EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 25 octobre 2017, la commission a examiné le rapport pour avis sur le projet de loi n° 21 (2017-2018) mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et l'environnement.

M. Hervé Maurey , président . - Nous allons examiner le rapport pour avis sur le projet de loi mettant fin à la recherche et à l'exploitation des hydrocarbures, envoyé au fond à la commission des affaires économiques qui examinera son rapport et établira le texte de la commission un peu plus tard dans la matinée.

C'est le premier rapport pour avis de M. Jean-Marc Boyer, désigné la semaine dernière seulement. Il a néanmoins eu le temps de procéder à un certain nombre d'auditions et il s'est concerté avec sa collègue rapporteure au fond de la commission des affaires économiques.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - C'est avec grand plaisir que je vous présente, ce matin, mon rapport sur le premier projet de loi d'envergure du nouveau Gouvernement en matière d'environnement et d'énergie. Ce texte a pour ambition de mettre fin, d'ici 2040, à la recherche et à la production d'hydrocarbures en France.

Ce projet de loi constitue la première traduction législative du plan climat présenté par Nicolas Hulot le 6 juillet 2017, dont l'axe 9 prévoit « d'amorcer la sortie progressive de la production d'hydrocarbures sur le territoire français en n'attribuant plus de nouveaux permis d'exploration d'hydrocarbures et en ne renouvelant pas les concessions d'exploitation existantes ». Il s'agit, d'après le Gouvernement, d'être en cohérence avec les engagements pris dans le cadre de l'Accord de Paris adopté le 12 décembre 2015, dont l'ambition est de contenir l'augmentation de la température moyenne mondiale en dessous de 2 degrés par rapport aux niveaux préindustriels, et de s'efforcer de la limiter à 1,5 degré. Le respect de cet objectif implique de réduire fortement la consommation d'énergies fossiles. En France, cette consommation contribue à hauteur de 70 % aux émissions de gaz à effet de serre.

Ce projet de loi entend donc montrer l'engagement de la France dans la lutte contre le réchauffement climatique en actant sa volonté de sortir, à terme, des énergies carbonées.

Personne ne remet en cause la nécessité de réduire notre consommation d'énergies fossiles. Pour autant, ce texte ne répond pas à cet impératif. En prévoyant la sortie progressive de l'exploitation d'hydrocarbures sur le territoire national, il se concentre uniquement sur le volet « production » et ne comporte aucune mesure relative à la réduction de la consommation de pétrole et de gaz. Il ne s'attaque donc pas aux causes du réchauffement climatique, et il n'aura, en tant que tel, aucun effet bénéfique sur l'environnement. Au contraire, alors que la France consommera toujours un volume substantiel d'hydrocarbures à l'horizon 2040, il faudra compenser la production nationale par des importations d'hydrocarbures, ce qui est un non-sens économique mais aussi écologique, puisque le fait d'importer du pétrole et du gaz est une cause d'émission de CO 2 non négligeable - d'après certaines estimations, cela revient à émettre trois fois plus de gaz effet de serre.

Par ailleurs, une telle démarche de sortie des hydrocarbures mériterait d'être engagée au moins à l'échelle européenne, et non de façon isolée par la France.

Cependant, la production nationale d'hydrocarbures ne représente qu'environ 1 % de notre consommation annuelle : les effets de ce texte en termes d'activité et d'emplois seront vraisemblablement limités.

Actuellement, il existe 63 concessions d'hydrocarbures sur notre territoire qui couvrent 4 000 kilomètres-carrés et qui se situent principalement dans les bassins parisien et aquitain ainsi qu'en Alsace. Elles sont exploitées par six sociétés, dont la plus importante est l'entreprise canadienne Vermilion Energy. Il existe par ailleurs 31 permis exclusifs de recherche en cours de validité.

L'activité de recherche et d'exploitation d'hydrocarbures ne représente qu'environ 1 500 emplois directs et 4 000 emplois indirects en France, ce qui n'est toutefois pas insignifiant, et l'échéance de 2040 laissera le temps à la filière d'assurer la reconversion de ces emplois.

La décision de mettre fin à la production d'hydrocarbures apparaît donc symbolique au regard de l'activité qu'elle représente au plan national.

C'est pour cette raison qu'avec ma collègue rapporteure de la commission des affaires économiques, Mme Élisabeth Lamure, nous avons essayé, malgré nos réserves, d'apporter des correctifs à ce projet de loi plutôt que de nous y opposer frontalement.

