2. Le transfert périlleux des activités internationales du CNOUS à Campus France

La reprise de la gestion des bourses du CNOUS par le nouvel EPIC Campus France a impliqué des coûts de gestion supplémentaires et s'est déroulée suivant les trois orientations suivantes :

- concernant les boursiers du gouvernement français (BGF) : le CNOUS a fourni à l'EPIC la liste des BGF dont la bourse se poursuit au-delà du 31 août 2012. Après vérification auprès des ambassades concernées, les dossiers correspondants ont été transférés à Campus France qui les a ainsi intégrés dans sa base de données afin d'assurer la continuité du versement des mensualités de bourse au mois de septembre ;

- concernant le transfert des bourses des gouvernements étrangers (BGE) : en lien avec les postes diplomatiques concernés, Campus France a effectué des missions à l'étranger afin de renégocier la signature des conventions de bourses ou d'avenants à des conventions de bourses existantes, selon l'état transmis par le CNOUS en début d'année ;

- une convention a été signée entre l'EPIC et le CNOUS le 30 mai 2012 . Elle fixe les conditions d'hébergement en résidences universitaires pour les boursiers et les prestations d'accueil associées afin de sécuriser cet aspect primordial de la politique d'accueil des étudiants étrangers. Conformément aux décisions interministérielles, il s'agit dans cette convention de préserver, dans le nouveau système, la même proportion de BGF hébergés en résidence universitaire qu'actuellement (environ 4 700 si l'on se réfère à l'annexe indicative de la convention EPIC/CNOUS, dont 804 à Paris et sa banlieue). Le montant versé par l'EPIC au CNOUS correspond à un « droit pour chaque étudiant logé », soit 80 euros pour un total de 380 000 euros.

Dans ces conditions, le CNOUS évalue à 4,9 millions d'euros la perte totale occasionnée par le transfert de ses activités internationales à Campus France . Il souligne, en particulier, le fait qu'il a dû, conformément à la loi du 27 juillet 2010 qui avait fixé au 31 décembre 2011 la date limite de ce transfert, travailler pour le compte du nouvel EPIC en faisant vivre pendant huit mois, dans le cadre de 198 programmes de convention, 86 contrats. Parmi ces 86 contrats, le CNOUS affirme que seuls 46 ont été repris pour l'heure par Campus France. Le nombre encore limité de contrats désormais assurés par l'EPIC s'explique, selon le CNOUS, notamment par :

- la revalorisation des tarifs dans les contrats renégociés par Campus France qu'un certain nombre de gouvernements étrangers mandants n'acceptent pas ;

- le refus de certains gouvernements étrangers, tels que la Lybie, de coopérer avec le nouvel établissement qui voient dans ce transfert une rupture des relations de confiance qu'ils entretenaient avec le CNOUS.

Pour sa part, Campus France souligne qu'après comptage contradictoire, seules 78 conventions avec des institutions ou gouvernements étrangers faisaient toujours l'objet de mouvements en 2011. 52 conventions ont été reprises par Campus France . Selon l'EPIC, les 26 restantes n'ont pas été renégociées pour les raisons suivantes :

- certaines de ces conventions sont « éteintes » ou « dormantes » car elles ne prévoient pas, pour l'heure, l'envoi de nouveaux boursiers ;

- certaines conventions conclues avec des filiales de Total en Afrique ont été basculées sur une convention antérieure plus large négociée par EGIDE ;

- certains pays et institutions étrangers ont fait valoir qu'ils entendaient gérer désormais leurs étudiants boursiers par leurs propres moyens ou en confiant cette gestion à un tiers : c'est le cas notamment de l'Azerbaïdjan, du Chili et du Mexique ;

- le programme d'échanges avec l'Algérie a été interrompu par le CNOUS lui-même en août 2011 ;

- les obstacles pour la reprise de la précédente convention gérée par le CNOUS avec la Lybie (246 boursiers) sont liés au positionnement de l'ambassade de Lybie en France, auprès de laquelle une démarche sera prochainement effectuée. Il convient de relever que nos partenaires libyens, loin de se détourner de Campus France, lui font confiance. Le ministère du travail et de la réhabilitation libyen a signé, le 9 septembre 2012, avec Campus France une nouvelle convention appelée « programme des 300 » ;

- la convention avec la Syrie (507 boursiers) n'a pu être signée du fait de la situation politique.

