B. LA PROSPECTIVE DE DÉFENSE

L'action 7 « Prospective de défense » du programme 144, dotée de 1,03 milliard d'euros de crédits par le PLF 2015, soit 77 % des crédits du programme , se compose de quatre sous-actions qui correspondent à autant d'étapes de l'analyse stratégique lato sensu, comprise comme incluant la recherche technologique.

Évolution des crédits (hors titre 2 et hors FDC et AP) de l'action 7 « Prospective de défense » du programme 144

(en millions d'euros)

LFI 2014

PLF 2015

Évolution 2014-2015

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 7 « Prospective de défense »

1 097,28

1 035,12

1 034,02

1 030,02

- 5,76 %

- 0,49 %

Sous-action 7-1 « Analyse stratégique »

6,09

6,90

6,12

6,12

+ 0,49 %

- 11,35 %

Sous-action 7-2 « Prospective des systèmes de forces »

25,38

25,29

20,81

20,81

- 18,02 %

- 17,73 %

Sous-action 7-3 « Études amont »

807,87

744,99

742,91

738,91

- 8,04 %

- 0,82 %

Sous-action 7-4 « Soutien et subventions »

257,94

257,94

264,19

264,19

+ 2,42 %

+ 2,42 %

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

1. L'analyse stratégique

L'analyse stratégique, objet de la sous-action 7-1 , vise à éclairer le ministre de la défense sur l' évolution du contexte stratégique en général et constitue une analyse prospective de l'évolution de l'environnement international, en particulier des risques et des menaces qui peuvent affecter la sécurité de la France et de l'Union européenne. Menée jusqu'à présent par la délégation aux affaires stratégiques (DAS), cette analyse sera réalisée, à compter de 2015, par le pôle « prospective » de la direction de la stratégie de défense, de la prospective et de la contre-prolifération (DSD2P) de la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) nouvellement créée, chargée de piloter les travaux d'analyse stratégique et de coordonner l'ensemble des travaux de prospective menés au sein du ministère de la défense.

Le rôle du pôle « prospective » de la future direction de la stratégie de défense, de la prospective et de la contre-prolifération (DSD2P) de la DGRIS

Le pôle « prospective » de la DSD2P assure, au profit de l'ensemble des organismes du ministère, la veille prospective relative à l'environnement stratégique, dont il diffuse notamment les résultats sous forme de notes d'analyse et d'études. Il anticipe les tendances dans le moyen et long terme, en cherchant à identifier quels types de ruptures et de surprises stratégiques pourraient potentiellement affecter cet environnement, ainsi que leurs conséquences prévisibles sur la politique de défense française. Il peut contribuer aux travaux à caractère prospectif conduits par l'EMA, la DGA, le SGA et les autres organismes intéressés du ministère (centres de doctrine, etc.).

Le pôle « prospective » élabore et met en oeuvre la politique ministérielle en matière de soutien à la recherche stratégique. À ce titre :

- il assure les relations avec le monde universitaire et les instituts de recherche, et supervise l'activité de l'Institut de recherche stratégique de l'Ecole militaire (IRSEM), dont la DGRIS assure la tutelle ;

- il établit la programmation annuelle des études prospectives et stratégiques (EPS), sur la base de l'expression des besoins des membres du comité de cohérence de la recherche stratégique et de la prospective de défense (CCRP), dont il assure le secrétariat, et conduit un dialogue de gestion permanent avec les différents prestataires (instituts de recherche, universités, etc.) ;

- il met à la disposition des organismes du ministère, notamment par le biais de son site intranet, les produits des études, consultances et observatoires qu'il commande et pilote.

Source : projet annuel de performance de la mission « Défense » annexé au PLF 2015

Les crédits consacrés à la sous-action « Analyse stratégique » sont prévus à hauteur de 6,12 millions d'euros par le PLF 2015. Cette prévision marque un recul de 11 % , par rapport à 2014, alors que la dotation allouée à la sous-action avait enregistré une forte hausse, ces deux dernières années , passant de 4,89 millions d'euros en 2012 à 5,1 millions en 2013 et 6,9 millions en 2014, soit une augmentation de 40 % en deux ans.

Répartition des crédits de la sous-action 7-1 « Analyse stratégique » pour 2015

(en milliers d'euros)

Opérations budgétaires

AE = CP

Études prospectives et stratégiques (EPS)

5 514,3

Programme « Personnalités d'avenir - défense »

254,6

Recherche stratégique

349,5

Total

6 118,4

Source : projet annuel de performance de la mission « Défense » annexé au PLF 2015

? La programmation des études prospectives et stratégiques (EPS) fait l'objet d'une expression ministérielle des besoins, donnant lieu à une programmation annuelle. Le nombre des études programmées pour 2015 ne figure pas dans la documentation budgétaire ; pour l'année en cours, 68 études ont été programmées. Il convient de noter que cette analyse stratégique, parmi l'ensemble des études auxquelles elle donne lieu, permet l'élaboration du document - public - intitulé Horizons stratégiques (cf. encadré ci-après).

