LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Auditions de M. Jean-Claude CARLE ,
Rapporteur pour avis sur les crédits
de la mission « Enseignement scolaire »

Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

M. Emmanuel SKOULIOS, conseiller en charge des affaires budgétaires et de la modernisation de l'action publique

M. Éric TOURNIER, conseiller en charge du premier degré, de l'éducation prioritaire et des relations avec les inspecteurs d'académie-directeurs académiques des services de l'éducation nationale

Mme Agathe CAGÉ, conseillère en charge du second degré, des programmes et de l'évaluation des élèves

MEDEF - Direction de l'éducation et de la formation

Mme Florence POIVEY, présidente de la commission éducation, formation et insertion

Mme Sandrine JAVELAUD, directrice de la mission éducation et enseignement supérieur

Secrétariat général de l'enseignement catholique (SGEC)

M. Pierre MARSOLLIER, délégué général aux relations politiques,

M. Yann DIRAISON, délégué général aux ressources humaines

Syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale (SNPDEN)

M. Philippe TOURNIER, secrétaire général

Mme Isabelle BOURHIS, secrétaire générale adjointe

Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC (SNUIPP-FSU)

M. Arnaud MALAISE, secrétaire national

Mme Luce DESSEAUX, secrétaire nationale

Auditions de Mme Françoise FÉRAT ,
Rapporteur pour avis sur les crédits
du programme « Enseignement technique agricole »

Conseil national de l'enseignement agricole privé (CNEAP)

M. Philippe POUSSIN, secrétaire général

Union nationale des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation (UNMFREO)

MM. Xavier MICHELIN, président, et Serge CHEVAL, directeur

Union nationale rurale d'éducation et de promotio n (UNREP)

MM. Brice POURCHET, président, et Daniel BENISTANT, directeur adjoint

Syndicat national de l'enseignement technique agricole public (SNETAP)

MM. Jean-Marie LE BOITEUX, secrétaire général, et Serge PAGNIER, secrétaire général adjoint « politique scolaire et laïcité »

Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, Direction générale de l'enseignement et de la recherche

Mme Mireille RIOU-CANALS, directrice générale de l'enseignement et de la recherche

M. Philippe Schnäbele, directeur général adjoint

ANNEXE

Compte rendu de l'audition de Mme Najat VALLAUD-BELKACEM,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur
et de la recherche et de la recherche

_______

MARDI 27 OCTOBRE 2015

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Nous sommes heureux de vous accueillir, madame la ministre, malgré un horaire qui nous prive de la présence de plusieurs de nos collègues. Vous voudrez bien nous présenter votre budget et vous évoquerez certainement la réforme du collège, sur laquelle nous vous avions entendue au printemps, et celles de de l'évaluation, des programmes ainsi que sur le plan numérique pour l'école.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche . - Il est effectivement important de passer en revue ce budget, mais aussi toutes les réformes qui le sous-tendent. En 2013, l'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté une loi majeure, celle de la refondation de l'école, qui a insufflé une ambition éducative sans précédent. Ce budget est à la hauteur de l'enjeu.

L'année prochaine, l'enseignement scolaire sera doté de 65,72 milliards, soit 694 millions de plus que cette année. Grâce à l'effort budgétaire que constitue la création de 60 000 postes dans l'éducation au cours du quinquennat, nous poursuivons la mise en oeuvre de l'engagement du Président de la République. Ainsi, 54 000 postes auront été créés dans l'éducation nationale, 5 000 dans l'enseignement supérieur et 1 000 dans l'enseignement agricole. L'année prochaine, 10 711 postes seront créés, dont 8 000 d'enseignants. Depuis 2012, 47 078 ETP auront été créés pour l'éducation. Il en restera 12 922 à créer en 2017 pour atteindre l'objectif des 60 000 postes.

La semaine dernière, les députés Les Républicains ont considéré que c'était folie de créer autant de postes dans l'éducation nationale. J'assume pleinement ce désaccord : les quelque 80 000 suppressions de postes du quinquennat précédent avaient abîmé l'école de la République et provoqué de nombreux dysfonctionnements.

M. Jean-Claude Luche . - Nous n'avons rien dit ! C'est de la provocation.

M. Jacques Grosperrin . - Tout à fait !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - J'espère que les sénateurs Les Républicains ont une autre façon de voir les choses.

La rentrée s'est bien passée, notamment parce qu'il y avait un enseignant dans chaque classe, malgré la forte poussée démographique. Élus de terrain, vous savez le traumatisme que provoque la fermeture d'une classe dans une commune. J'ai d'ailleurs reçu de très nombreuses lettres de parlementaires de tous bords me demandant le maintien de telle ou telle classe de leur circonscription, y compris de la part de ceux qui combattent la création de nouveaux postes d'enseignants. Ces créations accompagnent de véritables politiques publiques, comme la priorité accordée au premier degré - afin d'assurer la maîtrise des fondamentaux, la refonte de l'éducation prioritaire, qui vise à donner à tous les élèves les mêmes chances de réussite, ainsi que la réforme du collège - afin que tous les jeunes maîtrisent le socle de connaissances, de compétences et de culture.

Ces créations de postes accompagnent également les territoires dans leur diversité : la poussée démographique est très forte dans certains départements ; il faut qu'ils puissent garder des taux d'encadrement adaptés. Mais nous devons aussi soutenir l'école en milieu rural malgré la baisse démographique que connaissent certains territoires.

Conformément aux décisions prises lors du comité interministériel aux ruralités qui s'est tenu à Vesoul en septembre, le Premier ministre a confié au sénateur de l'Ariège Alain Duran la mission d'accompagner les élus locaux vers les conventions ruralité : les élus des départements très ruraux peuvent ainsi maintenir des services de qualité, notamment en réorganisant les réseaux d'école afin de garder tout ou partie des postes malgré la baisse démographique. Nous souhaitons développer cet outil précieux et j'invite les élus de ces territoires à conclure ces conventions avec nous.

