Avis n° 114 (2017-2018) de M. Thani MOHAMED SOILIHI , fait au nom de la commission des lois, déposé le 23 novembre 2017

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N° 114

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2017

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2018 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME III

OUTRE-MER

Par M. Thani MOHAMED SOILIHI,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; MM. François Pillet, Jean-Pierre Sueur, François-Noël Buffet, Jacques Bigot, Mmes Catherine Di Folco, Sophie Joissains, M. Arnaud de Belenet, Mme Nathalie Delattre, MM. Pierre-Yves Collombat, Alain Marc , vice-présidents ; M. Christophe-André Frassa, Mme Laurence Harribey, MM. Loïc Hervé, André Reichardt , secrétaires ; Mme Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Philippe Bonnecarrère, Mmes Agnès Canayer, Maryse Carrère, Josiane Costes, MM. Mathieu Darnaud, Marc-Philippe Daubresse, Mme Jacky Deromedi, MM. Yves Détraigne, Jérôme Durain, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Jean-Luc Fichet, Pierre Frogier, Mmes Françoise Gatel, Marie-Pierre de la Gontrie, M. François Grosdidier, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Sébastien Leroux, Henri Leroy, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Jean Louis Masson, Mme Marie Mercier, MM. Thani Mohamed Soilihi, Alain Richard, Simon Sutour, Mmes Lana Tetuanui, Catherine Troendlé, M. Dany Wattebled .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 235 , 264 rect. , 266 rect. , 273 à 278 , 345 et T.A. 33

Sénat : 107 et 108 à 113 (2017-2018)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 29 novembre 2017, sous la présidence de M. Philippe Bas, président, la commission des lois du Sénat a examiné, sur le rapport pour avis de M. Thani Mohamed Soilihi 1 ( * ) , les crédits de la mission Outre-mer du projet de loi de finances pour 2018.

Le rapporteur pour avis a présenté l'évolution des crédits budgétaires de la mission, en soulignant leur stabilisation autour de 2 milliards d'euros depuis 2011, soit la moitié de la dépense fiscale et le dixième de l'effort financier total de l'État en faveur des outre-mer.

Examinant plus spécifiquement les problématiques institutionnelles de chaque territoire ultramarin, le rapporteur pour avis a mis en exergue les questions soulevées par l'organisation du référendum d'autodétermination en Nouvelle-Calédonie, prévu en novembre 2018. Il a précisé que l'une des questions essentielles de l'organisation de cette consultation était la composition du corps électoral qui y participera. Il a rappelé que le XVI ème comité des signataires de l'Accord de Nouméa s'était réuni, le 2 novembre 2017 et avait trouvé un consensus sur les modalités d'organisation du référendum en actant, de manière exceptionnelle, l'inscription d'office des personnes résidant en Nouvelle-Calédonie sur la liste électorale générale, préalable indispensable à leur inscription sur la liste électorale spéciale pour la consultation relative à l'autodétermination.

Le rapporteur pour avis a également relevé que le Département de Mayotte exerçait l'ensemble des compétences d'un département d'outre-mer et certaines compétences d'une région d'outre-mer, les autres étant assumées par l'État. Cette situation, a-t-il regretté, a des impacts budgétaires non négligeables pour la collectivité puisque Mayotte ne bénéficie pas de la totalité de la dotation globale de fonctionnement des régions d'outre-mer, ce que la commission des lois avait déjà dénoncé en 2015. Le rapporteur pour avis a souhaité qu'un prochain toilettage institutionnel du statut de Mayotte permette de régler cette question.

Sur proposition de son rapporteur, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Outre-mer inscrits au projet de loi de finances pour 2018.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Avec 2,7 millions d'habitants, soit 4 % de la population française, et une superficie de 120 369 kilomètres carré, répartis sur les cinq continents, nos territoires ultramarins sont incontestablement une richesse et une fierté pour notre pays. Ils lui permettent d'être présent sur l'ensemble du globe et de bénéficier d'une richesse naturelle exceptionnelle.

Pourtant, ces territoires souffrent d'une situation économique et sociale défavorable par rapport à l'Hexagone, en raison de nombreuses difficultés structurelles, liées à leur situation géographique et à l'étroitesse de leurs marchés, qui les empêchent de parvenir à des économies d'échelle, favorisant ainsi une forte dépendance vis-à-vis de leur environnement régional. En outre, l'économie de ces territoires se caractérise par l'importance des activités agricoles et du tertiaire non marchand dans leur structure productive. Par ailleurs, le produit intérieur brut (PIB) par habitant représente, en moyenne, 60 % de celui de l'Hexagone. Le taux de chômage y est en moyenne deux fois supérieur à celui de la métropole ; celui des jeunes est particulièrement préoccupant puisqu'il est de 50 % pour les 15-24 ans, contre 24 % dans l'Hexagone.

Les mouvements sociaux qu'a connus la Guyane en mars-avril 2017 sont la conséquence directe de ces fragilités socio-économiques, auxquelles s'ajoutent les problèmes de sécurité et d'immigration illégale propres à ce territoire.

À ces faiblesses structurelles viennent s'ajouter les risques naturels auxquels sont exposés les outre-mer et qui constituent une difficulté supplémentaire pour leur développement, comme en témoignent les ravages causés par l'ouragan Irma dans les îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, dont le coût est estimé à 1,2 milliard d'euros.

C'est dans ce contexte socio-économique préoccupant que la nouvelle ministre des outre-mer, Mme Annick Girardin, a lancé le 4 octobre dernier les assises des outre-mer, ce dont se félicite votre rapporteur. Elles ont pour objet l'ouverture d'un temps d'échanges et de réflexion avec l'ensemble des populations ultramarines, sur différentes thématiques (jeunesse, emploi, santé, sécurité, environnement, création d'entreprise, culture) afin d'identifier les besoins spécifiques de chaque territoire. Les résultats se concluront par la rédaction d'un Livre bleu outre-mer au printemps 2018, destiné à recenser les projets concrets dans chaque domaine pour chaque territoire. Ces projets alimenteront la politique du Gouvernement en faveur des outre-mer.

Se prépare en outre le référendum d'autodétermination en Nouvelle-Calédonie, qui devrait être organisé en novembre 2018, conformément à l'accord de Nouméa conclu le 5 mai 1998. Le libellé de la question revêtira une grande importance pour permettre un déroulement apaisé de cette consultation à haut risque. D'autres territoires ultramarins pourraient bénéficier d'une évolution statutaire dans les prochaines années. C'est pourquoi votre rapporteur a fait le choix de présenter une monographie institutionnelle de chaque territoire ultramarin, et présenter de façon succincte les problématiques de chacun d'entre eux.

I. UN EFFORT BUDGÉTAIRE CONSTANT, DEPUIS 2010, EN FAVEUR DES OUTRE-MER

Après avoir significativement augmenté entre 2008 et 2010, en raison notamment des événements sociaux qui avaient secoué les Antilles et la préparation de la départementalisation de Mayotte, l'effort budgétaire de l'État en faveur de la mission « Outre-mer » s'est depuis stabilisé autour de deux milliards d'euros chaque année. Le projet de loi de finances pour 2018 traduit, en ce début de quinquennat, le maintien de ces crédits au-dessus de ce seuil.

Il convient toutefois de noter que ce premier budget est, ainsi que l'ont qualifié nos collègues rapporteurs spéciaux de la commission des finances, un « budget de transition ne présageant qu'en partie des priorités futures ». Le Gouvernement s'est engagé à s'appuyer sur les résultats des assises des outre-mer en cours pour adapter les crédits de la mission dans les prochains mois.

A. LA STABILITÉ, À PÉRIMÈTRE CONSTANT, DES CRÉDITS DE LA MISSION OUTRE-MER

La mission Outre-mer regroupe l'ensemble des dotations budgétaires allouées par l'État aux territoires ultramarins et gérées par le ministère des outre-mer. Ses crédits se répartissent entre deux programmes :

- le programme 138 Emploi outre-mer , qui regroupe, au sein de trois actions, les crédits destinés aux aides aux entreprises propres aux outre-mer ainsi que ceux relatifs aux divers dispositifs spécifiques aux outre-mer d'aide à la formation professionnelle. En 2018, le montant des crédits de ce programme s'élève à 1 329 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 1 334 millions d'euros en crédits de paiement (CP), dont 1 175 millions d'euros en AE et 1 179 millions d'euros en CP hors dépenses de personnel. Le budget de ce programme connaît une progression de 3,2 % en AE et de 3,5 % en CP ;

- le programme 123 Conditions de vie outre-mer , qui décline, au sein de huit actions, les crédits destinés au financement des dispositifs propres aux outre-mer (aides au logement, continuité territoriale, coopération régionale, dispositifs sanitaires, culturels et sociaux, accès au financement bancaire) ainsi que les crédits affectés au soutien à l'investissement des collectivités territoriales. Dans le projet de loi de finances pour 2018, les crédits de ce programme s'élève à 775 millions d'euros en AE et à 735 millions d'euros en CP, ce qui correspond, par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, à une progression de 2,6 % en AE et de 4,5 % en CP.

