II. UN SYSTÈME A BOUT DE SOUFFLE QU'IL CONVIENT DE RÉFORMER

A. DES INTERROGATIONS QUI DEMEURENT ET UNE RÉFORME NÉCESSAIRE POUR PRÉSERVER UN DROIT FONDAMENTAL

1. Un délai de traitement des demandes préoccupant

Avec la hausse de la demande d'asile, l'OFPRA et la CNDA se sont retrouvées confrontées à un problème de traitement de cette demande et à l'incapacité d'y répondre dans des délais raisonnables.

Ainsi, le délai moyen de traitement d'un dossier par l'OFPRA est critique : 186 jours en réalisation 2012, auxquels il faut rajouter l'éventuel recours devant la CNDA. Au premier semestre 2013, la situation s'est encore détériorée, atteignant 204 jours ! La cible, horizon 2015, est de réduire ce délai de moitié.

Source : projet annuel de performance

Pourtant, le nombre total de décisions rendues par l'OFPRA n'a cessé d'augmenter depuis 2007, passant de 37 589 en 2007 à 60 128 en 2012, soit une hausse de 60% en cinq ans. En 2012, la hausse a été de 8% par rapport à 2011. En termes de productivité, le travail accompli à l'OFPRA est remarquable ! Les agents traitent en moyenne 1,8 dossier par jour, plaçant l'OFPRA devant ses équivalents européens. Néanmoins, malgré un renforcement régulier des effectifs et l'augmentation du nombre de décisions rendues, le nombre de dossiers en instance ne se résorbe pas. Ainsi, il est passé de 8 200 en 2007 à 24 260 au 31 décembre 2012. Au 30 juin 2013, il s'élèverait à 30 400. Ceci s'explique par l'augmentation, continue et plus forte, de la demande d'asile.

A l'inverse, le délai de traitement des dossiers devant la CNDA s'est amélioré : en l'espace de 3 ans, les délais prévisionnels de jugement ont diminué de 7 mois, passant de près de 15 mois et demi à un peu plus de 8 mois. Rappelons que les crédits de fonctionnement de la CNDA ne dépendent pas du présent programme, néanmoins vos rapporteurs se réjouissent de cette baisse du délai de traitement.

Rappelons que le contrat d'objectifs et de performance de l'OFPRA, signé en septembre dernier, fixe un objectif de traitement global de 9 mois, recours devant la CNDA inclus ! Soit 3 mois pour traiter le dossier à l'OFPRA. Cet objectif est à horizon 2015, pour une prévision de croissance de la demande comprise entre 5% et 10%.

Néanmoins, compte-tenu du flux actuel de dépôt des demandes, du stock de dossiers en instance, et surtout de la transposition en droit français de la directive dite « procédure » qui aura nécessairement des répercussions sur le traitement des dossiers ( cf. infra ), vos rapporteurs s'inquiètent que cet objectif reste un voeu pieux.

2. La concertation préalable à la réforme du droit d'asile

Face à une demande d'asile en augmentation continue depuis plusieurs années et la difficulté à y apporter des réponses rapides, le ministre de l'Intérieur a annoncé en mai 2013 la mise en place d'une concertation nationale sur la réforme du droit d'asile. Celle-ci a été lancée le 15 juillet 2013, sous le co-pilotage de deux parlementaires : Jean-Louis Touraine et Valérie Létard.

Un comité de concertation a été installé à cet effet, qui réunit tous les grands acteurs de la politique de l'asile : associations, Haut-commissariat aux réfugiés, administrations, élus. Ce comité doit s'appuyer sur les travaux conduits par quatre ateliers, sur les thèmes suivants : évolution des procédures d'asile ; accueil, orientation et accompagnement des demandeurs d'asile ; hébergement des demandeurs d'asile ; insertion de bénéficiaires d'une protection internationale.

Sans vouloir préjuger des conclusions du rapport, qui devrait être remis sous peu, plusieurs sujets incontournables ont d'ores et déjà été identifiés :

- Une réduction significative des délais : rappelons que ceux-ci sont de plus en plus critiques et atteignent 17 mois en moyenne aujourd'hui. L'objectif, à l'horizon 2015, est de descendre à 9 mois ;

- Une détermination dès l'arrivée, de l'éligibilité de la demande d'asile avec un traitement accéléré des demandes dont le fondement est de toute évidence infondé ;

- Un pilotage plus directif des hébergements : des équilibres entre territoires doivent être recherchés. Les demandeurs d'asile doivent être dirigés vers des hébergements en fonction des places disponibles ;

- Une territorialisation plus importante de toute la procédure : un dispositif efficace est un dispositif au plus près des réalités locales ;

Sur ces deux derniers points, rappelons que vos rapporteurs avaient souligné lors de l'examen de la LFI 2013 que 68% des demandes déposées étaient concentrées dans 5 régions, créant ainsi un déséquilibre géographique considérable.

- L'éloignement des déboutés du droit d'asile qui engorgent les hébergements. Les indicateurs de performance sont significatifs : 10% des places en CADA sont occupées par des personnes n'étant plus censées y avoir accès.

Interrogé par vos rapporteurs lors de son audition devant la commission, sur le calendrier de la réforme, le Ministre de l'Intérieur, M. Manuel Valls, a indiqué que suite à la remise des conclusions du comité de concertation, une consultation politique sera engagée, suivie des arbitrages nécessaires pour qu'un projet de loi puisse être déposé et aboutir en 2014. Quant aux modifications relevant du domaine réglementaire, elles seront prises sans attendre la loi.

Page mise à jour le

Partager cette page