Initialement, le projet de loi comptait 8 articles. À l'issue de son examen à l'Assemblée nationale, il en contient 22. Au Sénat, ce texte a été renvoyé au fond à la commission des affaires économiques et notre commission s'est saisie pour avis de 12 articles, portant sur quatre sujets principaux :

Les articles 1 er à 3 et l'article 8 relatifs à la fin progressive de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures, qui constituent le coeur du projet de loi ; l'article 5 bis , relatif au raccordement des énergies renouvelables en mer ; l'article 6 relatif aux biocarburants ; les articles 7, 7 bis A et 7 bis qui concernent la lutte contre la pollution de l'air.

S'agissant tout d'abord des hydrocarbures, l'article 1 er prévoit d'interdire l'octroi de nouveaux permis de recherche et d'exploitation d'hydrocarbures, y compris à des fins expérimentales, à compter de la promulgation de la loi. Une exception est prévue pour les titulaires d'un permis de recherche en vigueur qui pourront, s'ils découvrent un gisement d'hydrocarbures au cours de leurs prospections, obtenir une concession d'exploitation dans le cadre de ce qu'on appelle le « droit de suite » prévu par le code minier. De même, une dérogation est prévue s'agissant de l'extraction du gaz de mine, le grisou, qui s'échappe naturellement des anciennes exploitations minières, et qu'il convient de capturer pour des raisons de sécurité et de santé publique.

À l'Assemblée nationale, cet article a été complété afin d'étendre l'interdiction à la recherche et à l'exploitation de charbon, ce qui a une portée limitée puisque le dernier puits a été fermé en 2004.

Par ailleurs, un amendement a été adopté pour continuer à autoriser l'exploitation d'hydrocarbures lorsqu'elle est connexe à d'autres substances exploitées dans le cadre d'une concession. Ceci vise à préserver l'exploitation de soufre dans le bassin de Lacq, qui nécessite d'extraire, à titre subsidiaire, du gaz naturel.

Au total, l'interdiction ne concernant que les nouvelles demandes de titres, le projet de loi préserve globalement les droits acquis des titulaires de titres miniers, qui pourront continuer leurs activités de recherche et d'exploitation. Deux restrictions prévues par le texte pourraient cependant donner lieu à des demandes d'indemnités de la part des exploitants. Il s'agit de la limitation de la durée de prolongation des concessions existantes, qui ne pourront pas aller au-delà du 1 er janvier 2040, et de la limitation de la durée des concessions octroyées dans le cadre du « droit de suite » que j'évoquais à l'instant. En effet, l'article 1 er bis inséré par nos collègues députés prévoit que les entreprises qui découvriraient un gisement d'hydrocarbures dans le périmètre de leur permis de recherche ne pourraient l'exploiter que jusqu'au 1 er janvier 2040, sauf à ce qu'elles parviennent à démontrer à l'administration que cette échéance ne leur permet pas de couvrir leurs coûts de recherche et d'exploitation et d'atteindre un équilibre économique. Je vous présenterai un amendement qui vise à remplacer cette notion trop restrictive, par celle de « rémunération normale des capitaux », pour permettre aux exploitants de couvrir non seulement les investissements qu'ils ont réalisés mais également de tirer un profit raisonnable de leur exploitation.

Un autre de mes amendements tend à réparer une lacune importante de ce texte, qui ne prévoit pas d'exception pour les activités de recherche sur les hydrocarbures réalisées par des établissements publics, comme l'IFP Énergies nouvelles (Ifpen). Je vous proposerai de prévoir explicitement que ces activités de recherche publique demeurent autorisées.

L'article 2 détermine le champ d'application des dispositions relatives aux hydrocarbures. Il prévoit que l'interdiction de délivrance de nouveaux permis s'applique aux nouvelles demandes de titres miniers ainsi qu'aux demandes en cours d'instruction, sauf lorsqu'une juridiction a enjoint l'administration de procéder à la délivrance ou à la prolongation d'un tel titre. Si la loi était promulguée en l'état, toutes les demandes en cours d'instruction seraient donc refusées par l'administration.

Les articles 2 bis et 2 ter , insérés à l'Assemblée nationale, prévoient que l'exploitant doit remettre à l'autorité administrative, cinq ans avant la fin d'une concession, un dossier présentant le potentiel de reconversion des installations ou du site d'implantation pour d'autres usages, comme la géothermie, et que les installations peuvent être converties ou cédées à d'autres personnes publiques ou privées.

