- L'ESSENTIEL
- I. UN BUDGET EN BAISSE SENSIBLE EN 2026
- II. L'AEFE À LA CROISÉE DES
CHEMINS
- A. L'AEFE EST CONFRONTÉE À UN EFFET
DE CISEAUX RÉSULTANT DE LA DIMINUTION DE SA SUBVENTION POUR CHARGES DE
SERVICE PUBLIC ET DE LA HAUSSE DE SES CHARGES
- 1. Une croissance des effectifs
d'élèves qui se maintient mais qui ne permettra pas d'atteindre
l'objectif de doublement d'ici 2030
- 2. Une subvention pour charges de service public
qui connaîtra une nouvelle baisse en 2026
- 3. Une croissance des charges insuffisamment
compensée
- 4. Une dégradation de l'état du parc
immobilier des établissements en gestion directe qui pèse sur
leur compétitivité
- 1. Une croissance des effectifs
d'élèves qui se maintient mais qui ne permettra pas d'atteindre
l'objectif de doublement d'ici 2030
- B. VERS UNE RÉFORME DU MODÈLE
ÉCONOMIQUE DE L'AEFE
- A. L'AEFE EST CONFRONTÉE À UN EFFET
DE CISEAUX RÉSULTANT DE LA DIMINUTION DE SA SUBVENTION POUR CHARGES DE
SERVICE PUBLIC ET DE LA HAUSSE DE SES CHARGES
- III. UNE POLITIQUE D'ACCUEIL DES ÉTUDIANTS
ÉTRANGERS FRAGILISÉE PAR LA DIMINUTION DES BOURSES DANS UN
CONTEXTE DE FORTE CONCURRENCE INTERNATIONALE
- IV. UNE DIMINUTION DE L'ENVELOPPE
DÉDIÉE À L'INSTITUT FRANÇAIS PARIS QUI CONDUIRA
À UNE NOUVELLE REVUE DE SES ACTIONS ET DE SES DÉPENSES EN
2026
- V. UN RÉSEAU CULTUREL GLOBALEMENT
PRÉSERVÉ... POUR L'INSTANT
- A. DES DOTATIONS AUX ÉTABLISSEMENTS À
AUTONOMIE FINANCIÈRE (EAF) STABILISÉES À LEURS NIVEAUX DE
2025
- B. UNE DIMINUTION DES CRÉDITS
DÉDIÉS AUX ÉCHANGES D'EXPERTISE ET SCIENTIFIQUES ET
À CERTAINES ACTIONS MISES EN oeUVRE PAR LE RÉSEAU
- C. UN MAINTIEN DES CRÉDITS CONSACRÉS
AUX ALLIANCES FRANÇAISES ET À LA FONDATION DES ALLIANCES
FRANÇAISES
- A. DES DOTATIONS AUX ÉTABLISSEMENTS À
AUTONOMIE FINANCIÈRE (EAF) STABILISÉES À LEURS NIVEAUX DE
2025
- I. UN BUDGET EN BAISSE SENSIBLE EN 2026
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
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N° 141 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026 |
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Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025 |
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AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission des affaires
étrangères, de la défense |
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TOME II ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT Diplomatie culturelle et d'influence (Programme 185) |
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Par Mme Catherine DUMAS et M. Didier MARIE, Sénatrice et Sénateur |
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(1) Cette commission est composée de : M. Cédric Perrin, président ; MM. Pascal Allizard, Olivier Cadic, Mmes Hélène Conway-Mouret, Catherine Dumas, Michelle Gréaume, MM. André Guiol, Jean-Baptiste Lemoyne, Claude Malhuret, Akli Mellouli, Philippe Paul, Rachid Temal, vice-présidents ; M. François Bonneau, Mme Vivette Lopez, MM. Hugues Saury, Jean Marc Vayssouze-Faure, secrétaires ; M. Étienne Blanc, Mme Valérie Boyer, MM. François-Noël Buffet, Christian Cambon, Mme Marie-Arlette Carlotti, MM. Alain Cazabonne, Olivier Cigolotti, Édouard Courtial, Jérôme Darras, Mme Nicole Duranton, MM. Philippe Folliot, Guillaume Gontard, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Ludovic Haye, Loïc Hervé, Alain Houpert, Patrice Joly, Mmes Gisèle Jourda, Mireille Jouve, MM. Alain Joyandet, Roger Karoutchi, Ronan Le Gleut, Didier Marie, Pierre Médevielle, Thierry Meignen, Jean-Jacques Panunzi, Mme Évelyne Perrot, MM. Stéphane Ravier, Jean Luc Ruelle, Bruno Sido, Mickaël Vallet, Robert Wienie Xowie. |
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Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180 Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026) |
L'ESSENTIEL
Le projet de loi de finances pour 2026 inscrit une baisse significative des crédits du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence », lesquels passeront de 651,7 M€ inscrits en loi de finances initiale pour 2025 à 605,9 M€ en 2026 (- 7 %).
