III. LA LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE : DES RÉSULTATS ENCORE INSUFFISANTS

Les crédits dédiés à la lutte contre l'immigration irrégulière 31 ( * ) - qui financent notamment les frais d'éloignement des migrants en situation irrégulière et le fonctionnement des centres de rétention administrative - représentent moins de 10 % de la mission « Immigration, asile et intégration ».

Pour l'année 2020, les crédits alloués à cette politique sont en forte baisse : ils s'établissent à 112,74 millions d'euros en AE (- 26,39 % par rapport à 2019) et à 122,48 millions d'euros en CP (- 9,98 %). Renforcés l'an dernier par la loi de finances initiale pour 2019 (+ 86,8 % et + 65,7 %), ils avaient pour objet de financer de nouvelles places de rétention qui sont aujourd'hui en cours de construction et dont les programmes sont donc en voie d'achèvement.

Outre cette mission, trois autres programmes budgétaires participent au contrôle du droit d'entrée et de séjour sur le territoire. Deux d'entre eux sont examinés par notre collègue Henri Leroy dans son avis budgétaire sur la mission « Sécurités » .

Les trois autres programmes participant à la lutte contre l'immigration irrégulière

Le programme 176 « Police nationale » de la mission « Sécurités »

Ce programme comprend les crédits de personnels affectés à la lutte contre l'immigration illégale, dont la direction centrale de la police aux frontières (DCPAF).

Le programme 152 « Gendarmerie nationale » de la même mission « Sécurités »

Ce programme et le précédent comprennent chacun un indicateur et un objectif spécifique de lutte contre les filières d'immigration (nombre de procédures en matière d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d'un étranger).

Le programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail » de la mission « Travail »

Son action 04 est dédiée à la lutte contre le travail illégal, dont seulement une partie relève de l'emploi d'étrangers sans titre de séjour.

A. UNE PRESSION IMPORTANTE DE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE TOUJOURS MAL MESURÉE

Alors que la France fait face à un phénomène d'immigration irrégulière important et persistant, votre rapporteur déplore, cette année encore, l'absence d'effort du Gouvernement pour disposer de données précises concernant le nombre d'étrangers présents en situation irrégulière sur le territoire français .

Difficile à évaluer, le phénomène ne peut actuellement être appréhendé que de façon indirecte à travers plusieurs indicateurs qui révèlent des ordres de grandeurs et des évolutions préoccupants .

L' aide médicale d'État (AME) permet à certains étrangers en situation irrégulière d'avoir un accès gratuit aux soins médicaux et hospitaliers. 318 106 personnes en bénéficiaient au 31 décembre 2018 , soit une hausse de 0,7 % par rapport à l'an passé (315 835 bénéficiaires) et une hausse totale de 50 % par rapport au 31 décembre 2011 . Dans les faits, le nombre d'étrangers en situation irrégulière est probablement nettement supérieur, car cet indicateur ne permet pas de prendre en compte l'immigration irrégulière à caractère transitoire 32 ( * ) .

L'aide médicale d'État (AME) : une prise en charge des étrangers en situation irrégulière dont le coût considérable n'est pas maîtrisé

L'octroi de l'aide médicale d'État 33 ( * ) (AME) est subordonné à deux conditions :

- l'étranger en situation irrégulière doit séjourner en France de manière ininterrompue depuis au moins trois mois ;

- il ne dispose pas de revenus supérieurs au plafond de ressources permettant de bénéficier de la part complémentaire de la couverture maladie universelle (soit 8 723 euros pour une personne seule).

La demande de prise en charge doit être renouvelée chaque année.

De manière subsidiaire, le ministre chargé de l'action sociale peut octroyer l'AME à tout étranger dont l'état de santé le justifie, sans que la condition de résidence lui soit opposée.

Depuis plusieurs années, le nombre de bénéficiaires de l'AME et le coût budgétaire de l'aide connaissent une hausse sensible :

- le nombre de bénéficiaires s'établit aujourd'hui à plus de 315 000 personnes, contre 100 000 à la création du dispositif en 2001 ;

- pour 2019, les crédits destinés à financer l'AME s'élèveront à 934,9 millions d'euros, montant en progression de + 5 % par rapport à la dotation initiale votée en LFI 2018.

Nombre de bénéficiaires de l'aide médicale d'État (AME), au 31 décembre

Source : commission des lois du Sénat, à partir des documents budgétaires

Même s'il faut tempérer le caractère significatif de cet indicateur, car il dépend également des effectifs disponibles et du niveau de mobilisation des forces de l'ordre, on constate également un maintien à un niveau élevé du nombre d'étrangers contrôlés en situation irrégulière sur le territoire : 110 691 personnes interpelées en 2018 (contre 119 635 en 2017).


* 31 Crédits imputés au sein de l'action 03 (« Lutte contre l'immigration irrégulière ») du programme 303 (« Immigration et asile »).

* 32 Notamment parce que l'AME est attribuée sous condition de résidence stable et ininterrompue en France pendant trois mois.

* 33 Prévue aux articles L. 251-1 à L. 254-2 du code de l'action sociale et des familles, son financement relève de l'action 02 « Aide médicale de l'État » du programme 183 « Protection maladie » de la mission « Santé ».

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