L'article 3 modifie la loi du 13 juillet 2011 relative à l'interdiction de la technique de fracturation hydraulique, dite loi Jacob. Il tire les conséquences des précédents articles et supprime la Commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation des techniques d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux, dont l'objet était d'évaluer les risques environnementaux liés aux techniques de fracturation hydraulique ou aux techniques alternatives. Puisqu'à l'avenir une telle exploration est interdite, cette commission devient sans objet.

Les députés ont complété la loi de 2011 pour étendre l'interdiction relative à la fracturation hydraulique à toute autre technique « ayant pour but de conférer à la roche une perméabilité ». Ceci conduit donc à ne permettre l'extraction d'hydrocarbures que par la méthode conventionnelle de forage.

En ce qui concerne les énergies renouvelables en mer, l'article 5 bis prévoit de faire porter, à l'avenir, le coût du raccordement des installations d'énergie renouvelable en mer au gestionnaire du réseau public de transport, c'est à dire à l'entreprise RTE, et non plus au producteur comme c'est le cas actuellement. Ce coût serait couvert par le tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE). Cet article clarifie les responsabilités des acteurs en distinguant la construction des installations, à la charge du porteur de projet, et leur raccordement, à la charge du gestionnaire de réseau, sur le modèle de ce qu'il se fait déjà dans certains pays comme l'Allemagne. Ceci doit permettre d'accélérer la réalisation des projets d'énergies renouvelables en mer et de réduire leur coût.

Le Gouvernement souhaite que cette nouvelle procédure s'applique à l'appel d'offres portant sur la réalisation d'un parc éolien offshore au large de Dunkerque, qui a été lancé en avril 2016. Ceci explique pourquoi cette disposition, qui devait initialement être incluse dans le projet de loi « simplification », a finalement été insérée in extremis dans ce projet de loi. Cette clarification des modalités de raccordement répond aux attentes des acteurs de la filière et devrait favoriser le développement de l'éolien en mer. Je vous proposerai tout à l'heure un amendement relatif aux modalités d'indemnisation du producteur en cas de retard de raccordement ou d'avarie sur les ouvrages de raccordement.

J'en viens maintenant à l'article 6 relatif aux biocarburants. Il met en conformité le code des douanes avec une directive européenne du 9 septembre 2015 qui prévoit de nouveaux critères de durabilité des biocarburants. Ainsi, les biocarburants produits par des installations mises en service avant le 5 octobre 2015 devront présenter un potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'au moins 50 % par rapport aux émissions de gaz à effet de serre résultant d'énergies fossiles. Pour les installations mises en service après cette date, ce potentiel de réduction devra être d'au moins 60 %. Cette rédaction n'aura pas d'effets sur les installations actuelles, puisque l'ensemble des unités de biocarburants atteignent déjà l'objectif de 50 % et qu'aucune nouvelle unité n'a été mise en service depuis le 5 octobre 2015.

De plus, l'article 6 créé un dispositif de surveillance de la filière biocarburants afin de s'assurer qu'elle respecte bien les critères de durabilité fixés par la loi. Il précise ainsi la liste des agents habilités à réaliser le contrôle des installations et les pouvoirs dont ils disposent dans l'exercice de leurs missions. Il prévoit que des sanctions administratives pourront être appliquées aux acteurs de la chaîne biocarburants qui produisent ou mettent sur le marché des produits qui ne respectent pas les critères environnementaux, ainsi que des sanctions pénales lorsque ces mêmes acteurs empêchent les agents d'exercer leur contrôle.

Enfin, trois articles concernent la lutte contre la pollution de l'air. L'article 7 met en conformité les dispositions du code de l'environnement relatives au plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA) avec une directive européenne du 14 décembre 2016. Ce plan définit les actions à mettre en oeuvre afin d'atteindre les objectifs nationaux de réduction des émissions de polluants atmosphériques arrêtés par décret. Il prévoit également des modifications mineures par rapport aux dispositions en vigueur : ainsi, le Prepa devra être réévalué tous les quatre ans contre cinq ans actuellement, il devra être mis à jour dans un délai de 18 mois à compter de la présentation du dernier inventaire national des émissions de polluants ou des dernières projections nationales des émissions, si les objectifs ne sont pas respectés ou risquent de ne pas l'être.

