B. UNE MOBILISATION TARDIVE MAIS SALUTAIRE À DESTINATION D'UN SECTEUR SPORTIF SÉVEREMENT TOUCHÉ PAR LA CRISE SANITAIRE

Il aura fallu attendre huit mois pour que le Gouvernement prenne la pleine mesure du choc auquel le mouvement sportif a été confronté depuis le déclenchement de la crise sanitaire . Lors de son audition par la commission le 2 novembre 2020, le président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), Denis Masseglia rappelait combien il était désemparé par le peu de considération dont le mouvement sportif faisait l'objet.

Certes, le secteur du sport a pu pleinement bénéficier dès le printemps des dispositions générales mais ces mesures ne tenaient pas compte du caractère particulièrement préjudiciable de la crise sanitaire pour le secteur du sport qui a dû au printemps dernier arrêter complétement ses activités y compris les championnats professionnels de football qui ont été maintenus dans les autres pays européens comparables.

Lors de la présentation de ses conclusions le 17 juin dernier, le groupe de travail « Covid 19 - sport » de la commission de la culture avait pourtant établi que « la crise que connaît le secteur du sport était profonde et durable » et avait par ailleurs constaté qu'à cette date « aucun plan de relance digne de ce nom n'a été présenté et mis en oeuvre ».

Le rapporteur pour avis rappelle que le groupe de travail avait fait plusieurs propositions parmi lesquelles en particulier :

- la mise en place d'un plan global pour soutenir le secteur du sport à la rentrée de septembre 2020 ;

- des aides spécifiques financées par un déplafonnement de la « taxe Buffet » ;

- la création d'un crédit d'impôt dédié aux annonceurs dans le sport ;

- et la mise en place d'un « Pass Sport » pour encourager les 14-20 ans à pratiquer un sport en club.

Au lieu de présenter au printemps dernier un plan global pour le secteur du sport comme cela a été fait pour le secteur de la culture, le Gouvernement a réagi au travers d'annonces successives intervenues avec retard à mesure que la situation du secteur se détériorait .

Une première étape a consisté en la mise en place en juin 2020 d'un fonds de solidarité afin de soutenir les petites associations sportives. Ce fonds, opéré par l'ANS, a été doté d'une enveloppe initiale de 15 M€ financée par redéploiements de crédits de l'agence (8 M€) et du ministère des sports (7 M€). Face à l'épuisement rapide de ces crédits, le ministère a tout d'abord envisagé d'abonder le fonds de 4 M€ avant, finalement, d'opter pour sa reconduction en 2021 à hauteur de 15 M€ également, dont 8,7 M€ seront issus de crédits pris sur l'exercice 2020. Le financement du solde de 6,3 M€ faisait encore l'objet de discussion au moment de la préparation de cet avis.

La présentation du PLF 2021 a constitué une deuxième étape significative avec l'annonce d'une enveloppe de 122 M€ sur deux années qui a été portée à 132 M€ à l'issue de l'examen du budget à l'Assemblée nationale. Cette enveloppe 1 ( * ) issue du plan de relance comprend :

- une aide de 40 M€ afin de financer 2 500 emplois prioritairement pour les jeunes de moins de 25 ans dans les associations sportives locales d'ici 2022 ;

- une dotation de 12 M€ afin de proposer aux jeunes les plus défavorisés (1 500 en 2021 et 1 500 en 2022) un parcours personnalisé vers une qualification en vue d'un emploi dans les métiers du sport ou de l'animation (dispositif SESAME) ;

- des subventions à hauteur de 50 M€ pour permettre aux collectivités territoriales et aux fédérations et associations sportives de conduire des opérations de rénovation énergétique d'équipements sportifs structurants ;

- une aide de 8M€ à la transformation numérique des fédérations sportives ;

- un soutien aux fédérations sportives à hauteur de 21 M€ en 2021 pour financer en urgence des actions de soutien à la reprise sportive des clubs dans le cadre des projets sportifs fédéraux (PSF) ;

- et une dotation de 10 M€ destinée à financer le programme « Savoir rouler à vélo » pour favorise l'autonomie à vélo avant l'entrée au collège.

Le rapporteur pour avis partage le sentiment du mouvement sportif énoncé avant les annonces du Président de la République selon lequel le plan de relance n'était pas équilibré puisque seulement 21 M€ étaient destinés aux clubs et que l'essentiel des crédits était fléché vers l'emploi dans le secteur sportif et la transition écologique.