Le coût unitaire moyen d'une étude ne reflète pas la dispersion des montants des différentes EPS , qui vont de quelques contrats triennaux (« observatoires » regroupant plusieurs thèmes connexes, dont le montant peut atteindre 0,5 million d'euros sur trois ans) aux nombreux autres contrats (recours à des consultants, pour des montants de 4 000 à 50 000 euros, selon le thème et la complexité des sujets).

Les crédits identifiés au titre de la « recherche stratégique »
- 349 500 euros pour 2015 - correspondent principalement aux subventions pour publication octroyées chaque année par le ministère de la défense aux instituts de recherche qui en font la demande. La liste des bénéficiaires est arrêtée en cours de gestion.

? La dotation destinée au programme « Personnalités d'avenir - défense » (PAD), prévue à hauteur de 254 600 euros l'année prochaine, est stable par rapport à 2014. Ce programme d'accueil a pour objectif de sensibiliser aux positions françaises en matière de sécurité et de défense de futures élites étrangères (hauts fonctionnaires, conseillers diplomatiques, officiers, journalistes, chercheurs et industriels étrangers entre 25 et 40 ans qui pourraient exercer des fonctions importantes liées aux enjeux de sécurité et de défense à moyen ou long terme), et de créer des contacts entre ces jeunes cadres et les correspondants français partageant les mêmes centres d'intérêt. La prévision budgétaire est établie sur la base d'une programmation de 30 invitations par an, chacune d'une semaine en moyenne.

La démarche stratégique française

La politique de défense de la France s'inscrit dans un contexte caractérisé par la rapide évolution de l'environnement international et des équilibres régionaux. Les menaces directes contre nos intérêts ont diminué ; des crises régionales ou sous-régionales, en revanche, peuvent indirectement affecter la sécurité de notre pays ; des phénomènes globaux sont susceptibles d'atteindre plus directement nos intérêts (prolifération des armes de destruction massive, cyber-terrorisme..).

La volonté de répondre à ce changement de paradigme de sécurité est inscrite dans les éditions successives du Livre blanc sur la sécurité et la défense nationale (LBSDN), dont l'objectif est de définir la stratégie globale de défense et de sécurité de la France et de l'adapter à l'environnement géostratégique. Le LBSDN fixe le niveau d'ambition politique et militaire du pays afin d'établir un cadre de référence de long terme et officiel, tant vis-à-vis de l'extérieur (dimension diplomatique) qu'auprès des acteurs politiques nationaux (représentation nationale, citoyens...). Il arrête, pour les années à venir, les choix stratégiques et structurants de notre appareil de défense et de sécurité nationale.

La démarche stratégique française est également enrichie d'études et analyses donnant lieu à des documents, soit publics, soit classifiés. Pour le ministère de la défense, la démarche stratégique se décline autour des documents suivants :

1.- Horizons stratégiques . Ce document public de prospective géostratégique à l'horizon des trente prochaines années est élaboré régulièrement par la DAS, demain la DGRIS, avec le concours des principaux organismes ministériels chargés de la préparation de l'avenir. Il s'articule autour de sept domaines d'étude : relations internationales ; conflictualité et opérations militaires ; économie ; démographie et migrations internationales ; ressources et environnement ; santé ; évolutions sociétales. Il vise, notamment, à identifier les risques et menaces de nature à déstabiliser l'environnement politique international et à impacter, directement ou indirectement, les intérêts stratégiques français. Les occurrences de ruptures potentielles (politiques, technologiques, capacitaires, etc.) se déclinent notamment en « conséquences pour la Défense » directement exploitées par le Plan prospectif à 30 ans (« PP30 », cf. ci-dessous). Le document contribue également à préparer la révision du LBSDN dans sa dimension internationale.

2.- Les documents de prospective opérationnelle de l'état-major des armées (EMA). Le chef d'état-major des armées (CEMA) est chargé de la préparation des opérations présentes et futures. Il exprime un besoin militaire dont les solutions capacitaires sont élaborées en collaboration avec la direction générale de l'armement (DGA). Des situations opérationnelles à 15 ans, issues d'une analyse confrontant menaces et intérêts, sont déterminées à cet effet. Les grandes orientations stratégiques ayant été fixées dans le LBDSN de 2013, l'EMA travaille depuis sur leurs prolongements en termes d'hypothèses d'emploi. D'autres documents de prospective seront réalisés dans les deux années à venir, afin d'élaborer les réponses capacitaires au besoin militaire à un horizon de 10 à 15 ans.