La formation initiale des enseignants est la pierre angulaire d'un enseignement de qualité. Sur ce point, nous avons entendu dire tout et n'importe quoi, notamment que les postes créés depuis 2012 ne concerneraient que des professeurs stagiaires, comme s'il s'agissait d'emplois précaires. Les élèves en dernière année d'école supérieure du professorat et de l'éducation (ESPÉ) sont à mi-temps dans les classes et à mi-temps en formation. L'année suivante, ils sont titularisés. Il s'agit bien de postes à part entière.

Nous avons également fourni un effort important pour la formation continue : 72 millions d'euros lui sont consacrés (soit une hausse de 75 % par rapport à 2012), dont 24 millions pour préparer les enseignants à l'ère numérique.

Le soutien financier de l'État aux communes pour les activités périscolaires associées aux nouveaux rythmes scolaires est pérennisé.

Cette rentrée a marqué la deuxième année de généralisation des nouveaux rythmes scolaires, qui ont entraîné des évolutions significatives pour les équipes enseignantes, pour les enfants, pour les parents, mais aussi pour les communes.

M. Jean-Claude Luche . - Ainsi que pour les départements !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - Pour les intercommunalités aussi. Cette réforme a demandé un effort d'adaptation de tous les acteurs, notamment des équipes éducatives et des maires. Avec cinq matinées d'enseignement retrouvées, elle rythme mieux les journées, favorise les apprentissages et l'acquisition des savoirs fondamentaux.

Cette année, les organisations du temps scolaire sont caractérisées par une très grande stabilité, ce qui confirme que la réforme est installée dans la durée. Certes, des ajustements seront encore nécessaires. J'ai ainsi donné instruction de renforcer l'accompagnement des équipes enseignantes parce qu'une fois les questions organisationnelles réglées, toute l'énergie doit être portée sur le pilotage pédagogique. Comme certains d'entre vous me l'ont demandé, j'ai souhaité qu'une attention particulière soit apportée au risque de fatigue des enfants en maternelle,. Voilà pourquoi j'ai demandé aux chercheurs de l'université d'Orléans-Tours de mener une enquête approfondie auprès de milliers d'enfants.

Les activités périscolaires relèvent de la compétence des communes. Mais comme cette réforme est fondamentale, le gouvernement l'accompagne avec le fonds de soutien. Nous avons publié cet été les décrets qui étaient nécessaires pour le rendre pérenne. Les communes continueront après 2015-2016 à percevoir 50 euros par élève, voire 90 euros pour les communes les plus en difficulté.

Désormais, l'attribution de ces aides est liée à la signature d'un projet éducatif territorial (PEDT). Il ne s'agit pas d'une contrainte, mais d'une opportunité pour mettre en place des activités périscolaires de qualité. Les élus locaux ne s'y sont pas trompés : à la rentrée 2015, 82 % des communes avaient signé un PEDT, ce qui nous a agréablement surpris. Nous souhaitons parvenir à 100 %. Avec Patrick Kanner, mon collègue chargé de la ville, de la jeunesse et des sports, nous accompagnons les communes, notamment rurales, pour trouver les animateurs et mutualiser les formations. Si nous atteignons les 100 %, nous en tiendrons bien évidemment compte dans le budget afin que chaque commune bénéficie de cette aide.

Avec la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), nous accompagnons les communes pour l'accès aux activités périscolaires des élèves en situation de handicap. La CNAF a ainsi provisionné un fonds pour financer les aménagements nécessaires.

La réforme est loin de n'être qu'une somme de contraintes : le nombre des accueils périscolaires a augmenté de près de 30 % sur 2014-2015 et les activités sont très diversifiées. Comme l'a démontré une enquête de la CNAF publiée en décembre 2014, ces activités sont largement fréquentées par les enfants et donnent satisfaction aux parents. À ce titre, le Premier ministre a confié à Françoise Cartron, que je salue, la mission d'établir le bilan des initiatives prises par les élus locaux pour organiser et développer les activités périscolaires afin que l'État accompagne mieux les communes, notamment les plus petites et les plus rurales. Cet accompagnement passe par la diffusion des bonnes pratiques et par une réflexion sur le recrutement et la qualification des animateurs, ainsi qu'aux adaptations et aux simplifications à envisager. Nous comptons sur elle pour nous aiguillonner, sinon nous harceler.

Mme Françoise Cartron . - C'est bien me connaître...

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - Je veux ici lever une ambiguïté, qui avait conduit la sénatrice Françoise Gatel à m'interroger lors d'une séance de questions au gouvernement. Les écoles privées sont libres de leur organisation mais le fonds de soutien est là pour les inciter à mettre en oeuvre les nouveaux rythmes scolaires. En 2014-2015, des aides ont été versées à plus de 800 écoles privées. L'article 67 de la loi de refondation de l'école a ouvert le fonds de soutien aux écoles privées, dont les enseignements sont répartis sur neuf demi-journées par semaine. Parce qu'il s'agit d'une possibilité et non d'une obligation, le décret « Hamon » n'a concerné que les écoles publiques qui avaient besoin d'un cadre expérimental pour s'organiser différemment. Pour autant, à l'occasion de mutualisations des TAP entre écoles publiques et écoles privées, une trentaine de communes ont demandé aux écoles privées d'adopter l'organisation mise en place par leurs écoles publiques, avec le risque d'une non-éligibilité au fonds pour les écoles privées lorsque cette organisation est régie par le décret « Hamon ». Je déposerai à l'Assemblée nationale un amendement au projet de loi de finances rectificative pour prendre en compte la situation des écoles privées intégrées dans des PEDT et pour lesquelles les communes organisent les activités périscolaires dans le cadre du décret « Hamon ».

