EXAMEN DES ARTICLES

TITRE II - SOUTENIR LES PÊCHES MARITIMES ET LES CULTURES MARINES

La commission des affaires économiques a été saisie de l'ensemble des dispositions du titre II sur la pêche et les cultures marines.

Article 13 (article L. 2 du code rural et de la pêche maritime) - Compléter les finalités de la politique des pêches et de l'aquaculture

Objet : cet article a pour but de conforter la place des aquaculteurs dans les politiques alimentaires.

I. Le droit en vigueur.

Créé par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, le Livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime définit les objectifs de la politique en faveur de l'agriculture, de l'alimentation et de la pêche maritime.

Les deux articles L. 1 et L. 2 contenus dans ce Livre préliminaire fixent ainsi le cadre des politiques agricoles et alimentaires, même si ces dispositions ont plus un caractère déclaratoire qu'une portée pratique.

En ce qui concerne la politique des pêches maritimes, l'article L. 911-2 du même code décline ses objectifs spécifiques.

II. La proposition de loi initiale.

La proposition de loi visait à mettre en avant le rôle des aquaculteurs dans la politique alimentaire en complétant l'article L. 1 précité de trois manières :

- D'abord en rappelant que la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation devait « soutenir le revenu, [...] développer l'emploi et [...] améliorer la qualité de vie » des agriculteurs, mais aussi des aquaculteurs.

- Ensuite, en demandant que cette politique soutienne la recherche, l'innovation et le développement pas seulement dans le domaine agricole mais aussi dans le domaine aquacole.

- Enfin, en réclamant que cette politique ne se contente pas de développer la valeur ajoutée et de renforcer la capacité exportatrice de la France dans le domaine agricole, mais soit aussi capable de le faire dans le domaine aquacole. La rédaction proposée faisait aussi référence à l'amélioration de la place de ces filières sur le marché national, dans la mesure où la France est largement déficitaire en produits de la mer, la production ne couvrant qu'une faible part de notre consommation. La reconquête du marché intérieur constitue donc un enjeu économique majeur.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Les députés ont conservé l'idée des auteurs de la proposition de loi consistant à conforter la place de l'aquaculture dans les politiques agricoles et alimentaires. Mais ils ont intégré ces dispositions au sein de l'article L. 2 du code rural et de la pêche maritime consacré plus spécifiquement à la politique des pêches maritimes, de l'aquaculture et des activités halio-alimentaires.

Plusieurs amendements adoptés en séance ont par ailleurs apporté des modifications rédactionnelles afin de distinguer la filière des pêches maritimes de la filière aquacole, qui répondent à des logiques économiques différentes.

IV. La position de votre commission.

Votre rapporteur est en accord parfait avec l'objectif consistant à mieux reconnaître, dans notre code rural et de la pêche maritime, le rôle et la place spécifiques des aquaculteurs et de l'aquaculture .

Pour autant, faire figurer l'aquaculture au sein de l'article L. 1, qui est davantage consacré à l'agriculture, aurait pu contribuer à obscurcir cet article, déjà assez long. Un reclassement au sein de l'article L. 2 des mêmes dispositions paraît donc préférable, dans un but d'intelligibilité de la loi.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 14 (articles L. 653-2 et L. 640-1 du code rural et de la pêche maritime) - Renforcer les mesures en direction du secteur aquacole

Objet : cet article renforce la place de l'aquaculture dans le dispositif de sélection génétique et au sein de la politique des signes de qualité.

I. Le droit en vigueur.

L'article 14 modifie trois dispositions du code rural et de la pêche maritime qui relèvent de trois domaines très différents :

- Le premier domaine concerne la reproduction et l'amélioration génétique des ressources conchylicoles . Ce domaine est couvert par le chapitre III du titre V du Livre VI du code rural et de la pêche maritime, qui fixe de manière très succincte le cadre législatif applicable à la reproduction et à l'amélioration génétique des animaux d'élevage, dans la mesure où l'article L. 653-2 dudit code renvoie à des décrets en Conseil d'État ou à des décrets simples la fixation des règles en matière de monte publique ou privée, d'essais, de garantie de mise sur le marché de matériel de reproduction, de certification de parenté ou encore de tenues des livres de race. Les plans de sélection sont renvoyés à des organismes de sélection agréés par l'État.

- Le deuxième domaine concerne la politique de qualité et de l'origine des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer . L'article L. 640-1 du code rural et de la pêche maritime en définit les objectifs généraux. Cette politique est déclinée sous la forme des signes d'identification de la qualité et de l'origine comme les appellations d'origine ou les indications géographiques, des mentions valorisantes comme la mention montagne, ou encore de la certification de qualité des produits, définis aux articles L. 640-2 et suivants dudit code.

- Le troisième domaine concerne la protection sociale des pêcheurs à pied professionnels : l'article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime soumet au régime de protection sociale des exploitants agricoles géré par la mutualité sociale agricole (MSA) les conchyliculteurs et les pisciculteurs, ainsi que les pêcheurs à pied professionnels non couverts par le régime social des marins géré par l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM).

II. La proposition de loi initiale.

Deux des trois dispositions de l'article 14 de la proposition de loi s'inscrivent dans le prolongement de l'article 13, visant à conforter la place de l'aquaculture et de la conchyliculture dans le code rural et de la pêche maritime :

- La modification proposée à l'article L. 653-2 dudit code vise à exiger qu'un décret soit pris spécifiquement pour fixer les règles applicables à la reproduction et à l'amélioration génétique des ressources conchylicoles.

- La modification proposée à l'article L. 640-1 dudit code enrichit les objectifs de la politique de la qualité et de l'origine en visant spécifiquement l'aquaculture : la politique de la qualité et de l'origine doit viser à renforcer aussi le secteur aquacole, mais également à répartir de façon équitable les fruits de la valorisation des produits aquacoles. Enfin, un objectif transversal d'encouragement à la reprise d'exploitation par de nouveaux exploitants est intégré à la politique de la qualité et de l'origine.

- La dernière disposition de l'article 14 supprime le rattachement des pêcheurs à pied professionnels à la mutualité sociale agricole (MSA), la proposition de loi prévoyant par ailleurs que l'ensemble des pêcheurs à pied professionnels devrait être rattaché au régime de protection sociale des marins géré par l'ENIM. Il s'agit donc là d'une coordination.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Un amendement rédactionnel a été adopté en commission sur cet article.

Par ailleurs, les députés ont supprimé la disposition relative à la suppression du rattachement des pêcheurs à pied professionnels à la MSA, dans la mesure où la disposition rassemblant l'ensemble de ces professionnels au sein du régime de l'ENIM a été jugée irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution. Il s'agissait donc, par coordination, d'éviter qu'ils ne se retrouvent sans protection sociale, et de revenir à l'état actuel du droit.

IV. La position de votre commission.

Votre rapporteur ne voit d'objection ni à l'exigence d'une base juridique spécifique à la génétique dans le domaine conchylicole ni à la reconnaissance de la place de l'aquaculture dans la politique de qualité.

Votre rapporteur s'interroge toutefois sur l'intérêt d'intégrer l'encouragement à la reprise d'exploitation par de nouveaux exploitants dans les objectifs de la politique de qualité.

En effet, la politique d'installation en agriculture fait déjà l'objet de dispositions législatives au titre III du Livre III du code rural et de la pêche maritime.

Le risque, en mélangeant les objectifs et instruments des politiques agricoles et alimentaires, serait de rendre la loi illisible pour les acteurs économiques. C'est pourquoi votre rapporteur a proposé un amendement de suppression de l'alinéa 7 (Amendement n° COM-46).

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 15 (articles L. 911-1, L. 911-2, L. 912-4, L. 931-2, L. 942-2 et L. 946-8 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) - Conforter la place de l'aquaculture dans la définition de la politique des pêches et de l'aquaculture et élargir la définition de la société de pêche artisanale

Objet : cet article vise à mieux prendre en compte l'aquaculture dans les politiques publiques. Il fixe à 65 ans la limite d'âge des membres des comités des pêches, assouplit le régime de la société de pêche artisanale et renforce les pouvoirs de sanction des organisations de producteurs sur leurs membres. Il prévoit également d'encourager l'aquaculture à terre et en circuit fermé.

I. Le droit en vigueur.

Comme l'article 14, l'article 15 modifie plusieurs dispositions du Livre IX du code rural et de la pêche maritime, consacré à la pêche maritime et à l'aquaculture marine.