3.- Le document de politique et d'objectifs scientifiques (POS). Ce document, édité tous les deux ans par la Mission pour la recherche et l'innovation scientifique (MRIS) de la DGA, répartit les sujets de recherche par domaine scientifique (mathématiques, électromagnétisme, sciences du vivant, etc.) en identifiant les thématiques à traiter par leur intérêt général d'un point de vue de recherche. Cette approche permet d'identifier et d'exploiter des synergies entre les recherches civile et militaire. La dernière édition du document de POS date de 2012 ; la prochaine sera intégrée au sein du corpus documentaire prévu dans le cadre de la nouvelle gouvernance de la S&T (science, recherche, technologie et innovation).

4.- Le Plan stratégique de recherche et technologies (PSR&T). Ce document, élaboré par la DGA, établit les grands équilibres de la R&T, en amont du processus de planification des études amont du ministère de la défense. Deux volets sont pris en considération : l'un, capacitaire, permet, à partir des plans d'équipements, de déterminer les démonstrateurs, les levées de risques et les développements technologiques à effectuer avant le lancement effectif des programmes ; l'autre a vocation à identifier les pistes technologiques prometteuses devant être accompagnées (sans qu'une échéance d'application soit forcément précisée).

5.- Le Plan prospectif à 30 ans (PP30). Ce document d'aide à la décision, dont les analyses sont liées aux thèmes du LBDSN, vise à identifier les besoins technologiques et capacitaires et à orienter les études et recherches de défense. Il est réalisé par la DGA.

Le PSR&T et le PP30 ne feront pas l'objet de mise à jour en 2015. Durant cette année, la DGA va se concentrer sur la préparation des systèmes futurs dans le cadre de la nouvelle gouvernance des activités de S&T, conformément aux évolutions d'organisation du ministère de la défense. L'orientation de ces travaux a vocation à concourir à la satisfaction du besoin militaire prévisible défini avec l'EMA.

6.- Le rapport du Groupe de travail sur les orientations stratégiques de politique spatiale de défense (GOSPS). Ce rapport précise les enjeux capacitaires à l'horizon 2020 et propose des axes d'efforts prioritaires.

- Comparaisons internationales


Aux États-Unis , depuis 1997, la Quadriennal Defense Review (QDR) constitue un document que tout nouveau président, élu ou réélu, a l'obligation de remettre au Congrès. C'est un élément fondateur de la politique menée par le département de la défense (DoD) au cours du mandat présidentiel. Prenant naturellement en compte les orientations politiques présidentielle (National Security Strategy) et ministérielle (National Military Strategy ), cette QDR vise à formaliser la vision du DoD sur les menaces et est le fruit d'un consensus entre les différentes composantes du département (armées et services). D'autres documents, non obligatoires, peuvent également être publiés pour de nouvelles orientations sur un sujet particulier, comme la Nuclear Posture Review, la Missile Defense Review et la Space Posture Review.


Au Royaume Uni , le ministère de la défense (MoD) publie et met régulièrement à jour plusieurs documents, suivant une démarche séquentielle et à plusieurs niveaux, tout à fait comparables à l'approche française (LBDSN - politique de défense - prospectives géostratégique, opérationnelle et technico-capacitaire). On distingue ainsi :

- le Global Strategic Trends out to 2040 (publié en 2010), très proche du rapport français de prospective géostratégique Horizons stratégiques ;

- le High Level Operational Concept (HLOC) , qui vise à décrire le cadre conceptuel des opérations interarmées britanniques et le développement des capacités ad hoc pour les vingt prochaines années ;

- la Strategic Defence and Security Review (SDSR) et le National Security Strategy (NSS), qui constituent les documents majeurs, comparable au LBDSN français, bénéficiant d'une vocation quasi-programmatique. La prochaine SDSR est prévue pour 2015.


L'Allemagne publie de manière non régulière un Livre blanc sur la politique de sécurité et sur l'avenir de la Bundeswehr : la dernière édition date de 2006, soit douze ans après la précédente. Ce document vise notamment à définir les orientations stratégiques pour préparer les forces armées à affronter les nouveaux défis à la sécurité. Il est considéré comme un rapport d'étape et a été complété, en 2011, par un rapport présentant les « nouveaux principes directeurs de la politique de défense », précisant notamment la vision allemande du contexte stratégique.