L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), principal opérateur du programme, subira une nouvelle baisse de sa subvention pour charges de service public (- 25 M€). L'effet de ciseaux auquel l'Agence sera confrontée en 2026 avec, d'une part, la hausse de ses charges liées en particulier à l'augmentation du taux employeur de la pension civile des fonctionnaires de quatre points prévue en 2026 et au surcoût induit par la réforme du statut des personnels détachés et, d'autre part, la réduction de ses ressources, pèsera sur sa situation financière et sa capacité d'investissement. Face à la dégradation attendue de sa trésorerie en 2026, l'opérateur envisage d'accroître la participation financière complémentaire versée par les établissements en gestion directe et les établissements conventionnés, et d'accélérer le recouvrement de ses créances. À plus long terme, la soutenabilité financière de l'opérateur nécessitera une réforme de son modèle économique, qui pourrait passer par une augmentation des contributions demandées aux établissements. Les rapporteurs regrettent que la réforme du financement de l'AEFE, dont la nécessité est connue de longue date, intervienne dans l'urgence et sur fond de contrainte budgétaire, conduisant à privilégier des mesures qui se traduiront par un accroissement du coût pour les familles et pourraient avoir des conséquences sur le statut des établissements et des personnels.
Préservée en loi de finances initiale pour 2025, la politique d'accueil des étudiants étrangers sera fortement mise à contribution en 2026, avec une enveloppe consacrée aux bourses en diminution de près de 20 %. Cette coupe budgétaire nuira à l'attractivité de la France dans un contexte de très forte concurrence internationale.
Enfin, l'Institut français verra ses moyens une nouvelle fois réduits (- 1 M€ après une baisse de 1,7 M€ en 2025), entraînant une nouvelle revue de ses actions et de ses dépenses.
Au total, les mesures prévues dans le présent projet de loi de finances fragiliseront notre « soft power » à un moment où les luttes d'influence n'ont jamais été aussi fortes.
Si les crédits du programme devaient être adoptés en l'état, les rapporteurs appellent le Gouvernement à en assurer une exécution « à l'euro près » et, plus largement, à garantir aux services du ministère une meilleure visibilité de gestion, condition indispensable pour une utilisation efficace des ressources.
I. UN BUDGET EN BAISSE SENSIBLE EN 2026
Le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 prévoit une baisse significative des crédits du programme 185, qui passeront de 651,7 M€ à 605,9 M€ en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP), soit une diminution de 45,8 M€ (- 7 %).
Cette baisse intervient alors que l'exercice 2025, déjà affecté par une diminution de crédits de 72 M€, a été marqué par une mesure d'annulation1(*) (18 M€ correspondant au montant de la réserve légale) et deux mesures de surgel (pour un montant cumulé de 13 M€). Afin d'y faire face, il a été enjoint aux postes de suspendre tout engagement budgétaire de bourses dont l'attribution n'avait pas fait l'objet d'une notification écrite aux bénéficiaires avant le 12 août 2025.
Cette décision a conduit à une réduction de plus d'un million d'euros de crédits de bourses, affectant principalement les mobilités de courte durée (séjours scientifiques de haut niveau, formations en français langue étrangère, résidences d'artistes, etc.).