L'article 7 bis A prévoit un rapport du Gouvernement sur la prise en compte des objectifs de développement durable, et plus particulièrement sur les enjeux de la qualité de l'air, lors de l'attribution des marchés publics dans les zones couvertes par un plan de protection de l'atmosphère.

Enfin, l'article 7 bis prévoit que les préfets de département devront établir, dans les zones couvertes par un plan de protection de l'atmosphère qui connaissent un dépassement des valeurs limites relatives aux particules fines, un plan d'action favorisant le recours aux énergies les moins émettrices de particules et facilitant le raccordement aux infrastructures gazières publiques existantes.

M. Hervé Maurey , président . - Je vous félicite pour ce premier rapport très complet, car le sujet n'est pas des plus simples !

M. Gérard Cornu . - Félicitations pour ce brillant exposé.

L'air et la pollution n'ont pas de frontières. N'est-ce pas seulement symbolique de légiférer en France alors qu'il aurait fallu que ce texte soit débattu au niveau européen ? Mais avions-nous la capacité de convaincre nos partenaires ?

Comme nous interdisons l'exploitation, il faut aussi bannir la recherche du fait du droit de suite contenu dans le code minier. Ne faudrait-il pas modifier ce code pour préserver la recherche ?

M. Charles Revet . - À mon tour de féliciter notre rapporteur. Ce projet de loi interdit la recherche et l'exploitation en France, c'est-à-dire principalement en région parisienne et dans le sud-ouest. Mais cette interdiction vaut-elle aussi pour l'outre-mer ? Il y a quelques années, des recherches importantes avaient été effectuées au large de la Guyane. Ce projet de loi ne concerne-t-il que l'hexagone ?

Enfin, nous savons tous que nous aurons encore besoin de produits pétroliers en 2040.

Mme Nelly Tocqueville . - Bravo à notre rapporteur pour avis. Je me félicite que la France soit précurseur en ce domaine. Reste que la recherche et l'exploitation sur notre territoire reste modeste. Il faudra néanmoins accompagner les bassins d'emplois en prévoyant des formations professionnelles. La transition énergétique pourrait générer jusqu'à 1,5 million d'emplois.

M. Claude Bérit-Débat . - Je me félicite à la fois de ce rapport et de ce projet de loi, qui s'inscrit dans la continuité de la loi de 2011 sur l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des gaz de schiste par fracturation hydraulique.

Dans la Grande Aquitaine et en Occitanie, trois permis d'explorer et d'exploiter avaient été accordés : celui de Beaumont de Lomagne, celui de Brive et celui de Cahors. Ce dernier s'étendait sur un tiers de la superficie de la Dordogne. La vallée de la Vézère, autrement dit la vallée de l'homme où se trouve la grotte de Lascaux, était touchée par ce permis, ainsi qu'une partie de la vallée de la Dordogne qui est classée biosphère. J'étais bien sûr opposé à cette exploration et à cette exploitation qui auraient mis à mal notre sous-sol.

Nous devrons nous assurer que ce qui sera interdit en 2040 le soit réellement. Notre groupe est favorable à ce texte qui va dans le bon sens.

Après la loi Jacob, notre collègue Nicole Bricq avait déposé une proposition de loi pour interdire l'exploitation des gaz de schiste et Mme Batho, ministre de l'écologie, avait interdit les trois permis que j'ai cités, à la grande satisfaction des citoyens concernés.

M. Ronan Dantec . - Cette loi est plutôt symbolique. Si en 2040 la consommation mondiale de pétrole est identique à celle d'aujourd'hui, les guerres se multiplieront et notre modèle économique n'existera plus. Nous devons absolument réduire les émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. Cette loi fait donc sens : il fallait qu'un grand pays dise à l'occasion des négociations internationales sur le climat qu'il refuse d'exploiter son pétrole.

Écoutant ce matin Laurent Wauquiez sur France Inter, j'étais d'accord avec certaines de ses conclusions...

M. Hervé Maurey , président . - Cela figurera au compte rendu !

M. Ronan Dantec . - Il estime que l'interdiction du glyphosate posera des problèmes de distorsion de concurrence. C'est vrai, d'où la nécessité de revoir le CETA. Il en va de même pour les hydrocarbures.

Il faudrait compléter cette loi par un amendement interdisant les importations d'hydrocarbures les plus chargés en carbone. Refusons les hydrocarbures les plus nocifs en termes environnementaux afin de faire pression sur l'industrie.