L'article L. 911-1 définit le champ d'application de ces dispositions. Elles s'appliquent d'une part à la pêche maritime, définie comme « la capture des animaux et la récolte des végétaux marins, en mer et dans la partie des fleuves, rivières, étangs et canaux où les eaux sont salées » et d'autre part à l'aquaculture marine, définie comme étant « l'élevage des animaux et la culture des végétaux marins ».


L'article L. 911-2 précise les sept objectifs de la politique des pêches maritimes, de l'aquaculture marine et des activités halio-alimentaires :

- permettre d'exploiter durablement et de valoriser le patrimoine collectif que constituent les ressources halieutiques auxquelles la France accède, tant dans ses eaux sous juridiction ou souveraineté que dans les autres eaux où elle dispose de droits de pêche en vertu d'accords internationaux ou dans les zones de haute mer ;

- favoriser le développement de la recherche dans la filière ;

- faciliter l'adaptation aux marchés intérieurs et extérieurs de la filière des pêches maritimes et de l'aquaculture marine, qui comprend les activités de production, de transformation et de commercialisation ;

- promouvoir une politique de qualité et d'identification des produits ;

- créer les conditions assurant le maintien et le renouvellement d'une flotte adaptée à ces objectifs ainsi que le développement et la modernisation des entreprises de l'aval de la filière ;

- développer les activités d'aquaculture marine, notamment en veillant à la qualité du milieu ;

- assurer la modernisation et le développement d'activités diversifiées au bénéfice de l'économie des régions littorales.


• Le code rural et de la pêche maritime prévoit aussi l'obligation pour les professionnels du secteur des pêches maritimes et des élevages marins de se regrouper au sein d'organisations professionnelles : comité national, comités régionaux et comités locaux (départementaux ou interdépartementaux) des pêches maritimes et des élevages marins. Les articles L. 912-4 et L. 912-5 précisent que ces comités sont administrés par des représentants élus par ces professionnels.


Les articles L. 921-1 et suivants du même code prévoient que l'activité de pêche maritime peut être soumise à un régime d'autorisation administrative. Ces autorisations, valables pour une durée maximale de 12 mois, sont non cessibles. En outre, l'article L. 921-7 ne permet de donner la qualité de navire de pêche professionnelle qu'aux navires dotés d'un permis de mise en exploitation (PME). La détention de ce permis conditionne la délivrance du rôle d'équipage, titre de navigation obligatoire en vertu du code des transports. Les navires de pêche professionnelle doivent en outre figurer au sein d'un registre qui alimente le fichier européen dénommé : fichier flotte de pêche communautaire (FPC).

Outre l'autorité administrative, les organisations de producteurs (OP), dont le régime juridique est déterminé par les articles L. 912-11 et suivants, jouent un rôle important dans la régulation de l'accès à la ressource, notamment en répartissant entre leurs membres les quotas alloués par l'autorité administrative sur les espèces qui y sont soumises, en application de la politique commune de la pêche (PCP). Ainsi, l'article L. 912-12-1 dispose que les OP « prévoient dans leurs statuts les sanctions applicables à leurs adhérents en cas de manquement aux règles de gestion durable des sous-quotas définies dans les plans de gestion des efforts de pêche ».


• Si l'activité de pêche professionnelle peut être pratiquée selon de nombreuses modalités, le code rural et de la pêche maritime définit aux articles L. 931-2 et suivants un statut particulier pour les sociétés de pêche artisanale (SPA) . Ce statut donne accès à certains avantages fiscaux spécifiques. La société de pêche artisanale est soit une société de personnes dont l'activité est soumise à l'impôt sur le revenu, soit une société à responsabilité limitée dont 100 % des droits sociaux sont détenus par le pêcheur embarqué. Plusieurs pêcheurs peuvent se regrouper pour détenir une SPA, à condition qu'ils soient embarqués sur les navires, que la société ne détienne pas plus de deux navires, et qu'ils restent propriétaires ou copropriétaires majoritaires, ou aient vocation à le devenir à une échéance ne dépassant pas 10 ans, lorsque la propriété est partagée avec un armement coopératif ou une société de financement de la pêche (Sofipêche), dont le régime fiscal est défini à l'article 238 bis HP du code général des impôts. Cette dernière solution n'est plus d'actualité, le régime en question ayant été supprimé.


• Outre les fonctionnaires dont c'est la mission (agents des affaires maritimes, des douanes, de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), la recherche et la constatation des infractions en matière de pêche maritime et d'aquaculture peuvent être effectuées par des gardes-jurés et des prud'hommes pêcheurs assermentés. L'article L. 942-2 du code rural et de la pêche maritime, qui prévoit leur intervention, limite toutefois leurs pouvoirs par rapport aux fonctionnaires . Ainsi, s'ils peuvent intervenir à toute heure à bord des navires ou dans les criées, ils ne peuvent pas accéder aux locaux de stockage ou aux navires de transport, ni aux locaux d'habitation attenants, où les agents publics chargés du contrôle peuvent accéder pour leur part entre 8 heures et 20 heures.

II. La proposition de loi initiale.

L'article 15 comprend plusieurs dispositions modernisant le droit de la pêche maritime et de l'aquaculture.


Le I. modifie l'article L. 911-1 du code rural et de la pêche maritime, en précisant le champ d'application des dispositions relatives à la pêche et à l'aquaculture :

- L'exercice de la pêche maritime est toujours défini comme « la capture des animaux et la récolte des végétaux marins », mais une précision supplémentaire est apportée concernant le domaine d'exercice de la pêche maritime. Cette activité peut en effet s'exercer « en mer », mais aussi « dans la partie des fleuves, rivières, étangs et canaux où les eaux sont salées ». La modification proposée consiste à ajouter que cette activité peut aussi s'exercer « sur l'estran », c'est-à-dire sur la partie du littoral pouvant être recouverte par la marée.

- La définition de l'aquaculture est également précisée. Là où l'actuel article L. 911-1 définit cette activité comme « l'élevage des animaux et ... la culture des végétaux marins », l'article 15 subdivise cette activité en plusieurs sous-catégories : l'aquaculture, la pisciculture, les élevages marins et les autres cultures marines, toutes ces activités étant caractérisées par l'exploitation d'un « cycle biologique d'espèces aquatiques, végétales ou animales ». Il est précisé que ces activités consistent notamment dans « le captage, l'élevage, la finition, la purification, l'entreposage, le conditionnement, l'expédition ou la première mise en marché ». Cette énumération reprend en réalité les dispositions règlementaires applicables aux concessions de cultures marines, en particulier l'article R. 923-9 du code rural et de la pêche maritime.

- Enfin, un sort particulier est réservé à la conchyliculture, qui est définie comme « l'activité d'exploitation du cycle biologique des mollusques bivalves ».


Le II. enrichit les objectifs de la politique des pêches maritimes, de l'aquaculture marine et des activités halio-alimentaires, en faisant référence au rôle des écosystèmes marins, en précisant que la recherche doit concerner autant la filière des pêches maritimes que la filière aquacole, et en demandant que l'implantation de nouveaux sites aquacoles soit favorisée.


Le III. fixe à 65 ans la limite d'âge pour siéger au sein de tous les comités des pêches maritimes et de l'aquaculture : le comité national, les comités régionaux, ou les comités départementaux ou interdépartementaux. Cette disposition vise à favoriser la prise de responsabilité par des jeunes patrons-pêcheurs dans les organismes de représentation professionnelle de la pêche. Les comités ayant vocation à représenter les professionnels en activité, il n'y a théoriquement pas de patrons-pêcheurs au-delà de cette limite d'âge, leur régime de protection sociale prévoyant un départ à la retraite entre 50 et 55 ans.


Le IV. procède à une réécriture de l'article L. 921-1 du code rural et de la pêche maritime, qui prévoit que la pêche maritime peut être soumise à un régime d'autorisation : celle-ci concerne la pêche embarquée, la pêche à pied, la pêche sous-marine ou encore la récolte de végétaux marins. La nouvelle rédaction consiste à préciser que la pêche scientifique est également concernée par le régime d'autorisation. Une telle rédaction répond à l'impératif de conformité du droit français au règlement sur le contrôle des pêches, qui prévoit une telle autorisation pour la pêche à but scientifique 2 ( * ) . Le principe de telles autorisations figure déjà dans la partie règlementaire du code rural et de la pêche maritime, à l'article R. 921-77, et se voit remonter au niveau législatif.