Or, certains de ces programmes peuvent faire l'objet de cofinancements par les partenaires étrangers de la France. De telles décisions, même temporaires, peuvent fragiliser la crédibilité progressivement acquise par notre pays dans le domaine de la coopération culturelle et scientifique.
Aussi, les rapporteurs appellent-ils à une exécution à l'euro près des crédits du programme 185 pour l'exercice 2026 et, plus largement, à une meilleure visibilité en gestion afin de permettre aux postes diplomatiques de planifier et de respecter leurs engagements vis à vis de nos partenaires.
Les rapporteurs appellent à une exécution à l'euro près des crédits du programme 185 pour l'exercice 2026 et, plus largement, à une meilleure visibilité en gestion afin de permettre aux postes diplomatiques de planifier et de respecter leurs engagements vis-à-vis de nos partenaires.
Par ailleurs, le PAP pour 2026 introduit une révision substantielle de la maquette budgétaire du programme avec la création de quatre nouvelles actions :
- l'action 03 « Opérateurs » ;
- l'action 08 « Appui au réseau culturel et de coopération » ;
- l'action 09 « Mobilité étudiante » ;
- et l'action 11 « Crédits centraux ».
Si cette évolution est justifiée dans le PAP par la « volonté d'apporter une meilleure lisibilité dans l'allocation des crédits entre l'administration centrale du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et le réseau culturel et de coopération », ces modifications, qui interviennent dans un contexte de baisse importante des crédits du programme depuis 2025, ne peuvent qu'interroger.
En outre, ces changements de périmètre nuisent à la comparabilité des données entre exercices, les contours des dispositifs devant désormais être reconstitués pour permettre une lecture cohérente de l'évolution des moyens alloués.
Évolution des crédits du programme 185 selon la nouvelle nomenclature budgétaire
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8 |
Réseau culturel et de coopération |
108 850 284 |
103 445 956 |
- 5 404 328 |
-5% |
|
9 |
Bourses de mobilité |
70 072 657 |
56 272 657 |
-13 800 000 |
-20% |
|
10 |
Opérateurs |
446 542 722 |
420 542 722 |
- 26 000 000 |
-6% |
|
11 |
Crédits centraux |
26 279 070 |
25 679 070 |
- 600 000 |
-2% |
|
TOTAL |
651 744 733 |
605 940 405 |
- 45 804 328 |
-7% |
Source : MEAE, réponse au questionnaire des rapporteurs
Les rapporteurs demandent par conséquent que la maquette budgétaire du programme 185 soit stabilisée à compter de l'exercice 2027.
II. L'AEFE À LA CROISÉE DES CHEMINS
A. L'AEFE EST CONFRONTÉE À UN EFFET DE CISEAUX RÉSULTANT DE LA DIMINUTION DE SA SUBVENTION POUR CHARGES DE SERVICE PUBLIC ET DE LA HAUSSE DE SES CHARGES
1. Une croissance des effectifs d'élèves qui se maintient mais qui ne permettra pas d'atteindre l'objectif de doublement d'ici 2030
Nombre d'élèves scolarisés dans le réseau EFE
L'enquête sur les effectifs prévisionnels d'élèves scolarisés dans le réseau de l'enseignement français à l'étranger (EFE), fondée sur les inscriptions enregistrées anticipe environ 403 000 élèves à la rentrée 2025, contre 398 108 en 2024-2025, soit une hausse de 1,2 %.
Cette progression est principalement portée par les établissements partenaires et par la croissance du nombre d'élèves non français.
Source : MEAE
Compte-tenu des taux de croissance enregistrés au cours des dernières années (moins de 2 % en moyenne entre 2017 et 2025, alors qu'un taux de croissance annuel moyen de 5,5 % aurait été nécessaire pour permettre un doublement des effectifs), les rapporteurs ont interrogé le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) sur le maintien de l'objectif présidentiel de doublement des effectifs d'élèves de l'enseignement français à l'étranger (EFE) à l'horizon 2030 (« Cap 2030 »), soit 700 000 élèves.