Les conventions reprises par Campus France représentaient, au 1 er octobre 2012, un volume de fonds de près de 30 millions d'euros , soit 75 % des dépenses effectuées par le CNOUS au titre des BGE en 2011. Elles seraient de 95 % si les conventions avec la Lybie et la Syrie étaient intégrées. En outre, Campus France a signé au moins quatre nouvelles conventions qui traduisent une modernisation de la gestion des programmes de mobilité.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis tient à rappeler que le CNOUS, établissement public administratif sous tutelle du ministère de l'enseignement supérieur, affichait des tarifs de gestion des BGE extrêmement bas , inchangés depuis 1998 , de l'ordre de 50 euros (394 francs) pour chaque mois de bourse versé. Dès lors, un relèvement du barème de gestion des BGE s'imposait, dans une logique de plus grande transparence et de vérité des coûts . Cette réévaluation des tarifs s'est fondée sur l'évolution du coût horaire du travail depuis quinze ans, soit une augmentation de 45 %. La création de l'EPIC Campus France, en tant qu'opérateur de l'État, visait à externaliser la gestion d'opérations rendues au meilleur coût pour les finances publiques. Le niveau de tarif pratiqué par Campus France se rapproche désormais de celui pratiqué antérieurement par le ministère des affaires étrangères pour la gestion des boursiers du Gouvernement français.

Campus France a eu la chance de procéder à un ajustement de sa masse salariale dans une phase d'expansion de ses activités. Il est plus aisé, en effet, de limiter la croissance des effectifs en période d'augmentation des activités que d'imposer un plan de suppression des postes en situation de décroissance, comme c'était le cas pour EGIDE au cours de ses dernières années d'existence. Dans un contexte de quasi -doublement du volume de ses activités, Campus France a été en mesure de maîtriser efficacement ses effectifs.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis tient à saluer les efforts du nouvel EPIC dans la constitution d'un réseau de relais locaux auprès des universités et des grandes régions particulièrement actives dans le domaine de la recherche (Rhône-Alpes, Île-de-France, Aquitaine...). Dans le cadre de la réduction des moyens qui lui a été imposée, le CNOUS a été contraint à des redéploiements qui sont susceptibles de conduire à la fermeture de bureaux d'accueil des étudiants étrangers au sein de certains CROUS. Dans ces conditions, Campus France entend faire tout son possible pour compenser cette réduction de logistique en renforçant les antennes régionales qu'il a héritées d'EGIDE et en multipliant les co-localisations au sein de grandes universités , en particulier celles regroupées en pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES), ces structures étant encore peu aguerries en matière d'accueil des boursiers étrangers.

D'une façon globale, la mise en place de l'EPIC Campus France constitue une réforme positive mise en oeuvre conformément aux orientations de la loi du 27 juillet 2010. Grâce à ses espaces Campus France logés au sein des alliances françaises ou des instituts français, Campus France dispose d'un réseau comparable à celui du British Council , avec une présence auprès de 110 pays. Il s'appuie sur des personnels employés par les entités supports, qu'il s'agisse d'une alliance ou d'un institut, mais dont il assure seul la formation, initiale et permanente, et leur fournit du matériel académique et pédagogique.

La mise en place de Campus France est un exercice délicat, mais son installation va progressivement dans la direction souhaitée par le législateur. Alors que le nouvel EPIC est l'héritier des déficits d'EGIDE et s'est trouvé confronté à la résistance d'un CNOUS tenace, la France continue parallèlement à perdre des places au sein des classements mondiaux des établissements d'enseignement supérieur. Elle ne compte plus que quatre universités parmi les 100 premières mondiales et 35 dans le top 700 du classement publié, le 11 septembre 2012, par le bureau d'études londonien QS, reconnu dans le monde universitaire.

L'enseignement supérieur français, que l'on s'accorde à reconnaître de très grande qualité, peine à se faire une place à l'international alors que l'université française connaît une profonde réorganisation, brisant des attitudes corporatistes et des conservatismes divers.

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