M. Gérard Cornu . - Tout à fait.

M. Hervé Maurey , président . - Réflexions très intéressantes.

M. Jérôme Bignon . - Bravo à notre collègue rapporteur. A quelques semaines de la COP 23, les symboles sont importants, car ils font l'opinion.

L'amendement proposé par M. Dantec et approuvé par M. Cornu me convient parfaitement et je le signerais volontiers.

M. Christophe Priou . - Il y a quelques jours, nous étions M. Dantec et moi-même à Saint-Nazaire pour la mise à l'eau et l'inauguration de la première éolienne flottante. Rappelons la langueur et la longueur des procédures françaises en la matière : il faut dix à quinze ans pour créer un parc, alors qu'il en faut trois à cinq chez nos voisins.

Nous sommes le deuxième pays mondial en linéaire de côtes grâce à l'outre-mer. Notre espace maritime fait l'objet de beaucoup de convoitises internationales.

Enfin, nous sommes un certain nombre à avoir cosigné des amendements qui seront examinés par la commission des affaires économiques.

M. Patrick Chaize . - Je me joins aux félicitations faites à notre rapporteur. Quelle est l'origine de la proposition de mettre à la charge de RTE le raccordement des zones de production en mer ?

M. Jordi Ginesta . - L'Australie vient de décider de remettre en service un nombre important de centrales thermiques puisque l'électricité produite par l'énergie renouvelable produit des écarts de tension et de puissance très importants. Le président d'EDF disait il y a trois ans qu'on ne pouvait aller au-delà de 30 % d'injection d'électricité verte dans le réseau.

En outre, il faut que les activités de recherche ne soient menées que par des entreprises publiques.

M. Guillaume Gontard . - Merci pour ce rapport. Ce projet de loi est hautement symbolique et il va dans le bon sens, même s'il est un peu hypocrite puisqu'il impose des règles à une production nationale qui ne couvre que 1 % de nos besoins. En revanche, il ne fixe pas de règles sur l'exportation des savoir-faire et sur l'importation des hydrocarbures, notamment dans le cadre du CETA.

La date de 2040 me semble tardive. En outre, le droit de suite conduira au maintien des concessions au-delà de la date butoir. Enfin, les définitions de l'exploration et de l'exploitation ne me semblent pas satisfaisantes, car seules certaines techniques sont interdites.

M. Jean-Claude Luche . - Vouloir agir, c'est bien, mais quid des produits de substitution ? Comment va-t-on faire dans nos communes pour les enrobés, les bitumes ? Comment l'État entend-il faire disparaître le stock de véhicules anciens qui sont les plus pollueurs ?

M. Guillaume Chevrollier . - On ne peut qu'être favorable à la lutte contre les gaz à effet de serre. Mais pourquoi avoir recours à la procédure accélérée pour examiner un texte qui ne s'appliquera qu'en 2040 ? L'étude d'impact n'aurait-elle pu être plus développée ?

Je regrette aussi que l'intitulé de ce projet de loi face référence à la fin de la recherche : ce n'est pas un bon signal, alors que la recherche dans notre grand pays devrait être encouragée.

M. Hervé Maurey , président . - Vous avez tous noté que ce texte était largement symbolique et qu'il ne suffirait pas à lui seul à atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. Pour y parvenir, il faudra d'autres actions, notamment en matière d'économies d'énergie et d'énergies renouvelables.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Avec Mme Lamure, nous avons procédé à plusieurs auditions dont le cabinet du ministre. Hier, la commission des affaires économiques a reçu Nicolas Hulot et beaucoup de vos questions reprennent celles qui lui ont été posées. Aujourd'hui, 45 % de l'énergie consommée en France provient du pétrole, 22 % de l'électricité et 19 % du gaz. Annuellement, nous consommons 75 millions de tonnes de pétrole et l'objectif est de passer à 50 millions en 2040.

Certes, monsieur Cornu, l'Europe n'a pas bougé en ce domaine, mais d'après Nicolas Hulot, la France doit donner l'exemple même si elle est un peu isolée. Il s'agit d'après lui d'un enjeu de société. Je veux rendre hommage à l'honnêteté intellectuelle du ministre. Comme le code minier prévoit le droit de suite, il convient donc d'interdire la recherche. Je vous proposerai néanmoins un amendement pour autoriser la recherche publique.

Oui, monsieur Revet, l'interdiction concernera aussi l'outre-mer.