S'il leur a bien été confirmé que cet objectif demeurait inchangé, sa réalisation reposera toutefois sur une forme d'« artifice comptable », consistant à intégrer, aux côtés des élèves scolarisés dans les établissements de l'EFE, ceux issus des établissements labellisés LabelFrancÉducation.
L'atteinte de l'objectif de doublement des effectifs d'élèves de l'EFE d'ici 2030 reposera sur une forme d'artifice comptable, consistant à intégrer les élèves issus des établissements labellisés LabelFrancÉducation.
Le réseau LabelFrancEducation
Créé en 2012, le LabelFrancÉducation, attribué par le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (MEAE), distingue les filières bilingues francophones offrant un enseignement renforcé du français et d'au moins une discipline non linguistique (DNL) en français, conformément au programme national du pays d'accueil
La gestion administrative et financière de la labellisation est assurée par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE).
En 2025, le réseau compte 778 filières bilingues francophones réparties dans 66 pays, contre 716 dans 67 pays en 2024 et accueillait près de 200 000 élèves en 2024.
2. Une subvention pour charges de service public qui connaîtra une nouvelle baisse en 2026
La subvention pour charges de service public (SCSP) versée à l'AEFE s'élèvera à 391,6 M€, contre 416,6 M€ inscrits en loi de finances pour 2025, soit une diminution de 25 M€ (- 6 %). Cette baisse fait suite à une première coupe intervenue en 2025 de 38 M€.
3. Une croissance des charges insuffisamment compensée
L'AEFE est confrontée à une augmentation du poids financier de deux mesures dont la compensation par l'État n'est plus intégralement assurée.
D'une part, la SCSP, rebasée à 120 M€ en 2009 afin d'intégrer les charges de pension civile, ne couvre plus aujourd'hui l'évolution du coût de cette mesure. En 2025, 66 M€ restaient ainsi à la charge directe de l'AEFE, financés sur ses ressources propres, principalement grâce à la participation financière complémentaire (PFC) versée par les établissements du réseau. La hausse de quatre points du taux employeur de la pension civile des fonctionnaires prévue en 2026 entraînera un surcoût estimé à 10 M€ pour l'Agence.
Récapitulatif du montant du CAS Pensions depuis 2020
Source : MEAE
D'autre part, la réforme du statut des personnels détachés entrée en vigueur en 2022 générera un coût supplémentaire évalué à 24,3 M€ en 2026, dont 9,9 M€ au titre de la masse salariale et 14,4 M€ liés au fonctionnement et à la mobilité.
Ainsi, compte tenu de la diminution de la SCSP observée en 2025 (- 35 M€) et prévue en 2026 (25 M€), les surcoûts liés à la réforme statutaire et à l'augmentation des charges de pension civile ne sont, de facto, plus compensés par la subvention versée par l'État.
4. Une dégradation de l'état du parc immobilier des établissements en gestion directe qui pèse sur leur compétitivité
L'exécution des opérations prévues dans le cadre des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) 1 pour 2011-2015 et 2 pour 2016-2020 reste en cours, représentant un ensemble de 23 opérations et un reste à exécuter s'élevant à 90,7 M€ au 31 décembre 2024, sur un montant total engagé de 321,16 M€.
Plusieurs facteurs expliquent ce retard dans l'exécution des projets. La crise sanitaire a fragilisé la situation financière de nombreux établissements ainsi que celle de nombreuses familles, limitant leur capacité à s'engager sur des dépenses d'investissement courant sur plusieurs années. Parallèlement, l'Agence ne dispose plus des marges financières nécessaires pour soutenir les établissements dans leurs investissements. En particulier, l'interdiction de recourir à l'emprunt, confirmée par l'INSEE en mai 2021 qui a réaffirmé le statut d'organisme divers d'administration centrale (ODAC) de l'AEFE, contraint l'Agence à utiliser des avances de l'Agence France Trésor (AFT) pour financer ses opérations, via le programme 823 « Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics » (9 M€ en 2025). Ce dispositif devrait se maintenir jusqu'à la fin de l'année 2026. Les établissements en gestion directe (EGD) mobilisent également leur trésorerie pour financer certaines opérations. Cette solution, bien que nécessaire, présente plusieurs limites, notamment en cas de fluctuations des taux de change susceptibles d'entraîner une dépréciation de la valeur des fonds constitués.
