EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Notre assemblée est invitée à se prononcer sur le projet de loi relatif aux activités privées de protection des navires, déposé par le Gouvernement sur le bureau de l'Assemblée nationale le 3 janvier 2014 et adopté par les députés le 29 avril 2014.

Soumis au Parlement selon la procédure accélérée, ce texte compte, à l'issue de son examen par l'Assemblée nationale, 43 articles .

Ce projet de loi a pour objet d'autoriser et d'encadrer une nouvelle activité privée de sécurité : la protection des navires par des gardes armés . En effet, face à la recrudescence des actes d'agression armée commis dans des zones troublées, l'interdiction d'embarquer une équipe de protection privée fait peser un risque de compétitivité sur le pavillon français, depuis que plusieurs puissances maritimes ont autorisé cette forme de protection sur les navires battant leur pavillon.

Votre commission s'est saisie pour avis du présent projet de loi car il touche à un aspect de son champ de compétence, la régulation d'une nouvelle activité privée de sécurité . Elle a par ailleurs reçu délégation de la part de la commission du développement durable pour examiner au fond 27 articles, répartis au sein des titres II (articles 2 à 17), IV (articles 31 à 35) et V (articles 36 à 40).

I. L'AUTORISATION D'UNE NOUVELLE ACTIVITÉ PRIVÉE DE SÉCURITÉ : LA PROTECTION ARMÉE DES NAVIRES

A. L'INSUFFISANCE DU CADRE JURIDIQUE ACTUEL

1. L'interdiction de principe de recourir à des gardes privés, un frein à la compétitivité du pavillon français

Actuellement, le droit français interdit de recourir à des gardes privés à bord des navires battant pavillon français.

Pendant longtemps, cette interdiction n'a été pénalisante ni pour les équipages, ni pour les armateurs. En effet, en dehors de quelques zones connues et géographiquement limitées dans lesquelles il pouvait exister un risque de piraterie, comme le détroit de Malacca, les risques étaient limités.

Au cours des dernières années, le développement de la piraterie maritime a toutefois connu un regain particulier, en raison notamment de la disparition de l'autorité étatique en Somalie. Ainsi, au cours de la seconde moitié des années 1990, 209 attaques ont eu lieu, mais entre 2000 et le début de l'année 2007, près de 2463 attaques ont été perpétrées 1 ( * ) .

Rapidement, la plupart des États de l'Union européenne ont autorisé la mise en place d'entreprises de protection privée à bord des navires.

L'interdiction de disposer de gardes privés à bord des navires battant pavillon français s'est alors avérée un handicap . Il ne s'agit pas tant de pouvoir disposer systématiquement d'une équipe à bord du navire que de pouvoir s'engager auprès de l'assureur à faire embarquer, si nécessaire, une équipe de protection privée.

2. L'insuffisance des dispositifs de protection alternatifs

Des solutions alternatives à l'embarquement de gardes privés armés ont été entreprises.

Outre le suivi des recommandations édictées par l'organisation maritime internationale 2 ( * ) (OMI) pour les navires de commerce, consistant par exemple à transiter rapidement dans les zones considérées ou à installer des dispositions de protection passives, deux types de mesures ont été prises au plan national.

En premier lieu, un dispositif de contrôle naval volontaire a été créé dès 2001 en Océan Indien et étendu en 2008 dans le Golfe de Guinée . C'est un protocole d'échange d'informations entre la Marine nationale et les armateurs français. Les navires inscrits à ce dispositif reçoivent des informations sécuritaires actualisées ainsi que des recommandations. Les armateurs communiquent quant à eux la position du navire et rendent compte d'éventuelles observations d'activités suspectes.

En second lieu, l'arrêté du 22 mars 2007 établissant les responsabilités du ministère de la défense dans la protection du trafic maritime a créé un dispositif permettant d'embarquer à bord de navires privés une équipe de militaires de la marine, afin d'assurer la protection de ce navire dans une zone ou pour un transit donné.

La décision de mettre en place une équipe militaire de protection embarquée (EPE) est prise par le cabinet du Premier ministre auprès de qui l'armateur a formulé une demande, après une étude technique menée par les services du ministère de la défense, en liaison avec l'armateur. Cette étude permet d'apprécier la menace en fonction de la zone et de la vulnérabilité intrinsèque du navire ainsi que la capacité à déployer une équipe militaire compte tenu des contraintes diplomatiques et logistiques, en fonction des escales prévues et du préavis disponible.

La mise en place d'une EPE est précédée par la signature d'une convention entre l'État et l'armateur, pour chaque déploiement.

Le taux de réponse positive aux demandes est de l'ordre de 70 % . Les refus ne sont pas liés à un manque de personnels ou de moyens de la Marine nationale. Les deux principaux motifs de refus sont liés, d'une part, à l'appréciation de la situation qui a conduit à conclure que le navire ne présentait pas de vulnérabilité particulière et, d'autre part, à des délais diplomatiques trop courts pour disposer de l'autorisation du pays où le navire fera escale pour envoyer une équipe et son armement. En effet, dans certains cas, comme le marché des matières premières, les préavis d'appareillage des navires sont parfois de l'ordre de l'heure.


* 1 Source : Bureau maritime international.

* 2 http://www.imo.org/MediaCentre/HotTopics/piracy/Documents/1339.pdf

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