Ce budget finance les politiques nouvelles mises en place dans le cadre de la refondation de l'école. Il finance la réforme des collèges, avec la création de 4 000 postes. L'année scolaire 2015-2016 sera marquée par un effort important de formation et d'accompagnement des équipes pédagogiques à la nouvelle organisation du collège qui entrera en vigueur à la rentrée 2016. Chaque équipe pédagogique sera formée à la mise en oeuvre des enseignements pratiques interdisciplinaires, à l'accompagnement personnalisé, à l'utilisation de la dotation d'heures professeurs pour le travail en petits groupes.

La refondation de l'école de la République s'accompagne de la refonte des programmes de la scolarité obligatoire. Les programmes actuels de l'école primaire et du collège souffrent d'un manque de progressivité et de cohérence et sont considérés par de nombreux enseignants comme trop lourds et trop longs. C'est pourquoi le gouvernement a souhaité qu'ils soient tous repensés sur toute la durée de la scolarité obligatoire et par cycles de trois ans. Pour la première fois, ils ne sont plus la simple juxtaposition de programmes disciplinaires annuels, mais sont articulés autour d'un socle commun pour garantir son acquisition. Ces programmes sont tournés vers ce que doivent apprendre les élèves, plutôt que vers ce que doivent enseigner les professeurs. Pour la première fois, ils laissent du temps pour des entraînements et des exercices fréquents afin de consolider les apprentissages.

Leur entrée en vigueur va entraîner le renouvellement des manuels scolaires qui sera échelonné sur deux années en fonction des disciplines. À la rentrée 2016, tous les élèves recevront de nouveaux manuels de français, mathématiques et histoire-géographie, langue vivante 2 pour les classes de 5 ème et sciences pour les classes de 6 ème . Les autres manuels seront fournis à la rentrée 2017. L'effort conséquent de l'État s'élève à 150 millions d'euros pour l'année 2016.

Cette réforme du collège et des programmes s'accompagne d'une modernisation de notre école, avec le lancement du grand plan numérique. Il s'agit d'élever le niveau de compétences numériques des élèves et d'accompagner la généralisation des pratiques du numérique dans les établissements scolaires. Le déploiement du plan numérique, doté de 192 millions d'euros, se fera sur trois ans. En 2016, 40 % des collèges seront concernés, 70 % en 2017, et 100 % en 2018. Ce plan repose sur trois piliers : formation des enseignants, création d'outils pédagogiques dans toutes les disciplines, équipement des établissements scolaires. Dès cette année, une expérimentation concerne 350 écoles et 220 collèges pilotes.

L'éducation nationale ne pouvait pas rester insensible aux tragiques événements de janvier. Nous avons apporté des réponses autour de la notion de laïcité. Nous avons ainsi présenté un plan de formation des personnels en février : 1 000 formateurs se déploient sur les territoires pour former 300 000 enseignants d'ici la fin 2015. Nous avons également mis en oeuvre l'enseignement moral et civique de l'école élémentaire jusqu'au lycée. Nous avons voulu que les candidats aux concours de recrutement soient à même d'expliquer et de faire partager les valeurs de la République. Les parents d'élèves sont invités à signer la charte de la laïcité. Un livret laïcité a été distribué à tous les chefs d'établissements pour leur apporter des réponses claires sur des sujets délicats. Enfin, nous prévoyons un parcours citoyen pour les élèves pour qu'ils soient responsables et libres, grâce notamment à la valorisation de la culture de l'engagement. La réserve citoyenne de l'éducation nationale fonctionne bien : 5 000 citoyens se sont proposés pour venir témoigner devant les élèves.

Chacune de nos réformes tente de réduire les inégalités de réussite scolaire. L'allocation progressive des moyens tient compte des évolutions démographiques, mais aussi des difficultés sociales et des contraintes territoriales. De même, nous avons mis en oeuvre la réforme de l'éducation prioritaire. Si elle a été contestée par des établissements craignant de sortir de la carte d'éducation prioritaire, elle y a fait entrer 200 établissements parmi les plus pauvres de France et qui souffraient en silence. Ils bénéficient désormais des moyens de l'éducation prioritaire. Au total, plus de 1 000 collèges et plus de 6 000 écoles primaires sont concernés. Les 350 millions supplémentaires serviront à mieux former et rémunérer les enseignants, ainsi qu'à créer 2 150 postes d'assistants d'éducation prioritaire. Cette réforme finance également le dispositif « plus de maîtres que de classes », avec 500 emplois supplémentaires, soit un total de 2 500 emplois créés. La préscolarisation des moins de trois ans touche près de 21 % des enfants, contre 17 % en 2012.

Pour aider les élèves les plus en difficulté, la loi de refondation de l'école a également renforcé l'action des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED). Plusieurs milliers d'emplois y avaient été supprimés entre 2007 et 2012 ; nous en avons créé pour porter leur nombre à 10 063. En outre, leurs spécificités et leurs missions sont mieux reconnues.

Nous traduisons aussi le concept d'école inclusive en actes. Quels que soient les handicaps, les origines, les différences, tous les enfants peuvent apprendre, grandir, se dépasser. L'école inclusive doit donc veiller à bien les accueillir. Plus de 260 000 élèves en situation de handicap sont scolarisés dans nos établissements. Nous avons travaillé sur la professionnalisation des assistants d'éducation (AVS) qui les accompagnent. Ainsi, à terme, les 28 000 assistants d'éducation ayant exercé durant six ans des fonctions d'accompagnement du handicap pourront bénéficier d'un contrat à durée indéterminée. Nous créerons cette année encore 350 postes d'accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH). De plus, 10 000 contrats aidés sur des missions d'auxiliaire de vie scolaire seront pourvus en 2015-2016. Trente nouvelles unités d'enseignement autisme en maternelle ont été créées cette rentrée et il y en aura 100, soit une par département, d'ici la fin du quinquennat.