La question sur l'accompagnement des bassins d'emplois a été posée hier au ministre, madame Tocqueville. Selon lui, les énergies renouvelables vont être créatrices d'emplois.

Comme vous, monsieur Bérit-Débat, je suis favorable à l'interdiction de la fracture hydraulique.

Je remercie M. Dantec d'avoir fait référence à M. Wauquiez. Hier, la question du CETA a été abordée, ainsi que celle des hydrocarbures les plus chargés en carbone.

M. Ronan Dantec . - Allez-vous présenter un amendement ?

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Ce pourrait être un amendement de séance.

M. Hervé Maurey , président . - Je propose que MM. Dantec, Cornu, Bignon et vous-même, monsieur le rapporteur, travailliez à sa rédaction.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - M. Chaize m'a interrogé sur la prise en charge par RTE du raccordement des installations en mer : il s'agit d'une demande des acteurs de la filière éolienne.

M. Patrick Chaize . - Cela ne me surprend pas. En revanche, le raccordement sur terre est à la charge de l'investisseur : pour quelle raison en irait-il autrement en mer ?

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Il semblerait que ce soit pour raccourcir les délais de mise en place de ces projets : pour l'instant, il faut compter entre dix et quinze ans pour obtenir une autorisation.

M. Patrick Chaize . - Le coût de cette prise en charge par RTE sera supporté par tous les consommateurs, alors que tel n'est pas le cas pour les installations sur terre.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - In fine , c'est toujours le consommateur qui paye.

M. Ronan Dantec . - Cette prise en charge est peut-être liée à la puissance : pour les centrales nucléaires et pour les grandes centrales thermiques, RTE paye le raccordement. Les éoliennes en mer sont de grande puissance, contrairement à celles installées sur terre.

M. Hervé Maurey , président . - Nous interrogerons le Gouvernement en séance.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Certes, monsieur Ginesta, les opérateurs privés n'auront pas intérêt à faire de la prospection s'ils ne peuvent exploiter. Seuls les opérateurs publics pourront faire de la recherche.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.1 prévoit que des permis de recherche d'hydrocarbures pourront être octroyés lorsqu'ils portent sur des activités réalisées sous contrôle public à seules fins de connaissance géologique du territoire national, de surveillance ou de prévention des risques miniers.

M. Gérard Cornu . - Cet amendement va dans le bon sens, mais quel opérateur public se lancera dans une recherche s'il ne peut exploiter ?

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Certains établissements publics comme le BRGM.

M. Jérôme Bignon . - L'expression « territoire national » comprend-il les eaux sous juridiction ? Le plateau continental n'est ainsi pas complètement territoire national.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Il faudra étudier ce point juridique.

M. Claude Bérit-Débat . - Je comprends le sens de cet amendement mais je ne suis pas favorable à cette exception. Si je conçois la recherche pour prévenir les risques miniers, je suis beaucoup plus réservé en ce qui concerne la connaissance géologique, car cela revient à valider la recherche. Nous nous abstiendrons sur cet amendement.

L'amendement DEVDUR.1 ( COM-9 0) est adopté.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.2 procède à plusieurs modifications. Premièrement, par souci de cohérence, il réintroduit les dispositions de l'article 1 er bis au sein de l'article 1 er , puisqu'elles portent sur la même section du code minier nouvellement créée par l'article 1 er .

Deuxièmement, il précise que la limitation de la durée des concessions octroyées dans le cadre du droit de suite au 1 er janvier 2040 ne concerne que les concessions attribuées postérieurement à la promulgation de la loi, et non les concessions déjà attribuées à ce titre, afin de ne pas remettre en cause les droits acquis par les exploitants qui les possèdent.

Enfin, cet amendement remplace la notion d' « équilibre économique » par celle de « rémunération normale des capitaux immobilisés compte tenu des risques inhérents à ces activités ».

Mme Michèle Vullien . - Ce n'est pas plus clair.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - La notion d'« équilibre économique » signifie que les recettes et les dépenses doivent être équilibrées, mais le retour sur investissement n'est pas prévu.

Mme Michèle Vullien . - Mais que signifie « rémunération normale » ?

M. Ronan Dantec . - Cet amendement vide la loi de son contenu puisque tout ce qui aura été fait avant la promulgation de ce texte ne sera pas concerné et, après l'entrée en vigueur de la loi, l'exploitant demandera un retour sur investissement et donc la date butoir de 2040 ne pourra pas s'appliquer.

