B. DES PERTES DE RECETTES CONSÉQUENTES

1. La décote prévue par la loi dite « Duflot »

La loi du 18 janvier 2013 15 ( * ) , dite « loi Duflot » a introduit la possibilité d'appliquer une décote pouvant aller jusqu'à 100% de la valeur vénale du prix des terrains cédés par l'État et ses établissements publics lorsque ces terrains sont affectés à la construction de logements dont une partie au moins est constituée de logements locatifs sociaux. Cette loi prévoit également, au profit de l'administration qui subit cette décote, une possibilité de réservation, à titre gratuit, d'une partie de ces logements sociaux (plafonnée à 10 %). Ces dispositions figurent respectivement aux I, II et V de l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

Les moins-values liées à cette décote se sont élevées à 85 M€ depuis la mise en oeuvre de la loi « Duflot », avec des taux de décote compris entre 27 % et 100 % (voir tableau ci-après).

Ce montant inclut 57 M€ de décote estimée , dans le cadre de la vente d'une partie de l'Ilot Saint-Germain à Paris qui doit permettre, en contrepartie, la réservation de 50 logements sur 250 pour le personnel militaire.

Cette cession d'une fraction de l'Ilot Saint-Germain à la régie immobilière de la ville de Paris a été réalisée le 31 mai 2018 pour un montant de 29 millions d'euros après application de la décote dite « Duflot » à hauteur de 69% de la valeur du bien .

Vos rapporteurs regrettent qu'un tel taux de décote n'ait pas conduit, à tout le moins, à la réservation de davantage de logements en faveur des militaires. Pour la défense, les conditions de cession de ce bien exceptionnel, au coeur de Paris, ne sont pas satisfaisantes .

Opérations réalisées en application du dispositif de décote de la loi dite « Duflot »

Année

Localisation de l'emprise

Nom - Adresse de l'emprise

Valeur vénale

Produit de cession

% de la décote

Montant de la décote

2014

BORDEAUX

59 rue Joseph Brunet

376 200 €

148 000 €

60%

226 200 €

NANTES

Caserne Mellinet

19 426 954 €

6 300 000 €

67%

13 126 954 €

PAMANDZI

Jardins de Mayotte

1 125 000 €

0 €

100%

1 125 000 €

2015

RODEZ

Villa Paraire

106 786 €

66 390 €

38%

40 396 €

MARSEILLE 04

Ex DIRSEA, 4 rue docteur Acquaviva

920 000 €

700 000 €

27%

220 000 €

2016

ROQUEBRUNE CAP MARTIN

Av François de Monléon

30 610 450 €

21 427 315 €

30%

9 183 135 €

TOUL

37/39 rue P. Keller

145 000 €

60 000 €

59%

85 000 €

KOUROU

Allée des étoiles

909 800 €

636 860 €

30%

272 940 €

2017

MARCOUSSIS

Le Chêne Rond

2 207 600 €

717 000 €

68%

1 490 600 €

ANGERS

Rue Général Bizot

340 000 €

117 000 €

41%

223 000 €

2018

DIJON

7 Place Président Wilson

934 962 €

336 017 €

64%

598 945 €

LA TRONCHE

24 avenue du maquis du Grésivaudan

4 665 031 €

2 271 121 €

51%

2 393 910 €

PARIS 07

10 rue Saint Dominique

85 720 000 €

29 000 000 €

69%

56 720 000 €

TOTAL

147 487 783 €

61 779 703 €

85 706 080 €

Source : réponses au questionnaire de vos rapporteurs pour avis

2. Le mécanisme introduit par le Sénat dans la LPM

À l'initiative de votre commission, la loi du 28 juillet 2015 16 ( * ) actualisant la programmation militaire avait limité le taux de décote à 30% pour les terrains occupés par le ministère de la défense. Cette disposition, fruit d'un accord en CMP avec l'Assemblée nationale, a toutefois été, par la suite, abrogée dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2016.

À l'initiative du Sénat, l'article 47 de la LPM 2019-2025 dispose :

« Jusqu'au 31 décembre 2025, la décote [...] n'est applicable aux cessions de terrains occupés par le ministère des armées et situés dans des zones tendues, en particulier l'Île-de-France et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, que lorsque ces terrains, bâtis ou non, sont destinés à la réalisation de programmes de logements sociaux réservés au maximum aux trois quarts aux agents de ce ministère, à la demande de ce dernier. »

Le Sénat a souhaité, par cet apport à la LPM , que les armées puissent bénéficier de leurs recettes de cessions, ou, à défaut, d'un nombre conséquent de logements pour les militaires .

Cette disposition donne la possibilité au ministère des armées de demander la réservation non pas de 10% mais des trois quarts des logements réalisés dans ce type d'opération.

Le dispositif dérogatoire ainsi introduit est prévu à titre temporaire pendant la durée de la programmation. Il se justifie par la situation particulière du ministère des armées au regard de la question du logement de ses agents et de leur mobilité, dans un contexte où ils sont sur-sollicités et déployés y compris sur le territoire national.

Vos rapporteurs souhaitent vivement que cette disposition permette, à l'avenir, de faire beaucoup mieux que ce qui a été fait dans le cadre de la cession d'une fraction de l'Ilot Saint-Germain à la Régie immobilière de la ville de Paris, dans l'hypothèse où la décote serait à nouveau appliquée dans le cadre de cessions du ministère des armées.


* 15 Loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social.

* 16 Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

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