Enfin, je travaille sur la pérennisation des contrats aidés assurant l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Je me réjouis que la CNAF ait prévu un fonds doté de près de 400 millions d'euros pour accompagner les territoires qui facilitent l'accessibilité des accueils périscolaires aux enfants en situation de handicap. J'ai adressé une instruction aux recteurs pour faciliter l'emploi complémentaire par les collectivités des AESH pour que les enfants aient affaire à la même personne pendant le temps scolaire et en dehors de celui-ci.

Avec 7 100 ETP, les moyens humains des unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) sont en augmentation constante. Il n'y a plus de tension au niveau national pour y accéder. L'éducation nationale accompagne largement les familles pour une scolarisation individuelle en classe ordinaire. Dans le premier degré, les élèves en situation de handicap sont plus souvent scolarisés individuellement au sein de classes ordinaires. Si cela se révèle nécessaire, ils peuvent être accompagnés par un AVS.

Ces crédits pour l'enseignement scolaire, en constance augmentation depuis 2012, reflètent parfaitement notre ambition pour l'école de la République.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis sur les crédits de l'enseignement scolaire . - Votre budget augmente de 1 %, soit de 600 millions d'euros. Néanmoins, comme je le dis avec constance depuis longtemps, on ne juge pas l'efficacité d'un budget à l'aune de sa progression. Ce budget a constamment augmenté depuis trente ans sans résultats tangibles.

Comme vous, j'estime que les enfants doivent maîtriser les apprentissages fondamentaux, surtout à l'âge où tout se joue, entre la dernière année de maternelle et le CE2. Il faut suffisamment d'enseignants devant ces élèves et ces apprentissages doivent être dispensés par les personnels les mieux formés et convenablement rémunérés. Le premier degré ne bénéficie que d'un peu plus de la moitié des créations de postes. Devant l'ampleur de ce défi, n'aurait-il pas été préférable de redéployer des moyens du secondaire vers le primaire ? La Cour des comptes a en effet rappelé que le lycée était excessivement doté. Or la moitié des 150 000 jeunes qui en sortent sans diplôme ni qualification, avait connu des difficultés entre le CP et le CE2. A ce propos, qu'en est-il de la mission, du rôle et du statut des directeurs d'école ?

Selon la Cour, le surcoût net des rythmes scolaires après les versements des aides de l'État et de la CNAF est compris entre 350 et 620 millions d'euros. Cette réforme a accru les inégalités sociales puisque 30 % des communes demandent une participation financière aux familles. Il manquerait 70 millions dans votre budget, si 100 % des communes signaient un projet éducatif territorial (PEDT), comme c'est d'ailleurs votre objectif. D'où viendrait cet argent ?

Il faudra des manuels scolaires pour les nouveaux programmes - rejetés d'ailleurs par le Conseil supérieur de l'éducation (CSE). Vous prévoyez 150 millions d'euros par an pendant deux années pour les nouveaux manuels du collège. Quid pour le primaire ? Certes, il n'appartient pas à l'État de fournir ces manuels mais aucun texte n'impose aux communes de le faire. Les familles et les communes devront-elles payer ?

En ce qui concerne l'orientation, l'enseignement professionnel et l'apprentissage, les crédits n'augmentent pas et les dispositifs de pré-orientation ont presque tous été supprimés : comment ferez-vous pour parvenir à 60 000 apprentis en 2017 et comment atteindre l'objectif du Président de la République de 500 000 apprentis ?

Mme Françoise Férat, rapporteure pour avis sur les crédits de l'enseignement technique agricole . - L'an dernier, nous avons eu la désagréable surprise de voir un amendement du gouvernement adopté par l'Assemblée nationale réduire les crédits du programme 143 de 2,5 millions d'euros, afin de financer le fonds de pérennisation pour la réforme des rythmes scolaires. Quel mépris pour l'enseignement agricole ! Il ne représente que 2 % d'une mission budgétaire de plus de 65 milliards d'euros. C'est une goutte d'eau dans votre budget. Avez-vous mesuré les dégâts occasionnés ? L'enseignement agricole, qui n'est en rien concerné par les rythmes scolaires, doit-il être à nouveau la variable d'ajustement du budget de l'éducation nationale ? Le montant des crédits au titre du fonds de soutien des collectivités locales au développement des activités périscolaires ne suffira probablement pas. Amputerez-vous à nouveau les crédits de l'enseignement agricole ?

Ce secteur est fragilisé par la forte baisse de ses effectifs, notamment en classe de quatrième et troisième. C'est une conséquence de la politique d'orientation menée par l'éducation nationale qui n'a pas dû vous échapper. Comment prévoyez-vous d'y remédier ? L'enseignement agricole forme à beaucoup de métiers : moins de 20 % des élèves deviennent agriculteurs ou producteurs.

Les établissements d'enseignement agricole, très dispersés, gagneraient beaucoup à mutualiser leurs moyens avec ceux de l'éducation nationale : les auxiliaires de vie scolaire (AVS) pourraient par exemple être mis en commun au sein des bassins de formation.

Enfin, à l'approche du onzième mois de l'année civile, les subventions aux organisations n'ont toujours pas été versées. Pourriez-vous nous rassurer sur ce point ? L'enseignement agricole est un enseignement d'excellence. Il se retrouve sur une pente dangereuse. Voulons-nous, oui ou non, le préserver ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances . - Nos finances publiques sont extrêmement contraintes. Dans notre pays, l'enseignement secondaire est beaucoup plus coûteux que dans les pays comparables de L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Envisagez-vous d'adopter une attitude plus directive pour réduire les coûts de l'enseignement secondaire ? L'enseignement préélémentaire, l'internat, l'accueil des enfants handicapés, sont autant d'éléments de satisfaction.

Une politique de recrutement quantitativiste a pour contrepartie la stagnation voire la régression du pouvoir d'achat des enseignants. On peine à recruter dans certaines matières -lettres, mathématiques, anglais. Cette politique ne contribue-t-elle pas à dégrader le savoir-faire, la bonne volonté et l'engagement des professeurs ?