Cet amendement est contradictoire avec le discours plutôt bienveillant du rapporteur : je voterai contre.

M. Claude Bérit-Débat . - L'équilibre économique et la rémunération des capitaux ont des sens bien précis. Le point mort est un critère de gestion dans une entreprise, au même titre que la rémunération des capitaux. Avec cet amendement, on va trop loin : le groupe socialiste votera contre.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Tout l'enjeu est de savoir si l'équilibre économique se borne à prendre en compte le coût des charges et de personnel ou s'il inclut les marges qui permettent d'améliorer l'outil de production.

M. Gérard Cornu . - Cet amendement pose le principe de la non-rétroactivité. Tout ce qui aura été fait avant la loi ne sera pas concerné. Notre rapporteur pourrait-il revoir son amendement afin de tendre vers l'unanimité ?

Mme Françoise Cartron . - Qu'est-ce qu'une rémunération des capitaux « normale » ?

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Il faut permettre aux sociétés d'investir, ce qui n'est pas toujours le cas avec l'équilibre économique.

M. Hervé Maurey , président . - Je propose le retrait afin de travailler la formulation.

M. Frédéric Marchand . - L'équilibre économique se limite à la prise en compte des coûts de recherche et d'exploitation engagés par les titulaires de permis et il exclut le retour sur investissement que ces opérateurs sont en droit d'attendre lorsqu'ils entreprennent une activité d'exploitation. Il n'est donc pas nécessaire d'intégrer la notion de retour sur investissement.

M. Benoît Huré . - Votons-nous sur le retrait de l'amendement ?

M. Hervé Maurey , président . - Le retrait appartient à l'auteur de l'amendement. Il n'y a donc pas lieu de procéder à un vote.

M. Gérard Cornu . - Cela n'empêchera pas notre rapporteur de présenter en séance un amendement rédigé autrement.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - La commission des affaires économiques, saisie au fond, va présenter le même amendement : il sera intéressant de savoir le sort qu'elle va lui réserver.

L'amendement DEVDUR.2 est retiré.

Article 1 er bis

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - Je retire l'amendement de conséquence COM-3.

L'amendement DEVDUR.3 est retiré.

Article 5 bis

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - L'article 5 bis , inséré à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, prévoit que le coût du raccordement des installations d'énergie renouvelable en mer ne sera plus à la charge du producteur mais du gestionnaire du réseau public de transport (GRT), et qu'il sera couvert par le tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (Turpe).

L'amendement DEVDUR.4 étend aux cas de dysfonctionnements de ces ouvrages l'obligation d'indemnisation du producteur par le GRT.

M. Claude Bérit-Débat . - Le groupe socialiste est opposé à cet amendement qui remet en cause le système actuel qui fonctionne bien depuis plusieurs décennies. Je ne suis d'ailleurs pas sûr que RTE soit favorable à cette disposition.

Mme Michèle Vullien . - Cet accord a-t-il été validé par RTE ?

M. Jean-Claude Luche . - Quelle est la règle appliquée pour les productions sur terre ?

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - C'est l'investisseur qui paye le raccordement.

M. Jean-Claude Luche . - Il faudrait respecter la logique.

L'amendement DEVDUR.4 ( COM-9 3) est adopté.

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.5 soumet à l'avis de la Commission de régulation de l'énergie les mesures réglementaires qui devront être adoptées.

L'amendement DEVDUR.5 ( COM- 94) est adopté.

Article 7 bis A

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.6 améliore la rédaction de cet article et étend la portée du rapport devant être transmis au Parlement, afin qu'il ne concerne pas uniquement les marchés publics passés dans des zones couvertes par un PPA mais l'ensemble des marchés publics.

L'amendement DEVDUR.6 ( COM- 95) est adopté.

Article 7 bis

M. Jean-Marc Boyer , rapporteur pour avis . - L'amendement DEVDUR.7 précise que les mesures arrêtées par les préfets sont incluses dans les plans de protection de l'atmosphère lors de leur élaboration ou de leur révision, et ne constituent pas un nouveau plan distinct des PPA. Il prévoit que l'élaboration de telles mesures est une faculté laissée aux préfets de département et non une obligation. Enfin, il indique que les mesures prises ont pour objet de favoriser le recours aux énergies ainsi qu'aux technologies les moins émettrices de particules fines.

L'amendement DEVDUR.7 ( COM- 96) est adopté.

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