c) Des doutes sur l'efficacité et l'avenir des dispositifs de prévention et de lutte contre l'enfance en danger

Les actions de prévention et de lutte contre la maltraitance des enfants sont principalement mises en oeuvre par le groupement d'intérêt public « Enfance en danger » (Giped), qui fédère le service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated) et l'observatoire national de l'enfance en danger (Oned), financé à parité par l'Etat et les départements. Pour 2010, l'Etat y participe à hauteur de 2,2 millions d'euros, soit une légère hausse par rapport à l'exercice 2009, qui permet au Giped de disposer d'un budget global de 4,4 millions.

L'Etat accorde également des subventions aux autres associations oeuvrant dans ce domaine sur la base d'une enveloppe dotée en 2010 de 500 000 euros.

L'amélioration nécessaire du service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger

Les missions du Giped, qui ont été renforcées par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, sont de deux types :

- avec le Snated, une mission préventive et curative d'écoute et de conseil pour les mineurs et leur famille par le traitement, 24 heures sur 24, d'environ quatre mille appels téléphoniques par jour reçus au numéro d'urgence 119 qui donne lieu, le cas échéant, à la transmission d'un compte rendu aux conseils généraux, pour la mise en oeuvre éventuelle d'une mesure de protection ;

- avec l'Oned, une mission d'observation et d'évaluation des politiques publiques conduites en matière de protection de l'enfance.

En 2008, sur 655 300 appels décrochés et traités par le pré-accueil du 119, 29 844 ont fait l'objet d'un entretien avec un écoutant, dont 23 605 ont donné lieu à une aide ou un conseil immédiats et 6 239 ont été transmis aux départements et fait l'objet d'un compte-rendu. Après leur transmission, 86,4 % des appels ont donné lieu à une mesure de protection de l'enfance, ce qui atteste de la qualité d'écoute et d'analyse des personnes en charge de la prise des appels, à qui il revient la responsabilité d'apprécier le caractère préoccupant des situations qu'ils ont à traiter 27 ( * ) .

Si votre commission approuve l'augmentation des crédits alloués aux actions de prévention et de lutte contre l'enfance en danger, elle s'inquiète en revanche que moins de la moitié des appels reçus au 119 obtiennent une réponse et que seulement 4,8 % soient effectivement traités par un écoutant .

Elle déplore en outre que les objectifs fixés pour 2010 se contentent d'un taux de réponse de 47,5 % et d'un taux de traitement par un écoutant du Snated de seulement 4,8 %. Elle n'ignore pas l'existence inévitable d'appels sans fondement qui peuvent perturber fortement la prise en charge. Il existe cependant des dispositifs de filtrage ou de contrôle des appels efficaces tels que ceux mis en oeuvre par les pompiers ou le Samu.

Votre commission souhaite que les mesures nécessaires soient rapidement mises en oeuvre pour améliorer le taux de réponse et de traitement des appels , afin de répondre dans les meilleures conditions à la détresse des enfants ou adolescents qui sollicitent une aide.

Un avenir compromis pour le fonds national de la protection de l'enfance

Dans cette action aurait également dû figurer la contribution de l'Etat au fonds national de financement de la protection de l'enfance (FNPE). Or, plus de deux ans après la promulgation de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, force est de constater que le Gouvernement n'a toujours pas pris les mesures qui s'imposent pour mettre en place ce fonds, l'abonder et organiser son fonctionnement. En 2007, la Cnaf, qui avait prévu d'y contribuer à hauteur de 30 millions d'euros, a dû, faute de destination, reporter la somme correspondante sur l'exercice 2008.

Votre commission a déjà eu l'occasion de déplorer cette carence de l'Etat alors que ce fonds visait à promouvoir des actions en faveur de la protection de l'enfance et de la lutte contre la maltraitance, mais aussi à compenser les charges résultant pour les départements de la nouvelle répartition des rôles dans ce domaine. Le ministère chargé de l'action sociale les a évaluées à 137 millions d'euros sur trois ans.

Le rapport de la Cour des comptes 28 ( * ) se montre également particulièrement sévère à ce sujet, en faisant observer que, « alors même que les montants en cause sont modestes au regard des dépenses engagées par les départements, ces retards et ces hésitations [...] pèsent sur la crédibilité de l'Etat en tant qu'acteur de cette politique » .

En réponse aux observations de la Cour, la secrétaire d'Etat chargée de la famille et de la solidarité a fait valoir que « la création de ce fonds ne correspondait pas à une obligation juridique de l'Etat de compenser aux départements les dépenses engagées au titre de la loi puisqu'il n'y a pas de transfert de compétences au sens de l'article 72-2 de la Constitution ». Sont également invoquées des difficultés de faisabilité liées au double financement par l'Etat et la Cnaf qui, semble-t-il, auraient conduit le Premier ministre à s'opposer à la création de ce fonds. Toutefois, interrogée à ce sujet lors de son audition par votre commission, la secrétaire d'Etat chargée de la famille et de la solidarité s'est engagée à étudier la possibilité de créer ce fonds, dans le cadre des Etats généraux sur la protection de l'enfance.

Votre commission demande à ce que la loi votée par le Parlement soit respectée et appliquée . A défaut, elle estime indispensable qu'un débat s'engage à ce sujet afin que le Gouvernement puisse clarifier ses intentions et exposer devant la représentation nationale les modalités selon lesquelles il entend procéder pour que les départements n'assument pas seuls le coût de la réforme de la protection de l'enfance .

* 27 Voir, sur cette question de l'identification des situations de danger et la transmission des informations préoccupantes, le rapport de la Cour des comptes sur la protection de l'enfance, p. 13-20, octobre 2009.

* 28 Rapport précité sur la protection de l'enfance, p. 120.

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