L'ensemble des crédits de la mission est récapitulé dans le tableau suivant :

Numéro et intitulé du programme
et de l'action

Autorisations d'engagement
(en milliards d'euros)

Crédits de paiement
(en milliards d'euros)

Ouvertes
en LFI
pour 2017

Demandées
en 2018

FDC 2 ( * ) et ADP 3 ( * ) attendus
en 2018

Ouvertes
en LFI
pour 2017

Demandées
en 2018

FDC et ADP attendus
en 2018

138

Emploi outre-mer

1,276

1,328

0,016

1,278

1,334

0,016

01

Soutien aux entreprises

1,028

1,079

1,030

1,079

02

Aides à l'insertion et à la qualification professionnelle

0,246

0,247

0,016

0,246

0,253

0,016

03

Pilotage des politiques des outre-mer

0,002

0,002

0,002

0,002

123

Conditions de vie outre-mer

0,849

0,776

0,00015

0,789

0,735

0,00015

01

Logement

0,246

0,226

0,232

0,228

02

Aménagement du territoire

0,144

0,161

0,00015

0,164

0,166

0,00015

03

Continuité territoriale

0,042

0,041

0,042

0,041

04

Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports

0,030

0,020

0,022

0,020

06

Collectivités territoriales

0,300

0,262

0,280

0,226

07

Insertion économique et coopération régionales

0,001

0,001

0,001

0,001

08

Fonds exceptionnel d'investissement

0,040

0,040

0,035

0,036

09

Appui à l'accès aux financements bancaires

0,046

0,025

0,013

0,017

Source : commission des lois du Sénat
à partir de l'annexe au projet de loi de finances pour 2018 « Outre-mer »

Au total, à périmètre courant, les crédits de la mission connaissent une légère baisse par rapport à 2017 (- 0,94 % en AE et - 0,07 % en CP). À périmètre constant, les crédits de la mission Outre-mer augmentent de + 3,42 % en AE (soit + 72,6 millions d'euros) et + 3,7 % en CP (soit + 85,1 millions d'euros). Cette hausse traduit et confirme, dans un contexte général de maîtrise des dépenses de l'État, la priorité accordée aux outre-mer par le Gouvernement.

La moitié des crédits de cette mission porte sur la compensation des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale spécifiques aux outre-mer, qui s'élèvent à 1,079 milliard d'euros, soit 81,2 % des crédits du programme 138. Bien que les projets de loi de finances pour 2018 et de financement de la sécurité sociale pour 2018 ne prévoient aucun recentrage de ces exonérations, il semblerait qu'elles fassent néanmoins l'objet d'un réexamen courant 2019.

B. UNE LÉGÈRE AUGMENTATION DE L'EFFORT GLOBAL DE L'ÉTAT EN FAVEUR DES TERRITOIRES ULTRAMARINS

L'action budgétaire de l'État en faveur de nos compatriotes ultramarins ne se réduit pas aux crédits de la mission Outre-mer . En effet, la plupart des crédits budgétaires intéressant ces territoires relèvent également d'autres missions budgétaires en fonction des politiques publiques qui y sont mises en oeuvre.

L'effort financier de l'État en faveur des outre-mer est aujourd'hui porté par 87 programmes relevant de 29 missions, auxquels s'ajoutent les prélèvements sur recettes, la dépense fiscale et la contribution du Centre national pour le développement du sport (CNDS).

L'effort budgétaire global de l'État en faveur des territoires ultramarins (c'est-à-dire toutes missions confondues) s'élève à 17 milliards d'euros en AE, soit une augmentation de + 1,26 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2017. Cet effort se décline en six axes :

- développer l'emploi, la production et l'investissement en outre-mer ;

- offrir une véritable égalité des chances à la jeunesse outre-mer ;

- garantir la sécurité des citoyens outre-mer ;

- améliorer les conditions de vie des citoyens outre-mer ;

- favoriser le développement durable des territoires en partenariat avec les collectivités ;

- valoriser les atouts des outre-mer.

Ainsi que votre commission le constate chaque année, cet éclatement budgétaire entre un nombre élevé de missions a des répercussions sur la conduite des politiques publiques en faveur des territoires ultramarins. En effet, chaque ministre demeure compétent pour son département ministériel, le ministère des outre-mer n'ayant pas vocation à compléter les interventions financières des autres ministères sur son propre budget. Les compléments éventuels du ministère interviennent uniquement pour des dépenses d'investissement et non de fonctionnement.

Quant à la dépense fiscale , elle devrait, en 2018, s'élever à 4,1 milliards d'euros, soit le double des crédits inscrits dans la mission Outre-mer . Un quart de cette dépense porte sur des dispositifs de défiscalisation, mis en place pour compenser les contraintes particulières pesant sur les économies ultramarines.

Au total, en intégrant les dépenses fiscales, l'effort financier total de l'État en faveur des territoires ultramarins devrait s'élever à 21,4 milliards d'euros en 2018. Les différents changements de périmètre opérés sur les missions ou programmes composant cet effort financier rendent néanmoins difficile une évaluation de l'ensemble des aides de l'État dont bénéficient réellement les territoires ultramarins.

Le montant du soutien financier de l'État, comme son évolution, connaissent des variations sensibles selon les collectivités, comme le retrace le tableau suivant. Ces évolutions dépendent logiquement, compte tenu de la dispersion des crédits budgétaires au sein de plusieurs missions, de décisions des différents responsables de programmes qui n'agissent pas nécessairement de manière coordonnée. Ainsi, une décision budgétaire qui peut présenter une cohérence au niveau de la politique générale menée par un ministère peut, en fonction d'autres décisions prises parallèlement par les autres ministères pour la même collectivité, s'avérer, au final, problématique pour ce territoire.

Évolution des AE de la politique transversale « Outre-mer »
par territoire

(en euros)

Territoires

Autorisations d'engagement

Évolution

Loi de finances initiale
pour 2016

Loi de finances initiale
pour 2017

Projet de loi de finances pour 2018

2017/2016

2018/2017

Guadeloupe

1 624 452 528

1 655 481 485

1 754 243 023

1,90 %

6,00 %

Guyane

927 739 835

1 017 808 123

1 076 873 098

9,7 %

5,80 %

Martinique

1 458 010 173

1 556 101 818

1 510 260 906

6,70 %

- 2,90 %

Saint-Martin

40 737 770

47 704 470

47 521 744

17,10 %

- 0,40 %

Saint-Barthélemy

1 178 363

528 961

508 863

- 55,10 %

- 3,80 %

Total Antilles Guyane

4 052 118 671

4 277 624 857

4 389 407 633

5,60 %

2,60 %

La Réunion

3 051 680 391

3 054 015 191

3 101 534 905

0,10 %

1,60 %

Mayotte

420 659 486

568 216 096

468 963 121

35,10 %

- 17,50 %

Nouvelle-Calédonie

450 964 736

473 074 703

459 924 015

4,90 %

- 2,80 %

Polynésie française

430 896 769

471 661 544

474 533 186

9,50 %

0,60 %

Wallis et Futuna

60 580 279

67 436 045

65 053 442

11,30 %

- 3,50 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

63 956 512

75 494 074

73 981 872

18,00 %

- 2,00 %

TAAF

14 192 573

14 840 096

4 842 232

4,60 %

0,00 %

Non réparti

103 528 111

139 659 142

128 563 922

34,90 %

- 7,90 %

Total (ensemble des territoires)

8 648 577 525

9 142 021 748

9 176 804 327

5,70 %

0,40 %

Source : Document de politique transversale, annexé au projet de loi de finances pour 2018

Au final, votre rapporteur se félicite tant du maintien des crédits de la mission Outre-mer au même niveau que 2017 que de l'effort financier total de l'État en faveur des territoires ultramarins.

Néanmoins, il estime que le développement de ces territoires passe avant tout par des politiques économiques et sociales adaptées à chacun d'entre eux, ce que devrait faciliter les assises des outre-mer et la rédaction du Livre bleu Outre-mer. En tout état de cause, l'effort global de l'État en faveur des outre-mer du projet de loi de finances pour 2018 témoigne de la prise de conscience par l'État que les solutions à apporter à chaque territoire sont spécifiques et ne peuvent faire l'objet de mesures générales, tant les problématiques sont diverses et propres à chacun d'entre eux.

II. DES ÉVOLUTIONS INSTITUTIONNELLES DIFFÉRENCIÉES : MONOGRAPHIES DES DIFFÉRENTES COLLECTIVITÉS ULTRAMARINES ET DES TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES (TAAF)

Au cours de la législature précédente, le Parlement a adopté plusieurs réformes institutionnelles relatives à certains territoires ultramarins ainsi que deux lois plus générales qui visaient également à répondre plus ponctuellement à des questions institutionnelles 4 ( * ) .

Trois d'entre elles sont d'ailleurs issues d'initiatives sénatoriales, prouvant une fois de plus l'attention du Sénat aux territoires ultramarins et sa volonté de trouver pour ces territoires les solutions institutionnelles les plus adaptées.

La loi organique n° 2015-1485 du 17 novembre 2015 portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy, issue d'une initiative de notre collègue Michel Magras, vise, sept ans après la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer qui a érigé la commune de Saint-Barthélemy en collectivité d'outre-mer, à apporter des ajustements au statut de cette collectivité afin de mieux l'adapter à la réalité locale.

La loi n° 2016-507 du 25 avril 2016 relative au statut des autorités administratives indépendantes créées par la Nouvelle-Calédonie, fruit d'une initiative de notre ancienne collègue Catherine Tasca, tend à lutter contre la « vie chère » par la mise en place d'une autorité administrative indépendante en Nouvelle-Calédonie exerçant des prérogatives en matière de régulation de la concurrence sur ce territoire.

Enfin, la loi n° 2016-1658 du 5 décembre 2016 relative à l'élection des conseillers municipaux dans les communes associées de la Polynésie française et à la modernisation du code général des collectivités territoriales applicable aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics, déposée par notre collègue Lana Tetuanui, a poursuivi deux objectifs : l'élection des conseillers municipaux dans les communes associées de Polynésie française et la modernisation de plusieurs dispositions relatives au fonctionnement des conseils municipaux des communes de cette collectivité.