Le V. crée un nouvel article L. 921-7-1 du code rural et de la pêche maritime, pour donner une base juridique à la licence européenne de pêche, obligatoire pour tout pêcheur intervenant dans les eaux européennes ou extra-européennes en vertu d'accords de pêche négociés par l'Union européenne. Cette licence est non cessible. La licence européenne, prévue par la réglementation de la PCP, est déjà régie par la partie réglementaire du code rural et de la pêche maritime (articles R. 921-15 et suivants) : le nouvel article lui donne une base juridique plus solide en prévoyant son existence au niveau législatif, les conditions d'attribution de cette licence étant renvoyées à un décret en Conseil d'État.


Le VI. assouplit considérablement la définition de la société de pêche artisanale (SPA), en jouant sur plusieurs paramètres :

- L'exigence de détention à terme de 100 % des parts de la société par les marins-pêcheurs embarqués est revue à la baisse : il est proposé qu'ils ne possèdent plus que 50 % des parts, afin de ne pas faire perdre le statut de SPA à des sociétés de pêche qui feraient entrer d'autres acteurs que les marins-pêcheurs dans leur capital. Il s'agit de disposer de ressources financières extérieures au secteur de la pêche pour financer l'acquisition de nouveaux navires.

- Il est également proposé que les SPA puissent détenir plus de deux navires.

- Enfin, l'acquisition progressive des navires par le patron-pêcheur est permise sur une durée plus longue : 15 ans au lieu de 10 ans. Dans l'intervalle, les parts pourront rester propriété d'un armement coopératif agréé.

- Par ailleurs, la SPA pourra être simplement exploitante des navires, à condition que des marins-pêcheurs embarqués restent propriétaires de 50 % des parts.


Le VII. élargit les pouvoirs des gardes-jurés et des prud'hommes pêcheurs assermentés, en leur permettant d'intervenir dans les locaux de stockage ou encore dans les locaux d'habitation attenants à leurs zones de contrôle, en journée. Il s'agit de renforcer le contrôle à terre des pêches maritimes et de l'aquaculture.


Le VIII. , enfin, conforte le pouvoir de sanction des organisations de producteurs (OP) vis-à-vis de leurs membres, en leur attribuant directement des pouvoirs de sanction de leurs membres à travers des sanctions pécuniaires ou des retraits d'autorisations. L'article L. 912-12-1 du code rural et de la pêche maritime prévoit que les statuts des OP doivent prévoir de telles sanctions, mais aucune disposition législative ne mentionnait spécifiquement le droit des OP d'infliger de telles sanctions à leurs membres. Le nouvel article L. 946-7-1 vient donc conforter le pouvoir de sanction des OP, en l'encadrant dans les mêmes termes que ceux prévus à l'article L. 912-12-1 précité.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

L'article 15 a été substantiellement modifié lors de la discussion à l'Assemblée nationale, avec pas moins de 15 amendements adoptés en commission et 11 autres amendements adoptés en séance.


La nouvelle définition, plus précise, de l'aquaculture, ainsi que l'enrichissement des objectifs de la politique des pêches maritimes, de l'aquaculture marine et des activités halio-alimentaires, prévus par les I. et II. (devenus 1° et 2°), n'ont fait l'objet que de rectifications rédactionnelles . De même, la limitation prévue au III. (devenu 3°) à 65 ans de l'âge des élus au sein des comités des pêches maritimes et des élevages marins n'a pas été remise en cause.


• À l'initiative de Jean-Luc Bleunven, les députés ont adopté en séance un amendement visant à donner plus d'ambition à l'objectif de développement de l'aquaculture marine, prévu par l'article L. 911-2 du code rural et de la pêche maritime. Considérant que l'octroi de concessions de cultures marines en pleine mer se heurtait à de fréquentes et systématiques oppositions, les députés ont souhaité que la politique des pêches maritimes, de l'aquaculture marine et des activités halio-alimentaires encourage l'installation de sites aquacoles à terre, à proximité de la bande littorale, et vers lesquels l'eau de mer serait acheminée par pompage.


Les IV. et V. (devenus 4° et 5°) ont été supprimés par coordination, dans la mesure où les mesures qu'ils proposaient sont déjà mises en oeuvre par l'ordonnance n° 2015-1248 du 7 octobre 2015 portant adaptation du code rural et de la pêche maritime au droit de l'Union européenne, qui est intervenue :

- D'une part, pour modifier l'article L. 921-1 du code rural et de la pêche maritime afin de prévoir expressément dans la loi que les opérations de pêche à des fins scientifiques puissent être soumises, elles aussi, à un régime d'autorisation ;

- D'autre part, pour compléter l'article L. 921-7 du même code, afin de donner un cadre juridique à la licence européenne de pêche. Le maintien du nouvel article L. 921-7-1, créé par l'article 15, n'était donc plus nécessaire.


• À l'initiative de la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, Annick Le Loch, et de Jean-Luc Bleunven, les députés, en séance, ont également adopté deux amendements identiques créant un 5° bis au sein de l'article pour réclamer que les schémas régionaux de développement de l'aquaculture marine (SRDAM) comprennent un volet recensant les possibilités d'installation de fermes aquacoles en milieu fermé , considérant que l'aquaculture en milieu fermé permet de mieux gérer les effluents et limiter les risques de pollutions.


• À l'initiative conjointe des deux rapporteurs de la commission du développement durable et de la commission des affaires économiques, les députés, en commission, ont resserré la définition de la société de pêche artisanale (SPA) . S'ils ont accepté que le capital des SPA ne soit plus détenu à 100 % par des patrons-pêcheurs embarqués, ils ont verrouillé l'exigence que la SPA reste majoritairement détenue par eux, en faisant passer le seuil de détention du capital de 50 à 51 %. Les apporteurs de capitaux extérieurs ne pourront être que minoritaires.

Par ailleurs, pour éviter que de grosses sociétés puissent encore être qualifiées de SPA, les députés ont rétabli le plafond à deux navires : les sociétés détenant plus de deux navires ne pourront pas être qualifiées de SPA et bénéficier des avantages qui y sont attachés. Il s'agit de ne pas dénaturer la notion de pêche artisanale.


• Enfin, les députés ont adopté en séance un amendement du Gouvernement revenant sur l'extension des pouvoirs des gardes-jurés et des prud'hommes pêcheurs assermentés , estimant qu'ils ne devaient pas se voir dotés de pouvoirs de police judiciaire, cette mission relevant des seuls agents publics.

IV. La position de votre commission.

Après avoir entendu les professionnels, la nouvelle définition de l'aquaculture prévue par cet article semble faire consensus . Votre rapporteur ne suggère donc pas de la modifier.

Les précisions apportées à l'article L. 911-2 du code rural et de la pêche maritime, tendant à renforcer les objectifs des politiques publiques en matière de développement de l'aquaculture, vont à l'évidence dans le bon sens. Il convient de ne pas opposer les différentes formes d'aquaculture : en mer, à terre, en circuit fermé ou en circuit ouvert. La faiblesse du développement de l'aquaculture ces dernières années doit inciter à encourager tous les types de projets. Votre rapporteur a simplement proposé à votre commission, qui l'a accepté, un amendement modifiant le 2° de cet article afin de ne pas omettre l'objectif de développement de l'aquaculture en mer au sein de l'article précité du code rural et de la pêche maritime (Amendement n° COM-47).

La limitation à 65 ans de l'âge des élus aux comités des pêches maritimes et des élevages marins a été approuvée par les organismes auditionnés par votre rapporteur et correspond globalement à la pratique observée actuellement. Cette disposition ne doit donc pas être modifiée.

L'élargissement de la notion de société de pêche artisanale est nécessaire, mais doit être maîtrisée . Aller au-delà de deux navires risquerait de favoriser la création de sociétés d'une taille importante, qui profiteraient d'un statut avantageux tout en n'étant plus réellement « artisanales ». Votre rapporteur souligne cependant qu'il ne faut pas attendre monts et merveilles de l'apport de capitaux extérieurs vers la pêche . Les capitaux vont vers les rendements les plus rémunérateurs et la pêche constitue un investissement encore incertain. Il conviendrait, dans le cadre juridique déjà existant, de travailler à des solutions originales de financement participatif, dans un but d'abord de maintien de l'activité locale des pêcheurs plutôt que dans une logique de spéculation. C'est pourquoi votre commission a accepté un amendement de notre collègue Michel Canevet précisant que les patrons-pêcheurs pourraient recourir au financement participatif pour réunir les sommes nécessaires afin d'atteindre le niveau de 51 % de parts détenues dans les SPA (Amendement n° COM-12).