La nécessité pour les établissements d'autofinancer leurs projets immobiliers ralentit de facto leur programmation et limite leur capacité à envisager des investissements globaux, alors même que l'état réel de leurs patrimoines nécessite des travaux importants. Certains EGD connaissent une dégradation de leur patrimoine immobilier, ce qui nuit à leur attractivité, dans un contexte où les familles sont appelées à supporter des frais en augmentation.
Pour faire face à ces contraintes, l'AEFE a proposé plusieurs pistes, notamment le rebasage de la SCSP, le renforcement de la subvention pour charges d'investissement et la création de fonds d'amorçage, qui sont encore à l'étude. Dans ce contexte, le SPSI 3, couvrant les cinq prochaines années, affiche un besoin global s'élevant à 230 M€ pour moderniser et rénover les infrastructures du réseau.
La refonte du modèle économique de l'AEFE (cf. infra) devra veiller à apporter une réponse pérenne à cette problématique qui n'a que trop duré.
B. VERS UNE RÉFORME DU MODÈLE ÉCONOMIQUE DE L'AEFE
Plusieurs pistes sont étudiées dans le cadre du groupe de travail interministériel sur la réforme du modèle économique de l'AEFE, piloté par la directrice générale de la mondialisation. Ces pistes doivent encore faire l'objet d'un arbitrage par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères et la ministre déléguée aux Français établis hors de France.
1. Faire face à l'urgence en 2026
Selon les chiffres communiqués aux rapporteurs, la trésorerie des services centraux de l'Agence devrait s'élever à 49,7 M€ fin 2025. Si ce niveau devrait permettre de passer le cap des premiers mois de 2026, sans mesure spécifique, la trésorerie de l'Agence devrait atteindre 9 M€ en fin d'année, soit un niveau insuffisant pour lui permettre de couvrir l'ensemble de ses besoins.
Sans mesure spécifique, la trésorerie des services centraux de l'Agence devrait s'élever à 9 M€ fin 2026.
Afin d'éviter une telle situation, plusieurs solutions sont envisagées. En premier lieu, l'Agence envisage d'accélérer le recouvrement des créances qui lui sont dues et dont le montant est estimé à environ 20 M€ pour 2026. En second lieu, une augmentation temporaire de la participation financière complémentaire (PFC) versée par les établissements, de 3 à 4 points supplémentaires, est envisagée. Cette mesure exceptionnelle, déjà mise en oeuvre de manière transitoire en 2018, pourrait générer environ 33 M€ de recettes supplémentaires.
La combinaison de ces deux leviers permettrait d'assurer un niveau de trésorerie suffisant en fin de l'exercice 2026, en attendant la mise en place de solutions plus structurelles.
2. À plus long terme, une refonte des contributions des établissements pourrait être envisagée qui ne serait pas sans conséquence pour le réseau et les familles
À plus long terme, une refonte des contributions des établissements est envisagée. Présentée comme une mesure destinée à « mieux valoriser » l'homologation commune aux trois types d'établissements, qui constitue une source majeure de valeur ajoutée pour ces derniers (accès aux diplômes nationaux, appui institutionnel de l'Agence, reconnaissance liée au réseau), cette évolution ne sera cependant pas sans conséquence pour le réseau et les familles
Les contributions versées par les établissements
Ces deux contributions sont uniquement dues par les établissements en gestion directe (EGD) et les établissements conventionnés sont tenus au versement de deux contributions : la participation des établissements à la rémunération des personnels résidents et détachés (PRRD) et la participation forfaitaire complémentaires (PFC).
Pour la PRRD (185 M€ en 2024), l'assiette retenue est celle de la rémunération des résidents et détachés, incluant les rémunérations accessoires, mais excluant la pension civile. Elle ne s'applique ni aux expatriés ni aux détachés formateurs. On applique à cette assiette un taux participatif modulé et individualisé à chaque établissement.
