III. L'ANALYSE DE VOTRE COMMISSION POUR AVIS

A. UNE EMBELLIE DONT LES OPÉRATEURS EUROPÉENS TARDENT À PROFITER

Le secteur des transports aériens, qui a été parmi les premiers touchés par la crise économique et financière, montre des signes de reprise spectaculaires au niveau mondial : l'Association internationale du transport aérien a ainsi prévu un bénéfice net cumulé de 8,9 milliards d'euros (6,8 milliards d'euros) en 2010, l'un des plus élevés de l'histoire, alors que les pertes ont été de presque 10 milliards de dollars en 2009.

La situation est toutefois plus difficile pour les transporteurs européens , en raison d'une reprise économique plus lente sur le continent. Leurs revenus pourraient encore connaître une baisse de 1,3 % cette année. En France, Air France prévoit de dégager un bénéfice d'exploitation sur l'exercice courant, clos le 31 mars 2011.

B. LA CONSTRUCTION DU CIEL UNIQUE EUROPÉEN ET LA NÉCESSAIRE RÉORGANISATION DE LA DGAC

1. Le Ciel unique européen : un projet d'avenir

Votre rapporteur pour avis soutient résolument le projet de mise en place du Ciel unique européen . Face aux États-Unis dotés d'un espace aérien desservant plus de 300 millions d'habitants, une meilleure coopération entre les opérateurs de navigation aérienne en Europe est indispensable pour mettre en place des routes plus directes et mieux gérer les niveaux de vol et les trajectoires, de manière à permettre des vols plus économiques et moins polluants.

La crise liée au volcan islandais Eyjafjöll en avril dernier a démontré la nécessité d'une mise en oeuvre accélérée du projet Ciel unique européen, qui a été retenue comme l'une des priorités du Conseil « Transports » du 4 mai 2010.

Les prochaines années seront ainsi marquées par la création de neuf blocs d'espace fonctionnel (FAB) : la France, l'Allemagne, la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suisse coopéreront au sein du FABEC ( Functional Airspace Block Europe Central ).

Un accord international doit être signé au conseil « Transports » du 2 décembre 2010 pour une mise en place du FABEC en 2012.

2. L'impact du projet Ciel unique sur l'organisation du contrôle aérien

S'agissant de l'organisation fonctionnelle des services de navigation aérienne , le Gouvernement a privilégié dans un premier temps la piste de la création d'une organisation intégrée de prestation de services de navigation aérienne au sein du FABEC, sous la forme d'un service public, non concurrentiel et non privatisable 26 ( * ) .

La forte résistance de certaines organisations professionnelles de la DGAC, qui s'est traduite par plusieurs mouvements sociaux en 2010, a toutefois conduit le Gouvernement à confier une mission de médiation à M. Gilles Savary. Cette mission, dans un rapport remis le 6 septembre 2010 :

- estime qu'un modèle d'« intégration/fusion » des autorités nationales de navigation aérienne au sein d'une organisation internationale unique de statut public n'est pas envisageable à court ou moyen terme ;

- privilégie plutôt un modèle d'« intégration/subsidiarité » selon lequel les autorités nationales existantes mettraient en oeuvre des décisions prises à l'unanimité par une institution intergouvernementale « FABEC » dotée de la personnalité morale. Le rapport Savary indique que la fusion des prestataires suscite des craintes aussi bien chez des syndicats qui s'inquiètent de voir le modèle social français remis en cause que chez les autres États membres qui redoutent à l'inverse que les règles et les usages français (notamment le statut de fonctionnaire) ne soit transposés au niveau d'un prestataire unique européen, qui aurait de plus la capacité, en cas de mouvement social, de paralyser l'ensemble du ciel européen.

L'invocation du principe de subsidiarité 27 ( * ) peut surprendre : le trafic aérien européen étant par nature, et particulièrement en Europe, transnational, on peut difficilement considérer que sa gestion serait plus efficace au niveau national. Il est également à craindre que le modèle proposé, en raison de la complexité de son organisation et des risques de lenteur présents en germe dans son modèle de gouvernance, ne compromette la réalisation d'une unification réelle des espaces aériens nationaux.

Votre rapporteur pour avis regrette donc que la piste d'une intégration plus poussée , qui avait d'ailleurs été proposée par des syndicats de contrôleurs aériens des pays concernés dans le cadre du projet Mosaic 28 ( * ) , semble repoussée à une échéance indéterminée .


* 26 Communiqué de presse du 11 janvier 2010 sur les enjeux du nouveau protocole d'accord avec les représentants des personnels de la DGAC
(
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/communique_fabec.pdf )

* 27 Article 5 du traité sur l'Union européenne : « l'Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu'au niveau régional et local, mais peuvent l'être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, au niveau de l'Union. »

* 28 Projet « Mosaic »: http://www.project-mosaic.eu .

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