Par ailleurs, des réflexions ont été engagées à Saint-Pierre-et-Miquelon pour simplifier l'architecture institutionnelle de ce territoire, tandis que se poursuit en Guadeloupe le travail mené par les élus locaux pour une éventuelle évolution institutionnelle vers une collectivité unique, sur le modèle de la Guyane et de la Martinique qui sont, depuis le 1 er janvier 2016, des collectivités uniques relevant de l'article 73 de la Constitution.

Votre rapporteur a fait le choix de monographies afin de rappeler le contexte et les enjeux institutionnels de chaque territoire ultramarin, tout en mettant par ailleurs l'accent sur la problématique spécifique de l'immigration illégale à Mayotte et en Guyane, même si celle-ci concerne l'ensemble des outre-mer à des degrés divers.

A. LA GUYANE : UNE ÉVOLUTION INSTITUTIONNELLE QUASI ABOUTIE, DES PROBLÈMES D'IMMIGRATION ILLÉGALE PERSISTANTS ET UNE CRISE SOCIALE AIGUE AU PRINTEMPS 2017

1. La récente mise en place de la collectivité territoriale de Guyane

Tout comme la Martinique, la Guyane a fait le choix de créer une collectivité unique, en lieu et place des anciens département et région d'outre-mer. C'était l'objet de la loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités uniques de Guyane et de Martinique qui définit l'organisation et le fonctionnement institutionnel de la collectivité territoriale de Guyane, mise en place le 1 er janvier 2016 à l'issue des dernières élections locales de décembre 2015 5 ( * ) .

Les 51 conseillers de l'assemblée de Guyane sont élus pour six ans au scrutin de liste proportionnel à deux tours à la plus forte moyenne, avec une prime majoritaire de onze sièges, sur le modèle du mode de scrutin régional. La Guyane forme une circonscription unique divisée en huit sections. L'exécutif de la collectivité est formé par le président de l'assemblée de Guyane, assisté de vice-présidents. Les institutions guyanaises sont complétées par le futur conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation de Guyane, qui sera placé auprès de l'exécutif de la nouvelle collectivité le 1 er janvier 2018. Comme en Martinique, le mandat des actuels conseils consultatifs (le conseil économique et social régional
- CESER - et le conseil de la culture, de l'éducation et de l'environnement
- CCEE) - a été prolongé jusqu'au 31 décembre 2017, afin de permettre une véritable concertation locale sur la composition du futur conseil.

Selon les éléments recueillis par votre rapporteur, la collectivité unique de Guyane s'est engagée dans une politique de rationalisation de son organisation administrative qui devrait porter ses fruits aussi bien en matière de qualité des politiques publiques que d'optimisation des moyens. L'organigramme de la nouvelle collectivité territoriale de Guyane est toujours en cours d'élaboration. Une première version a été soumise aux syndicats de personnels et fait l'objet de modifications. Afin que cet organigramme soit l'un des supports du développement économique du territoire, l'exécutif se laisse jusqu'au 31 décembre 2017 pour le finaliser.

S'agissant des emplois fonctionnels, l'assemblée de Guyane a décidé, par délibération du 29 juin 2016 de créer, en sus de l'emploi de directeur général des services, dix emplois de directeurs généraux adjoints chacun ayant la charge d'un domaine précis comme le sport, l'éducation, la petite enfance ou la culture.

Outre cette question d'organigramme, des outils de gestion et de pilotage demeurent encore à construire, notamment les outils de gestion (financier, RH et métiers).

2. La lutte contre l'immigration illégale

La Guyane connaît une forte pression migratoire : selon les éléments recueillis par votre rapporteur, les immigrés clandestins représenteraient au moins 25 % de la population, soit environ 40 000 à 70 000 personnes dont 3 500 à 5 000 travaillent en forêt sur les sites d'orpaillage clandestin.

La lutte contre l'immigration clandestine est une priorité de l'action de l'État en Guyane. Celle-ci est le seul territoire de l'Union européenne à avoir une frontière terrestre avec l'Amérique du Sud, très attractif pour les populations des États voisins du Brésil, du Suriname et du Guyana. Le taux d'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière y est élevé et supérieur à 79 % pour les nationalités brésilienne et surinamaise.

3. Le fléau de l'orpaillage illégal

L'orpaillage illégal, c'est-à-dire l'exploitation aurifère clandestine, constitue un fléau majeur pour la Guyane. Outre le manque à gagner considérable sur le plan économique, il entraîne d'importantes conséquences écologiques : déforestation sauvage, pollution des sites, etc.

L'orpaillage illégal est essentiellement le fait de ressortissants brésiliens, à l'origine également d'autres infractions, notamment le vol de véhicules, l'aide au séjour irrégulier et le proxénétisme sur les lieux d'extraction clandestins.

Pour combattre ce fléau, a été mise en place, depuis 2008, une opération de police dénommée « Harpie » et placée sous le double contrôle du préfet et du procureur de la République. Cette opération conduit des actions régulières de démantèlement de sites clandestins dans le but d'asphyxier durablement l'exploitation aurifère illégale. Pérennisée à compter de 2010, elle est menée conjointement par les forces armées de Guyane (FAG) et la gendarmerie. Elle succède à d'autres opérations, notamment « Anaconda », conduites entre 2002 et 2004, et aux opérations mixtes du protocole « Toucan », de 2004 à 2008.

Les résultats de cette opération sont tangibles, le nombre de sites actifs d'exploitation clandestine, bien qu'encore élevé, ayant été réduit de manière importante, passant d'environ 500 fin 2013 à 200 fin 2015. On peut néanmoins regretter les capacités insuffisantes d'intervention sur le terrain et surligner la nécessité de renforcer les dispositifs de lutte. L'objectif est de désorganiser les flux logistiques, en reconduisant systématiquement à la frontière les orpailleurs en situation irrégulière, et en saisissant ou détruisant les matériels nécessaires à l'exploitation aurifère illégale.

À la frontière brésilienne, compte tenu de la convergence existant entre l'orpaillage clandestin et l'immigration irrégulière, l'accent a été mis sur la répression des réseaux de trafiquants. Le recrutement des « garimpeiros » (orpailleurs clandestins) s'effectue pour l'essentiel parmi une population brésilienne démunie de tout titre de séjour. Ainsi, des opérations menées conjointement avec les forces armées en Guyane permettent d'associer la police aux frontières (PAF) de manière efficace à la lutte contre l'orpaillage clandestin. Elles se traduisent par l'interpellation et la reconduite à la frontière d'étrangers en situation irrégulière, d'une part, et la destruction du matériel utilisé pour l'orpaillage clandestin, d'autre part.

4. La crise sociale de mars-avril 2017

Plusieurs facteurs peuvent expliquer la crise sociale qui a éclaté en Guyane entre le 20 mars et le 21 avril 2017 : une hausse du sentiment d'insécurité, liée en partie à une forte augmentation du nombre d'homicides et de vols avec violence en 2016, à laquelle s'ajoute la détérioration du contexte économique. Le mouvement social est d'une ampleur comparable à celui qu'avaient connu les Antilles en 2009.

Le mouvement a été initié par le collectif dit des Toukans, et des syndicalistes de l'Union des travailleurs guyanais (UTG) au sein de l'entreprise EDF, pour protester contre la vente à un opérateur privé du centre médico-chirurgical de Kourou (CMCK) géré par la Croix-Rouge. Il s'est tout d'abord traduit par une grève, à Kourou, le 20 mars 2017. Rapidement suivie par plusieurs corporations, cette crise a permis d'attirer l'attention sur les importantes difficultés de la Guyane.

Le conseil des ministres du 5 avril 2017 a entériné un « plan d'urgence pour la Guyane », doté d'une aide de 1,085 milliard d'euros, et l'examen prioritaire d'une demande de deux milliards d'euros supplémentaires dont 250 millions d'euros pour la construction de cinq lycées et de dix collèges en cinq ans ; 150 millions d'euros sur dix ans pour la construction d'établissements scolaires ; 125 millions d'euros pour les hôpitaux et les structures d'accueil de la petite enfance ; 300 millions d'euros pour les infrastructures routières (construction d'une route à quatre voies et doublement d'un pont) ; 40 millions d'euros pour la couverture des besoins de télécommunications et, enfin, 53 millions d'euros pour le plan d'investissement de la collectivité territoriale de Guyane.

Lors de son récent déplacement en Guyane, le Président de la République a annoncé que ce plan serait intégralement mis en oeuvre, ce dont se félicite votre rapporteur.

B. LA GUADELOUPE : UNE RÉFLEXION INSTITUTIONNELLE EN COURS

Après la crise sociale de 2009, les élus guadeloupéens, à l'instar de leurs homologues martiniquais et guyanais, ont été invités par le Président de la République à réfléchir à l'évolution statutaire de leur territoire. Deux options leur étaient proposées : une évolution vers un statut à caractère autonome relevant de l'article 74 de la Constitution, d'une part, ou une évolution institutionnelle favorisant une simplification administrative du territoire relevant de l'assimilation législative prévue à l'article 73 de la Constitution, d'autre part.

Alors que les élus guyanais et martiniquais ont réclamé l'organisation d'une consultation relative à l'évolution statutaire de leurs collectivités, les élus de Guadeloupe sollicitaient, dans le même temps, en juin 2009, un délai de réflexion de dix-huit mois pour définir un projet d'évolution institutionnelle.

Aux termes de ce délai, le Congrès des élus de Guadeloupe a décidé l'élaboration d'un projet guadeloupéen de société comme préalable à toute évolution institutionnelle. Le 28 décembre 2010, il a estimé que le processus d'élaboration de ce projet n'était pas encore achevé et a décidé de poursuivre ses réflexions institutionnelles. Plusieurs options ont néanmoins été écartées : à l'unanimité de ses membres, le Congrès n'a pas retenu le passage de la Guadeloupe au statut de collectivité d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution.

