicapées.

Si la structuration de la mission et son périmètre demeurent, pour l'essentiel, inchangés, la répartition des crédits et l'équilibre entre les programmes sont profondément affectés par la mise en oeuvre, en année pleine, du revenu de solidarité active (RSA) en métropole, ainsi que par la réorganisation des administrations sanitaires et sociales et la création des agences régionales de santé (ARS).

La mission comporte cinq programmes , de poids très inégal, placés essentiellement sous la responsabilité du ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité et le Haut commissariat aux solidarités actives et à la jeunesse :

Le premier, « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales », permet la mise en oeuvre, en année pleine, du RSA, ce qui explique la forte augmentation des crédits (189 %) qui lui sont alloués en 2010.

Le deuxième, « Actions en faveur des familles vulnérables » , est constitué pour l'essentiel des dépenses relatives à la protection des majeurs et à l'allocation de parent isolé (API) dans les départements et territoires d'outre-mer, la généralisation du RSA en métropole ayant entraîné le transfert, depuis le 1 er juin 2009, de son financement aux conseils généraux. La réduction des crédits amorcée en 2009 se poursuit donc en 2010, avec le transfert, en année pleine, des dépenses correspondantes aux départements, ce qui conduit à reposer légitimement la question du sort réservé à ce programme pour la prochaine loi de programmation pluriannuelle.

Le programme « Handicap et dépendance » concentre à lui seul près des trois-quarts des crédits de la mission et bénéficie, encore cette année, d'une forte croissance qui confirme les engagements pris lors de la Conférence nationale du handicap du 10 juin 2008 par le Président de la République en faveur des personnes handicapées, en particulier avec la revalorisation du montant de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) de 25 % d'ici à 2012 et la création de places nouvelles dans les établissements et services d'aide par le travail (Esat).

Le quatrième programme « Egalité entre les hommes et les femmes » conserve une dotation modeste par rapport aux autres programmes, qui permet néanmoins la mise en oeuvre du plan triennal de lutte contre les violences faites aux femmes. Deux des actions de ce programme - « Articulation des temps de vie » et « Accès des femmes aux responsabilités et à la prise de décision » -, dotées de crédits très faibles, pourraient être intégrées dans l'action « Egalité professionnelle », qui recouvre des objectifs communs.

Enfin, le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » , qui regroupe les moyens des administrations de la santé et du secteur médico-social, est doté de moyens en hausse de 5,5 %. Leur répartition est marquée par la réorganisation des administrations sanitaires et sociales qui résulte de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et la mise en place des nouvelles agences régionales de santé (ARS).

Dans un contexte économique et budgétaire contraint, ce budget marque la volonté du Gouvernement de renforcer les efforts de la Nation en faveur de nos concitoyens les plus démunis et les plus fragiles.

I. UNE RÉPARTITION DES CRÉDITS MARQUÉE PAR LA MISE EN oeUVRE DU RSA EN ANNÉE PLEINE

La loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion a prévu la mise en oeuvre du revenu de solidarité active (RSA) en métropole à compter du 1 er juin 2009.

Ainsi, depuis cette date, le RSA remplace le RMI, l'API et les dispositifs de soutien à la reprise d'activité (primes forfaitaires mensuelles et prime d'intéressement) liés à ces deux prestations. Il joue dans ce cas le rôle de revenu minimum et on parle alors de RSA socle (ex-RMI et ex-API) en distinguant, le cas échéant, le RSA socle majoré (ex-API).

Le RSA est également versé à des personnes en activité, mais dont les revenus sont trop faibles par rapport à leurs charges familiales. Il peut être alors considéré comme un complément de revenu et on parle de RSA chapeau ou de RSA activité .

Il revient désormais aux conseils généraux de financer le RSA socle, y compris l'API - qui relevait auparavant de l'Etat et dont la charge leur a été intégralement transférée -, l'Etat assurant le financement du RSA activité, au travers du fonds national des solidarités actives (FNSA).