Enfin, votre rapporteur n'a pas souhaité revenir sur la limitation des pouvoirs des gardes-jurés et prud'hommes pêcheurs assermentés. Le maintien d'une discipline forte en matière de pêche passe certes par des contrôles stricts. Par ailleurs, les gardes-jurés et prud'hommes pêcheurs assermentés sont soumis à des conditions sévères pour exercer leur activité et doivent présenter des garanties de probité personnelle et de compétences professionnelles. Il convient donc de n'attribuer qu'à des agents publics les pouvoirs de contrôle les plus intrusifs dans la vie privée des professionnels de la pêche et de l'aquaculture.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 15 bis (article L. 931-31 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) - Possibilité de créer des fonds de mutualisation en matière de pêches maritimes

Objet : cet article donne une base juridique à la création de fonds de mutualisation agréés par l'autorité administrative, permettant aux pêcheurs de faire face à des aléas climatiques, à des incidents environnementaux ou à des frais de sauvetage en mer.

I. Le droit en vigueur.

L'article 35 du règlement (UE) n° 508/2014 du Parlement Européen et du Conseil du 15 mai 2014 relatif au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) permet la mise en place de fonds de mutualisation permettant d'indemniser les pertes économiques des pêcheurs en cas de phénomènes climatiques défavorables et d'incidents environnementaux. Les pertes couvertes doivent être de plus de 30 % du chiffre d'affaires annuel de l'entreprise concernée, par rapport à la moyenne du chiffre d'affaires des trois années précédentes. Le seuil de déclenchement de l'aide est donc fixé à un niveau élevé.

Ces fonds de mutualisation peuvent faire l'objet de subventions par le FEAMP, en plus des contributions des pêcheurs eux-mêmes .

Une enveloppe d'1,75 million d'euros sur l'ensemble de la période d'exécution du FEAMP, soit jusqu'en 2020, a été réservée dans le programme opérationnel approuvé pour la France. 1,3 million d'euros proviendrait des crédits européens, des contreparties nationales étant apportées à hauteur de 25 % des crédits européens mobilisés.

De tels dispositifs de fonds de mutualisation existent dans le secteur agricole pour faire face aux crises sanitaires, notamment dans le secteur de l'élevage, mais aussi dans le secteur végétal : ainsi, le Fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnementale (FMSE) a été mis en place en 2013. Agréé par l'État, il reçoit des contributions en provenance du budget de la politique agricole commune (PAC), ainsi que des contreparties budgétaires nationales. Les subventions représentent 65 % des ressources du FMSE, 35 % étant apportées par les agriculteurs eux-mêmes.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

L'article 15 bis est issu d'un amendement du Gouvernement adopté par la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale, et non modifié en séance publique.

Cet amendement crée une nouvelle section au sein du chapitre I er du titre III du Livre IX du code rural et de la pêche maritime, pour donner avec le nouvel article L. 931-31 une base juridique solide à la création de fonds de mutualisation bénéficiant de subventions européennes.

Ces fonds de mutualisation ont vocation à prendre en charge les pertes économiques résultant pour les pêcheurs de trois catégories d'évènements :

- des phénomènes climatiques défavorables ;

- des incidents environnementaux ;

- des coûts de sauvetage en mer des équipages ou des navires.

Ils doivent être agréés par l'État pour pouvoir recevoir des subventions de l'Union européenne, de l'État, et des contributions des pêcheurs eux-mêmes.

L'article L. 931-31 renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de définir les modalités de fonctionnement du fonds de mutualisation, et permet également par décret de rendre obligatoire l'affiliation des entreprises de pêche.

Lors de la présentation de l'amendement, le ministre a indiqué que les professionnels de la pêche à pied, ainsi, dans un second temps, que les professionnels de la pêche embarquée de coquillages, pourraient être intéressés par le dispositif du fonds de mutualisation .

III. La position de votre commission.

Votre rapporteur partage la volonté de donner aux professionnels de la pêche les outils pour maîtriser les risques économiques qu'ils prennent. Les fonds de mutualisation permettent d'organiser, avec l'appui de crédits publics, une réelle solidarité économique des acteurs de la pêche.

Votre rapporteur regrette que ces fonds de mutualisation ne puissent pas bénéficier à l'aquaculture . Cette situation résulte du choix fait dans la rédaction du règlement européen relatif au FEAMP : l'aquaculture est exclue du bénéfice des fonds de mutualisation prévus à l'article 35 de ce règlement.

L'article 56 du même règlement met en place un instrument spécifique pour l'aquaculture : le FEAMP peut apporter une subvention afin de compenser pour les conchyliculteurs les effets de « la suspension temporaire de leurs activités en raison d'une mortalité de masse exceptionnelle, lorsque le taux de mortalité dépasse 20 % ou que les pertes résultant de la suspension de l'activité s'élèvent à plus de 35 % du chiffre d'affaires annuel de l'entreprise concernée, calculé sur la base du chiffre d'affaires moyen de cette entreprise durant les trois années civiles précédant l'année au cours de laquelle les activités ont été suspendues ». Une enveloppe de 6,5 millions d'euros, dont près de 5 millions eu provenance du FEAMP, est prévue au sein du programme opérationnel français pour la période 2014-2020.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 16 - Rapports au Parlement sur le pescatourisme et la pêche récréative

Objet : cet article demande au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport sur le pescatourisme et la diversification de l'activité des pêcheurs professionnels.

I. Le droit en vigueur.

Les pêcheurs professionnels ne sont pas les seuls à exercer l'activité de pêche en mer. Des bateaux de pêche de loisir sont aussi présents et contribuent à prélever les ressources halieutiques, dans des proportions sans doute moindres, mais qui peuvent ne pas être négligeables, même si votre rapporteur ne dispose pas de statistiques fiables en la matière.

La concurrence entre pêche professionnelle et pêche de loisir peut prendre un tour acrimonieux pour certaines espèces peu abondantes : il en va ainsi du bar de ligne pêché sur les côtes bretonnes. Si les pêches récréatives ne doivent pas donner lieu à commercialisation du poisson obtenu, de nombreux témoignages mettent en évidence des pratiques contraires, pénalisant les pêcheurs professionnels.

Les navires des pêcheurs professionnels peuvent aussi être utilisés hors période de pêche pour développer une activité d'accueil touristique. La diversification de l'activité des pêcheurs professionnels constitue une voie pour améliorer leur situation économique et rentabiliser les équipements. Le pescatourisme est au demeurant en plein essor.

Mais plusieurs obstacles peuvent se dresser sur la route de la diversification . En particulier, alors que les captures effectuées dans le cadre d'une pêche de loisir par des pêcheurs non professionnels ne rentrent pas dans le calcul des quotas, les pêcheurs professionnels initiant des non-professionnels risquent de devoir appliquer leurs normes professionnelles et décompter les captures de leurs quotas. Le statut des poissons pêchés dans le cadre d'une activité de pescatourisme doit donc faire l'objet d'une clarification.

Enfin, la pratique des ventes directes aux consommateurs permet, sur le littoral, d'alimenter les circuits courts, et constitue une modalité intéressante de valorisation des produits de la pêche artisanale.

II. La proposition de loi initiale.

L'article 16 de la proposition de loi prévoyait de demander au Gouvernement de présenter deux rapports au Parlement dans un délai de 6 mois à compter de la promulgation de la loi pour l'économie bleue :

- Un rapport sur les « possibilités et les conditions de diversification d'activité des marins-pêcheurs par le tourisme, notamment : pescatourisme et commercialisation directe des produits de la pêche transformés ou non ».

- Un rapport sur les « conséquences sur l'environnement, la biodiversité et la ressource exploitée par les pêcheurs professionnels de la pêche récréative en mer et sur l'estran » et les « résultats d'une consultation des organisations concernées sur ce sujet ».

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

À l'initiative du rapporteur Arnaud Leroy, les députés ont adopté en commission un amendement :

- Supprimant le second rapport sur les conséquences environnementales de la pêche non professionnelle.

- Élargissant le champ du premier rapport sur la diversification de l'activité des pêcheurs : le rapport devra aussi examiner les possibilités de diversification de l'activité des aquaculteurs.

Cette modification a été justifiée par la nécessité de ne pas demander trop de rapports à la fois.

IV. La position de votre commission.

Si votre commission retient une position assez systématique d'hostilité à l'égard des rapports au Parlement réclamés au Gouvernement dans des projets ou propositions de loi, votre rapporteur a pu constater l'attachement des professionnels de la mer à une étude sérieuse et fouillée sur le pescatourisme et la diversification des activités des pêcheurs et aquaculteurs .

Les questions de vente directe et de dégustation de produits artisanaux, dans des conditions similaires à celles prévues pour les produits agricoles, sont importantes pour l'économie du littoral.

