B. LES CRÉDITS EN FAVEUR DE L'ALTERNANCE ET DES QUALIFICATIONS

1. La montée en charge de la réforme du financement de l'apprentissage

Les crédits de l'action 2 « Amélioration de l'insertion dans l'emploi par l'adaptation des qualifications et la reconnaissance des compétences »s progresseraient de plus de 368 millions d'euros pour s'établir à 1,39 milliard d'euros (+ 36 %).

Cette progression s'explique essentiellement par la montée en charge de la réforme de l'apprentissage prévue par la loi du 5 septembre 2018. En effet, alors que l'aide unique aux employeurs d'apprentis représentait 922,76 millions d'euros en autorisations d'engagement mais seulement 172,33 millions d'euros en crédits de paiement en 2019, le PAP pour 2020 prévoit 912,6 millions d'euros en AE et 661,72 millions d'euros en CP.

À l'inverse l'aide aux TPE recrutant un jeune apprenti est en voie d'extinction et représenterait 1,35 million d'euros en 2020 contre 192,7 millions d'euros en 2019.

Enfin, les exonérations de cotisations sociales en faveur de l'apprentissage représenteraient une dépense de 589,52 millions d'euros en 2020 contre 467,74 millions d'euros en 2019.

2. Une stabilité des crédits en faveur des opérateurs

Dans un contexte de restructuration de cet opérateur, la subvention pour charges de service public versée à l'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) serait maintenue au même niveau qu'en 2018 et en 2019, soit 110 millions d'euros.

Le Centre pour le développement de l'information sur la formation permanente (Centre Inffo) serait elle aussi maintenue, à 4,1 millions d'euros.

C. DES HÉSITATIONS REGRETTABLES DANS LA POLITIQUES DE SOUTIEN À L'EMPLOI

1. Des dispositifs de baisse du coût du travail finalement maintenus

Selon les documents annexés au projet de loi de finances, les crédits dédiés à la baisse du coût du travail devaient s'élever à 2,8 milliards d'euros, soit une baisse de 110,8 millions d'euros (- 4 %) par rapport à 2019. Cette baisse s'expliquait largement par les économies prévues au titre du recentrage, par l'article 79 du PLF, des dispositifs d'exonération en faveur des services d'aide à domicile employés par un public fragile, prévu.

Préalablement au dépôt du texte sur le bureau de l'Assemblée nationale, le Gouvernement a annoncé que cette mesure serait supprimée au cours de la procédure parlementaire. Ce revirement tardif n'a pas permis l'actualisation des documents budgétaires. Si votre rapporteur se félicite de la suppression de l'article 79, il note que les hésitations du Gouvernement nuisent à la sincérité des documents soumis au Parlement, même si ce n'est que marginalement.

Un amendement du Gouvernement a été adopté par l'Assemblée nationale afin de tirer les conséquences de la suppression de cet article.

L'ajustement des crédits demandés par le Gouvernement en cours d'examen du PLF

Le resserrement des exonérations de cotisations sociales initialement prévu par l'article 79 du PLF devait permettre une économie de 323 millions d'euros pour le budget de l'État mais de seulement 203 millions d'euros pour les finances publiques en raison d'un report sur les allègements généraux

Par ailleurs, au cours de l'examen du PLF par l'Assemblée nationale, le Gouvernement a décidé de reporter l'entrée en vigueur du décret prévu au titre de la réforme de l'Acre, initialement prévu pour le mois d'octobre 2019 et qui ne serait finalement publié que le 1 er janvier 2020.

Afin de tenir compte de ces décisions, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement majorant les crédits demandés au titre du programme 103 à hauteur de 253 millions d'euros.

2. Un retour en arrière sur l'aide aux créateurs et repreneurs d'entreprise

Les crédits dédiés aux dispositifs en faveur de la promotion de l'activité progresseraient de 220 millions d'euros pour atteindre 770 millions d'euros. Cette progression résulte essentiellement de la forte hausse des crédits dédiés à l'aide aux créateurs et repreneurs d'entreprise (ACRE) 18 ( * ) , qui représentent 95 % des crédits de la sous-action.

Cette aide, qui prend la forme d'une exonération de cotisations sociales, concernait initialement les demandeurs d'emploi indemnisés créant ou reprenant une entreprise et a été progressivement étendu à plusieurs catégories de personnes, dont les bénéficiaires du RSA, les jeunes de 18 à 26 ans et les résidant des QPV.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 19 ( * ) a fait de ce dispositif le vecteur d'une « année blanche » durant laquelle les travailleurs indépendants créant ou reprenant une entreprise sont exonérés de cotisations sociales sur la fraction de revenus inférieure au plafond de la sécurité sociale (40 524 euros en 2019) 20 ( * ) . Cet élargissement de l'ACRE est entré en vigueur le 1 er janvier 2019.