Les 8 et 9 décembre 2011, le Congrès des élus de Guadeloupe a adopté le principe de l'évolution vers la collectivité unique mais la structure précise de cette évolution reste à déterminer. Or le paysage politique ayant changé lors des dernières élections régionales de décembre 2015, il est probable que cette question soit à nouveau mise en étude.

C. LA MARTINIQUE : LA MISE EN PLACE DE LA COLLECTIVITÉ UNIQUE

Comme en Guyane, la collectivité territoriale de Martinique a succédé, à l'issue des élections de décembre 2015 et depuis le 1 er janvier 2016, aux anciens conseils régionaux et départementaux de Martinique.

En application de la loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités uniques de Guyane et de Martinique, la collectivité territoriale de Martinique exerce les compétences attribuées à un département et à une région d'outre-mer, ainsi que les compétences qui lui sont spécifiquement dévolues par la loi.

Sur le plan électoral, la Martinique forme une circonscription unique divisée en quatre sections correspondant aux circonscriptions législatives. Comme en Guyane, les 51 conseillers de son assemblée sont élus au scrutin de liste proportionnel à deux tours à la plus forte moyenne, avec une prime majoritaire de 11 sièges, pour un mandat de six ans.

L'exécutif de la collectivité est formé par le conseil exécutif de Martinique, composé d'un président assisté de huit conseillers exécutifs. Le mandat des actuels conseils consultatifs (CESER et CCEE) a été prolongé, comme en Guyane, jusqu'au 31 décembre 2017, afin de permettre une véritable concertation locale sur la composition du futur conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation de Martinique, qui sera placé auprès de l'exécutif de la nouvelle collectivité territoriale.

D. LA RÉUNION : LES PRÉMICES D'UNE FUTURE ÉVOLUTION INSTITUTIONNELLE ?

La question institutionnelle n'a, jusqu'à présent, fait l'objet d'aucun débat aussi bien au sein de la société civile réunionnaise que parmi les élus locaux, comme l'avait constaté votre commission lors d'un déplacement en 2012 6 ( * ) .

Pourtant, lors de son déplacement en Guyane, le Président de la République, Emmanuel Macron, a annoncé, à l'occasion du lancement des assises des outre-mer, le 28 octobre dernier, être prêt à procéder à des adaptations constitutionnelles pour les territoires ultramarins. Cette annonce visait en premier lieu l'alinéa 5 de l'article 73 de la Constitution selon lequel « la disposition prévue aux deux précédents alinéas [pouvoir d'habilitation des collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution à fixer elle-même les règles dans un certain nombre de matières relevant de la loi ou du règlement] n'est pas applicable au département et à la région de La Réunion ». Cette disposition, introduite à l'initiative de notre ancien collègue Jean-Paul Virapoullé lors des débats sur la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République, prive La Réunion du droit d'adaptation législative ou réglementaire dont disposent les autres collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution et le principe de l'assimilation législative.

Cette disposition avait été introduite car, selon notre ancien collègue, le droit d'habilitation introduit aux troisième et quatrième alinéas de l'article 73 de la Constitution ouvrait « une brèche dans le domaine législatif » ce qui, à ses yeux, pouvait préfigurer une évolution statutaire que les Réunionnais ne voulaient pas. « Nous préférons la stabilité institutionnelle et la sécurité juridique. »

Certains estiment que la suppression de cette disposition représenterait une des clés de « l'adaptation de l'émancipation économique » de La Réunion. D'autres au contraire s'y opposent, qualifiant ce débat de « stérile » et d'aucune conséquence pour le développement de l'île.

E. MAYOTTE : UNE FORTE POUSSÉE DE L'IMMIGRATION ILLÉGALE, DES INTERROGATIONS TOUJOURS PERSISTANTES SUR SON STATUT INSTITUTIONNEL

1. Les interrogations institutionnelles de Mayotte

Initialement territoire d'outre-mer, Mayotte est devenue une collectivité départementale en 2001, avant l'initiation, en 2011, du processus de départementalisation. L'achèvement du processus de départementalisation est une priorité affichée depuis 2015 avec le plan Mayotte 2025 7 ( * ) .

Bien que dénommée « Département de Mayotte », la collectivité n'est, sur le plan juridique, ni un département d'outre-mer, ni une région d'outre-mer, bien que relevant des collectivités ultramarines de l'article 73 de la Constitution. Elle constitue, depuis 2011, une forme de collectivité unique dont l'assemblée délibérante - le conseil départemental - exerce les compétences d'un département et certaines compétences d'une région d'outre-mer. C'est, avant la Guyane et la Martinique, la première collectivité unique régie par l'article 73 de la Constitution.

Toutefois, Mayotte n'exerce pas toutes les compétences d'une région d'outre-mer, plusieurs d'entre elles relevant de la compétence de l'État. Cette situation s'explique par les difficultés économiques et sociales de l'île ainsi que par la situation budgétaire des collectivités territoriales mahoraises (aussi bien le département que les communes et les syndicats intercommunaux).

Votre commission avait relevé, le 25 novembre 2015, la faiblesse relative de la dotation globale de fonctionnement dont bénéficie Mayotte en comparaison de celle des autres départements d'outre-mer. De surcroît, elle avait constaté que ce département était sous doté budgétairement alors qu'il exerce des compétences régionales, sans pour autant bénéficier de la dotation globale de fonctionnement des régions. Elle avait jugé cette situation ni équitable, ni juste, compte tenu du contexte budgétaire et financier difficile du département. C'est pourquoi elle s'était interrogée sur la prise en compte, a minima au titre de la dotation globale de fonctionnement, de la double compétence de Mayotte sur le modèle de ce qui s'applique aujourd'hui en Guyane et en Martinique. Plus globalement, votre commission dénonce les différences de traitement subies par les collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution et le principe de l'assimilation législative.

2. Le problème endémique de l'immigration illégale

Mayotte subit une forte pression migratoire, principalement en provenance des Comores, plus particulièrement de l'île d'Anjouan, mais aussi de Madagascar. Le nombre d'immigrés clandestins ne fait l'objet d'aucune estimation officielle mais semble proche de 50 000 personnes, soit près d'un quart de la population, Mayotte comptant 212 600 habitants 8 ( * ) .

Le nombre de personnes ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) depuis cette île reste important même si les résultats en matière d'éloignement sont en légère baisse. Le nombre des éloignements réalisés à Mayotte en 2015 est en baisse par rapport à 2014
(- 6,1 %). Il augmente de + 26 % sur les huit premiers mois de l'année 2016. Plus de 99 % des éloignements sont à destination des Comores et moins de 1 % à destination de Madagascar.

Selon les derniers éléments recueillis par votre rapporteur, en 2015, la police aux frontières a intercepté 196 kwassas kwassas et 191 passeurs.

F. LA NOUVELLE-CALÉDONIE : L'ATTENTE DU RÉFÉRENDUM D'AUTODÉTERMINATION

1. Le régime institutionnel de la Nouvelle-Calédonie

L'organisation institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie est régie par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, adoptée après la signature de l'Accord de Nouméa et la révision constitutionnelle du 20 juillet 1998.

Ses institutions comprennent le congrès, le gouvernement, le sénat coutumier, le conseil économique, social et environnemental et les conseils coutumiers. Les provinces et les communes de la Nouvelle-Calédonie sont des collectivités territoriales de la République. L'exécutif de la Nouvelle-Calédonie est assuré par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, composé de onze membres et élu par le Congrès pour une durée de cinq ans.

La loi organique n° 2009-969 du 3 août 2009 relative à l'évolution institutionnelle de la Nouvelle Calédonie a aménagé les modalités des transferts de compétences devant intervenir d'ici 2014, conformément à la loi organique précitée du 19 mars 1999. À l'issue de cette loi, ont été adoptées plusieurs lois de pays relatives au transfert de ces compétences, en sus de celles déjà votées par le congrès de Nouvelle-Calédonie le 30 novembre 2010. Aux termes des lois de pays, les compétences suivantes ont été transférées à la Nouvelle-Calédonie :

- le 1 er janvier 2011 pour la circulation maritime ;

- le 1 er janvier 2012 pour l'enseignement ;

- le 1 er janvier 2013 pour la circulation aérienne ;

- le 1 er juillet 2013 pour le droit civil et commercial.

La loi organique précitée du 3 août 2009 a par ailleurs apporté plusieurs précisions sur la répartition des compétences entre l'État, la Nouvelle-Calédonie et les provinces 9 ( * ) , ainsi que sur l'organisation institutionnelle de la collectivité 10 ( * ) .

Enfin, la loi organique n° 2011-870 du 25 juillet 2011 a modifié l'article 121 de la loi statutaire afin de renforcer la stabilité du gouvernement de la collectivité. Dans le respect de l'accord de Nouméa, cette loi vise à :

- d'une part, à éviter que les démissions collectives répétées ne conduisent à la démission d'office du gouvernement, en fixant un délai de dix-huit mois pendant lequel le gouvernement ne peut plus être démissionnaire ;

- d'autre part, à permettre aux groupes démissionnaires qui se trouvent, de ce fait, privés de la représentation dont ils disposaient au sein du gouvernement, de déposer à tout moment une nouvelle liste et de restaurer ainsi leur présence au gouvernement. Si cette faculté n'est pas exercée, le gouvernement est réputé complet.