Aussi, votre rapporteur n'a pas proposé de supprimer l'article 16.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 17 (article L. 2213-9 [nouveau] du code de la défense) - Établir une flotte à caractère stratégique pour la sécurité des approvisionnements en temps de crise

Objet : cet article, créant une flotte stratégique pour l'approvisionnement en temps de crise, a été supprimé et ses dispositions ont été reclassées à l'article 12 ter.

Les dispositions de cet article ayant été déplacées à l'article 12 ter, soumis à l'examen de la commission saisie au fond, votre commission n'en a pas effectué de réexamen.

Votre commission a maintenu la suppression de cet article.

Article 18 (articles L. 211-1, L. 211-3, L. 213-1 et L. 321-1 du code de l'environnement) - Renforcer la prise en compte des problématiques conchylicoles en matière de police de l'eau et de réglementation territoriale

Objet : cet article vise à renforcer l'arsenal juridique à disposition des pouvoirs publics pour assurer la protection de la qualité des eaux aquacoles, et principalement conchylicoles, face aux pollutions et autres atteintes qui peuvent compromettre ces activités.

I. Le droit en vigueur.

La problématique de la qualité de l'eau est essentielle pour l'activité aquacole, et en particulier l'activité conchylicole.

Les articles L. 161-1 et suivants du code de l'environnement définissent de manière large les « dommages causés à l'environnement ». Le code de l'environnement donne aux pouvoirs publics des pouvoirs étendus pour mettre en place des mesures de prévention. Il instaure aussi le principe du « pollueur-payeur » imposant aux personnes qui portent atteinte à l'environnement le soin de réparer le préjudice causé, avec une priorité donnée au rétablissement des ressources naturelles et des services écologiques dans leur état initial.

Par ailleurs, le droit civil impose de réparer les dommages causés aux personnes victimes de dommages environnementaux, y compris des dommages subis dans leur activité économique.

Il est cependant parfois difficile d'établir un lien de causalité, certaines détériorations des milieux étant plurifactorielles, et le résultat de phénomènes de long terme . L'introduction d'une responsabilité civile du fait des atteintes à l'environnement, résultant directement du code civil, est encore en débat, et pourrait avoir un impact direct sur la possibilité pour les aquaculteurs de demander des comptes aux autres acteurs économiques générant des pollutions des milieux marins.

Les articles L. 211-1 et suivants du code de l'environnement fixent le cadre juridique en vue d'une « gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ». La politique de l'eau répond à des impératifs fixés par la loi nationale, mais aussi à des objectifs fixés au niveau européen :

- La directive du 23 octobre 2000 , dite directive cadre sur l'eau (DCE) , demande aux États-membres de l'Union européenne d'atteindre en 2015 un bon état général tant pour les eaux souterraines que pour les eaux superficielles, y compris les eaux estuariennes et côtières. Des plans d'action doivent être adoptés par bassin versant, et des zones protégées établies. Ces plans d'action prennent la forme de schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) et de schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE). Le pilotage de ces schémas est assuré par un comité de bassin.

- La directive cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM) du 17 juin 2008 établit pour sa part un cadre d'action communautaire dans le domaine de la politique pour le milieu marin. Ses exigences ont été transposées en droit national au sein des articles L. 219-9 à L 219-18 du code de l'environnement. La DCSMM vise à atteindre un bon état écologique du milieu marin au plus tard en 2020, grâce à la mise en oeuvre d'un plan d'action pour le milieu marin (PAMM) dans chaque sous-région marine, qui suppose une surveillance de la qualité des eaux.

- D'autres textes européens imposent également des objectifs en matière de qualité des eaux : la pollution par les nitrates doit être réduite et contrôlée au titre de la directive nitrates. Les directives habitat ou oiseaux imposent aussi de mettre en oeuvre des mesures adaptées pour préserver la faune et la flore sauvage et, ce faisant, lutter contre les pollutions liées aux activités humaines.

Le code de l'environnement renvoie le plus souvent la définition concrète des mesures à prendre au niveau réglementaire. L'article L. 211-2 du code de l'environnement renvoie ainsi à un décret en Conseil d'État la définition des règles générales de préservation de la qualité et de répartition des eaux superficielles, souterraines et des eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales et l'article L. 211-3 permet l'adoption, toujours par décret en Conseil d'État, de prescriptions particulières à certaines parties du territoire.

Enfin, les articles L. 321-1 et suivants du code de l'environnement définissent des règles particulières destinées à protéger et aménager le littoral.

II. La proposition de loi initiale.

Les dispositions de l'article 18 visaient principalement à créer de nouveaux instruments juridiques au sein du code de l'environnement pour mieux protéger la qualité des eaux conchylicoles.


Le I. modifiait l'article L. 161-1 du code de l'environnement pour mieux prendre en compte la conchyliculture dans la définition des « dommages causés à l'environnement » :

- D'abord, la modification proposée prévoyait de faire directement référence aux directives européennes en matière de protection des eaux. Au titre de l'actuel article L. 161-1, constitue un dommage causé à l'environnement une « détérioration directe » qui « affecte gravement l'état écologique, chimique ou quantitatif ou le potentiel écologique des eaux ». La proposition de loi ajoutait qu'un tel dommage serait constitué s'il affectait aussi les zones protégées au titre de la directive cadre sur l'eau (DCE), de la directive cadre « stratégie pour le milieu marin » (DCSMM) ou de toute autre directive concernant la protection de l'environnement marin.

- Ensuite, la proposition de loi créait une nouvelle catégorie de dommage causé à l'environnement : le dommage causé aux zones de productions conchylicoles et aquacoles . Ce dommage serait constitué dès lors que ces zones auraient dû faire face à des restrictions d'activité, comme par exemple l'interdiction temporaire de mise en marché à des fins de protection de la santé humaine.


Le II. modifiait l'article L. 211-1 du même code , qui détermine quels sont les objectifs en matière de « gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ». Les objectifs des auteurs de la proposition de loi consistaient à mieux prendre en compte la conchyliculture au sein de ces objectifs d'une triple manière :

- En proposant que la politique de l'eau vise à prévenir les modifications des caractéristiques physiques, chimiques, biologiques ou bactériologiques des eaux, mais aussi de leurs caractéristiques micro-biologiques .

- En demandant que les « eaux et ressources de la conchyliculture ou des élevages marins » soient spécialement citées dans la liste des eaux devant faire l'objet de protection au titre de la politique de l'eau, l'article L. 211-1 énonçant en effet simplement « les eaux superficielles, souterraines » ou les « eaux de la mer », sans précisions supplémentaires.

- Enfin, en demandant un décret en Conseil d'État spécifique pour la protection des eaux conchylicoles.


Le III. modifiait l'article L. 211-3 du même code , qui prévoit qu'en complément des règles générales de préservation de la qualité et de répartition des eaux superficielles, souterraines et des eaux de la mer définies par décret en Conseil d'État, d'autres décrets en Conseil d'État peuvent fixer des « prescriptions nationales ou particulières à certaines parties du territoire ». La liste des prescriptions pouvant être prises est très large : limitation ou suspension provisoire d'utilisation de l'eau, encadrement des prélèvements pour l'irrigation, prescriptions à destination des stations d'épuration, des installations de captage d'eau, ou encore délimitation de zones particulières au sein des zones humides (comme les lagunes, tourbières ou encore les zones de tête de bassin). La proposition de loi :

- demande que ces décrets prévoient des « dispositions particulières applicables à la protection des ressources conchylicoles et piscicoles » afin de protéger spécifiquement ces zones ;

- prévoit que la délimitation de zones humides d'intérêt particulier se fasse dans l'intérêt de la protection des ressources conchylicoles et piscicoles ;

- réclame qu'un programme d'action particulier soit établi pour la protection des eaux des zones conchylicoles . Ce programme peut prévoir d'interdire le rejet de certaines substances dans les eaux conchylicoles, de manière à conserver un milieu propice à la production.


Le IV. proposait de modifier l'article L. 212-2 du même code , qui fixe le cadre général des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), en demandant que la protection des eaux et des zones de production conchylicoles soit intégrée dans les objectifs de qualité et de quantité des eaux qui sont fixés par les SDAGE, au niveau de chaque bassin.


Le V. enrichissait les missions du comité national de l'eau , mentionnées à l'article L. 213-1 du code de l'environnement, en prévoyant que celui-ci donne son avis sur les projets de décret concernant la protection des peuplements piscicoles, mais aussi sur les projets de décret concernant la protection des peuplements conchylicoles, ceux-ci n'étant pas spécifiquement mentionnés au sein dudit article.


