CHAPITRE IER - 2017 : UN DEUXIÈME « NOUVEAU DÉPART » DE LA PROGRAMMATION MILITAIRE JUSQU'EN 2019

La loi du 28 juillet 2015 avait déjà révisée la programmation militaire jusqu'en 2019, dotant la défense de ressources financières et d'une trajectoire capacitaire renforcées afin de tirer les premières conséquences du changement de contexte stratégique intervenu depuis le vote de la LPM du 18 décembre 2013 - et prenant ainsi en compte, notamment, l'important niveau d'engagement des forces sur des théâtres extérieurs 9 ( * ) comme sur le territoire national depuis le déclenchement de l'opération « Sentinelle » à la suite des attentats des 7 et 9 janvier 2015. Ce mouvement s'est poursuivi à l'initiative de l'Exécutif, sans qu'il soit fait appel au législateur, pour répondre à l'évolution du contexte sécuritaire, à partir des attentats du 13 novembre 2015 et des annonces du Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès le 16 novembre suivant, et parallèlement à l'intensification des OPEX françaises, en particulier au Levant ; la programmation en cours, de fait, s'est trouvée révisée « à la hausse » encore.

De la sorte, les décisions entérinées en conseil de défense le 6 avril 2016 conduisent la programmation militaire jusqu'en 2019 à connaître, après l'actualisation de l'été 2015, un deuxième « nouveau départ », que concrétisent les prévisions du PLF 2017.

En effet, le budget de la défense prévu pour l'année prochaine, inscrit dans la nouvelle trajectoire financière et capacitaire tracée au sein du rapport du Gouvernement « relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019 » remis au Parlement en date du 18 octobre dernier, s'avère plus élevé que ce que prévoyait la LPM actualisée : 32,687 milliards d'euros en CP, hors pensions. Il s'agit d'un montant supérieur de 417 millions d'euros à la prévision retenue par la loi du 28 juillet 2015 (+ 1,3 %) et de 609 millions d'euros à la dotation inscrite dans la LFI 2016 (+ 1,9 %).

Ce budget prévisionnel pour 2017 se trouve a priori libéré des hypothèques que faisaient peser sur lui les décisions à prendre pour assurer la fin de gestion 2016 : le projet de « collectif » budgétaire déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 18 novembre dernier préserve de toute annulation de crédits la mission « Défense ». Cet élément est bienvenu alors que, par ailleurs, des risques pèsent sur certaines des ressources prévues pour l'année prochaine.

I. UNE TRAJECTOIRE FINANCIÈRE ET CAPACITAIRE DE DÉFENSE À NOUVEAU RÉVISÉE

Le rapport susmentionné du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019 évalue les besoins de financement requis par la mise en oeuvre des décisions arrêtées en conseil de défense le 6 avril dernier à près de 3 milliards d'euros (2,993 milliards) au total, pour les trois prochaines années : 775 millions en 2017, 996 millions en 2018 et 1,222 milliard en 2019. Cette sensible révision de l'actualisation à laquelle avait procédé la loi du 28 juillet 2015 modifie la programmation militaire, jusqu'en 2019, par des mesures relatives aux ressources humaines du ministère de la défense pour quasiment les trois quarts du coût prévisionnel, 27 % seulement des nouvelles dépenses ainsi engagées se rapportant aux équipements militaires. Cependant, le financement correspondant se trouve entaché d'incertitudes , dans la mesure où il n'est aujourd'hui défini que pour 2017 et où il doit reposer, cette année prochaine, sur des ressources nouvelles qui, pour part, sont affectées d'un risque objectif d'aléas.