Depuis la promulgation de cette loi, le gouvernement de Nouvelle-Calédonie, mis en place à la suite des dernières élections au congrès et aux assemblées de province du 14 mai 2014, n'a pas connu de blocage . Néanmoins, afin de respecter la loi organique n° 2014-125 du 14 février 2014 interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur, la démission de l'un de ses membres puis celle de son remplaçant a, depuis le 19 août dernier, nécessité l'élection d'un nouveau gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. L'équilibre politique complique, encore aujourd'hui, l'élection du président et du vice-président du congrès.

Une actualisation de la loi organique de 1999 a été adoptée par le Parlement le 15 novembre 2013 pour notamment permettre à la Nouvelle-Calédonie de créer des autorités administratives indépendantes dans les matières relevant de ses compétences.

Enfin, la loi organique n° 2015-987 du 5 août 2015 relative à la consultation sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté vise trois objectifs :

- améliorer le fonctionnement des commissions administratives spéciales chargées de réviser la liste électorale générale et d'établir puis réviser la liste électorale spéciale pour la consultation portant sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté ;

- élargir la possibilité d'inscription d'office sur la liste électorale spéciale pour la consultation sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté aux électeurs admis à la consultation du 8 novembre 1998, à ceux relevant du statut civil coutumier et à ceux qui, nés en Nouvelle-Calédonie, sont présumés y détenir le centre de leurs intérêts moraux et matériels, en vertu des critères qu'elle énonce ;

- préciser les modalités d'organisation, le cas échéant, de la troisième consultation prévue par l'Accord de Nouméa.

2. L'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie
a) Une réflexion organisée par un comité sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie

Le VIII ème comité des signataires de 2010 a décidé la création d'un comité sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, dont les travaux s'organisent autour des trois domaines liés à la consultation sur l'après 2018 prévue par l'Accord de Nouméa : l'exercice des compétences régaliennes telles que définies à l'article 21 de la loi organique, l'accès à un statut international de pleine responsabilité et l'organisation de la citoyenneté en nationalité.

Ce comité s'appuie sur les travaux d'une mission de réflexion sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, décidée lors du IX ème comité des signataires de 2011.

Le rapport de la mission menée par MM. Jean Courtial, conseiller d'État, et Ferdinand Mélin-Soucramanien, professeur des universités, a été présenté au Comité des signataires du 11 octobre 2013 et rendu public. Il est intitulé « Réflexions sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie » et a été précédé de 5 réunions du comité de pilotage « Avenir institutionnel » entre octobre 2011 et septembre 2013.

Lors du XII ème comité des signataires, le 3 octobre 2014, et dans la perspective de la préparation de la consultation prévue par l'accord de Nouméa, les membres du comité des signataires ont convenu de poursuivre en Nouvelle-Calédonie ce travail de réflexion, en s'appuyant sur les thèmes mentionnés au point 5 de l'accord de Nouméa (transfert des compétences régaliennes, transformation de la citoyenneté en nationalité, statut international), dans le respect des convictions de chacun.

Sur proposition du Premier ministre, les partenaires se sont accordés sur l'intérêt qu'il y a à mettre en place trois groupes de travail, présidés par le haut-commissaire et composés de toutes les forces politiques représentées au congrès, en vue d'approfondir la réflexion sur ces trois thèmes. Le Premier ministre a proposé d'y associer les signataires.

Un comité des signataires exceptionnel s'est réuni le 5 juin 2015 pour aborder les questions soulevées par les différents partenaires calédoniens à l'occasion de l'avis rendu par le congrès sur le projet de loi organique relatif à la consultation sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté. Les échanges entre les partenaires ont permis de déterminer un calendrier et une méthode destinés à identifier les difficultés relatives aux questions électorales. Cet accord a permis l'adoption de la loi organique du 5 août 2015 en vue de constituer la liste électorale spéciale à la consultation sur l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie.

b) La préparation du référendum d'autodétermination de 2018 : la sensible question de l'inscription sur les listes électorales

Les accords de Nouméa de 1998 prévoient l'organisation d'un référendum d'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie « entre 2014 et 2018 ». L'une des questions essentielles de l'organisation de cette consultation est la composition du corps électoral qui participera à celle-ci.

Il existe en Nouvelle-Calédonie trois listes électorales distinctes, selon les règles fixées par la loi organique précitée de 1999.

La première - dite liste électorale générale (LEG) - regroupe les électeurs participant aux élections nationales françaises : elle comprend tous les Français habitant en Nouvelle-Calédonie depuis six mois au moins avant un scrutin.

La deuxième liste - dite liste électorale spéciale (LES) - permet aux électeurs inscrits de participer à l'élection des assemblées délibérantes spécifiques de la Nouvelle-Calédonie (Congrès et assemblées de province). Y sont inscrites les personnes inscrites sur la liste électorale générale en Nouvelle-Calédonie lors du référendum portant sur l'approbation de l'Accord de Nouméa et résidant depuis plus de dix ans au moment du scrutin.

Enfin, s'agissant de la troisième liste - la liste électorale spéciale pour la consultation (LESC) pour l'autodétermination -, les critères d'inscription sont plus restrictifs : les électeurs qui pourront participer au référendum d'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie doivent se trouver dans l'un des huit cas prévus à l'article 218 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

Article 218 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999
relative à la Nouvelle-Calédonie

Sont admis à participer à la consultation les électeurs inscrits sur la liste électorale à la date de celle-ci et qui remplissent l'une des conditions suivantes :

a) Avoir été admis à participer à la consultation du 8 novembre 1998 ;

b) N'étant pas inscrits sur la liste électorale pour la consultation du 8 novembre 1998, remplir néanmoins la condition de domicile requise pour être électeur à cette consultation ;

c) N'ayant pas pu être inscrits sur la liste électorale de la consultation du 8 novembre 1998 en raison du non-respect de la condition de domicile, justifier que leur absence était due à des raisons familiales, professionnelles ou médicales ;

d) Avoir eu le statut civil coutumier ou, nés en Nouvelle-Calédonie,
y avoir eu le centre de leurs intérêts matériels et moraux ;

e) Avoir l'un de leurs parents né en Nouvelle-Calédonie et y avoir le centre de leurs intérêts matériels et moraux ;

f) Pouvoir justifier d'une durée de vingt ans de domicile continu en Nouvelle-Calédonie à la date de la consultation et au plus tard au 31 décembre 2014 ;

g) Être nés avant le 1 er janvier 1989 et avoir eu son domicile en Nouvelle-Calédonie de 1988 à 1998 ;

h) Être nés à compter du 1 er janvier 1989 et avoir atteint l'âge de la majorité à la date de la consultation et avoir eu un de leurs parents qui satisfaisait aux conditions pour participer à la consultation du 8 novembre 1998.

Les périodes passées en dehors de la Nouvelle-Calédonie pour accomplir le service national, pour suivre des études ou une formation ou pour des raisons familiales, professionnelles ou médicales ne sont pas, pour les personnes qui y étaient antérieurement domiciliées, interruptives du délai pris en considération pour apprécier la condition de domicile.

L'inscription sur cette troisième liste fait l'objet de polémiques et de difficultés. Aujourd'hui, environ 160 000 personnes y sont inscrites. Toutefois, entre 10 000 et 22 000 personnes pourraient demander à y figurer si elles étaient inscrites sur la liste électorale générale. La question qui se posait était donc de savoir si un dispositif d'inscription d'office sur la liste électorale générale - qui n'existe actuellement en métropole que pour les électeurs atteignant l'âge de la majorité - devait être généralisé en Nouvelle-Calédonie d'ici l'organisation du référendum d'autodétermination.

Le 2 novembre dernier, sous l'égide du Premier ministre, le XVI ème comité des signataires de l'Accord de Nouméa a trouvé un consensus sur les modalités d'organisation du référendum d'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie, les partenaires estimant que « le règlement de cette question permettra de garantir la légitimité et la sincérité des résultats du scrutin ». Selon le relevé de conclusions, 10 922 natifs résidant de manière permanente en Nouvelle-Calédonie ne sont pas inscrits sur la liste électorale générale, soit 7 000 personnes de « statut civil coutumier » et 4 000 personnes de « statut civil de droit commun ». Les membres du comité des signataires ont acté, de manière exceptionnelle, l'« inscription d'office des personnes résidant en Nouvelle-Calédonie sur la LEG, préalable nécessaire à leur inscription sur la LESC ». La condition nécessaire sera « une résidence de trois ans attestée par l'inscription sur les fichiers d'assurés sociaux. » Ainsi, la durée de résidence, associée au fait d'être né en Nouvelle-Calédonie, constitue une présomption simple de détention du centre des intérêts matériels et moraux. L'inscription d'office ne sera pas pour autant automatique et devra faire l'objet d'un examen par les commissions administratives spéciales sur la base des éléments fournis par l'État.

Une période complémentaire d'inscription sur les trois listes électorales a été également été actée. Enfin, un groupe de travail spécifique, composé des représentants du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, d'une représentation des groupes politiques au congrès et, en tant que de besoin, de toute personnalité choisie pour sa compétence, sera prochainement constitué, notamment pour réfléchir au libellé de la question posée aux électeurs.

Cet accord implique de modifier la loi organique de 1999. Un avant-projet de loi organique visant à modifier la procédure de révision des listes électorales en Nouvelle-Calédonie traduisant cet accord politique est actuellement en consultation au congrès de la Nouvelle-Calédonie. Il devrait être délibéré en conseil des ministres le 6 décembre prochain. Selon les éléments recueillis par votre rapporteur, le projet de loi organique devrait être adopté au plus tard en mars 2018 pour permettre son application à la prochaine période de révision des listes électorales.