- Articulation avec les travaux de l'AED et de l'OTAN


Le Plan de développement des capacités (CDP) conçu au sein de l'Agence européenne de défense (AED) ne constitue pas une stratégie en soi mais un instrument de planification à l'horizon 2025, visant à garantir la capacité de l'Union européenne à répondre aux missions de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC). Combinant lacunes opérationnelles immédiates, besoins capacitaires de moyen et de long termes ( Long Term Vision, LTV), capacités militaires existantes et programmes d'armement en cours, le CDP vise à élaborer des priorités capacitaires au niveau européen et à orienter les planifications nationales. Une première série d'actions prioritaires a été définie en 2008, de nouvelles actions prioritaires sont en cours d'élaboration pour fin 2014, après une mise à jour en 2011.

Des éléments d'étude du PP30 ont été fournis par la France pour contribuer à l'élaboration du CDP (facteurs géostratégiques, missions de la PSDC et tâches militaires génériques, évolution des sciences et technologies, menaces émergentes...). Les objectifs initiaux du CDP pour les capacités militaires européennes et ceux du PP30 pour les capacités militaires françaises sont relativement proches : il s'agissait d'anticiper les besoins capacitaires résultant des formes probables de conflits futurs, et d'en déduire dans leurs grandes lignes des prévisions d'acquisition d'équipements. Cependant, les différences entre les deux documents concernent :

- le champ d'application : le PP30 vise à orienter les études de défense au profit de la programmation des équipements militaires français, le CDP a vocation à exprimer des problématiques capacitaires à l'échelle européenne (criticité, lacunes, priorités, vision d'ensemble notamment) pour guider les États membres dans l'établissement de leurs planifications nationales ou bien dans la recherche de pistes de coopération ;

- la grille de lecture : le PP30 est organisé par systèmes de forces et par thèmes transverses, alors que le CDP est construit à partir des tâches militaires génériques de la PSDC ;

- les échéances : le PP30 pose la question des futurs non tendanciels à un horizon de 30 ans, le CDP se limite quant à lui à l'horizon de la LTV (2025). Un volet majeur porte en outre sur la hiérarchisation des lacunes capacitaires par rapport à l'objectif majeur de 2010 (HLG 2010) et sur le retour d'expérience des opérations extérieures.


Dans le cadre de l'OTAN, le Processus de planification de défense (NATO Defence Planning Process - NDPP) vise à inciter les États membres de l'Organisation à détenir, conserver ou développer, à l'horizon 2030, les capacités identifiées comme nécessaires pour mener les missions confiées à l'Alliance, en concordance avec son niveau d'ambition (Level of Ambition - LoA). Le NDPP recense les forces et structure le développement capacitaire dans un souci d'interopérabilité et d'une juste répartition de l'effort de défense entre les nations.

L'analyse stratégique française contribue à l'élaboration du Strategic Foresight Analysis et du Framework for Future Alliance Operations (FFAO).

D'autres documents d'analyse stratégique de nature générale (analyse de la menace, planification capacitaire) sont régulièrement produits et diffusés sous classification OTAN. Le Commandement suprême allié Transformation (ACT) , qui assume la responsabilité du renforcement des capacités opérationnelles et se trouve dirigé par un officier général français depuis 2009, est responsable pour la réflexion stratégique militaire, le développement capacitaire et l'entraînement des forces, préparant ainsi l'avenir depuis le futur immédiat jusqu'au très long terme.

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

2. La prospective des systèmes de forces

La prospective des systèmes de forces regroupe les activités destinées à identifier les besoins opérationnels et à orienter et exploiter les études de défense pour éclairer les choix ultérieurs en matière de capacités opérationnelles. Instrument essentiel de la préparation du futur, elle fait partie intégrante du processus conduisant à la programmation et à la planification.

De façon à conjuguer les dimensions opérationnelles et techniques, ces activités sont conduites de façon collégiale par les officiers de cohérence opérationnelle (OCO) de l'état-major des armées (EMA) et les architectes de systèmes de forces (ASF) de la direction générale de l'armement (DGA). Elles sont placées sous l'égide du comité d'architecture des systèmes de forces (CASF) co-présidé par l'EMA et la DGA.

Ces activités comportent l'élaboration du Plan prospectif à 30 ans (PP30, cf. encadré ci-dessus) et la réalisation d'études à caractère opérationnel et technico-opérationnel (EOTO), objet de la sous-action 7-2. Elles s'appuient également sur les résultats des études amont qui font l'objet de la sous-action 7-3.