A. DES BESOINS NOUVEAUX ÉVALUÉS À PRÈS DE 3 MILLIARDS D'EUROS POUR LA PÉRIODE 2017-2019

1. Une révision de l'actualisation effectuée par la loi du 28 juillet 2015

Il convient ici de rappeler que la loi du 28 juillet 2015, en actualisant une première fois la programmation militaire, a non seulement accru les ressources financières de la défense mais les a, en outre, sécurisées 10 ( * ) .

a) L'accroissement des moyens décidé par la loi de 2015 (+ 3,8 milliards d'euros sur 2016-2019)

Par rapport à la version initiale de la LPM de 2013, l'actualisation effectuée par la loi en 2015 a conduit à une augmentation des ressources de la défense à hauteur de 3,8 milliards d'euros entre 2016 et 2019, à raison d'abondements de 600 millions d'euros pour 2016, 700 millions pour 2017, 1 milliard pour 2018 et 1,5 milliard pour 2019. L'effort en faveur de la défense devait ainsi s'élever, au total, à 162,41 milliards d'euros courants sur la période 2015-2019, contre 158,61 milliards d'euros selon les prévisions originelles de la LPM, soit une hausse globale de 2,4 %, surtout sensible à partir de 2018.

Programmation du budget de la défense pour 2015-2019 actualisée par la loi du 28 juillet 2015

(CP, en milliards d'euros courants)

2015

2016

2017

2018

2019

Total

2015-2019

LPM initiale

31,40

31,38

31,56

31,77

32,52

158,61

Actualisation

31,40

31,98

32,26

32,77

34,02

162,41

Variation

en volume

0

+ 0,6

+ 0,7

+ 1,0

+ 1,5

+ 3,8

en proportion

0

+ 1,9 %

+ 2,2 %

+ 3,1 %

+ 4,6 %

+ 2,4 %

Source : LPM 2014-2019 actualisée par la loi du 28 juillet 2015

Les moyens supplémentaires ainsi dégagés visaient à financer, entre 2016 et 2019 :

- en premier lieu, à hauteur de 2,8 milliards d'euros (soit près des trois quarts de l'augmentation des ressources de la défense décidée par la loi du 28 juillet 2015), la masse salariale et les dépenses de fonctionnement impliquées, pour l'essentiel, par le maintien d'effectifs du ministère de la défense alors prévu. Il s'agissait ainsi de financer le nouveau contrat de protection des armées, c'est-à-dire la capacité des forces terrestres à déployer sur le territoire national 7 000 hommes dans la durée et jusqu'à 10 000 hommes pendant un mois, niveau de déploiement maximal de l'opération « Sentinelle ». L'augmentation budgétaire tenait également compte des besoins liés à la montée en puissance de la réserve opérationnelle et à l'expérimentation du service militaire volontaire (SMV) ;

- en second lieu, à hauteur d'un milliard d'euros , un effort en matière d' équipement des forces partagé de façon égale entre, d'une part, pour 500 millions d'euros, l'entretien programmé des matériels (EPM), afin de permettre la régénération de matériels soumis à de fortes pressions lors de leur utilisation en OPEX et, d'autre part, pour les 500 millions d'euros restant, les opérations d'armement. Ces dernières devaient bénéficier, en outre, du redéploiement d'un milliard d'euros de crédits déjà prévus dans la version initiale de la LPM, rendus disponibles depuis 2013 ou projetés comme devant l'être, d'ici 2019, grâce à l'évolution favorable du coût des facteurs (prix du pétrole, prix de certains marchés de fourniture, cours de la monnaie). Ainsi, au total, 2,5 milliards d'euros se sont trouvés nouvellement affectés au volet capacitaire de la programmation militaire.

Affectation des ressources supplémentaires de la défense prévues pour 2016-2019 par la loi du 28 juillet 2015

(CP, en milliards d'euros)

Montant

Part du total

Effectifs

masse salariale (titre 2)

2,4

63,2 %

73,6 %

fonctionnement (hors-titre 2)

0,4

10,4 %

Équipement

Entretien programmé des matériels

0,5

13,2 %

26,4 %

Opérations d'armement*

0,5

13,2%

Total

3,8

100,0 %

(*) : Hors prise en compte de l'affectation d'un milliard d'euros par redéploiement de crédits rendus disponibles par l'évolution du coût des facteurs.

