III. DES PROGRÈS RESTENT À ACCOMPLIR DANS LA PRISE EN COMPTE DES ENJEUX PATRIMONIAUX ET DES ATTENTES LOCALES POUR RENDRE LES PROJETS PLUS ACCEPTABLES

A. MIEUX INTÉGRER LES CONSIDÉRATIONS PATRIMONIALES LORS DE L'ÉLABORATION DES PROJETS D'ÉNERGIE RENOUVELABLE

Sans être forcément le signe d'un changement d'approche du Gouvernement en matière de patrimoine, son choix de ne pas abaisser le niveau des protections patrimoniales démontre qu'il est conscient de l'enjeu que peuvent revêtir l es problématiques patrimoniales pour emporter l'adhésion des populations locales à un projet d'EnR .

À l'heure actuelle, les problèmes d'acceptabilité et d'attractivité
des projets d'EnR constituent des obstacles à leur déploiement au moins aussi grands que la complexité des procédures administratives.

Compte tenu de l'attachement des populations à leur patrimoine et à leur cadre de vie, déroger aux règles de protection du patrimoine serait un élément susceptible d'accroître les résistances à l'encontre des projets au niveau local.

Le développement des EnR, en particulier des éoliennes, est un sujet porteur de fractures territoriales . Il peut faire naître des oppositions entre les zones rurales, où ces projets sont majoritairement installés, et les zones urbaines, où une large part de l'énergie produite y est consommée. Afin de limiter ce risque de fracture, il est essentiel d'améliorer la prise en compte de l'impact des projets d'EnR sur le cadre de vie en amont de la décision .

des Français estiment que les éoliennes dégradent la beauté des campagnes

des Français considèrent qu'elles font perdre aux campagnes leur attractivité

Source : Sondage Opinion Way pour la SPPEF consacré aux Français et aux éoliennes, mars 2022

Les personnes auditionnées se sont accordées sur le fait que la qualité du diagnostic architectural et paysager contenu dans les études d'impact était souvent décevante et ne permettait pas d'appréhender correctement les effets réels des projets. Il n'est pas rare que plusieurs projets soient déployés de manière concomitante sur une même zone sans que leurs effets conjugués ne soient évalués.

Il est regrettable que les services du patrimoine et de l'archéologie soient rarement associés à l'élaboration du projet, c'est-à-dire en amont du dépôt de la demande d'autorisation d'urbanisme . Leur expertise serait pourtant utile dès ce stade pour disposer d'un premier diagnostic et orienter ou adapter la localisation ou l'emprise du projet vers une zone dans laquelle l'impact sur le patrimoine et le cadre de vie serait moindre. Les ABF comme les services régionaux de l'archéologie sont investis d'une mission de conseil qui les rend aptes à répondre, le cas échéant, aux sollicitations des porteurs de projet. L'ABF peut les accompagner même lorsque le lieu d'implantation envisagé est situé hors des espaces protégés au titre du code du patrimoine.

Même s'il rallonge la durée de la phase amont, le renforcement du dialogue à cette étape constitue un gain sur le temps total de la procédure . La phase initiale de diagnostic ne doit donc pas être négligée lors de l'élaboration des projets. Elle est un facteur contribuant à raccourcir ensuite les délais d'instruction de la demande d'autorisation d'urbanisme, à réduire le risque d'un refus ou d'une demande de modification et à limiter les contestations ultérieures.

Sous l'effet des progrès technologiques, les éoliennes ont considérablement évolué au cours de la dernière décennie. Si ces évolutions ont permis d'accroitre significativement la puissance des éoliennes, et donc la quantité d'énergie qu'elles produisent, elles ont aussi des impacts de plus en plus importants sur le patrimoine et les paysages , sans véritable évolution du cadre législatif. Avec l'augmentation de la hauteur des mâts, les éoliennes sont visibles depuis des zones de plus en plus éloignées. Le repowering (remplacement partiel ou total d'une installation par une autre de plus grande puissance pour en augmenter le rendement) peut avoir des effets désastreux sur les paysages, dans la mesure où des projets qui avaient été élaborés intelligemment à une certaine échelle ont un impact tout autre lorsque celle-ci s'accroît.

Pour répondre à ces problématiques, la commission de la culture a souhaité déposer un amendement ( COM-426 ) visant à étendre l'avis conforme de l'ABF aux projets de parcs éoliens terrestres de grande dimension entrant dans le champ de visibilité d'un monument historique ou d'un site patrimonial remarquable dans un périmètre de 10 kilomètres autour de celui-ci . Cet amendement poursuit trois objectifs :

- améliorer le contrôle sur les projets éoliens terrestres ;

- inciter les porteurs de projets à soigner davantage leurs études d'impact ;

- impliquer l'ABF dans l'examen des projets de repowering concernant des installations situées dans l'environnement proche des espaces protégés au titre du code du patrimoine.

Face au développement récent de l'éolien en mer, la commission a également souhaité déposer un amendement ( COM-427 ) pour interdire, à compter des prochains appels d'offres, les projets situés à moins de 40 kilomètres des côtes afin d'en limiter l'impact visuel , conformément aux préconisations de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages dans son avis du 16 juin 2021.

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