Pour la PFC (58 M€ en 2024), l'assiette retenue est celle des frais de scolarité et les droits d'inscriptions annuelles des établissements en gestion directe (EGD) et conventionnés, sur laquelle on applique un taux de 6 %.
Les établissements partenaires sont facturés en fonction de la convention de partenariat qui les lie à l'AEFE, en moyenne 2 % de leurs droits de scolarité, et ces recettes sont enregistrées dans les comptabilités des instituts régionaux de formation (IRF).
Une première piste consiste à renforcer la participation des établissements partenaires. En effet, ces derniers, qui représentent plus de la moitié des établissements et des élèves du réseau, ne disposent pas de personnels détachés par l'État, mais bénéficient néanmoins d'un appui significatif de la part de l'État et de l'AEFE. Cet accompagnement se traduit notamment par des actions de formation, un soutien dans le maintien de l'homologation, ainsi qu'un appui pédagogique assuré par le réseau des inspecteurs de l'Éducation nationale et par les instituts régionaux de formation (IRF).
Par ailleurs, l'État prend en charge la part patronale des cotisations sociales d'environ 2 500 personnels détachés directement auprès des établissements partenaires (et non via l'AEFE) par le ministère de l'Éducation nationale. L'ensemble de ce dispositif représente un effort financier global d'environ 92 M€ pour l'État. À cela s'ajoute une aide à la scolarité d'environ 28 M€, soit un soutien total de l'ordre de 120 M€.
En contrepartie, les établissements partenaires versent une contribution au fonctionnement du réseau, fixée à 2 % de leur chiffre d'affaires. En pratique, environ la moitié d'entre eux s'acquitte de cette contribution au taux plein, tandis que d'autres appliquent des taux réduits, compris entre 0,5 % et 2 %, voire nulle dans certains contextes historiques spécifiques (notamment au Liban ou aux États-Unis), où la contribution repose sur une base forfaitaire. L'ensemble de ces versements représente environ 11,8 M€ de recettes pour le réseau.
Une seconde piste envisagée porte sur une réforme du dispositif de participation à la rémunération des résidents et détachés (PRRD), dont l'assiette inclurait les cotisations sociales. Sa mise en oeuvre complète ne pourrait cependant pas avoir lieu avant 2027, dans la mesure où l'application de cette réforme nécessitera la signature d'avenants aux conventions existantes, processus qui ne pourra être achevé avant 2026.
Les établissements conventionnés auront donc à terme le choix entre deux options : signer des avenants pour se conformer au nouveau cadre, ou bien changer de statut et devenir des établissements partenaires, ne bénéficiant plus du détachement de personnels par l'AEFE, c'est-à-dire faire le choix du « déconventionnement » à l'instar de ce qui a pu se produire à Zurich, Hong Kong, Washington, San Francisco ou Dubaï, ce choix restant, à ce stade, exceptionnel.
Certains établissements conventionnés pourraient également recourir à des détachements directs, selon un modèle qui n'existe à l'heure actuelle qu'à Mexico. Cette solution, qui pourrait s'avérer viable dans certains contextes (lorsque les conditions offertes par un contrat de droit local sont plus attractives qu'un détachement via l'AEFE) apparaît toutefois difficilement généralisable. Cette évolution traduirait en outre une logique nouvelle tendant à réserver les moyens publics aux établissements pour lesquels l'État estime justifié d'y consacrer ses ressources, en fonction de la mission de service public et de l'intérêt stratégique du pays d'accueil.
Si les rapporteurs considèrent qu'une réforme des modalités de financement de l'AEFE était nécessaire, ils regrettent que celle-ci intervienne dans l'urgence, conduisant à privilégier la hausse des contributions des établissements et donc des familles.
Il est regrettable que la nécessaire réforme du financement de l'AEFE intervienne dans l'urgence et conduise à privilégier la hausse des contributions des établissements et donc des familles.