Le VI., enfin, ajoute le maintien ou le développement des activités conchylicoles dans la zone littorale à la liste des objectifs que doit poursuivre la politique de protection et d'aménagement du littoral régie par les articles L. 321-1 et suivants du code de l'environnement. La préservation et le développement des activités économiques liées à la proximité de l'eau, telles que la pêche ou les cultures marines, figuraient déjà au titre des objectifs de la politique du littoral, mais les auteurs souhaitent aller plus loin en citant la conchyliculture.

Le même VI. ajoute que les schémas de cohérence territoriale (SCoT) et les plans locaux d'urbanisme (PLU) ne peuvent être contraires au maintien et au développement, dans la zone littorale, des activités agricoles, sylvicoles, conchylicoles, de l'industrie, de l'artisanat ou du tourisme .

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Les députés ont procédé à une large réécriture de l'article 18 . En effet, si celui-ci poursuit des objectifs louables d'amélioration de la protection de la qualité des eaux aquacoles, condition sine qua non du maintien et du développement de cette activité, très sensible aux pollutions des milieux marins, les moyens juridiques proposés se sont avérés peu adaptés.


• À l'initiative du rapporteur, Arnaud Leroy, les députés ont tout d'abord adopté en commission un amendement supprimant la modification de l'article L. 161-1 du code de l'environnement . En effet, la proposition consistant à indiquer qu'un dommage à l'environnement serait constitué s'il concernait une zone protégée au titre des directives européennes, notamment les directives DCE ou DCSMM, n'est pas très utile, dans la mesure où l'article L. 161-1 du code de l'environnement retient déjà une définition très large du dommage à l'environnement. Par ailleurs, la reconnaissance spécifique, en tant que dommage à l'environnement, des détériorations qui affectent les zones de production conchylicole et aquacole, n'est pas apparue opportune aux députés, dans la mesure où les détériorations affectant l'eau, les espèces, leur habitat, les sites de reproduction et les services écologiques sont déjà comprises dans le I. de l'article L. 161-1.


• À l'initiative du rapporteur, les députés ont également adopté en commission un amendement supprimant la modification de l'article L. 211-1 du code de l'environnement qui était proposée pour enrichir les objectifs de la politique de protection de la ressource en eau. Les députés ont en effet estimé que l'objectif de protection des ressources conchylicoles était déjà assuré par la rédaction actuelle de l'article L. 211-1, qui vise très largement les « eaux de la mer ».


• Les députés ont aussi souhaité supprimer les modifications apportées à l'article L. 211-3 qui visaient à la création d'un programme d'action particulier pour la protection des eaux des zones conchylicoles au sein des zones humides . Les objectifs de qualité des eaux conchylicoles et piscicoles sont en effet déjà pris en compte dans la politique de l'eau menée dans les zones humides, et il n'est pas apparu nécessaire de renforcer encore la législation en la matière.

En revanche, l'attention aux caractéristiques microbiologiques des eaux conchylicoles a fait l'objet d'amendements adoptés en séance par les députés : plutôt que d'imposer un objectif de préservation de l'état physique, chimique, biologique, bactériologique ou microbiologique de l'ensemble des masses d'eau, en modifiant en ce sens l'article L. 211-1, les députés ont adopté en séance deux amendements du rapporteur Arnaud Leroy, pour prévoir qu'un décret devrait fixer des dispositions particulières pour la protection des seules ressources conchylicoles et piscicoles. Dans ce cadre, la surveillance de l'état de ces seules eaux pourrait être étendue à leur qualité microbiologique, afin de couvrir les pollutions par les micro-organismes : virus ou bactéries notamment.


• Les députés n'ont pas jugé nécessaire de rajouter la protection des eaux et des zones de production conchylicole dans les objectifs des SDAGE, car ils ont estimé que cette protection faisait déjà partie des objectifs de ces schémas. Ils ont donc adopté un amendement de suppression du IV. du projet de loi (qui était devenu 4°).


Les députés ont conservé au V. (devenu 5°) la saisine pour avis du Comité national de l'eau sur la protection des peuplements conchylicoles .


Les députés, enfin, ont accepté que le maintien et le développement des activités aquacoles soient spécifiquement mentionnés au titre des objectifs de la politique du littoral . Ils ont toutefois modifié la disposition nouvelle prévoyant que les documents d'urbanisme devraient se conformer à la politique du littoral, afin d'éviter les difficultés d'articulation entre les niveaux de planification spatiale. Un amendement du rapporteur, adopté en séance, a simplement prévu que l'action des collectivités territoriales en matière de planification devrait contribuer à la politique de protection et d'aménagement du littoral, ce qui ne dit rien de la relation entre documents de planification.

IV. La position de votre commission.

Votre rapporteur partage les objectifs d'amélioration de la qualité des eaux conchylicoles, et plus largement aquacoles, car sans cette qualité il ne sera plus possible de produire dans de bonnes conditions, voire plus possible de produire du tout, si la pollution des eaux rendait les produits impropres à la consommation ou empêchait leur croissance.

Pour autant, il ne peut que constater, avec le rapporteur de l'Assemblée nationale Arnaud Leroy, que l'arsenal juridique permettant de protéger les eaux aquacoles existe déjà .

L'extension des analyses de qualité des eaux à leur état microbiologique est intéressante, dans la mesure où ces analyses ne concernent que le secteur aquacole. En revanche, l'intérêt d'une généralisation d'un objectif de maintien de l'état microbiologique de l'eau est plus douteux dans d'autres domaines, comme par exemple pour les eaux de baignade. La solution consistant à ne fixer un objectif de stabilité microbiologique que pour les eaux conchylicoles ou aquacoles est donc mieux adaptée à l'enjeu.

Votre rapporteur partage enfin l'intégration de la préoccupation aquacole au coeur de la politique du littoral, car la politique du littoral ne doit pas consister en une « mise sous cloche » de l'espace littoral mais en une exploitation intelligente qui préserve ces espaces remarquables, tout en permettant aux activités humaines de s'y déployer. Il serait paradoxal que l'aquaculture et la conchyliculture, censées s'exercer en symbiose avec le milieu marin, soient pénalisées par la politique du littoral alors que ces activités font l'identité même de ces territoires .

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 18 bis (article L. 923-1-1 du code rural et de la pêche maritime) - Renforcer le degré de compatibilité entre les schémas de cohérence territoriale et les schémas régionaux de développement de l'aquaculture marine

Objet : cet article vise à mieux articuler les schémas régionaux de développement de l'aquaculture marine avec les documents de planification spatiale et les projets de l'État et des collectivités territoriales.

I. Le droit en vigueur.

La loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) de 2010 a créé un nouvel instrument pour favoriser le développement de l'aquaculture : les schémas régionaux de développement de l'aquaculture marine (SRDAM), établis dans chaque région comportant une façade maritime afin de recenser les sites existants et les sites propices au développement d'une aquaculture marine durable.

Ces SRDAM sont élaborés par les préfets de région , en lien avec les parties prenantes : élus, professionnels, personnalités qualifiées en matière de protection de l'environnement.

Leur régime est défini à l'article L. 923-1-1 du code rural et de la pêche maritime , qui précise en son dernier alinéa qu'ils doivent être pris en compte, notamment en veillant à l'accessibilité des zones aquacoles actuelles ou futures, dans les documents de planification de l'État ou des collectivités territoriales ou de leurs groupements.

La loi prévoit donc déjà une articulation entre les SRDAM et les autres documents de planification, en particulier les schémas de cohérence territoriale (SCoT) ou les plans locaux d'urbanisme (PLU).

Le droit de l'urbanisme distingue plusieurs niveaux d'exigence dans l'articulation des documents de planification entre eux .

La prise en compte constitue le niveau de base, beaucoup moins contraignant que l'exigence de compatibilité qui s'applique par exemple pour les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), les schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) ou encore les chartes de parcs naturels régionaux.

L'obligation de prise en compte empêche simplement le SCoT ou le PLU de s'écarter des orientations fondamentales des SRDAM , comme ils ne doivent pas s'écarter des orientations fondamentales des autres documents qu'ils doivent prendre en compte, par exemple les schémas régionaux de cohérence écologique (SRCE).

D'après les informations fournies à votre rapporteur, l'ensemble des régions métropolitaines ayant une façade maritime seraient aujourd'hui dotées d'un SRDAM approuvé, à l'exception de deux d'entre elles où les SRDAM seraient en cours d'approbation .

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

À l'initiative du rapporteur Arnaud Leroy, la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale avait ajouté l'article 18 bis pour renforcer l'opposabilité des SRDAM aux documents d'urbanisme, prévoyant que les documents de planification et les projets de l'État, des collectivités territoriales et de leurs groupements devraient non plus prendre en compte ces SRDAM mais désormais être compatibles avec ceux-ci .