Les EOTO éclairent, dans les domaines opérationnels et techniques, les réflexions en matière d'équipement et d'emploi. Ces études portent sur la définition des besoins futurs à satisfaire ; la recherche du meilleur compromis entre les caractéristiques opérationnelles, les spécifications techniques et les coûts associés dans les systèmes en projet ou les évolutions des systèmes existants ; et l'emploi des systèmes d'armes. Elles font l'objet d'un programme annuel prévisionnel soumis à la validation du comité des études à caractère opérationnel et technico-opérationnel (CETO) présidé par un représentant du chef d'état-major des armées.

La sous-action « Prospective des systèmes de forces » est dotée par le PLF 2015 de 20,81 millions d'euros. La diminution apparente de ces ressources, par rapport à 2014, ne traduit que des mesures de périmètre, plus haut indiquées, en conséquence desquelles la sous-action ne retrace plus, désormais, que les EOTO. Sur le montant total alloué à ces études, 3 millions d'euros (15 %) le sont au bénéfice de la dissuasion, le reste étant consacré aux systèmes de forces conventionnels.

Répartition des crédits de la sous-action 7-2 « Prospective des systèmes de forces » pour 2015

(en millions d'euros)

Opérations budgétaires

AE

CP

Part du total (CP)

Dissuasion

3,00

3,00

15 %

Commandement et maitrise de l'information

5,96

5,85

28 %

Engagement - combat

7,60

7,77

37 %

Études transverses

0,55

0,32

2 %

Projection-mobilité-soutien

1,00

0,97

4 %

Protection et sauvegarde

2,70

2,90

14 %

Total

20,81

20,81

100 %

Source : projet annuel de performance de la mission « Défense » annexé au PLF 2015

3. Les études amont

Les études amont, objet de la sous-action 7-3 , sont définies comme « des recherches et études appliquées rattachées à la satisfaction d'un besoin militaire prévisible et contribuant à constituer, maîtriser, entretenir ou à développer la base industrielle et technologique de défense (BITD), ainsi que l'expertise technique de l'État nécessaires à la réalisation des opérations d'armement » . Ces travaux poursuivent un triple objectif :

- disposer des technologies nécessaires au développement et à l'évolution des systèmes pour lesquels une autonomie nationale totale ou partielle est requise ;

- disposer des compétences industrielles et étatiques permettant de réaliser les programmes futurs, dans un cadre national ou en coopération ;

- susciter et accompagner l'innovation dans les domaines intéressant la défense, par le canal de dispositifs de recherche coordonnés avec l'Agence nationale de la recherche (ANR) ou en favorisant la compétitivité et l'accès au marché de la défense aux PME/PMI et entreprises de taille intermédiaire (ETI), en lien avec la direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS).

Depuis 2014, la gouvernance des études amont est organisée selon une segmentation de la recherche scientifique et technologique par agrégats sectoriels qui présentent une cohérence en termes d'objectifs capacitaires, industriels et technologiques.

Globalement, la sous-action « Études amont » est dotée, pour 2015, de 742,91 millions d'euros en AE et 738,91 millions en CP , soit 55 % de l'ensemble des crédits de paiement prévus pour le programme 144. Ce niveau de CP, comme on l'a signalé déjà, marque, par rapport à 2014, une légère diminution (- 0,8 %), mais - vos rapporteurs pour avis le constatent avec satisfaction - il demeure conforme à la LPM , dont le rapport annexé prévoit, en faveur des études amont, une dotation de 730 millions d'euros en moyenne annuelle sur la période 2014-2019, soit environ 100 millions de plus par an qu'avant 2013.

Répartition des crédits de la sous-action 7-3 « Études amont » pour 2015

(en millions d'euros)

Opérations budgétaires

AE

CP

Part du total (CP)

Dissuasion

199,00

232,00

31 %

Aéronautique et missiles

212,91

168,55

23 %

Information et renseignement classique

97,00

114,74

15 %

Information et renseignement espace

20,00

12,39

3 %

Naval

37,00

34,23

4 %

Terrestre ; nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) ; et santé

40,00

52,43

7 %

Innovation et technologies transverses

137,00

124,56

17 %

Total

742,91

738,91

100 %

Source : projet annuel de performance de la mission « Défense » annexé au PLF 2015

Les études amont prévues en 2015


Dissuasion (232 millions d'euros en CP). - Les crédits affectés pour 2015 aux études amont concernant la dissuasion le sont au profit, notamment, de la préparation du programme de sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) de troisième génération, ainsi que des études visant à porter à maturité les technologies pour les évolutions du missile M51, en ce qui concerne la composante océanique de la dissuasion, et des études et expérimentations préparant la prochaine génération de missile pour ce qui touche à la composante aéroportée.