Financé à mi-année en 2009, le RSA sera pour la première fois mis en oeuvre en année pleine en 2010. Il en résulte :

- d'une part, une hausse de près de 190 % des crédits du programme 304 « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales », destinés, pour l'essentiel, à financer le RSA activité ;

- d'autre part, la réduction de plus de 50 % des crédits du programme 106 « Actions en faveur des familles vulnérables » du fait du transfert aux conseils généraux des dépenses d'API, cette prestation étant désormais intégrée au RSA en métropole.

A. PROGRAMME 304 : UNE DOTATION EN HAUSSE DE 189 % POUR FINANCER LA GÉNÉRALISATION DU RSA EN MÉTROPOLE

Doté de 1,68 milliard d'euros, le programme 304 « Lutte contre la pauvreté : RSA et expérimentations sociales » comporte deux actions :

- la première correspond à la dotation de l'Etat (1,67 milliard) au FNSA pour financer, en année pleine, le RSA activité, l'aide personnalisée de retour à l'emploi (APRE) et les frais de gestion de la prestation ;

- la seconde, très marginale, permet la mise en oeuvre d'expérimentations en faveur de la lutte conte la pauvreté et de la cohésion sociale (10 millions).

1. Une dotation de l'Etat au FNSA excessive au regard du rythme de montée en charge du RSA

a) Une montée en charge plus lente que prévu

Au 30 août 2009 1 ( * ) , environ 1 467 000 personnes percevaient le RSA , dont :

- pour 1 131 000, le RSA socle (dont 130 000 qui touchent à la fois le RSA socle et le RSA activité), et parmi elles, 220 000 bénéficient d'une majoration pour isolement (ex-API) ;

- pour 336 000 , le RSA activité seul. Si l'on ajoute les personnes qui perçoivent à la fois le RSA socle et le RSA activité, environ 466 000 personnes ont perçu le RSA activité, pour un montant moyen de 185 euros par mois .

Au total, en ajoutant les ayants droit, c'est plus de 3,1 millions de personnes qui sont couvertes par la prestation.

Les droits ouverts au titre du RSA au mois de juin ont donné lieu à des versements aux personnes éligibles dès le 1 er juillet 2009. Pour les anciens allocataires du RMI et de l'API, le transfert sur le RSA socle s'est fait de manière automatique et n'a nécessité aucune démarche. A l'inverse, les bénéficiaires potentiels du RSA activité ont été invités à se faire connaître et à déposer un dossier auprès des organismes compétents 2 ( * ) dès le 1 er juin, afin de faire valoir leurs droits à compter du 1 er juillet.

Un dispositif de simulation, accessible sur le site Internet de la Cnaf depuis le mois d'avril, a permis aux personnes qui le souhaitaient de tester leur éligibilité au RSA et d'évaluer le montant auquel ils pourraient prétendre. Entre avril et juin, la Cnaf a enregistré plus de onze millions de connexions, avec un pic de deux millions la première semaine de juin, lors de l'entrée en vigueur du RSA.

Sur les quelque 1,7 million de personnes à revenus modestes potentiellement bénéficiaires, un peu plus d'un quart percevaient le RSA activité, trois mois après sa mise en oeuvre. Cela n'est en réalité guère surprenant si l'on observe le rythme usuel de montée en charge des prestations nouvelles, d'autant plus que la mise en oeuvre est intervenue pendant la période des vacances d'été.

A la fin du mois de septembre, les caisses d'allocations familiales avaient enregistré plus d'un million de demandes, à raison d'environ 30 000 formulaires déposés par semaine. L'instruction des premiers dossiers montrent que près d'une demande sur deux donne lieu au versement d'une prestation.

