II. DES EFFORTS DE RATIONALISATION POUR DES EFFETS CIBLÉS

A. LA CONTRACTUALISATION : L'UN DES ENJEUX DE LA RÉFORME TERRITORIALE

1. Une progression qui doit être saluée

Il est utile de rappeler que l'État développe, en partenariat avec les collectivités territoriales, une politique de soutien à des établissements labellisés et des réseaux. À travers les missions d'intérêt général qui leur sont confiées, ces structures contribuent au renouvellement artistique et à la démocratisation culturelle, dans un cadre concerté d'aménagement du territoire.

Les labels et réseaux du spectacle vivant

Le ministère de la culture et de la communication distingue 7 labels nationaux et 3 réseaux en matière de création et de diffusion artistique.

Les 7 labels recouvrent :


les 37 centres dramatiques nationaux (CDN) et régionaux (CDR) , dirigés par un ou plusieurs artistes. On compte à chaque saison plus d'un million de spectateurs payants ;


les 19 centres chorégraphiques nationaux (CCN) , dirigés par un ou plusieurs artistes et travaillant avec les établissements culturels locaux. Les 19 CCN produisent 1 200 représentations annuelles devant 500 000 spectateurs ;


les 71 scènes nationales (SN) qui ont une mission de diffusion artistique et, dans certains cas, de production, dans les domaines du théâtre, de la musique, de la danse et parfois des arts plastiques et du cinéma ;


les 6 centres nationaux de création musicale (CNCM) qui ont pour mission de favoriser la création d'oeuvres faisant appel aux nouvelles technologies et de développer le répertoire contemporain ;


les 86 scènes de musiques actuelles (SMAC) qui concourent au développement de la carrière des jeunes artistes, accompagnent les talents émergents, initient et accueillent des résidences de création et diffusent l'ensemble des musiques actuelles ;


les 12 centres nationaux des arts de la rue (CNAR) ;


les 13 pôles nationaux pour les arts du cirque (PNAC) qui contribuent à la structuration et au rayonnement des arts du cirque.

Les 3 réseaux sont les suivants :


les 19 orchestres permanents en région , qui proposent 2 500 représentations annuelles pour 1,5 million de spectateurs ;


les 13 opéras en région qui mettent en oeuvre la politique de l'État en faveur de l'art lyrique. Ils proposent 1 600 manifestations par an pour plus d'un million de spectateurs ;


les 11 centres de développement chorégraphiques (CDC) , structures associatives dont le projet est centré autour du développement de la danse dans sa diversité et de sa diffusion en région auprès des publics et des professionnels.

Source : Projet annuel de performances pour 2015

Comme le rappelle le projet annuel de performances, le ministère de la culture et de la communication veille à ce que les structures artistiques puissent consacrer l'essentiel de leurs subventions aux missions culturelles dont elles ont la charge. Il s'appuie pour cela sur un panel d'outils tels que la charte des missions de service public pour le spectacle vivant, la circulaire du 31 août 2010 relative aux labels et réseaux nationaux du spectacle vivant, les cahiers des charges ou encore les dispositifs partenariaux d'aides aux équipes artistiques.

Circulaire du 22 février 2013 : présentation des améliorations apportées à la circulaire du 31 août 2010 par le ministère de la culture et de la communication

La promotion de l'égalité, de la diversité et de la parité est un axe central de toute politique de cohésion sociale et de lutte contre les discriminations. Elle répond à des considérations de justice et d'égalité et constitue une obligation démocratique. Le ministère de la culture et de la communication a décidé d'inscrire son action dans cette démarche et d'en faire une priorité.

À l'instar des différentes mesures législatives venues encadrer les procédures de nomination afin d'assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les établissements publics de l'État, la politique de recrutement du ministère de la culture et de la communication dans les structures labellisées et les réseaux du spectacle vivant ainsi que dans les réseaux de diffusion de l'art contemporain, menée en concertation avec les collectivités territoriales, se devait également d'être un instrument fort de soutien à la promotion de l'égalité.

À ces fins, la circulaire du 22 février 2013 est venue préciser les modalités de recrutement des dirigeants des structures concernées de façon à garantir les objectifs de transparence et de parité qui doivent désormais présider au renouvellement de la génération des directeurs.

L'enjeu est de favoriser le renouvellement des générations, la parité dans l'exercice des responsabilités et de donner la place qui convient aux créateurs les plus talentueux . Dans cette perspective, lors du recrutement de la personne en charge de la direction de structure recevant le soutien de l'État, les services du ministère de la culture et de la communication veillent à :

- établir avec les collectivités territoriales partenaires une liste restreinte de candidats garantissant la parité ;

- tendre vers la parité pour la composition du jury présidant au choix final des candidats.

Par ailleurs, dans l'objectif de mieux assurer le renouvellement des générations, le nombre maximal de mandats des directeurs de CDN et de CCN est fixé à trois pour une durée totale cumulée de dix ans . Néanmoins, si des circonstances exceptionnelles le justifient, sur décision du ministre chargé de la culture, et après concertation avec les collectivités territoriales concernées, le troisième mandat peut être prolongé pour une durée n'excédant pas trois ans.