Aéronautique et missiles (168 millions d'euros en CP). - Dans le domaine de l'aviation de combat, l'année 2015 sera marquée par l'achèvement du programme des essais en vol du démonstrateur de drone de combat NEURON, incluant en particulier la délivrance d'un armement, l'aboutissement des travaux lancés en 2010 concernant la maturation de technologies améliorant la discrétion du Rafale, ainsi que la réalisation d'un démonstrateur d'évolution du radar RBE2. Dans le domaine des hélicoptères de combat et des aéronefs de transport, les études relatives à la préparation d'un futur standard du Tigre seront poursuivies, ainsi que celles portant sur de nouveaux types de leurres améliorant l'autoprotection des aéronefs, à la suite de résultats attendus lors d'essais en vol. Dans le domaine des missiles, un avant-projet de propulseur d'un missile de combat aérien de nouvelle génération est attendu. Les premières études d'architecture pour une future famille de missiles à longue portée seront lancées.


Information et renseignement classique (114 millions d'euros en CP). - Dans les domaines du renseignement militaire et de la surveillance, les engagements prévus pour 2015 portent sur des études pour les futurs moyens de recueil et de traitement d'image et des émissions électromagnétiques, sur le traitement en masse de l'information non structurée, sur les technologies de surveillance, de détection et de pistage de cibles ainsi que les technologies pour plateformes de drones aéronautiques de surveillance. Dans ces domaines, les principaux résultats attendus concernent la préparation des programmes de renseignement d'origine électromagnétique tactiques, la validation des briques technologiques pour un moyen optronique de recueil aéroporté de nouvelle génération et un système permettant l'évitement automatique en vol pour drones. Dans les domaines des systèmes d'information et de communications et de la cybersécurité, les principaux attendus portent sur un système de communications pour sous-marins en plongée et sur les liaisons à haut débit pour plateformes aéronautiques.


Information et renseignement espace (12 millions d'euros en CP). - Dans le domaine spatial, les études amont porteront principalement, en 2015, sur les technologies de réception et d'émission discrète pour le segment utilisateur des futures capacités de télécommunications satellitaires, mais aussi, en matière de renseignement, sur les futurs moyens spatiaux de recueil de l'information.


Naval (12 millions d'euros en CP). - Les principaux attendus des études amont du domaine naval en 2015 concernent l'évaluation du potentiel technologique de senseurs innovants, ainsi que des avancées sur de nouvelles technologies de détection sous-marine. Les engagements portent notamment sur la poursuite des études sur les systèmes de combats des navires, en particulier la conception d'architectures ouvertes et évolutives, la lutte sous la mer, les systèmes de guerre électronique et l'architecture des futurs navires de combat.


Terrestre, NRBC et santé (52 millions d'euros en CP). - L'évaluation de technologies concourant à la protection des systèmes terrestres constitue le principal attendu des études amont du domaine en 2015. La mise au point d'une charge militaire à effets collatéraux réduits est également attendue, en ce qui concerne les munitions. Les engagements portent sur la poursuite des études relatives à la protection des systèmes et du combattant en vue de porter à maturité les technologies, ainsi que sur les munitions polyvalentes. Il est également prévu de lancer des études pour un système de reconnaissance robotisé. Dans le domaine de la défense NRBC, les études concernant l'approfondissement de la connaissance des risques et de leur prise en compte se poursuivront en 2015. Il en ira de même des travaux portant sur la santé du militaire en opération, notamment dans les domaines de la réparation tissulaire et de la lutte contre le choc hémorragique.


Innovation et technologies transverses (124 millions d'euros en CP). - Le soutien à l'innovation est effectué au moyen de différents dispositifs ; dans le cadre du « Pacte défense-PME », il est prévu d'accroitre la dotation du dispositif « RAPID », destiné depuis 2009 au soutien à l'innovation duale dans les PME et ETI. La direction générale de l'armement (la DGA) s'est engagée à porter le montant des crédits de ce dispositif de 40 à 50 millions d'euros (soit + 25 %) en trois ans : 45 millions dès cette année, 50 millions l'an prochain. Les études amont à caractère transverse concernent les technologies critiques, des technologies clés et le développement de l'expertise technique nécessaire à la conduite des opérations d'armement ; en 2015, les principaux attendus en la matière visent les composants et matériaux critiques pour les futurs systèmes d'arme et de nouvelles méthodologies pour leur évaluation.

