II. L'EFFORT FINANCIER EN FAVEUR DE LA DÉFENSE N'EST QU'UN ASPECT PARMI D'AUTRES DE L'INDÉPENDANCE NATIONALE

Le débat sur le niveau de l'effort financier en faveur de la défense est trop souvent réduit à son rapport au produit intérieur brut (PIB), avec l'objectif affiché de 2 % du PIB.

L'article 2 du PLPM 2024-2030 pose ainsi l'objectif « de porter l'effort national de défense, charges de pensions incluses, à hauteur de 2 % du produit intérieur brut entre 2025 et 2027 ».

Cet indicateur a le mérite de faciliter les comparaisons internationales. En 2021, le budget de défense de la France représentait 1,9 % de son produit intérieur brut (PIB), ce qui le classe devant celui de l'Allemagne mais derrière celui du Royaume-Uni et à plus forte raison des principales puissances militaires mondiales (États-Unis, Chine, Russie).

Les principaux budgets de défense dans le monde

(en pourcentage du PIB, prix et taux de change constants 2020)

L'analyse de cet indicateur sur le temps long rend également compte de la diminution de l'effort national en faveur de la défense, dont le budget représentait 7,6 % du PIB de la France en 1953.

Évolution des dépenses de défense (charges de pensions comprises) rapportées au PIB de la France

(en pourcentage du PIB)

Source : commission des finances du Sénat d'après SPIRI Military expenditure database

Néanmoins, l'atteinte imprévue du seuil des 2 % en 2020, année où le PIB s'est fortement contracté du fait de la crise sanitaire, atteste des limites évidentes de cet indicateur.

En tout état de cause, la détermination du bon niveau du budget de la défense ne peut s'apprécier qu'à l'aune de la menace à laquelle un pays donné fait face et de la doctrine d'emploi de l'outil militaire. L'investissement financier consenti en faveur de l'armée française, armée d'emploi régulièrement engagée sur plusieurs théâtres d'opérations, ne saurait revêtir la même signification que celui qui peut être mené dans d'autres pays relevant de cultures stratégiques distinctes.

Le rapporteur pour avis considère, quel que soit le budget de la défense en pourcentage du PIB, qu'il est permis de s'interroger sur l'indépendance réelle d'un pays dont la situation économique et financière est aussi dégradée que celle de la France. Quelques chiffres permettent de le rappeler :

- la France se caractérise en effet par une position extérieure nette13(*) négative de 801,9 milliards d'euros en 2021, soit 30,2 % de son PIB14(*) ;

- en 2022, son déficit commercial sur le marché des biens s'établit à 163,3 milliards d'euros, dont 115,3 milliards d'euros imputables aux produits énergétiques15(*).

- à la fin 2022, l'encours de la dette négociable de l'État s'élevait à 2 278 milliards d'euros, soit 86,2 % du PIB16(*) et, selon l'Agence France Trésor, 50,1 % des titres étaient détenus par des non-résidents. De façon significative, la charge qu'elle représente pour le budget de l'État est en outre supérieure au budget des armées (voir infra).


* 13 Cet indicateur reflète la différence entre la valeur des actifs et celle des passifs vis-à-vis du reste du monde.

* 14 Banque de France, La balance des paiements et la position extérieure de la France, rapport annuel 2021.

* 15 Direction générale du Trésor, rapport annuel 2023 sur le commerce extérieur.

* 16 Cour des comptes, Rapport sur le budget de l'État en 2022, avril 2023.

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