Source : loi du 28 juillet 2015

b) La sécurisation des ressources opérée par la loi en 2015

La révision de la LPM opérée par la loi du 28 juillet 2015 a permis de « re-budgétiser », et donc sécuriser, à compter de 2015, l'essentiel des ressources du budget de la défense qui, dans la version initiale de la programmation, étaient attendues de recettes exceptionnelles (REX). En particulier, cette loi a substitué une prévision de crédits budgétaires aux REX qui, jusqu'alors, étaient supposées provenir de la cession de fréquences hertziennes - principalement la vente de la bande passante dite des 700 mégahertz (MHz) aux opérateurs de téléphonie mobile 11 ( * ) . C'est en conséquence que la loi de finances rectificative (LFR) pour 2015 12 ( * ) a ouvert 2,15 milliards d'euros de crédits budgétaires en remplacement des REX qui, l'année dernière, étaient initialement attendues de la cession de la bande des 700 MHz.

Au titre de REX, seuls demeurent désormais inscrits dans la programmation militaire les produits de cessions de biens immobiliers et de matériel du ministère de la défense. Il convient cependant de souligner que, par rapport à la prévision de recettes de cessions immobilières inscrite dans la version initiale de la LPM - 480 millions entre 2015 et 2017 -, la loi du 28 juillet 2015 a procédé à un quasi doublement de ces REX subsistantes, cessions immobilières et cessions de matériel confondues (930 millions d'euros sur cinq ans), et même au triplement de ces ressources extrabudgétaires pour ce qui concerne l'année 2017.

Les recettes de cessions affectées au budget de la défense pour 2015-2019 selon la loi du 28 juillet 2015

(CP, en milliards d'euros courants)

2015

2016

2017

2018

2019

Total

2015-2019

LPM initiale

0,23

0,20

0,05

0

0

0,48

Actualisation (loi du 28 juillet 2015)

Total

0,23

0,25

0,15

0,15

0,15

0,93

Immobilier

0,23

0,20

0,10

0,10

0,10

0,73

Matériels

0

0,05

0,05

0,05

0,05

0,20

Variation

en volume

0

+ 0,05

+ 0,10

+ 0,15

+ 0,15

+ 0,45

en proportion

0

+ 25 %

+ 300 %

-

-

+ 194 %

Source : LPM 2014-2019 actualisée par la loi du 28 juillet 2015

Par ailleurs, des garanties du respect des trajectoires programmées pour le budget de la défense et l'équipement des forces ont été introduites, à l'initiative de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées notamment.

D'une part, eu égard à la conservation, dans la programmation militaire, de ressources extrabudgétaires attendues de cessions d'immeubles et de matériel , la commission a réintroduit, mutatis mutandis , la clause de sauvegarde relative aux REX qu'elle avait insérée, en 2013, dans la version initiale de la LPM. De la sorte, l'article 2 (IV) de la loi du 28 juillet 2015 prévoit désormais que, « dans l'hypothèse où le montant des ressources issues de cessions ou le calendrier selon lequel les crédits correspondants sont affectés au budget de la défense ne seraient pas réalisés conformément à la [...] loi de programmation, ces ressources seraient intégralement compensées par des crédits budgétaires sur la base d'un financement interministériel 13 ( * ) ».

D'autre part, compte tenu de l'importance des redéploiements de crédits prévus, en faveur des opérations d'armement, à partir d'économies réalisées par le ministère de la défense en raison de l'orientation favorable des indices économiques constatée ou projetée, et pour parer à toute mauvaise surprise à cet égard, la commission, rejointe dans son initiative par la commission des finances, a introduit dans la loi du 28 juillet 2015 (article 2, III) une clause de garantie prévoyant que, « dans l'hypothèse où l'évolution des indices économiques ne permettrait pas de dégager les ressources financières permettant d'assurer la soutenabilité financière de la trajectoire d'équipement des forces fixée par la [...] loi de programmation, la compensation nécessaire au respect de celle-ci serait assurée au moyen de crédits budgétaires » .