Sur la base de ces observations et tout en reconnaissant que « la montée en charge du RSA serait alors particulièrement rapide par rapport à d'autres prestations » , le Gouvernement n'exclut pas d'atteindre l'objectif de 825 000 bénéficiaires d'ici à la fin de l'année et de 1,53 million au mois de juin 2010, soit respectivement 50 % et 90 % de la cible 3 ( * ) .

Montée en charge du RSA depuis sa mise en place au 1 er juin 2009

Juin

Juillet

Août

Cumul

Droits cumulés ouverts (1) + (4) :

1 319 762

1 381 592

1 467 447

-

RSA socle (1)

dont socle seul (2)

dont socle + activité (3)

1 114 341

998 241

116 091

1 095 112

973 241

121 871

1 131 422

1 000 813

130 609

-

Demandes déposées cumulées RSA activité

522 000

751 000

900 000 (*)

ns

RSA activité (3) + (4)

Part en % de la cible 4 ( * )

dont activité seul (4)

321 521

18,9 %

205 430

408 351

24 %

286 480

466 634

27,4 %

336 025

-

Les droits acquis au titre du mois n donnent lieu à un versement au mois n+1.

Juillet

Août

Septembre

Cumul

Montants mensuels (en euros)

483 421 362

547 771 684

584 747 183

1 615 940 229

RSA socle (1)

dont RSA socle majoré

438 594 663

69 415 169

466 848 369

75 299 784

498 409 446

80 291 897

1 403 852 478

225 006 850

RSA activité (3) + (4)

Augmentation

44 826 699

-

80 923 315

+ 80,5 %

86 337 737

+ 6,7 %

212 087 751

Allocation mensuelle moyenne (en euros)

366,3

396,5

398,5

-

RSA activité (3) + (4)

139,4

198,2

185,0

-

RSA socle (1)

393,6

426,3

440,5

-

(*) Données prévisionnelles de la Cnaf à la mi-novembre.

Source : données Cnaf novembre 2009.

b) Une sous-consommation quasi certaine des crédits en 2009 et une surestimation plus que probable des dépenses pour 2010

Les dépenses du FNSA comprennent les montants versés au titre du RSA activité et de l'aide personnalisée de retour à l'emploi (APRE), ainsi que les frais de gestion.

Des dépenses réelles en 2009 très en-deçà des prévisions de la loi de finances initiale

Pour 2009 , les dépenses prévisionnelles du fonds ont été évaluées par la loi de finances initiale à 1,62 milliard d'euros , dont :

- 1,45 milliard au titre de la prestation, calculés sur la base d'un montant moyen de 110 euros et d'un nombre de bénéficiaires potentiels de 2,2 millions ;

- 75 millions au titre de l'APRE, qui correspond au financement de l'aide sur un semestre ;

- 100 millions de frais de gestion, pour permettre la mise en place du RSA (logiciels, formation des agents des Caf, etc.).

Plusieurs éléments conduisent votre commission à penser que ces dépenses devraient être très en-deçà des prévisions initiales :

- tout d'abord, le Gouvernement évoque désormais une cible de bénéficiaires potentiels comprise entre 1,6 et 1,7 million au lieu des 2,2 millions évoqués au départ. Il estime même raisonnable de considérer que cette cible, comme c'est le cas pour toutes les autres prestations, ne devrait à terme n'être atteinte qu'à 90 %, soit 1,53 million de personnes ;

- ensuite, à la fin du mois de septembre, sur les trois premiers mois, les montants versés représentaient un total cumulé de 212 millions d'euros, alors que la dépense prévisionnelle tablait sur une dépense mensuelle moyenne, sur un semestre, de 241,7 millions. Or, fin septembre, la dépense mensuelle ne représentait que 86,3 millions ;

- enfin, au 30 septembre 2009, l'engagement des dépenses au titre de l'aide personnalisée de retour à l'emploi (APRE) se situait très en-deçà des prévisions : 16 millions d'euros au lieu des 75 millions ouverts en LFI pour 2009.