Cette politique a d'ores et déjà donné des résultats dans le cadre de l'important mouvement de renouvellement des directions en 2013-2014.

Source : Ministère de la culture et de la communication. Direction générale de la création artistique

Le tableau ci-après retrace la répartition des crédits d'intervention déconcentrés en fonctionnement, consacrés au soutien que l'État apporte, via les DRAC, aux activités artistiques et culturelles mises en oeuvre par les labels et réseaux, par les équipes artistiques, le programme de scènes conventionnées et les autres dispositifs, lieux et institution de création et de diffusion du spectacle vivant.

Source : Projet annuel de performances pour 2015 - Mission « Culture »

Sur un total de 284,06 millions d'euros en AE=CP (soit une augmentation de près de 300 000 euros par rapport au PLF pour 2014) , 192,698 millions d'euros bénéficient aux labels et réseaux, soit près de 68 % des crédits d'intervention déconcentrés .

2. Les limites d'une approche multipartite : quelle leçon pour la réforme territoriale ?

La circulaire ministérielle du 31 août 2010 5 ( * ) relative aux labels et réseaux du spectacle vivant et les cahiers des charges qui lui sont associés ont permis une avancée substantielle dans l'organisation de l'évaluation des structures publiques du secteur du spectacle vivant. L'État y précise les missions qu'il assigne à chaque catégorie d'établissements, autour de trois grandes catégories de critères portant sur les missions artistiques, les missions territoriales ou en direction des publics et les missions professionnelles.

Cette même circulaire préconise la conclusion d'une convention pluriannuelle d'objectifs (CPO) et multipartite , destinée à sécuriser les financements des institutions, à permettre à chacune d'elle de disposer d'une feuille de route et à fixer les principales modalités d'une évaluation. C'est là que devraient pouvoir se préciser, entre les partenaires publics et la structure considérée, les contours d'une ambition partagée.

Or, le diagnostic posé au deuxième trimestre 2013 dans le cadre de l'évaluation de la politique en faveur du spectacle vivant, décidé par le comité interministériel de modernisation de l'action publique (CIMAP) du 18 décembre 2012, a mis en évidence que les conventions conclues sont très majoritairement bilatérales . « En effet, le principe de conventions multipartites s'est révélé être d'une mise en oeuvre complexe et lente en raison de la difficulté des collectivités territoriales à se soumettre au modèle défini par la circulaire du Premier ministre du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations. La sécurisation juridique vis-à-vis des risques de requalification et du respect de la réglementation européenne sur les aides d'État a pour contrepartie une moins grande souplesse des modes de contractualisation. Il en résulte que nombre d'entreprises du spectacle vivant voient leur activité régie par autant de conventions bilatérales qu'elles ont de financeurs publics associés » . Cette réponse apportée par écrit à votre rapporteur pour avis a été nuancée par le directeur général de la création artistique lors de son audition, celui-ci expliquant que le constat était surtout vrai pour les structures hors du champ des labels et réseaux. Cela signifierait tout de même que 32 % des crédits déconcentrés ne peuvent actuellement faire l'objet d'une contractualisation multipartite.

Une réflexion interministérielle, pilotée par le ministère chargé de la jeunesse et des sports et associant le ministère de la culture et de la communication, afin d'assouplir le modèle de convention pluriannuelle défini par la circulaire précitée, a été engagée.

Comme l'indique le ministère de la culture, « la contractualisation s'avère parfois plus complexe également du fait des différences de hiérarchisation des objectifs qui fondent l'intervention de chaque financeur public . L'évolution en cours de la carte territoriale française pourrait néanmoins contribuer à accentuer la complémentarité des objectifs des collectivités publiques ».

Cette question figure donc parmi les enjeux de la co-construction de scénarii de réformes par l'État et les collectivités territoriales dans le cadre de l'évaluation de la politique en faveur du spectacle vivant. Les acteurs culturels auditionnés ont fait part de leur interrogation sur la portée réelle de l'article 29 du projet de loi n° 636 (2013-2014) portant nouvelle organisation territoriale de la République, qui ouvre la faculté d'instaurer un guichet unique . La multiplicité des contrats et des priorités laisse entrevoir, à tout le moins dans le domaine du spectacle vivant, hors labels et réseaux, une réticence des collectivités territoriales ou de l'État à déléguer leur compétence d'instruction et de gestion des aides et subventions, faute de consensus sur les critères devant fonder une convention de délégation.

Le ministère de la culture a, en outre, rappelé que les résultats de l'étude avaient fait apparaître une insuffisante caractérisation des objectifs au moyen d'indicateurs mesurables, permettant de tirer toutes les conséquences des conventions conclues avec les institutions du spectacle vivant.

La structuration en cours de l'observation au sein de la direction générale de la création artistique (DGCA) devrait contribuer à résoudre l'insuffisance en indicateurs mesurables, constatée notamment en ce qui concerne la dimension économique du secteur subventionné.

Dans un contexte de diminution de la dotation globale de fonctionnement, votre rapporteur pour avis rappelle la nécessité d'une vigilance collective pour éviter que la culture ne soit sacrifiée dans un mouvement de désengagement des collectivités territoriales.


* 5 Voir annexe ci-après.

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