Source : projet annuel de performance de la mission « Défense » annexé au PLF 2015

Il convient de noter que les études amont ne constituent qu'une partie de l'effort de recherche en matière de défense . Celui-ci est usuellement mesuré à travers les agrégats « recherche et technologie » (R&T, composé du budget des études amont et des subventions aux écoles relevant de la tutelle de la DGA, que retrace la sous-action 7-4 du programme 144) et « recherche et développement » (R&D, composé de l'agrégat R&T, des autres études de défense - EPS, EOTO, crédits de recherche du CEA-DAM et crédits de recherche duale du CNES et du CEA - et des crédits de développement des programmes d'armement retracés, au plan budgétaire, par le programme 146 « Équipement des forces »)

Évolution des crédits de recherche de défense

(CP inscrits en LFI, en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Budget de la défense

42 541

41 990

41 844

41 227

41 274

42 057

Études amont

660,1

653,2

645,2

633,2

747,9

745,9

R&T

821,0

814,7

800,5

780,5

896,7

867,2

Études de défense

1 571,3

1 620,1

1 647,9

1 644,0

1 728 ,4

1 728,0

- dont recherche CEA

527,4

585,5

626,6

647,7

615,0

640,8

- dont EPS

3,9

3,5

4,2

4,5

4,7

5,8

- dont EOTO

19,0

18,5

19,6

18,5

19,8

20,5

- dont recherche duale

200,0

200,0

196,9

192,9

192,2

192,9

Part des études de défense dans le budget de la défense

3,7 %

3,9 %

3,9 %

4,0 %

4,1 %

4,1 %

Développements (prog. 146)

2 253,1

1 948,5

1 629,6

1 800

1 550,0

1 835,1

Total R&D

3 824,3

3 568,6

3 277,5

3 444,0

3 278,4

3 563,1

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

Le budget de R&T prévu en 2015 s'élève à 864 millions d'euros en crédits de paiement, niveau stable par rapport à 2014. Alors que les développements réalisés dans le cadre des programmes d'armement bénéficieront de 2 milliards d'euros (crédits inscrits sur le programme 146, en augmentation par rapport à 2014), le montant total du budget de R&D de la défense sera porté à 3,6 milliards d'euros l'année prochaine, en augmentation par rapport à 2013 et 2014 (+ 11 % en deux ans). Vos rapporteurs pour avis s'en réjouissent : c'est un niveau d'effort, en la matière, qui n'avait pas été atteint depuis 2010.

Évolution des crédits de recherche de défense

(CP, en millions d'euros)

LFI 2013

LFI 2014

PLF 2015

Études amont

747,9

745,0

738,9

R&T

896,7

866,7

863,7

Développements (prog. 146)

1 550,0

1 835,0

2 051,6

Total R&D

3 278,4

3 563,1

3 639,0

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

Malgré les contraintes pesant sur ses finances publiques, la France est le pays d'Europe qui consacre le plus gros effort budgétaire à sa R&D de défense , comme le montre le tableau ci-après.

Évolution des crédits de recherche de défense

(crédits exécutés, en milliards d'euros)

2011

2012

2013

2014

France

Budget de la défense

41,84

41,23

41,27

42,06

R&T

montant

0,8

0,78

0,86

0,87

% budget

1,91 %

1,89 %

2,1 %

2,07 %

R&D

montant

3,28

3,44

3,29

3,56

% budget

7,84 %

8,34 %

7,97 %

8,46 %

Royaume-Uni

Budget défense

39,2

39,9

39,72

39,24

R&T

montant

0,61

0,45

0,44

n.d.

% budget

1,56 %

1,13 %

1,11 %

n.d.

R&D

montant

2,9

2,67

1,57

n.d.

% budget

7,40 %

6,69 %

3,97 %

n.d.

Allemagne

Budget défense

31,98

31,87

33,28

32,84

R&T

montant

0,391

0,359

0,392

0,389

% budget

1,22 %

1,13 %

1,18 %

1,18 %

R&D

montant

0,922

0,918

0,927

0,815

% budget

2,88%

2,88 %

2,79 %

2,48 %

Italie

Budget défense

23,87

22,8

23,13

22,8

R&T

montant

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

% budget

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

R&D

montant

0,06

0,06

0,06

0,06

% budget

0,25 %

0,26 %

0,26 %

0,26 %

Source : réponse au questionnaire adressé au Gouvernement en application de l'article 49 de la LOLF

4. La gestion des moyens et subventions

La sous-action 7-4 « Gestion des moyens et subventions », dotée de 264 millions d'euros par le PLF 2015, retrace :

- d'une part, les subventions pour charges de service public aux opérateurs de l'État rattachés au programme 144 (ONERA et écoles sous tutelle de la DGA) ;

- d'autre part, des subventions versées à des organismes d'études et à l'institut Saint-Louis ;

- enfin, la masse salariale des élèves de l'École polytechnique (15,57 millions d'euros en 2015), comptabilisée à compter de 2015, comme déjà indiqué, en dépenses de fonctionnement (crédits de titre 3).