Le tableau ci-après retrace l'évolution du nombre de bénéficiaires et des montants versés depuis le 1 er juin et établit une évolution prévisionnelle pour le dernier trimestre 2009.

Si l'on retient l'objectif du Gouvernement d'atteindre 50 % de la cible d'ici à la fin de l'année (soit 825 000 allocataires), avec une progression linéaire du nombre d'allocataires et, à l'inverse, une baisse progressive du montant moyen versé, on peut raisonnablement tabler sur une dépense effective en 2009 de l'ordre de 580 millions d'euros .

Montée en charge prévisionnelle du RSA activité au second semestre 2009

Juillet

Août

Septembre

Octobre
prévisions

Novembre
prévisions

Décembre
prévisions

Bénéficiaires

321 521

408 351

466 634

593 300

720 800

850 000

Part en % de la cible (1)

18,9 %

24 %

27,4 %

34,9 %

42,4 %

50 %

Allocation moyenne mensuelle
(en euros)

139,4

198,2

185

177,5

170

162,5

Montants mensuels versés
(en millions d'euros)

44,3

80,9

86,3

105,3

122,4

138,1

Cumul des montants mensuels (en millions d'euros)

44,3

125,2

211,5

316,8

439,2

577,6

(1) Cible fixée à 1,7 million de bénéficiaires potentiels avec un objectif de 50 % en décembre.

Source : commission des affaires sociales
sur la base des hypothèses actualisées du Gouvernement au 15 novembre 2009

Par ailleurs, au regard des dernières informations transmises à votre rapporteur, une hypothèse de consommation des crédits de l'APRE, d'ici à la fin de l'année, de l'ordre de 40 millions d'euros semble plausible. En effet, faute de directives claires sur les modalités d'attribution de la prestation, cette aide n'a pas remporté le succès attendu alors qu'elle devait permettre aux conseillers référents d'y recourir opportunément, avec une grande souplesse.

Votre commission sera particulièrement attentive aux modalités d'utilisation de cette aide , qui doit faciliter le retour à l'emploi des bénéficiaires du RSA en permettant de surmonter, de façon réactive, les obstacles à la reprise d'activité. A cet égard, il serait souhaitable que les préfets qui contrôlent l'allocation de cette aide, fassent un bilan en fin d'année de son utilisation .

S'agissant des frais de gestion, la dotation de 100 millions d'euros inscrite en loi de finances initiale pour 2009 pour permettre la mise en place du RSA devrait être intégralement consommée.

Au total, les dépenses du fonds devraient s'élever en 2009 à 717,6 millions d'euros au lieu des 1,62 milliard initialement prévus, soit un différentiel de 907,4 millions .

Malgré la lente montée en charge du RSA activité, les hypothèses de dépenses pour 2010 n'ont pas été revues à la baisse

Alors que le nombre de bénéficiaires du RSA activité se situe très en-deçà des prévisions initiales, les hypothèses de dépenses pour 2010 n'ont pas été revues à la baisse.

Celles-ci ont été estimées, en année pleine, à 3,13 milliards d'euros (dont 2,9 milliards au titre de la prestation, 150 millions au titre de l'APRE et 77 millions de frais de gestion), en partant sur la base d'un montant mensuel moyen de 109 euros et de 2,21 millions de bénéficiaires.

Si l'on observe que le montant mensuel moyen versé est supérieur aux prévisions (185 euros au lieu de 109 euros) 5 ( * ) , le nombre de bénéficiaires actuels en revanche ne représente que 20 % des objectifs initialement fixés.

Le tableau ci-dessous établit une évolution prévisionnelle pour 2010 en tenant compte des éléments suivants :

- le nombre de bénéficiaires ne devrait pas excéder 1,53 million en rythme de croisière, soit 90 % de la cible, établie, après correction, par le Gouvernement, à 1,7 million ;

- selon le Haut commissariat aux solidarités actives, cet objectif devrait être atteint dès le mois de juillet 2010, ce qui suppose une accélération du rythme de montée en charge au premier semestre ;

- à l'inverse, le montant moyen mensuel devrait, en toute logique, progressivement diminuer et tendre vers la cible de 110 euros ; toutefois, avec une approche prudente, on peut tabler sur un montant moyen de 120 euros.