Compte tenu des difficultés que cette rédaction nouvelle aurait pu poser pour les SCoT et PLU existants ou en cours d'élaboration, et prenant en compte la nouvelle rédaction de l'article L. 321-1 du code de l'environnement introduite à l'article 18, qui prévoyait que l'action des collectivités territoriales en matière de planification devrait contribuer à la politique de protection et d'aménagement du littoral, les députés ont adopté en séance un amendement du rapporteur, Arnaud Leroy, supprimant cette nouvelle exigence.

Les SCoT et PLU devront donc prendre en compte les SRDAM , comme c'est aujourd'hui le cas, mais l'article L. 923-1-1 du code rural et de la pêche maritime a été complété pour ne pas s'arrêter à une simple prise en compte de l'accessibilité aux sites aquacoles.

La nouvelle rédaction de la fin de cet article exige que cette prise en compte consiste en une intégration, au sein des SCoT et PLU, de l'objectif de développement de la production aquacole, et que les SCoT et PLU ne fassent pas obstacle à l'accessibilité des zones aquacoles, mais aussi à l'installation ou l'extension d'établissements aquacoles.

Les exigences qui s'imposent aux SCoT et PLU en matière d'aquaculture marine sont donc plus précises que sous l'empire du droit actuel, sans changer le niveau d'opposabilité des SRDAM .

III. La position de votre commission.

Votre rapporteur ne peut que regretter l'absence de développement de l'aquaculture marine . D'après les informations qui lui ont été fournies lors des auditions, depuis l'adoption de la loi de 2010, aucune nouvelle installation aquacole en mer n'a été enregistrée.

La volonté de développer l'aquaculture, portée par la loi de 2010, s'est donc clairement heurtée à des obstacles puissants, qui résident moins dans un problème d'articulation entre les documents de planification de l'espace que dans l'existence de multiples freins techniques ou financiers.

Pour autant, l'idée de mieux intégrer les objectifs de développement de l'aquaculture marine dans les documents d'urbanisme va dans le bon sens. Les porteurs de projets seront d'autant plus encouragés dans leurs initiatives que les collectivités territoriales identifieront dans leurs documents d'urbanisme des espaces propices au développement de ces activités, et pas seulement à la préservation des activités déjà installées sur le littoral.

Compte tenu des difficultés qu'un rapport de compatibilité des SCoT et PLU avec les SRDAM pourrait faire apparaître, votre rapporteur n'a pas souhaité reprendre à son compte l'amendement initial de l'Assemblée nationale, acceptant du coup le compromis établi en séance consistant à expliciter un peu plus les exigences de prise en compte posées par la loi .

Votre commission a adopté cet article sans modification.

TITRE II BIS - DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES AUX COLLECTIVITÉS, RÉGIONS ET DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER

Ce titre comporte seulement deux articles, ajoutés à l'Assemblée nationale lors de la discussion en séance publique du projet de loi pour l'économie bleue :

- L'article 18 ter permet l'association des collectivités d'outre-mer aux discussions menées par la France sur la gestion et l'évaluation des ressources halieutiques, au sein des organisations internationales de gestion des pêches ;

- L'article 18 quater crée, pour sa part, un objectif spécifique de développement des circuits courts d'approvisionnement au sein de la politique des pêches maritimes et de l'aquaculture dans les outre-mer.

Article 18 ter (article L. 4433-15-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) - Permettre aux collectivités d'outre-mer de participer aux discussions régionales et internationales relatives à la ressource halieutique partagée

Objet : cet article a pour objet d'associer les collectivités ultramarines aux organisations internationales de gestion et d'évaluation des ressources halieutiques les concernant.

I. Le droit en vigueur.

La France est partie, soit directement, soit par le biais de l'Union européenne, à plusieurs traités internationaux organisant l'exploitation en commun des ressources halieutiques au-delà de la limite des 12 miles qui sépare la mer territoriale des eaux internationales.

Ces traités ont mis en place des organisations régionales de gestion de la pêche (ORGP), au sein desquelles les États coopèrent pour établir une évaluation des ressources halieutiques des zones concernées et mettre en oeuvre des mesures de gestion pouvant impliquer des régulations des capacités ou activités de pêche.

Ainsi, pour les Antilles et la Guyane, la Commission des pêches pour l'Atlantique centre-ouest (COPACO) constitue le cadre de référence des discussions entre États riverains de cette zone de pêche. Pour Mayotte et La Réunion, la France est partie à la Commission des pêches pour le Sud-Ouest de l'Océan indien.

Ce sont les autorités nationales qui assurent la représentation de la France dans ces organisations internationales, même si ce sont les navires basés dans les ports des collectivités ultramarines riveraines qui seront les premiers impactés par les décisions prises dans ces instances.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

À l'initiative du député Serge Letchimy, les députés ont adopté en séance un amendement créant l'article 18 ter , afin de permettre l'association des collectivités uniques de Guyane et de Martinique ainsi que de Mayotte aux travaux menés dans le cadre des ORGP gérant les bassins océaniques environnants.

L'article L. 4433-15-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi complété pour prévoir cette association.

Cet article, créé en 2000 par la loi d'orientation pour l'outre-mer, organise déjà en Guadeloupe, à Mayotte et à la Réunion l'exercice par la région des compétences en matière de gestion et de conservation des ressources biologiques de la mer dévolues à l'autorité administrative, notamment les autorisations d'installations d'élevages marins, la délivrance des autorisations de pêche et la répartition des quotas, la définition des obligations en matière de débarquement ou encore de modes de présentation des produits.

Les collectivités ultramarines sont déjà très impliquées dans les politiques locales des pêches maritimes et de l'aquaculture, et l'amendement adopté par les députés conforte cette place en leur permettant d'être associées aux travaux de la délégation française au sein des organisations internationales de gestion des pêches . En outre, l'association des organismes scientifiques compétents en matière halieutique et des organismes professionnels est également prévue.

III. La position de votre commission.

Votre rapporteur ne peut qu'approuver cette association des collectivités concernées aux organismes de gestion des pêches compétents dans leur environnement géographique direct.

La représentation de la France au sein des ORGP restera assurée au niveau national, mais un travail de collaboration plus étroite avec les autorités locales sera effectué, permettant d'impliquer tous les acteurs.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 18 quater (article L. 951-1 A [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) - Développement des circuits courts au sein de la politique des pêches maritimes et de l'aquaculture dans les outre-mer

Objet : cet article inscrit dans la loi un objectif spécifique à la politique des pêches maritimes et de l'aquaculture dans les outre-mer : la valorisation des productions locales.

I. Le droit en vigueur.

Les objectifs de la politique des pêches maritimes et de l'aquaculture sont définis à l'article L. 911-2 du code rural et de la pêche maritime. Ils ne sont pas déclinés par territoire. En particulier, il n'existe pas d'objectifs spécifiques aux outre-mer ni d'objectifs spécifiques de développement de circuits courts, même si on peut considérer que ceux-ci sont inclus dans l'objectif général de mener une politique de qualité.

II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Toujours à l'initiative du député Serge Letchimy, les députés ont adopté en séance un autre amendement créant l'article 18 quater , qui crée un nouvel article L. 951-1 A au sein du code rural et de la pêche maritime.

Cet article donne une base législative à une politique des pêches maritimes et de l'aquaculture spécifique aux outre-mer , qui, outre les objectifs généraux de la politique des pêches maritimes et de l'aquaculture fixés à l'article L. 911-2, aurait un objectif particulier de développement des productions locales de la pêche et de l'aquaculture.

Le développement de circuits courts et la valorisation des produits locaux de la pêche et de l'aquaculture visent à faire face aux handicaps liés à l'insularité et à l'éloignement de la métropole.

III. La position de votre commission.

Votre rapporteur partage la préoccupation de développer les circuits courts d'approvisionnement en produits de la mer dans les outre-mer , de manière à limiter la dépendance aux produits importés et à développer l'emploi local.

Il note d'ailleurs que, s'il n'y a pas aujourd'hui de déclinaison aux outre-mer des objectifs de la politique des pêches maritimes et de l'aquaculture dont le cadre est fixé par l'article L. 911-2 du code rural et de la pêche maritime, il n'en va pas de même pour la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation, dont le cadre général est fixé à l'article L. 1 du même code :

- Tout d'abord, le V. de cet article prévoit que la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation tient compte des spécificités des outre-mer ainsi que de l'ensemble des enjeux économiques, sociaux et environnementaux de ces territoires ;

- Ensuite, l'article L. 181-1 A définit des objectifs de la politique en faveur de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt dans les outre-mer, parmi lesquels le développement des circuits courts, puisque cette politique doit « favoriser la satisfaction de la demande alimentaire territoriale par les productions locales ».