En outre, à l'initiative de l'Assemblée nationale, une disposition de la même loi (article 2, II) prévoit plus spécifiquement qu'» en cas de hausse du prix constaté des carburants opérationnels , la mission "Défense" bénéficie de mesures financières de gestion et, si la hausse est durable, des crédits supplémentaires sont ouverts en construction budgétaire, pour couvrir les volumes nécessaires à la préparation et à l'activité opérationnelle des forces ».

2. Une programmation modifiée par des coûts supplémentaires concernant aux trois quarts les ressources humaines, contre un quart pour les équipements

Les décisions arrêtées en conseil de défense le 6 avril 2016 , procédant à une révision de la programmation militaire d'ici 2019 en sus de l'actualisation réalisée par la loi du 28 juillet 2015, sont présentées au sein du rapport précité du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019, daté du 18 octobre dernier, comme décrivant trois séries de priorités : une nouvelle trajectoire des effectifs et les besoins de fonctionnement et d'équipements associés ; des mesures relatives à la condition du personnel ; enfin, le volet capacitaire. Ce faisant, en synthèse, les décisions concernent, d'une part, les ressources humaines et, d'autre part, les équipements.

Toutefois, ces mesures concentrent sur les ressources humaines, pour accroître les effectifs et améliorer la condition du personnel, pratiquement les trois quarts de la prévision de dépenses nouvelles correspondantes (2,181 milliards d'euros, soit 73 %), contre 27 % pour ce qui concerne l'acquisition de nouveaux équipements et l'entretien programmé du matériel (coût de 812 millions d'euros 14 ( * ) ).

Le coût des mesures nouvelles arrêtées en conseil de défense le 6 avril 2016

(CP, en millions d'euros)

2017

2018

2019

Total 2017-2019*

(et part du total, en %)

Ressources humaines

Effectifs

216

960

1 176 (39%)

2 181 (73%)

Condition du personnel**

287

366

351

1 005 (34%)

Capacitaire (équipements et EPM)

271***

541

812 (27 %)

Total*

775

996

1 222

2 993 (100 %)

(*) : Montants donnés par le rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019. Les distorsions arithmétiques du présent tableau résultent de l'utilisation d'arrondis.

(**) : Hors effet de la revalorisation de l'indemnité pour sujétion d'alerte opérationnelle décidée en conseil de défense le 16 août 2016.

(***) : Ce montant intègre un besoin pour 2017 de 73 millions d'euros afin de compléter la couverture en CP des AE ouvertes en LFI 2016 par l'adoption d'un amendement du Gouvernement.

Source : rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019

Du reste, le rapport du Gouvernement fait valoir que les décisions prises par l'Exécutif postérieurement à la loi du 28 juillet 2015 « correspondent au contrat opérationnel [des armées] tel qu'il a été arrêté lors de l'actualisation de la loi de programmation militaire en juillet 2015 qui, en particulier, rehaussait le contrat de protection du territoire national à 7 000 hommes en permanence, avec la possibilité de monter jusqu'à 10 000 hommes pendant un mois. Toutefois, si ce niveau d'engagement, d'ores et déjà dépassé en 2015 et 2016, devait s'installer dans la durée, les effectifs des armées, notamment de la Force opérationnelle terrestre, devraient être revus à la hausse dans le cadre d'une nouvelle programmation, ainsi que les dépenses de fonctionnement et d'équipements associées à ces effectifs. »

a) Les nouvelles mesures visant les ressources humaines (2,181 milliards d'euros sur 2017-2019, dont 503 millions en 2017)

Le conseil de défense du 6 avril dernier a entériné deux séries de mesures relatives aux ressources humaines : la hausse nette des effectifs entraîne un coût évalué à 1,176 milliard d'euros sur la période 2017-2019, et l'amélioration de la condition du personnel un coût évalué à 1,005 milliard d'euros sur ces trois années - soit, au total, 2,181 milliards d'euros, dont 503 millions pour l'an prochain.