Montée en charge prévisionnelle du RSA activité en 2010

Janvier

Février

Mars

Avril

Mai

Juin

Juillet à Décembre

Bénéficiaires

856 800

948 600

1 040 400

1 132 200

1 224 000

1 300 500

1 530 000

Part en % de la cible (1)

56 %

62 %

68 %

74 %

80 %

85 %

90 %

Allocation moyenne mensuelle
(en euros)

156,5

150,5

144,5

138,5

132,5

126,5

120

Montants mensuels versés
(en millions d'euros)

134,1

142,8

150,3

156,8

162,2

164,5

183,6

Cumul des montants mensuels (en millions d'euros)

134,1

276,9

427,2

584

746,2

910,7

2 012,3

(1) Cible fixée à 1,7 million de bénéficiaires potentiels avec un objectif de 50 % en décembre.

Source : commission des affaires sociales sur la base des hypothèses actualisées du Gouvernement au 15 novembre 2009

Ainsi, en rythme de croisière, le coût du RSA activité devrait s'élever à 183,6 millions d'euros par mois (au lieu des 241 millions initialement prévus) et la dépense pour 2010 ne devrait pas excéder 2,01 milliards, soit un différentiel par rapport aux prévisions d'environ 900 millions.

c) Des recettes qui devraient être suffisantes malgré les moindres rendements des contributions additionnelles affectées au FNSA

Pour couvrir ces dépenses, les recettes apportées au FNSA comprennent :

- le produit des nouvelles contributions additionnelles sur les revenus du patrimoine et des placements de 1,1 %, estimé, pour 2009, à 1,23 milliard d'euros (au lieu du 1,43 milliard attendu) et, pour 2010, à 1,29 milliard (au lieu du 1,5 milliard prévu). Ce moindre rendement s'explique par l'atonie du marché immobilier mais aussi par la baisse des revenus des placements financiers, dans un contexte de crise économique et financière persistant. Sans amélioration de la situation d'ici à la fin de l'année, la révision à la baisse de ces prévisions par la commission des comptes de la sécurité sociale 6 ( * ) dans son rapport pourrait se révéler être plus proche de la réalité : celle-ci table sur une recette de 1,14 milliard d'euros pour 2009 et de 1,18 milliard pour 2010, soit un manque à gagner respectivement de 296 millions et 321 millions par rapport à la prévision initiale. Votre rapporteur retiendra cette prévision qu'il estime être plus conforme à la réalité ;

- une dotation de l'Etat fixée, pour 2009, à 555,4 millions d'euros, afin de financer le RSA activité de juillet à décembre, et réévaluée, pour 2010, de 434 millions, ce qui en porte le montant, en année pleine, à 1,67 milliard d'euros ;

- le report , sur l'exercice de 2010, de l'excédent du fonds en 2009, estimé à 165 millions d'euros (au lieu des 362 millions prévus). Votre rapporteur estime qu'au vu des dépenses réalisées, cet excédent devrait être nettement supérieur.

d) Les prévisions révisées laissent apparaître une marge de manoeuvre budgétaire estimée à 1,59 milliard d'euros

L'équilibre du FNSA doit être appréhendé de manière dynamique, sur la durée supposée de la montée en charge de la nouvelle prestation. Ainsi, l'objectif est de parvenir à l'équilibre en 2011 , après deux années d'application en année pleine, le temps que le dispositif atteigne son rythme de croisière.

En 2009, l'Etat a abondé le FNSA à hauteur de 555 millions d'euros , pour financer la montée en charge des dépenses liées au RSA activité au cours du second semestre.