La conclusion de cet accord n'a pas mis fin aux tensions politiques qui secouent la Nouvelle-Calédonie entre indépendantistes et non-indépendantistes et au sein de chaque mouvement.

Le 23 novembre 2017, le Congrès de Nouvelle-Calédonie a rendu son avis sur l'avant-projet de loi organique dans lequel il propose plusieurs modifications.

G. LA POLYNESIE FRANÇAISE : LA VOLONTÉ D'UN TOILETTAGE INSTITUTIONNEL AMBITIEUX

1. Une première étape avec la loi du 5 décembre 2016

Afin de conforter l'évolution des communes polynésiennes depuis leur création en 1971 et de remédier aux difficultés propres à certaines situations, les élus locaux de la Polynésie française ont, dans le cadre du syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française (SPC-PF), de février à septembre 2015, élaboré une réforme pragmatique et consensuelle du cadre juridique applicable à ces collectivités. Ce long travail est à l'origine de la loi n° 2016-1658 du 5 décembre 2016 relative à l'élection des conseillers municipaux dans les communes associées de la Polynésie française et à la modernisation du code général des collectivités territoriales applicable aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics, issue d'une initiative de notre collègue Lana Tetuanui.

Cette loi a procédé aux modifications du code électoral rendues nécessaires par le nombre de communes associées sur le territoire polynésien. Elle a ainsi réformé le mode de scrutin applicable à l'élection des conseillers municipaux dans les communes polynésiennes de 1 000 habitants et plus.

Elle a par ailleurs remédié aux difficultés concrètes auxquelles se heurtaient ces communes :

- adaptation des modalités d'élection des maires délégués dans les communes associées en ouvrant à ces derniers le statut d'adjoint surnuméraire au maire de la commune centre et en améliorant leur traitement indemnitaire ;

- assouplissement des conditions d'utilisation de la visioconférence pour les réunions du conseil municipal ;

- ouverture aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) comportant des communes membres dispersées sur plusieurs îles de la possibilité de fixer leur siège en dehors du territoire intercommunal et possibilité de la prise en charge des frais de déplacement de certains élus intercommunaux ;

- réaménagement du régime indemnitaire des élus afin de permettre au conseil municipal de pouvoir moduler les indemnités versées aux maires délégués ;

- extension aux élus communaux polynésiens du dispositif du droit individuel à la formation, consacré par la loi n° 2015-366 du 31 mars 2015 visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat ;

- report au 1 er janvier 2020 des modifications apportées par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République au régime indemnitaire des élus de certains syndicats de communes.

En matière d'action économique, la loi a complété les outils à la disposition des communes polynésiennes en ouvrant à celles-ci la faculté de créer des sociétés publiques locales et en actualisant les règles encadrant la passation des marchés publics sur ce territoire.

Enfin, la loi a modifié plusieurs dispositions relatives aux cimetières et aux opérations funéraires, en tenant compte des traditions locales et abrogé diverses dispositions du code général des collectivités territoriales, étendues à la Polynésie française mais devenues sans objet.

Un projet de loi organique portant modernisation du droit statutaire des outre-mer est actuellement en cours d'élaboration. Il devrait permettre de procéder à quelques ajustements de la loi n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française. Les modifications envisagées sont le résultat d'un important travail de concertation entre la Polynésie française et l'État.

2. L'indemnisation des victimes des essais nucléaires

L'article 113 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer (dite loi EROM) et portant autres dispositions en matière sociale et économique a modifié le régime d'indemnisation des essais nucléaires dans un sens plus favorable aux victimes, conformément à l'engagement du Président de la République, M. François Hollande. Ont été précisées les modalités d'instruction des demandes d'indemnisation par le comité des victimes des essais nucléaires (CIVEN).

Le seuil permettant de déterminer dans quelle mesure le risque attribuable aux essais nucléaire pouvait être considéré comme négligeable au regard de la nature de la maladie et des conditions d'exposition de l'intéressé a été redéfini : le CIVEN peut désormais considérer comme négligeable une probabilité de causalité inférieure à 0,3 % au regard d'une méthodologie que lui-même détermine, en s'appuyant sur celles recommandées par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Le CIVEN peut prendre également en considération tout élément permettant l'ouverture du droit à l'indemnisation.

Le risque peut être considéré comme négligeable dans certains cas où les mesures de surveillance étaient insuffisantes et en l'absence de données relatives à la situation de personnes se trouvant dans des situations comparables à celle du demandeur.

Enfin, cet article permet au CIVEN de réexaminer les demandes rejetées antérieurement à cette loi et susceptibles d'être indemnisées à la faveur de cette modification. Il ouvre aussi la possibilité aux demandeurs de réintroduire une demande s'il s'avère qu'ils peuvent bénéficier de la modification introduite par la loi précitée du 28 février 2017.

Par cette disposition, il s'agissait de corriger les erreurs du passé et faire en sorte que nos concitoyens polynésiens, qui mènent ce combat depuis très longtemps, puissent être entendus. Votre rapporteur estime que nous ne pouvons que nous en réjouir.

H. SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON : DES INTERROGATIONS SUR UNE ÉVOLUTION INSTITUTIONNELLE

La collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon est une collectivité d'outre-mer dont le statut a été fixé par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.

Elle exerce les compétences dévolues aux départements et aux régions, à l'exception de certaines d'entre elles énumérées à l'article L.O. 6414-1 du code général des collectivités territoriales 11 ( * ) . Elle détient par ailleurs la compétence en matière de fiscalité, de régime douanier, de droits de l'urbanisme, de construction et d'habitat, ainsi que celle de créer et organiser ses services et ses établissements publics.

Le schéma institutionnel de Saint-Pierre-et-Miquelon est identique à celui retenu à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy.

Le conseil territorial , assemblée délibérante de la collectivité, se compose de 19 membres (15 pour Saint-Pierre et 4 pour Miquelon-Langlade). Ses règles d'organisation et de fonctionnement reprennent les dispositions du droit commun applicables à un conseil départemental. Son président préside également le conseil exécutif et sa responsabilité peut être mise en cause par le vote d'une motion de défiance du conseil territorial.

La collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon comprend deux communes, la commune de Saint-Pierre et celle de Miquelon-Langlade, soumises au régime municipal de droit commun. Ainsi, sur un territoire limité, sont compétentes trois collectivités territoriales : la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon et les communes de Saint-Pierre et de Miquelon-Langlade.

Depuis 2005, quatre rapports successifs ont mis en évidence l'existence de difficultés institutionnelles dans l'exercice de certaines compétences auxquelles l'évolution statutaire de 2007 ne semble pas avoir mis fin.

Un rapport d'information de nos anciens collègues Christian Cointat et Bernard Frimat 12 ( * ) , dans le cadre d'une mission effectuée par votre commission, formulait plusieurs pistes d'évolution sur cette question, parmi lesquelles :

- la transformation du conseil territorial en un organe intercommunal, émanant des deux communes ;

- une meilleure répartition des compétences fiscales par le biais d'un fonds intercommunal de péréquation, permettant aux communes d'assurer l'exercice de leurs compétences ;

- une nouvelle répartition des compétences normatives, permettant un rééquilibrage en faveur des communes.

En décembre 2015, un nouveau rapport a été remis à la ministre des outre-mer par M. Laurent Olléon, conseiller d'État, tendant à dresser un état des lieux des difficultés soulevées par les incertitudes législatives et réglementaires entourant le périmètre des compétences des collectivités territoriales et de l'État.

À la suite de ces travaux, la proposition d'une consultation des électeurs a été faite au Président de la République par la ministre des outre-mer, Mme George Pau-Langevin, en conseil des ministres, le 19 juillet 2016. Le Gouvernement envisageait de proposer la mise en place d'un conseil territorial directement issu des deux communes. Le scrutin, qui devait être organisé le 18 septembre 2016, a cependant été suspendu, à défaut d'un accord entre les élus sur le schéma institutionnel qui devait être proposé au vote.

Selon les éléments recueillis par votre rapporteur, en l'absence de demande locale, le Gouvernement n'envisagerait pas à l'heure actuelle d'engager une modification du statut de la collectivité.

I. SAINT-BARTHÉLEMY : DES QUESTIONS INSTITUTIONNELLES SATISFAITES, UNE ÎLE À RECONSTRUIRE

Avec une population de 9 427 habitants, Saint-Barthélemy présente un PIB/habitant de 35 700 euros et un taux de chômage très faible, ne représentant que 4,3 % de la population active.

Le statut de Saint-Barthélemy est fixé par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer. La collectivité exerce les compétences anciennement exercées par la commune, le département et la région de Guadeloupe ainsi que celles spécifiquement attribuées par le législateur organique. Sous réserve des adaptations prévues par le pouvoir législatif ou règlementaire, les lois et règlements s'appliquent de plein droit à Saint-Barthélemy, à l'exception des règles en matière de droit d'asile et d'entrée et de séjour des étrangers.

Sur le modèle du schéma institutionnel de Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy dispose d'une assemblée délibérante appelée conseil territorial , composé de dix-neuf membres élus pour cinq ans au scrutin de liste à la représentation proportionnelle au sein d'une circonscription unique. La liste arrivée en tête obtient un tiers des sièges, ce qui assure une majorité stable au sein de la collectivité.

Particularité de cette collectivité, le conseil territorial élit en son sein un conseil exécutif , lui-même composé de sept membres : le président, quatre vice-présidents et deux autres membres. Après l'élection du président, les autres membres sont élus par le conseil territorial. Sous réserve des compétences propres du président du conseil territorial, ce conseil est l'organe exécutif dont le fonctionnement est collégial. Il comprend les différentes composantes représentées au sein du conseil territorial.