À périmètre constant, les crédits prévus pour cette sous-action l'année prochaine sont en hausse de 2,6 % par rapport à l'année 2014, alors que, sur le même périmètre, ils étaient cette année en baisse de 6,5 % par rapport à l'année 2013.

? La subvention de l'ONERA (Office national d'études et de recherches aérospatiales, qui a pour mission de développer, d'orienter, de coordonner et de promouvoir les recherches dans le domaine aérospatial) est fixée par le PLF 2015 à 98 millions d'euros , soit une hausse de 1 ,6 % par rapport à 2014 (subvention de 96,43 millions d'euros), compte non tenu de 7 millions d'euros supplémentaires qui seront attribués, en gestion, pour compenser un gel antérieur de crédits destinés à financer une opération immobilière devenue sans objet. Le montant total de la subvention, l'année prochaine, atteindra donc 105 millions d'euros .

Eu égard au rôle de l'ONERA dans l'industrie de défense française, vos rapporteurs pour avis se réjouissent de cette évolution , même si le niveau de la subvention à l'établissement restera en 2015 en-deçà de celui des subventions versées pour 2013 (108,9 millions d'euros) et pour 2012 (109,7 millions).

Cette subvention :

- d'une part, financera la partie la plus amont (c'est-à-dire à risque) du programme annuel d'études de l'ONERA, pour entretenir et faire évoluer les compétences nécessaires sur le moyen terme à ses donneurs d'ordre (DGA, autres institutions publiques, industrie, etc.), la partie la plus aval du programme annuel étant financée par des ressources propres, issues de contrats avec divers donneurs d'ordre, valorisant les compétences développées grâce à la subvention ;

- d'autre part, doit permettre à l'ONERA de disposer de moyens du meilleur niveau (souffleries, grands calculateurs, etc.) pour soutenir la compétitivité des produits industriels futurs.

? Les subventions prévues pour les écoles placées sous la tutelle de la DGA - 130,88 millions d'euros globalement - s'avèrent, par rapport à 2014, en diminution de 1,6 % (- 2,12 millions d'euros, après une baisse de 4,7 millions entre 2013 et 2014). À périmètre constant, le plafond d'emploi est également en baisse de 18 équivalents temps plein (ETP). Cette mesure d'économie budgétaire induit, à périmètre constant, une diminution de 0,24 % des subventions aux opérateurs de l'État rattachés au programme 144.

Les subventions se répartissent comme suit :

- pour l'École polytechnique (X), 65,48 millions d'euros, contre 67,99 millions en 2014 (- 3 %), auxquels s'ajoutent les 15,57 millions d'euros susmentionnés de masse salariale des élèves ;

- pour l'Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace (ISAE), 34,08 millions d'euros, contre 34,11 millions en 2014 ;

- enfin, pour l'École nationale supérieure de techniques avancées (ENSTA) Paris Tech , 17,12 millions d'euros, contre 17,18 millions en 2014, et, pour l'ENSTA Bretagne , 14,20 millions d'euros, contre 14,21 millions en 2014.

? La subvention de l'Institut de recherche de Saint-Louis , fixée conventionnellement entre la France et l'Allemagne, sera l'année prochaine identique à celle des trois années précédentes : 17,74 millions d'euros . Rappelons que cet établissement franco-allemand, créé par une convention de 1958 dans le but de mettre en oeuvre une coopération étroite entre les deux États en ce qui concerne les recherches et études, tant scientifiques que techniques, dans le domaine de l'armement, et de renforcer ainsi une défense commune, réalise des recherches fondamentales et appliquées, des études techniques et des démonstrateurs de faisabilité technologique, ainsi que des travaux d'expertise.

? Enfin, 2 millions d'euros sont inscrits dans le PLF 2015 en vue de financer :

- d'une part, des subventions à des fondations reconnues d'utilité publique (1,2 millions d'euros), pour des travaux portant sur l'entretien de la pensée stratégique de défense dans le domaine de la dissuasion, l'analyse des données économiques internationales dans le secteur de l'armement au service de la coopération et de la base industrielle et technologique de défense (BITD), la connaissance des enjeux relatifs aux menaces nouvelles (cyberespace, armes à énergie dirigée), et l'analyse des tendances et opportunités sur le marché de l'armement et des exportations actualisée par pays au sein d'une base de données mondiale ;

- d'autre part, des subventions de soutien des actions en faveur des PME-PMI stratégiques pour la défense (0,8 million d'euros), lancées notamment dans le cadre de partenariats avec les organisations professionnelles, les acteurs locaux du développement économique (notamment les agences de développement régionales ou les chambres consulaires) ou des associations représentatives de PME technologiques.

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