Le coût des mesures nouvelles arrêtées en conseil de défense le 6 avril 2016 concernant les ressources humaines

(CP, en millions d'euros)

2017

2018

2019

Total 2017-2019*

Effectifs

216

960

1 176

Armée active

Masse salariale

75

159

360

594

1 072

Fonctionnement

41

178

219

Infrastructures

73

186

259

Réserve opérationnelle (masse salariale)

27

39,5

37,5

104

Condition du personnel

287

366

351

1 005

Mesures spécifiques**

90

178

268

Mesures interministérielles

197

540

737

Total*

503

1 678

2 181

(*) : Montants donnés par le rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019. Les distorsions arithmétiques du présent tableau résultent de l'utilisation d'arrondis.

(*) : Hors effet de la revalorisation de l'indemnité pour sujétion d'alerte opérationnelle décidée en conseil de défense le 16 août 2016.

Source : rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019 et réponse du Gouvernement au questionnaire adressé en application de l'article 49 de la LOLF

(1) L'accroissement des effectifs (1,176 milliard d'euros sur 2017-2019, dont 216 millions en 2017)

Devant le Parlement réuni en Congrès le 16 novembre 2015, le Président de la République avait annoncé l'arrêt des diminutions d'effectifs du ministère de la défense jusqu'en 2019, dans l'objectif de renforcer les unités opérationnelles, la cyberdéfense et le renseignement. La décision finalement retenue en conseil de défense, le 6 avril dernier, a été celle d'une hausse nette des effectifs, à hauteur de 782 postes en équivalents temps plein (ETP), au total, sur la période 2017-2019 - au lieu de la diminution de 9 218 ETP prévue par la LPM dans sa version actualisée par la loi du 28 juillet 2015. L'accroissement est fixé à hauteur de 400 ETP pour 2017, hors effectifs du service industriel de l'aéronautique (SIAé), de 200 ETP pour 2018 et de 182 ETP pour 2019.

De la sorte, sur la période 2014-2019, les effectifs du ministère de la défense auront enregistré une déflation limitée à 4 925 ETP , soit une moindre réduction de 10 000 ETP par rapport à la prévision de la loi du 28 juillet 2015. Au terme de cette évolution, en 2019, les effectifs du ministère doivent représenter 271 161 ETP (hors apprentis, volontaires du service militaire volontaire [SMV] et SIAé).

Trajectoire des effectifs du ministère de la défense sur la période 2014-2019

(en EPT)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total 2014-2019

LPM actualisée (loi du 28 juillet 2015) (a)

- 8 007

0

+ 2 300

- 2 600

- 2 800

- 3 818

- 14 925

Révision (rapport du Gouvernement du 18 octobre 2016) (b)

- 8 007

0

+ 2 300

+ 400

+ 200

+ 182

- 4 925

Écart (b/a)

-

-

-

+ 3 000

+ 3000

+ 4000

+ 10 000

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire adressé en application de l'article 49 de la LOLF

Le rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019 évalue le coût complet de cette nouvelle trajectoire d'effectifs, masse salariale (crédits de titre 2) et besoins de fonctionnement associés (hors titre 2) ensemble, à 1,176 milliard d'euros sur la période 2017-2019, dont 216 millions l'année prochaine. Pour ce qui concerne l'armée active :

- la masse salariale exigera la mobilisation de 594 millions d'euros sur trois ans, dont 75 millions en 2017 ;

- les dépenses au titre du « soutien de l'homme » - fonctionnement général (hébergement, formation, gestion), activité (préparation opérationnelle, frais de déplacement) et petits équipements (habillement, cadre de travail) - s'élèveront à 219 millions d'euros sur trois ans, dont 41 millions en 2017 ;

- les dépenses d'infrastructures consécutives à l'accroissement des effectifs représenteront 259 millions d'euros sur trois ans, dont 73 millions en 2017, dans le cadre de programmes immobiliers destinés à l'accueil des personnels au sein des services concernés. Ces dépenses doivent notamment permettre d'aménager des conditions décentes d'hébergement pour les soldats mobilisés dans le cadre de l'opération « Sentinelle ».