Ce schéma institutionnel est complété par un conseil économique, social et culturel qui assiste à titre consultatif le conseil territorial. Ses membres sont désignés pour cinq ans pour représenter les groupements professionnels, les syndicats, les organismes et les associations qui concourent à la vie économique, sociale ou culturelle de Saint-Barthélemy ainsi que les associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de l'environnement. Il comprend également des personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence en matière d'environnement et de développement durable. Il est notamment consulté sur la préparation du plan d'aménagement et de développement durable de la collectivité, sur les orientations générales de son projet de budget ainsi que sur les projets de délibération ayant un caractère économique, social ou culturel. Il peut donner son avis de sa propre initiative ou à la demande du représentant de l'État.

Le conseil territorial de Saint-Barthélemy a, dans un avis du 20 décembre 2013, proposé d'apporter plusieurs aménagements à son statut issu de la loi organique du 21 février 2007. Ces modifications statutaires ont été reprises dans une proposition de loi organique de notre collègue Michel Magras qui a donné lieu à la loi organique n° 2015-1485 du 17 novembre 2015 portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy.

Celle-ci a modifié le statut de la collectivité, notamment en permettant :

- le transfert à la collectivité de la compétence « location de véhicule terrestre à moteur » et « carte et titre de navigation des navires de plaisance à usage personnel non soumis à francisation » ;

- la possibilité, pour le président du conseil territorial, d'être chargé pour la durée de son mandat d'intenter au nom de la collectivité les actions en justice ou de défendre la collectivité dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil territorial ;

- des aménagements du fonctionnement institutionnel de la collectivité visant notamment à clarifier le régime de convocation, d'information et de consultation du conseil territorial et du conseil économique, social et culturel.

Ces nouvelles dispositions ont satisfait pour l'essentiel les demandes exprimées par la collectivité en matière d'évolution institutionnelle.

La question institutionnelle est désormais passée au second plan en raison des destructions occasionnées sur l'île par l'ouragan Irma en septembre dernier.

J. SAINT-MARTIN : LA QUESTION D'UNE ÉVOLUTION STATUTAIRE PASSÉE AU SECOND PLAN EN RAISON DE LA NÉCESSAIRE RECONSTRUCTION DE L'ÎLE

Comptant une population de 35 000 habitants et un PIB de 544 millions d'euros, Saint-Martin est un territoire ultramarin distant de 6 727 kilomètres de l'Hexagone.

La collectivité de Saint-Martin est une collectivité d'outre-mer régie par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer .

Conformément à l'article 18 de la loi organique précitée du 21 février 2007, le schéma institutionnel de Saint-Martin est proche de celui retenu pour Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon : il repose sur un triptyque formé par le conseil territorial , le conseil exécutif et le conseil économique, social et culturel .

Assemblée délibérante de la collectivité, le conseil territorial est composé de vingt-trois membres, élus au suffrage universel direct, au scrutin de liste à deux tours pour cinq ans. Ses règles d'organisation et de fonctionnement reprennent les dispositions du droit commun applicables au conseil départemental. Son président est élu par les conseillers en leur sein lors de la réunion de droit qui suit chaque renouvellement. Il préside le conseil exécutif et sa responsabilité peut être mise en cause par le vote d'une motion de défiance du conseil territorial. Le conseil territorial exerce les fonctions et responsabilités traditionnellement dévolues aux organes délibérants des collectivités territoriales et collectivités d'outre-mer. Ainsi, il règle par ses délibérations les affaires de la collectivité, assure le contrôle de l'action des membres du conseil exécutif qui sont élus en son sein.

Comparable à la commission permanente d'un conseil départemental ou régional, le conseil exécutif est l'instance dirigeante de la collectivité, chargée d'assurer son fonctionnement. Il compte sept membres : le président du conseil territorial, qui le préside ; quatre vice-présidents ; deux autres conseillers territoriaux. Ses membres sont élus par l'assemblée délibérante. Il appartient ainsi au conseil exécutif d'arrêter les projets de délibération à soumettre au conseil territorial ; de prendre les règlements nécessaires à la mise en oeuvre des délibérations, sur proposition du président du conseil territorial, d'exercer les compétences qui lui sont déléguées par le conseil territorial, enfin, de délibérer sur des décisions individuelles en certaines matières 13 ( * ) .

En sa qualité d'organe exécutif de la collectivité et de représentant de celle-ci, le président du conseil territorial dispose de compétences propres : par exemple, la préparation de l'exécution des délibérations du conseil territorial et du conseil exécutif ; la responsabilité, sous réserve des compétences du conseil exécutif, de l'administration de la collectivité ; la gestion du domaine de la collectivité et l'exercice des pouvoirs de police afférents ; l'ordonnancement à titre principal des dépenses de la collectivité et la prescription de l'exécution des recettes ; la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés de travaux, de fournitures et de services qui peuvent être passés sans formalités préalables en raison de leur montant, par délégation du conseil territorial ; l'exercice des pouvoirs de police propres à la collectivité de Saint-Martin, sous le contrôle du représentant administratif de l'État ; enfin, l'engagement d'actions et la défense de la collectivité devant les juridictions, en vertu d'une délibération du conseil exécutif.

Enfin, le conseil économique, social et culturel (CESC) représente une innovation dans le paysage institutionnel de l'île. Il est composé de représentants des groupements professionnels, des syndicats, des organismes et des associations qui concourent à la vie économique et sociale de Saint-Martin, ainsi que d'associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de l'environnement et de personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence en matière d'environnement et de développement durable. Les conseillers sont désignés pour cinq ans par les organisations représentées au sein du CESC ou par le représentant de l'État, à raison de leur importance respective dans la vie économique, sociale et culturelle de l'île. Exerçant un rôle de réflexion, d'évaluation et éventuellement de conseil, il est consulté sur la répartition et l'utilisation des crédits de l'État destinés à des investissements intéressant la collectivité, la préparation du plan d'aménagement et de développement durable de Saint-Martin et les orientations générales du projet de budget de la collectivité. Il peut également, à son initiative, donner un avis sur tout projet ou proposition de délibération en matière économique, sociale ou culturelle.
Le représentant de l'État peut en outre le saisir pour avis.

Nos anciens collègues députés René Dosière et Daniel Gibbs 14 ( * ) estimaient en juillet 2015 que le statut de 2007 semble « garantir durablement la stabilité des institutions de la collectivité et la continuité de son action . » « D'un strict point de vue juridique, la collectivité ne s'est jamais trouvée dans l'impossibilité de prendre les décisions lui incombant ou d'honorer les obligations que lui assignent lois et règlements. »

Toutefois, ils relevaient par ailleurs que si le statut de Saint-Martin a, depuis 2007, favorisé le renouvellement des différentes instances sans heurt, il n'a pas pour autant contribué à la formation, dans la durée, d'une équipe soudée sous l'autorité de son président. Le fonctionnement du conseil territorial est tributaire de la solidité de sa majorité et peut être également affecté par la situation personnelle de ses membres, en particulier en matière d'inéligibilités qui a touché deux de ses présidents en 2008 et 2013. Et nos anciens collègues de conclure qu'il s'agissait là « d'une fragilité qui apparaît nuisible à la continuité et à la cohérence de l'action publique ».

C'est pourquoi ils ont proposé plusieurs modifications du statut de 2007 afin de favoriser une gouvernance de la collectivité plus cohérente. Ils ont notamment proposé de confier au président du conseil territorial le pouvoir de désignation des membres du conseil exécutif et de distinguer la présidence du conseil territorial de celle du conseil exécutif.

Néanmoins, les destructions causées par l'ouragan Irma en septembre 2017 et la nécessaire reconstruction de l'île ont relégué les questions institutionnelles au second plan. 85 % des maisons ont été détruites ou endommagées et 10 000 personnes, soit 65 % de la population, ont été recensées comme étant sans toit.

K. WALLIS ET FUTUNA : UN STATU QUO INSTITUTIONNEL ANCIEN

Le « territoire des îles Wallis-et-Futuna » est une collectivité d'outre-mer dotée d'une organisation atypique, définie par la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961, qui intègre les structures coutumières au sein des institutions républicaines. L'État y est représenté par un administrateur supérieur qui exerce également les fonctions de chef de territoire et dont les prérogatives sont définies aux articles 8 et 9 de la loi du 29 juillet 1961 précitée.

Le chef de territoire préside également un conseil territorial qui l'assiste pour l'administration du territoire, et notamment pour l'examen de tous les projets de délibération qui doivent être soumis à l'assemblée territoriale. Ce conseil territorial est composé de l'administrateur supérieur, des trois chefs traditionnels (rois) et de trois personnalités nommées par l'administrateur supérieur après avis de l'assemblée territoriale.

L' assemblée territoriale est, quant à elle, composée de vingt membres élus pour cinq ans au scrutin de liste (sans panachage ou liste incomplète) à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne. Il existe cinq circonscriptions électorales (trois à Wallis, deux à Futuna).

Trois conseils de circonscription, un à Wallis (royaume d'Uvea), deux à Futuna (royaumes d'Alo et de Sigave) sont élus dans les conditions prévues par la coutume. Les conseils de circonscription délibèrent sur tous les projets préparés par le chef de circonscription (à Wallis) et le délégué de l'administrateur supérieur (à Futuna), représentants directs de l'administrateur supérieur, notamment sur le budget de la circonscription.

L'institution communale n'existe pas à Wallis-et-Futuna. Les circonscriptions territoriales assument les compétences des communes, notamment en matière de tenue de l'état civil ou d'organisation des opérations électorales.

En 2012, le Président de la République M. François Hollande a souhaité « proposer aux élus et aux autorités traditionnelles de réfléchir à une modernisation du statut de l'archipel dont la décision appartiendra à la population qui sera accompagnée et informée ».