Pour les micro-entrepreneurs, l'exonération est prolongée, de manière dégressive jusqu'à la troisième année 21 ( * ) .

Selon l'étude d'impact du PLFSS pour 2018, l'Acre devait bénéficier, au terme de sa montée en charge, à 350 000 personnes de plus, pour un coût supplémentaire de 320 millions d'euros 22 ( * ) .

La progression du nombre de bénéficiaires de l'ACRE, et donc des dépenses associées, a été nettement supérieure aux anticipations du Gouvernement, notamment en raison de la forte progression du nombre de micro-entreprises. Cette progression traduit, selon le Gouvernement, des effets d'aubaine importants, une partie substantielle des créations de micro-entreprises concernant des activités qui pourraient relever du salariat.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur par la DGEFP, le coût du dispositif atteindrait, sans mesure nouvelle, 893 millions d'euros en 2020 et 1,4 milliard d'euros en 2022.

Face à cette explosion des coûts qu'il n'avait pas prévue, le Gouvernement souhaite resserrer les critères d'éligibilité à l'ACRE.

À cette fin, l'article 80 :

- revient sur l'élargissement opéré par la LFSS pour 2018 et limite, pour les micro-entrepreneurs, le bénéfice de l'ACRE aux publics mentionnés à l'article L. 5141-1 du code du travail 23 ( * ) ;

- supprime la possibilité pour le pouvoir règlementaire d'allonger la durée de l'exonération pour les micro-entrepreneurs ;

- réduit le montant de l'exonération dont bénéficient les micro-entrepreneurs afin de l'aligner sur celle qui est applicable aux autres travailleurs indépendants ;

- étend par ailleurs le bénéfice de l'ACRE aux conjoints collaborateurs des travailleurs indépendants non micro-entrepreneurs.

Ces mesures permettraient de contenir les dépenses liées à l'Acre, qui s'élèveraient, à 743,25 millions d'euros en 2020.

Votre rapporteur s'étonne du manque d'anticipation du Gouvernement. Il n'est en effet pas de bonne politique de modifier chaque année des dispositifs dont l'effet incitatif est conditionné par leur lisibilité et leur stabilité. Au demeurant, le resserrement opéré conduit à ce que l'ACRE soit moins favorable en 2020 qu'elle ne l'était avant son élargissement le 1 er janvier 2019, puisque l'exonération était alors dégressive sur trois ans pour les micro-entrepreneurs.

Il apparaît néanmoins à votre rapporteur que les avantages procurés par le statut de micro-entrepreneur peuvent susciter des effets d'aubaine et attirer des travailleurs vers une forme de travail moins protectrice sur le long terme. Il approuve donc le resserrement proposé par le Gouvernement avec une réserve.

Les micro-entrepreneurs ayant débuté leur activité en 2018 et 2020 pouvaient légitimement s'attendre à bénéficier de l'ACRE pour une durée de trois ans et ont pu intégrer cette attente dans leurs prévisions financières. Supprimer cette aide pourrait donc injustement créer des difficultés pour ces entrepreneurs. En outre, une telle modification du droit pourrait être contraire au principe d'espérance légitime protégé par le droit européen 24 ( * ) ainsi que par la jurisprudence administrative française 25 ( * ) .

Les autres éléments de dépense en faveur de la promotion de l'activité, qui représentent une part marginale des crédits de la sous-action, progresseraient également.

Crédits dédiés à la promotion de l'activité

Crédits demandés

(en millions d'euros)

Évolution en M€

Évolution en %

PLF 2020

PLF 2019

Fonds de cohésion sociale (FCS)

18

17

1

6%

Aide aux créateurs ou repreneurs d'entreprise (ACRE)

743,25

527,55

215,7

41%

Développement des nouvelles formes d'emploi (FNE)

9

5,7

3,3

58%

Total

770,25

550,25

220

40%

Source : PAP, calculs du rapporteur


* 18 Créé en 1979, ce dispositif est compensé à la sécurité sociale par des crédits issus de la mission Travail et emploi depuis 2016.

* 19 Loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 (1).

* 20 Cette exonération porte sur les cotisations patronales et salariales de sécurité sociale à l'exception des cotisations AT-MP - art. 13.

* 21 L'article L. 131-6-4 du code du travail permet l'allongement de l'exonération dans des conditions fixées par décret. Cet allongement est prévu par l'article D. 131-6-2.

* 22 En 2018, l'Acre bénéficiait à 250 000 entrepreneurs pour un coût de 218 millions d'euros.

* 23 Il s'agit notamment des demandeurs d'emploi, des bénéficiaires de l'ASS ou du RSA, des jeunes de 18 à 26 ans et des personnes créant ou reprenant une activité située dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.

* 24 Article 1 er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (CESDH).

* 25 Conseil d'État, décision du 25 octobre 2017, Société Vivendi, N° 403320.

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