En outre, pour accompagner la montée en puissance attendue de la réserve opérationnelle des armées, qui fait l'objet d'une politique de relance volontariste de la part du Gouvernement 15 ( * ) , une nouvelle dotation budgétaire se trouve programmée pour la période 2017-2019 à hauteur de 104 millions d'euros (crédits de masse salariale, titre 2), dont 27 millions pour l'année prochaine.

(2) L'amélioration de la condition du personnel (1,005 milliard d'euros sur 2017-2019, dont 287 millions en 2017)

Lors de ses voeux aux armées prononcés le 14 janvier 2016, le Président de la République a annoncé des mesures tendant à améliorer la condition du personnel militaire. Il s'agissait notamment d'appliquer à ce dernier le protocole relatif aux parcours professionnels, aux carrières et aux rémunérations des fonctionnaires (PPCR).

Plus largement, le rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019 évalue le coût du plan d'amélioration de la condition du personnel, à la fois civil et militaire , du ministère de la défense (PACP) à 1,005 milliard d'euros sur la période 2017-2019 : 287 millions en 2017 , 366 millions en 2018 et 351 millions en 2019 - compte non tenu de la revalorisation de l'indemnité pour sujétion d'alerte opérationnelle décidée en conseil de défense du 16 août 2016.

Comme le précise le rapport du Gouvernement, ce plan comprend deux volets :

- en premier lieu, des mesures spécifiques applicables aux militaires , en particulier la compensation de la suractivité par des mesures indemnitaires liées à l'accentuation des sujétions, notamment en matière d'activité opérationnelle, l'accompagnement et l'amélioration des conditions de travail et du cadre de vie, ainsi que l'aide aux familles. Le coût de ces mesures est estimé à 268 millions d'euros pour 2017-2019, dont 90 millions pour l'année prochaine.

- en second lieu, des mesures interministérielles , qui s'appliqueront aux ayants-droit du ministère de la défense - mesures salariales générales , telles que la revalorisation du point d'indice de la fonction publique, ou mesures catégorielles , parmi lesquelles se range l'application aux militaires du PPCR mentionné ci-dessus. Le coût de ces mesures est expressément estimé à 737 millions d'euros pour 2017-2019 ; on déduit des informations précédentes qu'il représentera 197 millions d'euros l'année prochaine.

b) L'acquisition de nouveaux équipements et l'EPM (812 millions d'euros sur 2017-2019, dont 271 millions en 2017)

Les mesures arrêtées en conseil de défense le 6 avril dernier pour ce qui concerne le domaine capacitaire, telles que les détaille le rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019, comprend trois volets :

- un rehaussement des stocks de munitions , afin d'absorber les flux de consommation induits par l'intensification des frappes françaises au Levant et d'élargir la panoplie des armements du Rafale, pour un coût évalué à 305 millions d'euros sur la période 2017-2019, dont 80 millions l'année prochaine ;

- des mesures visant à sécuriser le territoire national (accroissement de la mobilité tactique des unités, consolidation de la protection des ports militaires et des approches maritimes) et à équiper les renforts opérationnels permis par l'arrêt des réductions d'effectifs, pour un coût évalué au total à 258 millions d'euros sur 2017-2019, dont 94 millions l'an prochain ;

- enfin, l'acquisition de moyens complémentaires pour la cyberdéfense et le renseignement, en termes notamment de surveillance et de reconnaissance, et de protection des réseaux contre des attaques cyber, pour un coût évalué au total à 176 millions d'euros sur 2017-2019, dont 24 millions l'année prochaine.