Votre rapporteur soutient donc pleinement l'insertion par l'article 18 quater de la proposition de loi d'un nouvel article L. 951-1 A au sein du code rural et de la pêche maritime .

Votre commission a adopté cet article sans modification.

TITRE III - DISPOSITIONS DIVERSES

Votre commission n'est saisie sur ce titre que de deux articles :

- L'article 20, supprimé par l'Assemblée nationale, qui permettait la tenue de comptabilité en devises pour les entreprises commerciales ayant une activité internationale, et qui interdisait de répercuter sur des tiers les cotisations professionnelles obligatoires des comités des pêches ou des comités de la conchyliculture.

- L'article 22, qui créait une possibilité d'informer les clients des restaurants sur l'origine des produits aquatiques qui leur sont proposés.

Article 20 (articles L. 123-22 et L. 442-6 du code de commerce) - Permettre l'établissement d'une comptabilité en devises pour certaines entreprises et assurer la non-répercussion des cotisations professionnelles obligatoires dans les secteurs des pêches et de la conchyliculture par les acteurs de la commercialisation

Objet : cet article, supprimé à l'Assemblée nationale, comportait deux dispositions de nature technique : permettre aux commerçants ayant une activité internationale d'établir une comptabilité en devises et empêcher le transfert de la charge de paiement des cotisations professionnelles obligatoires dans le secteur conchylicole à l'occasion des opérations commerciales.

I. Le droit en vigueur.


L'article L. 123-22 du code de commerce précise que les documents comptables sont établis par les commerçants en euros. Ils doivent être conservés durant 10 ans. Les opérations réalisées dans une monnaie autre doivent être converties en euros dans la comptabilité des commerçants.


L'article L. 442-6 du code de commerce , pour sa part, fixe la liste des pratiques commerciales prohibées et engageant la responsabilité civile de leurs auteurs. Il prévoit également la nullité de certaines clauses, comme par exemple les clauses de remises et ristournes rétroactives.

II. La proposition de loi initiale.

L'article 20 de la proposition de loi vise à régler deux problèmes pratiques :


Le I. procédait à une nouvelle rédaction de l'article L. 123-22 du code de commerce pour permettre l'établissement d'une comptabilité en devises par les commerçants qui exercent une activité internationale. Il s'agissait surtout de faciliter l'activité des entreprises de transport maritime international, dont l'activité s'effectue exclusivement en dollars.


Le II. interdit aux vendeurs de coquillages de répercuter sur d'autres acteurs les cotisations professionnelles obligatoires établies par les comités des pêches maritimes et des élevages marins, aux niveaux national, régional, départemental ou interdépartemental ou par les comités de la conchyliculture, aux niveaux national ou régional. Il s'agit de permettre le recouvrement effectif de la cotisation, et non pas de transférer la créance sur un tiers à l'occasion d'une opération de commercialisation de coquillages.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Les députés ont supprimé en commission les deux dispositions de cet article :


• La possibilité d'établir une comptabilité en devises a été supprimée, dans la mesure notamment où la rédaction proposée s'étendait au-delà du seul secteur maritime : tout commerçant effectuant une part de son activité à l'international, même si cette activité est marginale, aurait eu une telle faculté, compliquant le contrôle de ces comptabilités.

Le rapporteur Arnaud Leroy soulignait dans son rapport que l'application des nouvelles normes comptables de l'Autorité des normes comptables devrait permettre très prochainement de neutraliser les plus-values ou moins-values d'actifs sur les opérations de couverture du risque de change, réglant ainsi la question.


• La disposition sur la nullité de la répercussion sur un tiers des cotisations professionnelles obligatoires a également été supprimée par un amendement du rapporteur, dans la mesure où une telle disposition était inutile , compte tenu de la nature de ces cotisations.

IV. La position de votre commission.

Votre rapporteur partage l'analyse du rapporteur au fond de l'Assemblée nationale sur l'article 20. Dans ces conditions, il approuve la suppression de cet article.

Votre commission a maintenu la suppression de cet article.

Article 22 (article L. 121-82-3 [nouveau] du code de la consommation) - Assurer l'information sur l'origine des produits aquatiques proposés

Objet : cet article instaure un dispositif facultatif d'indication dans les restaurants des zones de capture ou de production des produits aquacoles proposés aux clients.

I. Le droit en vigueur.

Le code de la consommation définit les règles générales d'information des consommateurs, ainsi que les règles particulières à l'étiquetage, dans un cadre devant respecter le droit communautaire. Le règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires fixe les règles spécifiques d'étiquetage de ces produits et donne peu de marges de manoeuvres aux États-membres de l'Union européenne.

En particulier, les informations sur l'origine des pays ne peuvent être rendues obligatoires que dans des cas limitativement énumérés par le règlement , ce qui a empêché jusqu'à présent la généralisation de l'étiquetage de l'origine des produits agroalimentaires, notamment des produits élaborés à base de viande.

En revanche, l'étiquetage des produits de la mer, poissons, crustacés, mollusques, autres invertébrés aquatiques et algues vendus directement au consommateur doit mentionner, de manière lisible, la zone géographique de capture. Pour les produits d'élevage, le nom du pays d'élevage doit être indiqué. Les articles 35 et suivants du règlement (UE) n° 1379/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture mettent donc en place un dispositif complet d'information du consommateur.

Les articles L. 121-82-1 et suivants du code de la consommation prévoient des dispositions spécifiques à l'information sur les plats proposés dans le cadre d'une activité de restauration commerciale, en réglementant notamment l'indication du « fait maison ». Mais aucune obligation ne pèse sur le secteur de la restauration hors domicile en matière d'information sur l'origine des poissons et produits de la mer servis. Le consommateur est donc moins bien informé au restaurant qu'au supermarché.

II. La proposition de loi initiale.

La filière pêche effectue des efforts importants de valorisation de ses productions, notamment à travers le « pavillon France » et bénéficie d'une bonne image de marque auprès des consommateurs, qu'elle ne peut cependant pas valoriser en restauration hors foyer. Or, la restauration hors foyer représente environ 20 % de la consommation de poissons et crustacés en valeur, ce qui n'est pas négligeable.

L'article 22 de la proposition de loi visait donc à instaurer une obligation d'information de l'origine des produits aquatiques vendus dans le cadre de l'activité de restauration commerciale ou de vente à emporter de plats préparés. La manière de présenter l'information était renvoyée au règlement n° 1379/2013 précité, afin de garantir une cohérence des informations fournies aux consommateurs, qu'ils soient des acheteurs directs ou des clients de restaurants.

III. Le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Les députés ont fait évoluer la rédaction initiale de l'article 22 :

En commission, ils ont enrichi le dispositif proposé :

- Pour imposer une traçabilité non seulement en restauration commerciale, mais également en restauration collective .

- Pour préciser que la zone de capture qui doit être indiquée au consommateur est définie selon le cadre harmonisé européen prévu par l'article 38 du règlement européen n° 1379/2013.

En séance, les députés sont, de manière surprenante, revenus sur l'obligation de traçabilité imposée à l'article 22. Estimant qu'il n'y avait pas de consensus, ils ont rendu facultative l'indication de la zone de capture ou de production des produits aquatiques proposés en restauration hors foyer.

IV. La position de votre commission.

Votre rapporteur partage totalement l'intention consistant à mieux informer les consommateurs sur l'origine des produits aquatiques consommés, y compris en restauration commerciale ou collective.

Les amendements étendant l'obligation à la restauration collective ou encore demandant une information standardisée conforme au règlement européen de 2013 vont dans le bon sens.

Mais rendre le dispositif facultatif revient à vider l'article 22 de sa substance .

Aussi, votre rapporteur a proposé à votre commission, qui l'a accepté, un amendement rétablissant le principe d'une information obligatoire du consommateur (Amendement n° COM-48). Cette information pourrait être donnée sur la carte ou sur un autre support. Les modalités précises d'information sont renvoyées à un décret, qui devra permettre une certaine souplesse, par exemple la possibilité d'un affichage des origines sur un autre support que la carte du restaurant.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.


* 2 Article 7 du règlement (CE) n° 1224/2009 du Conseil du 20 novembre 2009 instituant un régime communautaire de contrôle afin d'assurer le respect des règles de la politique commune de la pêche.

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