(2) Une fiscalité « mixte » conforme au droit communautaire
La directive 2011/64/UE du 21 juin 2011 concernant la structure et les taux des accises applicables aux tabacs manufacturés définit les grands principes communautaires s'appliquant à la fiscalité du tabac.
En particulier, elle dispose que :
- la structure de la fiscalité de la cigarette est mixte : elle comporte un élément spécifique par unité de produit et un élément proportionnel fondé sur le prix de vente au public (PVP) ;
- l'élément spécifique est calculé à partir du PMP de l'année écoulée ;
- les autres produits du tabac peuvent avoir une fiscalité proportionnelle, spécifique ou mixte (c'est-à-dire comprenant à la fois une part spécifique et une part proportionnelle au PVP).
Le dispositif proposé par le présent article est conforme à ces dispositions, dans la mesure où il fait évoluer la fiscalité des produits de tabac autres que la cigarette vers un système « mixte ».
(3) Une mécanique fiscale aux effets inchangés
Le présent article ne bouleverse pas la mécanique, assez complexe, de la fiscalité des cigarettes. Il préserve au contraire les marges de manoeuvre dont dispose l'Etat en la matière, en l'étendant aux autres produits de tabac.
En effet, la coexistence d'un droit de consommation, divisé entre une part fixe (spécifique) et une part proportionnelle, et d'un minimum de perception offre à l'Etat trois outils pour influer sur le prix de vente des cigarettes (et des autres produits de tabacs). Les effets de ces trois outils sont cependant très différents les uns des autres .
•
Toute augmentation du taux normal du droit
de consommation (et de la fiscalité sur les cigarettes en
général) se traduit nécessairement par une hausse
exponentielle du prix de vente de détail si le fabricant ou le
distributeur souhaite maintenir sa marge.
En effet, le niveau actuel de fiscalité (droit de consommation et TVA), auquel il faut ajouter la rémunération des débitants de tabac, est tel que la marge des fabricants et distributeurs est très réduite (à peine supérieure à 11 %), ainsi que l'illustrent les deux exemples suivants.
La décomposition du prix de vente public (PVP) des cigarettes
Structure de prix |
Taux |
Exemple
|
Exemple
|
Prix de vente au détail
|
5,7 |
6,2 |
|
Remise brute allouée au débitant |
8,54 % du prix de vente au détail pour les autres produits du tabac |
0,48 |
0,52 |
Droit de consommation |
64,25 % |
3,66 |
|
qui se décompose en :
|
|
|
|
TVA |
16,388 % du prix de vente au détail |
0,93 |
1,01 |
Charge fiscale totale |
4,59 |
4,94 |
|
soit par rapport au prix de vente au détail |
80,52 % |
79,67 % |
Source : DGDDI
L'impact de la hausse du droit de consommation est donc fort sur le prix de vente public (PVP) . Le tableau ci-dessous rend présente une simulation des effets économiques attendus d'une telle augmentation.
Source : DGDDI
Une augmentation d'un point du taux du droit de consommation, de 64 % à 65 % par exemple, entraîne ainsi une augmentation de 9,6 % du prix de vente à élasticité volume-prix constante. Comme celle-ci est inférieure à un, le fabricant ou le distributeur qui souhaite maintenir sa marge est contraint d'augmenter davantage encore ses prix.
Cet effet exponentiel sur les prix de vente (à marge constante) de toute hausse du taux du droit de consommation constitue un argument fort pour l'administration dans sa négociation avec les fabricants et les distributeurs de cigarettes afin de les inciter à augmenter « d'eux-mêmes » leur prix, sans qu'il soit nécessaire d'augmenter la fiscalité.
• L'augmentation du taux de la part spécifique
(qui est fixe) frappe proportionnellement plus fortement les cigarettes vendues
moins chères que la CPR, c'est-à-dire celles dont le prix du
paquet est compris entre 5,36 euros et 5,70 euros actuellement. Un
tel relèvement favorise donc les cigarettes vendues plus chères
que celle-ci. Dans le schéma
supra
rendant compte de la
mécanique du droit de consommation, le déplacement vers le haut
de la droite en pointillés représentant la part spécifique
entraîne en outre « l'aplatissement » de la droite
représentant la part proportionnelle. Comme la part proportionnelle
frappe logiquement plus fortement les cigarettes vendues plus chères que
la CPR,
celles-ci sont donc doublement favorisées par
l'augmentation de la part spécifique.
• L'augmentation du taux de la part proportionnelle
du droit de consommation frappe indifféremment les cigarettes les plus
chères comme les moins chères, avec l'avantage d'un rendement
budgétaire important. Cependant, sans relèvement du minimum de
perception, elle augmente l'écart de prix entre les cigarettes et, par
conséquent,
favorise les fabricants de cigarettes
d'entrée de gamme
.
• Enfin, le relèvement du minimum de
perception « écrase » le marché en
renchérissant uniquement le prix des cigarettes les moins chères
auquel il s'applique,
favorisant ainsi indirectement les fabricants
vendant des cigarettes plus chères que la CPR
.