La somme de ces montants conduit à chiffrer le coût des mesures capacitaires nouvelles à strictement parler à hauteur de 739 millions d'euros sur la période 2017-2019, dont 198 millions pour l'an prochain et 541 millions d'euros pour les années 2017 et 2018 cumulées. Le coût total atteint 812 millions d'euros sur 2017-2019, dont 271 millions en 2017, en tenant compte d'un besoin pour l'année prochaine de 73 millions d'euros afin de compléter la couverture en CP d'AE déjà ouvertes en LFI 2016 par l'adoption d'un amendement du Gouvernement (abondement des crédits de la mission « Défense » inscrits dans le PLF 2016 à hauteur de 173 millions d'euros en AE et 100 millions d'euros en CP) ; cette dépense, dans le détail, sera de 56,5 millions d'euros pour les munitions, 10 millions d'euros pour l'EPM terrestre et 6,5 millions d'euros pour le renseignement.

Le coût des mesures nouvelles arrêtées en conseil de défense le 6 avril 2016 concernant le domaine capacitaire

(CP, en millions d'euros)

2017

2018

2019

Total 2017-2019

Munitions

80

225

305

739

Sécurisation du territoire national et équipement des renforts opérationnels

94

164

258

Cyberdéfense et renseignement

24

152

176

Total

271*

541

812

(*) : Ce montant intègre un besoin pour 2017 de 73 millions d'euros afin de compléter la couverture en CP des AE ouvertes en LFI 2016 par l'adoption d'un amendement du Gouvernement : 56,5 millions d'euros pour les munitions, 10 millions d'euros pour l'EPM terrestre et 6,5 millions d'euros pour le renseignement.

Source : rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019

Le rapport du Gouvernement du 18 octobre dernier précise les quatre séries d'objectifs que ces dépenses tendent à servir :

1°- adapter l'équipement des forces aux nouvelles missions sur le territoire national, au moyen : de l'acquisition anticipée de véhicules légers 4x4 militarisés pour les unités déployées sur le territoire national (les 100 premiers véhicules tactiques de nouvelle génération, véhicules de liaison et de commandement non blindés, équipés d'une radio, pouvant transporter de 4 à 7 personnes, doivent équiper les unités dès le premier trimestre 2017 et les 2 000 premiers véhicules doivent avoir été livrés d'ici 2019) ; de l'amélioration de l'ergonomie du combattant (22 000 nouveaux gilets pare-balles dits « système modulaire balistique », plus légers et plus protecteurs que l'équipement actuel, doivent être livrés, à partir de 2017, d'ici 2019) ; et de la consolidation de la protection des ports militaires et de nos approches maritimes (avec la livraison en 2017 d'engins sous-marins télé-opérés d'inspection et, d'ici 2019, de douze vedettes pour la protection dynamique des approches de nos ports, l'acquisition d'un complément de bouées de détection acoustique en 2018 et un complément de barrières flottantes devant être livré d'ici 2019) ;

2°- équiper et entraîner les renforts opérationnels , dont les réservistes : d'une part, en améliorant la performance des unités opérationnelles terrestres dans la phase de préparation opérationnelle ; d'autre part, en réalisant l'acquisition de 200 véhicules blindés multi-rôles (VBMR) Griffon supplémentaires par rapport à la prévision retenue par la LPM dans sa version actualisée par la loi du 28 juillet 2015 (programme SCORPION) et de 1 500 kits du combattant (programme FÉLIN), ainsi que la dotation des forces en AIF, fusils d'assaut de nouvelle génération, destinés à remplacer le FAMAS (la cadence de livraison de ces armes doit être portée de 8 000 à 12 000 fusils par an à compter de 2018) 16 ( * ) ;

3°- donner les moyens d'intensifier les frappes dans les opérations de contre-terrorisme, par le rehaussement des stocks de munitions air-sol d'une manière générale, en particulier les munitions destinées aux hélicoptères Tigre (un nouveau lot de 200 missiles Hellfire doit ainsi être commandé pour une livraison en 2018), ainsi que le rehaussement des stocks des munitions sol-sol du lance-roquettes unitaire (LRU - la commande d'au moins un nouveau lot de 270 roquettes LRU est prévue, à livrer d'ici 2019) ; par l'élargissement de la panoplie d'armements des avions Rafale , afin de mieux maîtriser les coûts et l'efficacité de leurs frappes ; et par l'amélioration des capacités de ciblage et de navigation (il s'agit là de disposer d'un modèle numérique de terrain de haute résolution, actuellement développé dans le cadre d'une coopération internationale 17 ( * ) ) ;

