B. LA MISE EN AVANT DU MILIEU OUVERT EN 2013

1. Les propositions issues des travaux de la conférence de consensus

Les travaux de la « conférence de consensus » se sont déroulés de septembre 2012 à février 2013 et se sont conclus par la remise d'un rapport au Premier ministre par un « jury de consensus », présidé par Mme Françoise Tulkens, le 20 février 2013.

Les conclusions de ce dernier sont axées sur deux idées fortes : la sanction doit avoir pour finalité principale l'insertion ou la réinsertion des personnes qui ont commis une infraction ; dans ce cadre, la prison ne doit plus être conçue en matière délictuelle comme la peine de référence mais comme une peine parmi d'autres , prononcée seulement lorsqu'il est établi qu'elle est indispensable à la sécurité de la société.

De ce postulat découlent un certain nombre de propositions, tendant en particulier à élargir les modalités d'exécution des peines en milieu ouvert . S'inscrivant dans la suite des recommandations du Conseil de l'Europe du 29 novembre 2000 sur la probation, le jury de consensus préconise la création d'une nouvelle peine dénommée « peine de probation » . Cette dernière, qui rassemblerait un certain nombre de peines et mesures non privatives de liberté qui existent actuellement de manière éparse, serait une vraie peine, clairement distincte de l'emprisonnement, associant des éléments de contrainte et de contrôle ainsi que des fonctions de réparation et de réinsertion.

Par ailleurs, afin d'éviter toute « sortie sèche », le jury recommande l'adoption d'un système de libération conditionnelle d'office et de développer les autres modes d'aménagements sous écrou aujourd'hui sous-exploités (semi-libertés, placements à l'extérieur).

Enfin, constatant l'exclusion trop fréquente des personnes placées sous main de justice des dispositifs sociaux de droit commun, le jury préconise l'instauration d'une politique interministérielle et l'inscription des problématiques d'insertion des personnes détenues dans les dispositifs de droit commun instaurés au niveau local ou départemental.

Le jury se prononce également pour la suppression des mécanismes de « peines planchers », des freins à la libération conditionnelle des personnes condamnées en état de récidive légale ainsi que des mesures de sûreté (surveillance de sûreté, rétention de sûreté).

Il préconise enfin l'adoption de nouvelles méthodes de travail pour l'évaluation des personnes et une meilleure coordination de la recherche en matière d'évaluation de la politique de prévention de la récidive.

2. Les principales mesures proposées par le projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l'individualisation des peines

Le Gouvernement s'est largement appuyé sur les travaux de la conférence de consensus, sans toutefois en reprendre l'ensemble des propositions, dans l'élaboration du projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l'individualisation des peines, qui a été déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2013.

Son exposé des motifs établit deux constats :

- si la prison est indispensable dans certains cas, son efficacité en termes de prévention de la récidive, notamment s'agissant des courtes peines, n'est pas démontrée ;

- en outre, la persistance d'un taux élevé d'occupation des établissements pénitentiaires résulte du recours « par défaut » à l'emprisonnement, faute de solutions alternatives, et de l'allongement de la durée moyenne de la détention, principalement dû au mécanisme des peines minimales et à la lourdeur des processus d'aménagement.

Composé de 21 articles, il prévoit notamment la création d'une peine de « contrainte pénale » , exécutée dans la communauté, qui pourrait être prononcée, pour tout délit puni d'une peine n'excédant pas cinq ans d'emprisonnement, à chaque fois que la personnalité de son auteur justifie un accompagnement socio-éducatif individualisé et renforcé.

Cette peine de contrainte pénale emporterait pour le condamné l'obligation de se soumettre, pendant une durée comprise entre six mois et cinq ans, à des mesures de contrôle et d'assistance ainsi qu'à des obligations et interdictions particulières destinées à prévenir la récidive et favoriser sa réinsertion (réparation du dommage, suivi d'une formation, accomplissement d'un TIG, injonction de soins, etc.). Ces diverses mesures seraient déterminées par le juge de l'application des peines après évaluation de la personnalité de la personne condamnée par le SPIP, et pourraient être modifiées en cours d'exécution de la peine.

Le projet de loi ne reprend pas la proposition du jury de consensus tendant à la mise en place d'un système de libération conditionnelle d'office mais prévoit d'instituer une procédure d'examen obligatoire de la situation des personnes condamnées à une peine de cinq ans maximum, lorsqu'elles ont exécuté les deux tiers de la peine, afin d'apprécier s'il y a lieu qu'elles bénéficient ou non d'une mesure de sortie encadrée (appelée « libération sous contrainte »). Il prévoit également un examen obligatoire des longues peines aux deux tiers de leur exécution.

Abrogeant les dispositions relatives aux « peines planchers », il propose de revenir sur une mesure importante de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, en ramenant de deux ans à un an pour les non-récidivistes et d'un an à six mois en cas de récidive les seuils d'emprisonnement permettant un aménagement de peine ab initio .

Enfin, affirmant la responsabilité qui incombe à l'ensemble des organismes qui participent au service public pénitentiaire et précisant les missions des SPIP, il comporte également un article visant à renforcer le rôle de la police et de la gendarmerie dans le contrôle, par une personne condamnée ou sous contrôle judiciaire, de ses obligations.

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