II. UNE PROPOSITION DE LOI QUI VISE À ÉLARGIR UNE NOUVELLE FOIS LE DÉLIT D'ENTRAVE À L'IVG

A. L'OBJET DE LA PROPOSITION DE LOI : SANCTIONNER LES DISCOURS HOSTILES À L'IVG SUR INTERNET

Dans un rapport relatif à l'information sur l'IVG sur Internet , remis à la ministre des droits des femmes le 13 septembre 2013, le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes constatait que les sites « anti-IVG sont les plus visibles sur Internet ». Afin d'empêcher « une information sur Internet biaisée sur l'interruption volontaire de grossesse », plusieurs pistes juridiques ont été étudiées, notamment l'extension du délit d'entrave.

Sur le fondement de ce rapport, lors de l'examen au Sénat du projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté, le Gouvernement a déposé un amendement de séance tendant à compléter le délit d'entrave à l'IVG prévu à l'article L. 2223-2 du code de la santé publique, afin d'y inclure la diffusion de fausses informations sur Internet. Ne présentant aucun lien, même indirect, avec le texte déposé à l'Assemblée nationale, cet amendement a été déclaré irrecevable par la commission spéciale, dans le respect de l'article 45 de la Constitution et de l'article 48 du Règlement du Sénat 14 ( * ) .

Le 12 octobre dernier, les députés du groupe socialiste, écologiste et républicain ont déposé une proposition de loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse .

La rédaction initiale de la proposition de loi avait pour objet d'ajouter une troisième hypothèse au délit d'entrave définie par le fait de diffuser ou de transmettre par tout moyen « notamment par des moyens de communication au public par voie électronique ou de communication au public en ligne, des allégations, indications ou présentations faussées et de nature à induire intentionnellement en erreur , dans un but dissuasif , sur la nature, les caractéristiques ou les conséquences médicales d'une interruption volontaire de grossesse ou à exercer des pressions psychologiques sur les femmes s'informant sur une interruption volontaire de grossesse ou sur l'entourage de ces dernières ».

Selon l'exposé des motifs, ces dispositions visent les sites, en apparence « informatifs », qui proposent des numéros verts d'information et des centres nationaux d'aide et d'écoute, mais dont les opinions anti-IVG sont « délibérément masquées ».

Après avoir rappelé que le choix de recourir à l'avortement relève de l'exercice d'une liberté fondamentale, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, sur proposition de sa rapporteure, a modifié la rédaction initiale de la proposition de loi, estimant que celle-ci pouvait être interprétée comme « une tentative de contrôle de l'objectivité de l'information sur Internet 15 ( * ) ».

Au lieu de créer une troisième hypothèse de caractérisation du délit d'entrave, elle a choisi de compléter la définition du délit d'entrave constitué par l'exercice des pressions morales et psychologiques , en précisant que celles-ci s'exerçaient y compris par la diffusion ou la transmission par voie électronique « des allégations, indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif, sur les caractéristiques ou les conséquences médicales d'une interruption volontaire de grossesse ».

En séance publique, sur proposition de la rapporteure de la commission des affaires sociales, l'Assemblée nationale a finalement rattaché cette extension au premier alinéa de l'article L. 2223-2 du code de la santé publique, sans rattachement aux seules pressions psychologiques. Ainsi, elle a précisé que serait puni « de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher de pratiquer ou de s'informer sur une interruption de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L. 2212-3 à L. 2212-8 par tout moyen, y compris en diffusant ou en transmettant par voie électronique ou en ligne, des allégations, indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif, sur les caractéristiques ou les conséquences médicales d'une interruption volontaire de grossesse. »


* 14 64 amendements ont été déclarés irrecevables en raison de l'absence de lien avec le texte déposé à l'Assemblée nationale.

* 15 Rapport n° 4245 (XIV e législature) de Mme Catherine Coutelle, au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse, déposé le 23 novembre 2016. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :
http://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r4245.asp

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page