B. UNE RÉPONSE QUI DOIT ÉGALEMENT ÊTRE APPORTÉE AU NIVEAU EUROPÉEN

1. Une refonte du droit d'asile à l'échelle européenne ...

Dans la ligne du Pacte européen pour l'immigration et l'asile d'octobre 2008, la Commission européenne a déposé un ensemble d'instruments modifiant les directives et règlements en vigueur afin d'achever la mise en place du régime d'asile européen commun (RAEC).

Ainsi, le 26 juin 2013, le Parlement Européen et le Conseil ont adopté le règlement (UE) n°604/2013, dit "Dublin III". La France a participé activement à la refonte de ce règlement. Si le principe général demeure identique, l'objectif de cette nouvelle version est de renforcer l'efficacité du système tout en garantissant le respect des droits des demandeurs d'asile pendant toute la durée de la procédure.

Ce texte entraine un certain nombre de modifications contribuant à renforcer les garanties apportées aux demandeurs d'asile :

- le renforcement des obligations d'information du demandeur d'asile ;

- la création d'un mécanisme d'alerte, en cas de problèmes structurels dans le fonctionnement du système d'asile et d'accueil d'un État membre ;

- une meilleure prise en compte des demandeurs d'asile vulnérables : il s'agit essentiellement des mineurs non accompagnés (recherche accrue de la présence éventuelle de parents dans un autre État membre, coopération entre États membres renforcée, documents d'information spécifiques) et des personnes pouvant être en situation de dépendance ou malades (échange de données médicales entre États membres, notamment afin de garantir la continuité des soins et organiser éventuellement un transfert adapté) ;

- une formalisation "écrite" de l'entretien réalisé dans le cadre de la mise en oeuvre de la procédure Dublin qui devra être adressée avec la requête de saisine à l'État membre supposé être responsable de la demande d'asile ;

- le droit d'exercer un recours effectif contre la décision de transfert : le demandeur d'asile doit disposer d'un recours effectif dont l'effet peut être suspensif ;

- la réduction de certains délais de procédure dans un objectif de célérité de l'examen de la demande d'asile.

Également, le règlement « Eurodac » a été modifié par le règlement 603/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. D'application directe, il entrera en vigueur le 20 juillet 2015. Rappelons qu'Eurodac est une base de données permettant de comparer les empreintes digitales des demandeurs d'asile afin de faciliter l'application du règlement Dublin III. En particulier, il permet de déterminer l'État-membre à qui incombera l'examen de la demande d'asile.

Enfin, trois directives ont été publiées, qui participent à la refonte du droit d'asile au niveau européen :

- la directive « qualification » 2 ( * ) définit les conditions pour bénéficier d'une protection internationale et le contenu de cette protection ;

- la directive « accueil » 3 ( * ) prévoit les conditions d'accueil des demandeurs d'asile le temps de l'examen de leur demande au sein de l'Union européenne ;

- la directive « procédure » 4 ( * ) fixe les règles relatives à l'examen des demandes de protection internationale en première instance et en appel au sein des États membres.

2. ... qui ne sera pas sans conséquences

D'application directe, le règlement Dublin III n'exige pas de transposition en droit interne : il sera applicable à compter de janvier 2014. La Commission européenne travaille actuellement à la rédaction d'un règlement d'application, en concertation avec les États membres. Toutefois, certaines de ses dispositions devront être insérées dans le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), afin d'assurer la cohérence des règlements communautaires avec le droit national d'une part, et d'intégrer la création d'un recours spécifique d'autre part. En effet, ce règlement va introduire une modification substantielle en droit français : il impose de mettre en place un recours pleinement suspensif contre les décisions de remise à un autre État membre responsable de l'examen de sa demande d'asile .

De même, les trois directives devront être transposées en droit interne, avec parfois des modifications d'ampleur.

La procédure « qualification » devra être transposée avant le 21 décembre 2013. Plusieurs modifications législatives sont attendues, comme l'allongement de la durée du titre de séjour accordé aux personnes bénéficiant d'une protection subsidiaire ou encore la prise en compte renforcée des questions liées au genre du demandeur ...

La procédure « accueil », quant à elle, a un délai de transposition fixé au 20 juillet 2015. Parmi les modifications induites, on peut citer notamment le raccourcissement d'un an à neuf mois de procédure le délai à compter duquel un demandeur d'asile peut accéder au marché du travail, ainsi que l'élargissement de la notion de membre de la famille : seront considérés comme tels les parents de mineurs isolés demandeurs d'asile, qui recevront de fait les droits attribués aux demandeurs de protection internationale. Enfin, de nouvelles garanties sont prévues pour les personnes vulnérables et les mineurs non accompagnés.

Enfin, celle qui aura le plus de conséquences sera la directive « procédure ». En effet, elle apporte des garanties aux demandeurs qui entraîneront une hausse mécanique des délais d'instruction par l'OFPRA. En particulier, elle permet la présence d'un tiers auprès du demandeur d'asile à l'occasion de son entretien.

Également, l'article 31 prévoit que les « États-membres veillent à ce que la procédure d'examen soit menée à terme dans les six mois à compter de l'introduction de la demande ». Si cet objectif louable est en conformité avec celui présent dans le contrat d'objectifs et de performances de l'OFPRA, on peut tout de même se demander comment il pourra être réalisable compte-tenu des difficultés que connaît l'OFPRA, malgré une hausse des moyens, à traiter les demandes parallèlement à la hausse continue de celles-ci !


* 2 Directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d'une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection.

* 3 Directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale.

* 4 Directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale.

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