4°- accentuer la montée en puissance du renseignement et de la cyberdéfense, en l'acquérant, conformément à la LPM, deux avions légers de surveillance et de reconnaissance (ALSR, le premier livré en 2018 et le second en 2019 ; cette capacité est actuellement satisfaite par le recours à des solutions locatives) ; en procédant au renforcement de l'arsenal numérique destiné à contrer les nouvelles menaces en la matière ; et en assurant l' accompagnement de l'augmentation des effectifs du renseignement et de la cyberdéfense, notamment en matière d'infrastructure et d'équipements.


* 9 Cf. les opérations « Sangaris » (menée en République centrafricaine depuis décembre 2013), « Barkhane » (qui a pris la suite de l'opération « Serval », au Mali, depuis l'été 2014) et « Chammal » (conduite en Irak depuis septembre 2014 et étendue à la Syrie depuis septembre 2015).

* 10 Cf. le rapport n° 547 (2014-2015) de notre collègue Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sur le projet de loi d'actualisation de la programmation militaire (juin 2015).

* 11 La mesure a rendu caduque la perspective de mettre en place des « sociétés de projet » - ou special purpose vehicles (SPV) - un temps envisagés par le ministère de la défense afin de pallier le défaut anticipé des REX. Cf. les communications du 8 juillet 2014 et du 1 er avril 2015 de vos rapporteurs pour avis Jacques Gautier et Daniel Reiner à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à la suite de contrôles sur pièces et sur place menés sur le fondement de l'article 7 de la LPM du 18 décembre 2013.

* 12 Loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

* 13 Cependant, la disposition de plafonnement à 30 %, jusqu'au 31 décembre 2019, du taux de la décote praticable, en faveur du logement social, sur la valeur vénale des immeubles vendus par le ministère de la défense, introduite dans la loi du 28 juillet 2015 par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et la commission des finances du Sénat conjointement, a été abrogée à l'initiative de l'Assemblée nationale par l'article 55 de la LFI 2016.

* 14 Dont 73 millions d'euros afin de compléter la couverture en crédits de paiement des autorisations d'engagement déjà ouvertes en LFI 2016 par l'adoption d'un amendement du Gouvernement (abondement des crédits de la mission « Défense » inscrits dans le PLF 2016 à hauteur de 173 millions d'euros en AE et 100 millions d'euros en CP).

* 15 L'objectif a été fixé à hauteur de 40 000 volontaires engagés dans la réserve opérationnelle des armées à la fin 2018 (contre 31 258 volontaires estimés pour la fin 2016), avec une moyenne annuelle de 36,5 jours d'activité par réserviste (contre 28,8 jours prévus pour 2016) et la possibilité de déployer 1 500 réservistes par jour pour des missions de protection du territoire national. Ce projet se trouve au coeur de la création de la « Garde nationale », décidée en conseil des ministres le 12 octobre dernier, englobant les réserves opérationnelles des armées, de la gendarmerie et de la police nationale. Le rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019 précise que le budget complet de la Garde nationale s'élèvera à 311 millions d'euros en 2017 et que la masse salariale de la réserve opérationnelle des armées correspondant au format « cible » de 40 000 volontaires représente 156 millions d'euros par an. - Sur ce sujet, voir le rapport d'information n° 793 (2015-2016), « Garde nationale » : une réserve militaire forte et territorialisée pour faire face aux crises , présenté par nos collègues Jean-Marie Bockel et Gisèle Jourda, le 13 juillet 2016, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

* 16 Sur les programmes SCORPION, FÉLIN et AIF, voir le chapitre 3 du présent rapport.

* 17 Système T-REX. Cette coopération associe onze États membres de l'OTAN ; les États-Unis et l'Allemagne en sont les principaux contributeurs.

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