Les prévisions de la LFI pour 2009

Selon les prévisions réalisées à la fin de 2008 (voir dans le tableau ci-après les colonnes « LFI 2009 »), le solde du fonds devait faire apparaître un excédent de 362 millions d'euros à la fin de 2009, un déficit de 22 millions en 2010 et un solde nul en 2011, sur la base de dotations prévisionnelles de l'Etat au FNSA pour 2010 et 2011, fixées respectivement à 1,24 milliard et 1,7 milliard.

Les prévisions de la LFI pour 2010

Partant de l'hypothèse de moindres recettes des contributions additionnelles sur les revenus du patrimoine en 2009 (1,23 milliard au lieu de 1,43 milliard) et en 2010 (1,28 milliard au lieu de 1,5 milliard), le projet de loi de finances pour 2010 rectifie ces prévisions en prévoyant un excédent qui serait ramené en 2009 de 362 millions à 165 millions, justifiant ainsi une revalorisation de la dotation de l'Etat pour 2010 de 1,24 milliard à 1,67 milliard, pour dégager un excédent de 0,5 million à la fin de l'exercice.

Les prévisions actualisées de votre commission

Sur la base des premières dépenses réelles constatées en 2009 et des produits effectifs des nouvelles contributions additionnelles sur les revenus du patrimoine, votre commission évalue l'excédent du fonds à la fin de 2009 à 973,8 millions d'euros.

2009

2010

2011

Hors budget Etat
(en millions d'euros)

LFI
2009

PLF
2010

PLF
2010
révisé

LFI
2009

PLF
2010

PLF
2010
révisé

LFI
2009

PLF
2010

PLF
2010
révisé

Dépenses dont :

1 625

1 625

717,6

3 127

3 127

2 239

3 247

3 247

2 359

RSA « activité »

1 450

1 450

577,6

2 900

2 900

2 012

2 900

2 900

2 012

APRE

75

75

40

150

150

150

150

150

150

Frais de gestion

100

100

100

77

77

77

77

77

77

Extension outre-mer

0

0

0

0

0

0

120

120

120

Recettes dont :

1 987,0

1 790,4

1 691,4

3 105

3 126,5

3 829,3

3 247

3 247

4 859,3

Dotation Etat

555

555,4

555,4

1 241

1 674,5

1 674,5

1 700

1 700

1 700

Contribution 1,1 %

1 432

1 235

1 136

1 502

1 287

1 181

1 569

1 569

1 569

Reports trésorerie

0

0

0

362

165

973,8

- 22

- 22

1 590,3

RESULTAT

+362

+165

+973,8

- 22

0,5

1 590,3

0

0

2 500,3

Source : commission des affaires sociales

Cet excédent devant être reporté l'année suivante, l'équilibre pourrait être atteint en 2010 avec une dotation de l'Etat de seulement 84,2 millions d'euros au lieu du 1,67 milliard prévu, ce qui dégage une marge de manoeuvre budgétaire de 1,59 milliard d'euros. En 2011, si l'on maintient la dotation de l'Etat au niveau initialement prévu, l'excédent du fonds pourrait atteindre 2,5 milliards d'euros.

2. Les pistes envisagées pour utiliser au mieux cette marge de manoeuvre budgétaire

a) Les excédents du programme en 2009 devraient permettre de réduire le déficit et de financer la prime de Noël

Pour 2009, deux mesures 7 ( * ) ont été évoquées concernant l'affectation des excédents du programme :

- la suppression des crédits qui n'ont pas encore été versés en 2009 au FNSA, et qui s'élèvent à 135,4 millions d'euros ;

- le prélèvement de 340 millions d'euros sur le fonds, pour financer les primes de Noël qui seront versées à la fin de l'année aux bénéficiaires du RSA.