De très nombreuses collectivités territoriales ont déjà lancé des initiatives en matière de technologies de l'information et de la communication. Comment les concilier avec une intervention de l'État, telle que vous la prévoyez ?

Quid du statut de l'établissement public d'enseignement primaire ? Le directeur d'école pourrait devenir un véritable patron. Malgré les efforts considérables de regroupement déployés par les élus locaux, il reste des écoles sans directeur et des directeurs sans statut. Comment remédier à ce manque ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - Monsieur Carle, on ne juge pas de la qualité d'une politique à son seul budget. Mieux vaut cependant avoir un budget si l'on veut conduire une politique, en particulier dans l'éducation nationale. Depuis 2012, la loi de refondation de l'école donne la priorité au primaire, avec la création de nouveaux postes dans les écoles : d'abord 1 000, puis 3 000 à la rentrée 2013, 2 355 en 2014, 2 511 en 2015 et 3 900 en 2016. Pour revaloriser la rémunération des enseignants du primaire, nous avons créé en 2013 une indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves (ISAE). Cette prime de 400 euros sera régulièrement augmentée pour se rapprocher de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves (ISOE) du second degré.

Les surcoûts dans le secondaire ? Oui, sans doute, cependant la Cour des comptes se prononce sur la situation qui ressort de la réforme de 2010, conduite par la précédente majorité. Elle a également reconnu que la période 2010-2012 était de transition, avec la superposition de deux systèmes et les surcoûts afférents. Un bilan doit être lancé dans les prochaines semaines, et nous veillerons à prendre en chasse tous les surcoûts afin de dégager des marges de manoeuvre.

Un travail considérable a été accompli depuis 2013 pour revaloriser le métier d'enseignant. Avec tous les partenaires sociaux, nous avons lancé les chantiers métiers pour revoir les missions et les rémunérations de chacun. En créant l'indemnité pour mission particulière (IMP), nous avons valorisé l'implication des enseignants dans leur établissement scolaire. Quant aux directeurs d'école, nous avons augmenté leur décharge horaire, revalorisé leurs indemnités et allégé leurs tâches administratives, grâce à la mise en place de 15 000 contrats aidés.

Le point d'étape réalisé en juin dernier sur les rythmes scolaires a montré que pour la moitié des communes signataires d'un projet éducatif territorial (PEDT), les activités périscolaires étaient gratuites. La tarification est un choix des élus locaux, qui veillent à la progressivité en fonction des revenus des familles. S'engager dans un PEDT est le meilleur moyen de limiter les coûts pour les familles.

Depuis toujours, la compétence pour l'achat des manuels scolaires revient aux communes. C'était déjà le cas en 2008, lorsque Xavier Darcos était ministre de l'éducation nationale. En revanche, s'agissant des collèges, nous avons provisionné 150 millions d'euros pour 2016.

L'apprentissage est un sujet qui me tient à coeur, d'où l'engagement fort que nous avons pris : alors qu'on recense 40 000 jeunes apprentis sous statut scolaire, nous visons les 60 000 en 2017. Au-delà d'Affelnet, notre stratégie consiste à multiplier dans chaque académie les réunions d'information pour valoriser l'apprentissage. Et, nous avons mis en oeuvre le parcours avenir qui avance le premier contact avec le monde professionnel de la troisième à la sixième : des chefs d'entreprise viendront dans les classes, des journées portes ouvertes seront organisées...

Madame Férat, le budget de l'enseignement agricole ne me concerne pas directement. Vos suggestions de mutualisation sont néanmoins tout à fait pertinentes. Une tradition de coopération existe déjà entre les deux ministères, sur la carte scolaire, l'apprentissage des langues, les procédures d'affectation des élèves de troisième et de terminale. J'ai pris note de votre proposition sur les AVS.

Monsieur Longuet, je crois avoir répondu à beaucoup de vos questions. En ce qui concerne le recrutement, nous nous sommes réjouis, il y a quelques jours, de constater qu'il y avait beaucoup plus de candidats inscrits aux concours que l'an dernier, y compris dans des matières difficiles comme les mathématiques ou l'anglais. Nous devons poursuivre nos efforts. Il n'est pas surprenant que les étudiants des filières scientifiques soient plus attirés par des postes d'ingénieurs dans le privé. À nous de rendre nos métiers attractifs, ou de miser sur d'autres types de recrutement, en nous adressant par exemple à des gens qui souhaiteraient se reconvertir.

Quant au plan numérique, c'est une chance que les collectivités territoriales aient déjà lancé des initiatives. Loin de nous l'idée de faire du passé table rase. Pour le collège, le plan fonctionnera sur un appel à projets, de manière à ce que les départements intéressés s'entendent avec leur académie et leurs établissements scolaires pour monter un projet et évaluer les besoins. Nous accompagnerons leur choix, sans jamais imposer de modèle unique aux collectivités.

M. Jacques-Bernard Magner . - Un budget qui augmente de 600 millions d'euros par rapport à l'an dernier, même s'il reste autour de 65 milliards d'euros, c'est significatif, et remarquable dans la situation budgétaire actuelle. Pendant cinq ans, la tendance a été à la réduction du budget et des moyens. Peut-on faire mieux avec moins ? Ce n'est pas sûr : après avoir supprimé des postes, on crée désormais 60 000 sur cinq ans.

Ce budget donne la priorité à l'enseignement primaire et contient beaucoup de mesures qui contribuent à rendre l'école plus inclusive. Comme élu local, je vois de plus en plus de personnel attaché au service des enfants handicapés, au service des enfants en difficulté. Les directeurs ne revendiquent pas un statut de chef d'établissement. L'école n'est pas l'armée. Plutôt que d'un chef, elle a besoin de gens qui travaillent ensemble.