Depuis la loi constitutionnelle du 28 mars 2003, le régime constitutionnel de Wallis-et-Futuna a été modifié : le territoie - dont l'appellation officielle demeure « territoire des îles Wallis et Futuna » - est devenu une collectivité d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution et soumise au principe de spécialité législative.

Bien qu'adopté en 1961, le statut de la collectivité se fonde sur des équilibres et des compétences issus de l'organisation des territoires d'outre-mer de la IV ème République. En raison de la modernisation de l'environnement économique et social, il devient de plus en plus difficile d'assurer la correspondance entre les anciennes désignations de compétences et les nouvelles.

Dans le respect du choix qui relève des populations concernées, une actualisation des dispositions statutaires apparaît donc souhaitable, dans le cadre du nouveau contexte constitutionnel, afin que Wallis-et-Futuna puisse bénéficier d'un statut moderne adapté aux évolutions juridiques, sociales, économiques et environnementales des collectivités territoriales.

Cependant, une telle réforme ne peut aboutir sans l'accord des autorités coutumières et la garantie de la préservation du rôle de la coutume, élément indispensable à un consensus. À cet égard, dans son discours prononcé le 22 février 2016 devant l'assemblée territoriale, le Président de la République a annoncé que si les autorités locales en formulaient la demande, l'État serait prêt à accepter une nouvelle étape vers la décentralisation. De même, l'État serait prêt à associer la collectivité à la représentation de la France dans le Pacifique. Toutefois, il a souligné qu'il appartenait aux autorités locales de choisir le bon équilibre entre les pouvoirs de la coutume et les pouvoirs des institutions politiques.

À défaut de demande formulée par les autorités locales, il peut néanmoins être envisagé une nécessaire clarification de la répartition des compétences entre l'État et la collectivité.

La collectivité connaît une instabilité coutumière depuis plusieurs années. L'ensemble des chefs traditionnels Hau et Sau (rois) de Wallis et de Futuna a été renouvelé en 2016 :

- le roi de Wallis ( Lavelua ), Patalione Aisake Kanimoa, depuis le 3 juin 2016 (17 avril 2016 15 ( * ) ) ;

- le roi du royaume futunien d'Alo ( Tuigaifo ), Filipo Katoa depuis le 15 mai 2016 ;

- et le roi du royaume futunien de Sigave ( Tuisigave ), Eufenio Takala, depuis le 5 mars 2016.

Le royaume d'Uvea, divisé en trois districts coutumiers (Hahake, Hihifo et Mu'a), connaît une crise coutumière depuis le début des années 2000 et l'apparition de deux camps opposés, les « conservateurs » et les « rénovateurs ».

Cette opposition conduira à la destitution du Lavelua Kapeliele Faupala en septembre 2014 et à une vacance du titre coutumier, jusqu'à ce que les familles de la noblesse ( aliki) pouvant prétendre au titre coutumier trouvent un consensus pour la désignation d'un successeur en avril 2016. Une délibération du conseil de la circonscription d'Uvea a ainsi pu constater la désignation de Patalione Aisake Kanimoa en qualité de chef traditionnel (Hau) du royaume d'Uvea.

Cependant, une autre délibération du conseil de la circonscription d'Uvea a, de manière concurrente, constater également l'intronisation de Tominiko Halagahu au titre de Lavelua .

Ne pouvant s'immiscer dans les affaires coutumières, l'État a, dans un premier temps, demandé aux parties concernées de régler le différend. Puis, en l'absence de règlement, le chef de territoire a été contraint, pour satisfaire à son obligation de publication des délibérations, de constater que l'une des délibérations avait été prise par des autorités incompétentes puisque destituées. Il a donc été procédé à la publication de la seule délibération valide, celle désignant Patalione Aisake Kanimoa.

Tominiko Halagahu qui a contesté ce constat, se positionne désormais avec les membres de sa chefferie comme une autorité coutumière concurrente qui n'a cependant pas accès aux institutions.

Cette situation illustre l'instabilité coutumière qui tend à fragiliser l'autorité de la coutume à Wallis, mais également à Futuna.

L. LES TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES : UN ATOUT MAJEUR POUR LA RECHERCHE FRANÇAISE

Le territoire des Terres Australes et Antarctiques Françaises est actuellement composé de cinq districts : l'archipel Crozet, les îles Kerguelen, les îles Éparses de l'océan Indien, les îles Saint-Paul et Nouvelle-Amsterdam et La Terre-Adélie. L'archipel Crozet, les îles Kerguelen et les îles Saint-Paul et Nouvelle-Amsterdam forment aujourd'hui la plus grande réserve naturelle de France.

Source : site de la collectivité des terres australes et antarctiques françaises ( http://www.taaf.fr/Presentation-generale-des-TAAF )

Aucun district n'a de population permanente. La France y assure néanmoins une présence humaine continue en matière logistique, scientifique et militaire, grâce à du personnel relevé régulièrement. En effet, les TAAF accueillent de nombreuses activités de recherche portant notamment sur les sciences de la vie et les sciences de l'univers. Elles sont le lieu d'hébergement d'observatoires divers (sismologie, magnétisme, ionosphère, chimie atmosphérique, ...). Météo France y est également présent dans chaque district. L'intense activité scientifique de ces territoires est complétée par la présence d'installations du Centre national d'études spatiales (CNES) à Kerguelen et du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) à Crozet, Kerguelen et en Terre-Adélie.

Source : site de la collectivité des terres australes et antarctiques françaises
( http://www.taaf.fr/Presentation-generale-des-TAAF ).

Notre ancien collègue Cristian Cointat relevait en 2011 que « Plusieurs de ces programmes de recherche sont indispensables à la gestion de la réserve naturelle des Terres australes françaises, créée en 2006 et dont les TAAF sont l'organisme gestionnaire. » Ces programmes de recherches ont une finalité conservatoire (suivi de population, veille sur l'introduction d'espèces invasives, validation scientifique des actions conservatoires...).

Les TAAF accueillent chaque année plus de 225 chercheurs français ou étrangers pour une soixantaine de programmes de recherches.

*

* *

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la mission Outre-mer inscrits au projet de loi de finances pour 2018.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère des Outre-mer - Direction générale des Outre-mer (DGOM)

M. Charles Giusti , adjoint au directeur général

Mme Corinne Minot , sous-directrice de l'évaluation, de la prospective et de la dépense de l'État

Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM)

Mme Marie-Anne Poussin-Delmas , présidente

M. Philippe La Cognata , directeur

Mme Véronique Bensaid-Cohen , conseillère parlementaire auprès du Gouverneur de la Banque de France

Association des communes et collectivités d'Outre-mer (ACCD'OM)

Mme Sophie Charles , présidente

M. Lilian Malet , délégué général


* 1 Le compte rendu de cette réunion est consultable à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/lois.html .

* 2 Fonds de concours : ils sont constitués par des fonds à caractère non fiscal versés pour concourir à des dépenses d'intérêt public et par les produits de legs et donations attribués à l'État. Dans ce dispositif, la partie versante est une personne morale ou physique distincte de l'État : collectivité publique étrangère, collectivité territoriale, établissement public, organisme ou particulier.

* 3 Attributions de produits : elles visent à recueillir les recettes tirées de la rémunération de prestations régulièrement fournies par un service de l'État.

* 4 Loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d'actualisation du droit des outre-mer ; Loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.

* 5 Dans un premier temps, la date d'installation des nouvelles institutions locales, initialement fixée en mars 2014, a été repoussée par la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral au mois de mars 2015, comme pour le renouvellement général des conseils régionaux. Elle a été repoussée, une deuxième fois, au mois de décembre 2015, par l'article 10 de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

* 6 « Services publics, vie chère, emploi des jeunes : La Réunion à la croisée des chemins », rapport d'information n° 676 (2011-2012) de MM. Jean-Pierre Sueur, Christian Cointat et Félix Desplan, fait au nom de la commission des lois. Le rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/notice-rapport/2011/r11-676-notice.html.

* 7 Le plan Mayotte 2025, issu d'une réflexion collective entre l'État, les élus locaux et des représentants de la société civile, est un document stratégique fixant les priorités pour le développement de l'île, organisées autour de six axes en faveur de l'emploi et de la croissance.

* 8 Selon les résultats du dernier recensement effectué en 2012.

* 9 Par exemple, le transfert à la Nouvelle-Calédonie des compétences jusqu'alors attribuées aux provinces en matière de définition des normes de construction.

* 10 Renforcement de la transparence du processus de prise de décision, du régime des incompatibilités et inéligibilités et des garanties des élus.

* 11 Comme par exemple la police de la circulation sur le domaine de la collectivité, le financement des moyens des services d'incendie et de secours, etc.

* 12 « Saint-Pierre-et-Miquelon : Trois préfets plus tard, penser l'avenir pour éviter le naufrage », rapport d'information n° 308 (2010-2011) de MM. Christian Cointat et Bernard Frimat, fait au nom de la commission des lois. Le rapport est consultable à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/notice-rapport/2010/r10-308-notice.html.

* 13 Autorisation de travail des étrangers ; autorisation d'utilisation ou d'occupation du sol, nomination aux emplois fonctionnels de la collectivité ; exercice du droit de préemption ; agréments et décisions desquels dépend le bénéfice d'un avantage prévu par la réglementation fiscale de la collectivité.

* 14 Rapport d'information n° 2128 (Quatorzième législature) de MM. René Dosière et Daniel Gibbes sur la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin. Le rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i2128.asp#P391_41572.

* 15 Date du constat par les autorités coutumières.

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