Votre commission approuve ces mesures qui visent à optimiser la dépense publique et, en particulier, la suppression des crédits non versés au fonds qui permettra de réduire le déficit en 2009.

Si elle approuve le soutien financier apporté aux bénéficiaires du RSA avec la prime de Noël et, à plus forte raison, dans le contexte de crise actuelle, votre commission se doit néanmoins de faire observer que le FNSA est un fonds dédié, créé par la loi, pour financer de façon exclusive le RSA activité. En conséquence, le prélèvement de sommes déjà versées au fonds doit revêtir un caractère exceptionnel et devra obligatoirement, en l'espèce, faire l'objet d'une autorisation expresse en loi de finances rectificative .

Dans l'hypothèse où ces mesures seraient votées, l'excédent du fonds serait ramené en 2009 de 973,8 millions à 498,4 millions d'euros.

b) Une partie du surplus permettra de financer le RSA jeunes dès 2010

En 2010, la perspective de dépenses inférieures aux prévisions initiales a conduit le Gouvernement à envisager l'extension du RSA aux jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans et ayant travaillé au moins vingt-quatre mois dans les trois dernières années.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, cette disposition, qui a fait l'objet d'un amendement du Gouvernement adopté lors de l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale 8 ( * ) , devrait bénéficier à 160 000 jeunes 9 ( * ) et le coût de sa mise en oeuvre s'élever, en 2010, à environ 250 millions d'euros . Cette mesure sera intégralement financée sur les ressources du FNSA, en 2010, y compris le RSA socle qui relève normalement de la compétence des conseils généraux. Pour les années suivantes, le financement du RSA socle accordé aux jeunes devrait échoir aux départements et être compensé selon des modalités à définir sur la base d'un accord avec l'assemblée représentative des départements de France (ADF).

c) Une partie des crédits devrait être redéployée vers d'autres missions

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement supprimant 82,6 millions d'euros en autorisation d'engagement et près de 77 millions en crédits de paiement sur ce programme. Ces crédits devraient être redéployés vers d'autres programmes ou missions.

Au total, si l'on tient compte des mesures proposées par le Gouvernement, le FNSA devrait disposer, à la fin de 2 010, d'une marge de manoeuvre de 782,3 millions d'euros.

Impact prévisionnel des réductions de crédits
et des nouvelles dépenses prévues par le Gouvernement

(en millions d'euros)

2009

2010

Dépenses FNSA

717,6

2 239

Dépense supplémentaire

340

250

Dépenses totales

1 057,6

2 489

Recettes FNSA

1 691,4

2 855,5

Réduction de crédits

- 135,4

- 82,6

Report trésorerie FNSA

0

498,4

Recettes totales

1 556

3 271,3

SOLDE

498,4

782,3

d) Les propositions de votre commission

Au regard de la surbudgétisation avérée du FNSA, votre commission propose :

- d'une part, de réduire de 500 millions d'euros le montant de la dotation d'Etat inscrite pour 2010 au titre de ce programme pour alimenter le FNSA 10 ( * ) ;

- d'autre part, de redéployer 40 millions d'euros vers le programme « Handicap et dépendance » , pour accorder 32 millions supplémentaires aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) au titre de la compensation des personnels d'Etat non mis à disposition et 8 millions aux fonds départementaux de compensation.

L'addition de ces deux montants ne couvre toutefois pas l'intégralité de l'excédent prévisionnel du fonds tel qu'il résulte des estimations de votre commission. En effet, malgré l'adoption de ces deux mesures, le FNSA devrait encore afficher un excédent de 242,3 millions d'euros.

Ainsi, votre commission considère que, sans mettre en péril le financement du RSA et l'équilibre du FNSA, ces transferts de crédits pourront contribuer utilement à la réduction du déficit du budget de l'Etat qui devrait dépasser 116 milliards d'euros en 2010 et conforter la situation financière critique des MDPH dont les missions ne cessent de s'accroître.