M. Jacques Grosperrin . - Coordonnés par qui ?

Mme Françoise Cartron . - Cela fonctionne très bien à l'école.

M. Jacques-Bernard Magner . - La coordination ne passe pas forcément par un chef. Regardons vers l'avenir plutôt que de revenir au passé, comme l'a proposé une récente commission d'enquête prônant la sanction, la répression ou la ségrégation. La formation des enseignants a été remise à niveau de sorte que les ESPÉ redeviennent attractives. Qu'avez-vous prévu pour intégrer dans la formation des enseignants, qu'elle soit initiale ou continue, des éléments pour réagir à des événements tels que ceux de janvier dernier ?

M. Jacques Grosperrin . - Vous soufflez le chaud et le froid. « Qui se justifie s'accuse », disait ma grand-mère. Ayez le courage de votre politique. Osez dire que vous souhaitez créer des postes, en sachant que ce sera difficile car le métier n'est plus attractif ; ou, que vous souhaitez plus de RASED, car ils ont été supprimés dans certains endroits alors qu'ils auraient pu y jouer un rôle. Vous êtes dans un bel exercice de communication pour nous montrer que l'augmentation du budget masque une politique qui n'est ni réaliste, ni objective, ni constructive. Bien sûr, il y a l'augmentation démographique ; il y a aussi l'augmentation phénoménale des démissions et des arrêts de travail dont vous n'avez pas parlé. Le ministère reste à cet égard dans le déni.

La gestion du numérique met en difficulté les collectivités territoriales, car elles n'ont pas les financements nécessaires, et les chefs d'établissement peinent à recruter des animateurs. Dans le Doubs, on compte 5 000 ordinateurs pour 44 collèges, et seulement deux personnes pour gérer ce parc informatique.

Si le socle commun est une priorité nationale, où est le fléchage du budget pour l'apprentissage de la natation ? Les chefs d'établissement sont obligés de prendre sur leur propre budget pour le financer. Acceptez que nous ne soyons pas d'accord sur ces principes.

Avancer l'âge de l'exposition à l'apprentissage est une bonne mesure, même si elle s'inscrit dans une idéologie problématique. Vous n'êtes pas la Mme Bahlsen de l'éducation nationale ! Quant à l'indemnisation pour mission particulière, pourquoi ne pas donner plus d'autonomie aux établissements en leur confiant une enveloppe « heures supplémentaires année » (HSA) qu'ils géreraient comme ils l'entendent ?

Mme Marie-Christine Blandin . - C'est mieux qu'avant, pour dire les choses simplement. Cependant, envisagez-vous une réflexion sur les salaires des enseignants, dont la rémunération s'établit à 70 % de celle des enseignants des pays européens ?

Dispose-t-on d'un outil comptable pour connaître tous les moyens affectés à chaque établissement et le taux de remplacement ?

En ce qui concerne la formation continue, notamment en lien avec la réforme du collège, je constate des disparités étonnantes. En Auvergne, on y consacre cinq jours de formation, auxquels s'ajoutent huit pour le numérique ; dans le Nord, ce sera cinq jours de formation et, comme on a tiré la sonnette d'alarme, un jour avec les maisons des sciences pour former les enseignants aux manipulations de physique, de chimie, etc. ; dans une autre académie, tous les enseignants vont suivre une formation au sein de l'armée, avec un module consacré à la reconnaissance des terroristes, un film vantant un char d'assaut sans chenilles et une distribution de prospectus d'engagement : on est loin du programme d'enseignement moral et civique du Conseil supérieur des programmes. Quel outil de contrôle et de pilotage vous donnez-vous ?

De nouveaux manuels scolaires vont entrer dans les collèges avec la réforme des cycles deux, trois et quatre. La simultanéité de la réforme du collège, tous cycles confondus, est-elle irrévocable ? On faciliterait le déroulement de la prochaine rentrée en remettant à plus tard la réforme du cycle quatre.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin . - Nous sommes dans un débat assez convenu. Même si ce budget est le premier de l'État, il s'exprime dans un cadre contraint : 694 millions d'euros supplémentaires, c'est une augmentation de 1 % environ pour une inflation aux alentours de 1 %... Vous avez raison de vous fixer des objectifs ambitieux. C'est mieux, est-ce que cela sera suffisant ? À considérer le plafond d'emplois consommés, je ne suis pas aussi euphorique quant au nombre d'enseignants en présence des élèves. Le problème de la reconstitution du vivier continue à poser problème. Enfin, dans cette enceinte, on ne parle plus du tout de l'enseignement professionnel. Quelle stratégie engagerez-vous pour répondre aux difficultés bien réelles dans ce domaine, notamment en termes de réussite ou de poursuite d'études ?

Mme Mireille Jouve . - Les enseignants ont besoin de davantage de reconnaissance : cela passe par l'amélioration de leurs conditions de travail. Fin 2014, je vous avais interrogée sur leur suivi médical, car l'on peine à recruter des médecins de prévention pour l'assurer. Un rapport sur la médecine de prévention des trois fonctions publiques devait ouvrir des pistes de réflexion. Sommes-nous sur la bonne voie ? Il n'est pas normal que l'État demande aux collectivités territoriales de procéder à un suivi de ses agents sans que les enseignants en bénéficient.

Mme Françoise Férat . - Le programme 143 reste au coeur de votre mission. Qu'en est-il d'éventuels prélèvements pour la pérennisation des rythmes scolaires ? C'est un sujet qui me tient à coeur.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - Je remercie M. Magner de ses appréciations. En ce qui concerne la formation des enseignants, un travail est en cours pour préciser le statut du mémoire demandé aux étudiants, mais aussi pour donner plus de place aux valeurs de la République, ainsi que pour développer les apprentissages professionnels. Le nombre d'élèves attirés par les ESPÉ a crû cette année de plus de 4 %, contre 2 % dans les autres filières : les ESPÉ sont devenus la voie royale pour passer les concours de l'enseignement. L'année passée, 70 % des admis étaient passés par une ESPÉ.