Afin de répondre aux conséquences du huis-clos dans les enceintes sportives, un premier ajustement a été opéré avec l'annonce de la création d'un « fonds de compensation billetterie » doté de 110 M€ à destination des fédérations, des ligues professionnelles et des organisateurs de manifestations sportives qui ont subi des pertes de recettes de billetterie et de restauration associée entre juillet et décembre 2020. Le rapporteur pour avis aurait souhaité que ce fonds perdure au moins jusqu'à juin 2021 puisqu'il est peu probable qu'un fonctionnement normal soit rétabli d'ici là. Interrogé par le rapporteur pour avis, le ministère des sports a indiqué que le prolongement du fonds de compensation de la billetterie constituait « une hypothèse crédible » qui devrait néanmoins tenir compte de l'évolution de la situation en janvier avec la possibilité annoncée par le Président de la République de prévoir des jauges de 20 à 30 % dans les enceintes sportives. Selon le cabinet de la ministre, il est acquis que le retour à la pleine capacité n'interviendra pas avant l'été 2021 et qu'il faudra continuer à accompagner les acteurs. Chaque club est dans une situation particulière et, en l'absence de soutien, le ministère reconnait que des dépôts de bilan de clubs pourraient intervenir d'ici 2 à 3 mois.

La troisième étape a été marquée par plusieurs annonces faites par le Président de la République le 17 novembre dernier ainsi que la remise en perspective des moyens mobilisés. Le chef de l'État a ainsi confirmé la création du « Pass sport ». Ce dispositif doté de 100 M€ devrait voir le jour en 2021 afin d'aider les publics les plus fragilisés à accéder à des licences sportives mais il devra encore faire l'objet d'une adoption dans un projet de loi de finances rectificative.

Le rapporteur pour avis qui a proposé depuis deux ans, conjointement avec le député Régis Juanico, la création d'un dispositif similaire rappelle qu'il ne trouvera sa pleine mesure que dans une étroite articulation avec les initiatives similaires des nombreuses collectivités territoriales afin d'atteindre un montant d'environ 300 € prenant en charge le coût de la licence mais également la cotisation au club. Il insiste également sur la nécessité de créer un dispositif pérenne et pas seulement conjoncturel, ainsi que sur l'intérêt de viser la classe d'âge des 14/20 ans et pas seulement des publics fragilisés. Le ministère des sports estime qu'un bilan devra être fait à l'issue de la première année d'application afin d'engager dans un second temps des mesures pérennes en faveur de la réduction des inégalités dans l'accès à la pratique sportive.

Le chef de l'État a également indiqué que 5 000 missions de services civiques seraient fléchées vers le sport et que des emplois seraient créés dans les Comités régionaux olympiques et sportifs (CROS) pour accompagner les petits clubs dans l'obtention des aides.

Par ailleurs, afin de répondre à la situation des clubs qui subissent une perte de chiffre d'affaires sans avoir été fermés administrativement, l'État a décidé de leur accorder une exonération de cotisations sociales patronales et une aide au paiement des cotisations égale à 20 % de la masse salariale. Cette enveloppe, évaluée à 105 M€, a été adoptée dans le cadre de l'article 6 ter (11 ème alinéa) 2 ( * ) du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Ces exonérations porteront sur les charges sociales exigibles pour les mois d'octobre, novembre et décembre au titre des pertes subies dans les mois précédents.

Enfin, la création d'un groupe de travail sur le dossier du droit à l'image collective (DIC) des joueurs a été annoncée. Le rapporteur pour avis rappelle que cette disposition a été créée par l'article 17 3 ( * ) de la loi n° 2017-261 du 1er mars 2017 visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs issue d'une initiative sénatoriale prise par notre ancien collègue Dominique Bailly. Or les modalités d'application de ce texte 4 ( * ) ont rendu le dispositif tellement complexe que les clubs ont renoncé à y recourir, renonçant de ce fait à une source de revenus qu'ils avaient pourtant identifiée comme potentiellement importante. Le groupe de travail fera l'objet d'un pilotage commun au ministère des finances et au ministère chargé des sports, ses travaux qui ont débuté fin novembre pourraient examiner également la possibilité de reconnaître un droit individuel à l'image compte tenu des difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre d'un droit collectif.


* 1 Le financement de cette enveloppe relèvera des crédits du plan de relance pour 122 M€ et du produit de la « taxe Buffet » pour 10 M€ selon les indications apportées au rapporteur pour avis par le ministère des sports.

* 2 https://www.senat.fr/leg/pjl20-151.html

* 3 https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000034111794/

* 4 https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGITEXT000037278640/2018-08-04/#LEGITEXT000037278640

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