Pour 2010, la dotation du programme au fonds serait ainsi ramenée de 1,67 milliard d'euros à 1,05 milliard d'euros en autorisations d'engagement et à 1,05 milliard d'euros en crédits de paiement (en tenant compte des transferts de crédits votés en seconde délibération lors de l'examen du PLF à l'Assemblée nationale).

Il convient d'ajouter que, au regard de la grande incertitude qui pèse sur l'évolution des dépenses et des recettes du fonds, il serait plus sage à l'avenir que le versement des crédits au FNSA s'effectue « au fil de l'eau » - tout crédit versé au fonds ne pouvant être théoriquement récupéré - afin que, en cas de sur-dotation constatée en fin d'exercice, l'excédent puisse être redéployé ou supprimé.

3. Les innovations et expérimentations sociales

Les crédits consacrés à la seconde action du programme « Expérimentation sociale et autres expériences en matière sociale et d'économie sociale » apparaissent marginaux au regard des sommes en jeu pour financer la généralisation du RSA. Ils s'élèvent, pour 2010, à 10 millions d'euros et se décomposent comme suit :

- 8 millions pour le fonds d'innovation et d'expérimentation sociale (Fies) ;

- 880 000 euros de subventions aux chambres régionales de l'économie sociale et solidaire ;

- 820 000 euros de subventions aux organismes nationaux et locaux de l'économie sociale ;

- 300 000 euros de crédits de fonctionnement de la délégation interministérielle à l'innovation, à l'expérimentation sociale et à l'économie sociale (Diieses).

Votre commission soutient la poursuite de ces expérimentations en faveur de la cohésion sociale et de la réduction de la pauvreté, en particulier dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'emploi et de la garde d'enfants. Elle se félicite qu'elles aient trouvé un écho favorable à l'échelon communautaire 11 ( * ) à l'occasion de leur présentation par le haut commissaire aux solidarités actives lors de la présidence française de l'Union européenne.

* 1 « L'e-ssentiel » n° 90, publication électronique de la Cnaf, septembre 2009.

* 2 Les demandes peuvent être déposées auprès des caisses d'allocations familiales ou de mutualité sociale agricole, des centres communaux et intercommunaux d'action sociale, de Pôle emploi ou des services du conseil général.

* 3 Actualité du RSA - Site http:/www.rsa.gouv.fr en date du 9 novembre 2009.

* 4 Le Haut commissariat aux solidarités actives et à la jeunesse estime le nombre de foyers susceptibles de bénéficier du RSA activité entre 1,6 et 1,7 million. Pour les calculs et prévisions de ce tableau, c'est l'hypothèse haute qui est retenue, soit 1,7 million de bénéficiaires. Voir le site : www.rsa.gouv.fr .

* 5 Les bénéficiaires potentiels qui anticipaient de faibles montants se sont moins mobilisés pour faire valoir leurs droits que ceux qui pouvaient prétendre à une allocation relativement élevée.

* 6 Voir le « Tableau 2 - Structure par attributaire des prélèvements sociaux sur les revenus du capital » à la page 110 du rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale - octobre 2009.

* 7 Ces mesures devraient figurer en loi de finances rectificative, ainsi que l'a confirmé Martin Hirsch lors de son audition par la commission, dont le compte-rendu figure page 91 du présent rapport.

* 8 Article 59 quater rattaché à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » dont le commentaire figure p.81 et suivantes du présent rapport.

* 9 Sur 160 000 jeunes bénéficiaires âgés de dix-huit à vingt-quatre ans, 120 000 devraient toucher le RSA activité et 40 000 le RSA socle.

* 10 Cette proposition a été également présentée par la commission des finances, rapport (2009-2010) RG n° 101 - Annexe 30 de MM. Auguste Cazalet et Albéric de Montgolfier sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

* 11 La Commission européenne financera des appels à projets d'expérimentations dans ces domaines à l'échelle de l'Union européenne.

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