Alors que la formation continue avait été réduite comme peau de chagrin et qu'en 2012, nous avions trouvé son budget borné à 40 millions d'euros, celui-ci dépasse cette année les 70 millions d'euros. Ainsi, nous pouvons former les enseignants aux réformes que nous mettons en place, tout en leur proposant un plan de formation continue qui réponde à leurs demandes. S'il importe de s'inspirer des demandes exprimées, le contenu des formations doit être contrôlé.

La démission des professeurs semble être une obsession sur les bancs des Républicains. Les chiffres, pourtant, sont epsilonesques ! L'an dernier, sur 800 000 enseignants, seuls 385 ont démissionné.

M. Jacques Grosperrin . - Je parlais de ceux qui viennent de prendre leurs fonctions.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - Sur les quelque 25 000 enseignants dans ce cas, le nombre de démissionnaires est d'environ une centaine.

M. Jacques-Bernard Magner . - C'est beaucoup moins qu'avant...

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - En effet : en 2010-2011, ils étaient 473. L'apprentissage de la natation ayant toujours fait partie des missions des établissements, il n'est pas nécessaire d'y consacrer un budget supplémentaire.

M. Jacques Grosperrin . - C'est une priorité nationale.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - Il faut mieux communiquer sur ce sujet. Sur le préapprentissage à quatorze ans, est-il besoin de répondre ? Nous avons un profond désaccord sur le sujet. J'estime qu'on ne peut pas demander à un adolescent de quatorze ans de choisir son métier ni l'enfermer dans une voie dont il ne pourra plus sortir.

M. Jean-Claude Carle. - Et de le maintenir en situation d'échec ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - La souplesse que vous réclamez sera donnée par la réforme du collège, qui octroie au conseil pédagogique de l'établissement une marge d'autonomie de 20 % afin qu'il puisse s'adapter aux spécificités locales.

Des efforts ont été faits sur la rémunération des enseignants : augmentation de 400 euros par l'ISAE, hausse du nombre de personnels accédant à la hors-classe, création des indemnités pour mission particulière et doublement des indemnités REP et REP +. Nous pourrons désormais négocier avec nos personnels, grâce à l'accord sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations (PPCR), sur leur rémunération et les déroulements de carrière. Nous commencerons dans les prochaines semaines, et cela sera très positif pour l'éducation nationale.

Nos systèmes d'information comptable sont assez performants et nous progressons chaque année dans la connaissance des coûts relatifs des différents établissements. Cela dit, l'extrême variété des situations rend les comparaisons difficiles. Ainsi, un établissement dans un territoire très attractif comptera de nombreux enseignants en fin de carrière : la masse salariale globale divisée par le nombre d'élèves sera très supérieure à celle que l'on observera ailleurs, où les enseignants seront plus jeunes. Comparaison n'est pas raison, donc.

Il me paraît essentiel de conduire la réforme du collège d'un seul bloc, puisqu'elle instaure à la fois un socle et des cycles.

Mme Marie-Christine Blandin . - Et sur le cycle quatre ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - Les horaires de chaque discipline ont été repensés pour l'ensemble de la scolarité au collège. Ne pas faire entrer la réforme en vigueur pour tous les niveaux en même temps créerait des déséquilibres et priverait des vertus du travail collectif et interdisciplinaire au sein de l'équipe pédagogique.

Oui, Mme Gonthier-Maurin, il faut prêter plus d'attention au lycée professionnel. Voilà bien pourquoi j'ai décidé ouvrir cinq chantiers pour l'enseignement professionnel. D'abord, mettre en lien la cartographie des filières de la voie professionnelle et l'évolution à long terme des métiers qui les composent, sur laquelle j'ai demandé à France Stratégie une étude complète à un horizon de dix ou quinze ans. Puis, améliorer la première année de formation en lycée professionnel, puisqu'elle ne donne manifestement pas satisfaction. J'ai mis en place un groupe de travail associant les partenaires sociaux, qui me fera des propositions concrètes dans les prochaines semaines afin que nous puissions les appliquer à la rentrée prochaine.

Troisième chantier : la formation des enseignants des lycées professionnels en ESPÉ. Ceux-ci disaient que la formation dispensée ne tenait pas suffisamment compte de la singularité du métier de professeur en lycée professionnel. J'ai demandé aux inspections générales d'aller voir comment se déroulaient ces formations et de proposer des modalités pédagogiques adaptées. Le quatrième chantier porte sur l'orientation des élèves dans la voie professionnelle, car les passerelles existantes ne sont pas toujours utilisées. Enfin, des pôles de stage aideront les lycéens professionnels à trouver des périodes de formation en milieu professionnel.

Nous célébrons cette année les 30 ans de la filière professionnelle. Aussi serez-vous conviés à de nombreux événements. Par exemple, nous organisons un concours pour valoriser ce qui se passe dans les lycées professionnels, et une grande exposition se tiendra à Paris au printemps, avec la participation du photographe Reza...

La médecine scolaire traverse une crise d'attractivité, alors que les départs à la retraite sont nombreux. Ses missions ont été retravaillées avec les syndicats et nous menons avec le Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP) une réflexion sur la revalorisation de sa rémunération, qui aboutira en février. Si vous vous intéressez à ce problème, madame Jouve, votre aide est bienvenue.

Mme Férat a évoqué l'annulation de 2,5 millions d'euros de crédits. C'est la contribution du ministère de l'agriculture à ce qu'on appelle les aléas de gestion !

M. Michel Savin . - Environ 80 000 enseignants seraient dégagés de l'obligation d'animer une classe. Certes, ils ne sont pas payés par votre ministère, mais ils émargent tout de même au budget de l'État. Pourquoi ne pas redéployer ces personnels au lieu de continuer à recruter des milliers d'enseignants ?

La semaine dernière, nous avons adopté une proposition de loi relative au statut des sportifs de haut niveau. Nous avons en particulier adopté un amendement sur la formation à distance. Les établissements qui la dispensent ne peuvent bénéficier des crédits parce que les sportifs de haut niveau étant souvent en déplacement, les 200 heures ne sont pas effectuées sur place. J'espère que vous en tiendrez compte.

M. Jean-Claude Luche . - Président d'un conseil départemental, j'ai dû prendre en charge la maintenance du matériel informatique, pour un coût de 750 000 euros, soit un point de fiscalité supplémentaire. L'État baisse ses impôts et transfère aux collectivités territoriales la charge d'augmenter les leurs. Compenserez-vous ce coût supplémentaire ?

Mme Maryvonne Blondin . - Pour avoir participé jusqu'au bout au débat sur la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, je me félicite d'autant plus que nous ayons inscrit dans le code de l'éducation l'enseignement des langues et des cultures régionales. Des formations à la détection des signes de maltraitance ou de mal-être seront-elles dispensées dans les ESPÉ ?

Mme Dominique Gillot . - Comptez-vous réactiver le dispositif « Ouvrir l'école aux parents » à l'intention des enfants allophones qui arrivent dans nos écoles grâce à la générosité de certaines communes qui accueillent des familles de migrants ?

La loi sur l'enseignement supérieur et la recherche renforçait l'accompagnement des lycéens dans leur orientation par le dispositif « bac -3/bac + 3 ». Il faut s'intéresser davantage à ce que doivent apprendre lycéens et étudiants qu'à la manière dont les professeurs doivent le leur enseigner.

M. Guy-Dominique Kennel . - Vous avez décidé la création d'un corps unique de psychologues de l'éducation nationale, réunissant psychologues scolaires et conseillers d'orientation psychologues. Pourquoi ? Quel sera l'impact budgétaire de cette décision ? Ces personnels seront-ils intégrés dans les établissements scolaires et, surtout, seront-ils évalués ?

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Je me réjouis de votre plan numérique, car je milite en ce sens depuis longtemps. Pourquoi le limiter au collège et qu'envisagez-vous pour le primaire ? M. Carle a évoqué le changement de manuels scolaires en primaire et au collège. Vous avez souhaité que ce changement se fasse d'un seul coup ; les éditeurs nous avaient alertés sur l'impossibilité d'un tel renouvellement. De plus, ce sont les communes qui financent les manuels scolaires. Ceux d'entre nous qui ont été adjoints à l'éducation savent bien qu'il s'agit d'une dépense importante, surtout en cette période. Que répondez-vous aux communes ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - Lorsqu'un fonctionnaire de mon ministère est en détachement, ce n'est pas l'éducation nationale qui le rémunère, vous l'avez dit. Les détachements, qui ne coûtent strictement rien à mon ministère, lui sont profitables, car il peut être utile que certains professeurs acquièrent l'expérience d'autres milieux professionnels. Cela dit, le nombre de possibilités de détachement a été considérablement réduit ces dernières années, car nous avons besoin de professeurs devant les classes.

Le Conseil d'État a confirmé que la maintenance informatique était du ressort des collectivités territoriales compétentes. Il n'y a eu aucun transfert, aucune nouveauté. Au demeurant, le plan numérique prévoit bien que l'État dépensera un euro pour chaque euro dépensé par le département.

La médecine scolaire souffre d'un déficit d'attractivité. Nos pistes de réflexion pour revaloriser cette profession ne concernent pas uniquement la rémunération. Nous souhaitons aussi promouvoir l'accueil d'internes dans les services de médecine scolaire ou faciliter l'accès des médecins scolaires à la hors-classe. Nous avons rassemblé en un corps unique les psychologues de l'éducation afin d'établir une continuité dans le suivi des élèves, surtout psychologique en primaire avant d'être axé sur l'orientation au collège et au lycée. Formés en commun, les personnels se transmettront mieux les informations et partageront des réflexes. Cette réforme a été très bien accueillie.

Nous créons 2 500 places supplémentaires dans le dispositif « Ouvrir l'école aux parents pour la réussite des enfants » afin de préparer l'accueil des parents allophones. Je souhaite que nous allions encore plus loin, en lien avec le ministère de l'intérieur.

Je vais faire dans les prochaines semaines, avec M. Mandon, plusieurs annonces sur le dispositif « bac - 3/bac + 3 ».Pour s'orienter vers les filières où ils ont le plus de chances de réussite, les lycéens doivent connaître le taux d'insertion professionnelle de chacune. Ainsi, nous réduirons le nombre de filières où sévit cet insupportable tirage au sort.

Mme Dominique Gillot . - Souvent, les professeurs du secondaire ignorent ce qu'on attend d'un étudiant à l'université - et inversement.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre . - C'est vrai, en particulier dans les lycées professionnels.

Nous avons décidé de donner la priorité au collège en matière de numérique car c'est le bon âge pour effectuer ces apprentissages - et aussi parce que c'est l'État qui est compétent sur les manuels, ce qui simplifie la mise en oeuvre. Cela ne signifie pas que l'État se désintéresse de ce que font les communes en ce domaine, au contraire : parmi les établissements pilotes, il y a cette année 300 écoles primaires. D'ailleurs, nous réfléchissons à la transition entre les équipements qu'elles mettent en place dans les écoles et ceux que nous installons dans les collèges.

Les éditeurs ont ressenti de l'inquiétude lorsqu'ils ont cru qu'on leur demanderait de changer tous les manuels scolaires en même temps, mais nous avons prévu un échelonnement sur deux ans. Cinq manuels seulement vont changer cette année. En primaire, le nombre de manuels est bien moindre qu'au collège. Et nous n'avions pas changé les manuels ces dernières années, ce qui faisait autant d'économies pour les communes.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Je vous remercie d'avoir répondu à l'ensemble de nos questions.

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