III. UNE POLITIQUE D'ACCUEIL DES ÉTUDIANTS ÉTRANGERS FRAGILISÉE PAR LA DIMINUTION DES BOURSES DANS UN CONTEXTE DE FORTE CONCURRENCE INTERNATIONALE
A. UN DÉCROCHAGE RELATIF DE LA FRANCE DANS LA MOBILITÉ ÉTUDIANTE INTERNATIONALE
En 2024-2025, la France a accueilli environ 443 000 étudiants étrangers dans l'enseignement supérieur, soit une progression de 3 % par rapport à l'année précédente, (un rythme équivalent à celui observé en Allemagne), en ligne avec l'objectif fixé d'accueillir 500 000 étudiants internationaux à l'horizon 2027.
Selon les données de l'UNESCO, en 2022, la France a conservé la 7e place mondiale parmi les pays d'accueil d'étudiants en mobilité diplômante. Elle figurait cependant à la 4e place en 2015.
Quatre évolutions méritent d'être plus particulièrement soulignées :
- si la croissance du nombre d'étudiants accueillis en France est importante, elle demeure cependant inférieure à la moyenne mondiale, estimée à + 27 % sur cinq ans, contre + 21 % pour la France ;
- la forte hausse du nombre d'étudiants indiens accueillis en France, en progression de 17 % en un an. Cette évolution confirme l'efficacité des efforts de promotion déployés sur le sous-continent. L'Inde se positionne désormais comme l'un des tout premiers pays d'envoi, passant du treizième au onzième rang, bien que le pays reste encore en deçà de l'objectif présidentiel de 30 000 étudiants fixé à moyen terme ;
- la bonne tenue de la mobilité européenne, en hausse de 26 % sur cinq ans, avec une progression particulièrement marquée en Europe du Sud : + 38 % pour l'Italie et + 45 % pour l'Espagne ;
- un émiettement du marché mondial, au profit de nouveaux acteurs émergents, tandis que les États-Unis enregistrent une érosion tendancielle de leurs effectifs internationaux.
B. UN MAINTIEN DE LA SUBVENTION POUR CHARGES DE SERVICE PUBLIC VERSÉE À L'OPÉRATEUR...
La SCSP versée à Campus France s'élèvera à 3,4 M€, contre 3,5 M€ inscrits en loi de finances pour 2025, soit une diminution de 87 000 €. Cette relative stabilisation de la SCSP devrait permettre à l'opérateur de se concentrer sur plusieurs axes :
- le renforcement de l'attractivité de l'enseignement supérieur français : adaptation des actions de promotion aux nouvelles priorités de la stratégie Bienvenue en France, désormais plus qualitative et ciblée ;
- une amélioration de la qualité du service rendu à ses bénéficiaires : boursiers, établissements et services aux bailleurs (clients) ;
- un effort de rééquilibrage budgétaire et financier.
C. ...CONTREBALANCÉE PAR UNE COUPE DANS LES BOURSES DE MOBILITÉ QUI NUIRA À LA COMPÉTITIVITÉ DE LA DESTINATION FRANCE
L'enveloppe consacrée aux bourses de mobilité devrait s'élever à 56,2 M€, contre 70 M€ inscrits en loi de finances pour 2025, soit une diminution de 13,8 M€ (- 19,7 %).
Les bourses étudiantes constituent un instrument essentiel de pilotage de la mobilité internationale, au même titre que les accords de coopération.
La diminution du nombre de bourses avec allocation de vie, qui passerait d'environ 9 000 à 8 000, aura un impact significatif sur la politique d'attractivité et de mobilité internationale de la France.
En premier lieu, cette baisse se traduira par un « manque à gagner » pour l'opérateur estimé à environ 1,4 million d'euros. Elle limitera par conséquent directement la capacité de l'opérateur à financer ses actions et à atteindre les objectifs fixés dans le futur contrat d'objectifs et de performance (COP) dont la rédaction est prévue pour la fin de l'année de 2025 ou le début de l'année 2026. Elle restreindra notamment sa capacité à lancer des campagnes de communication ambitieuses, telles que celles associées à la marque « Bienvenue en France », pourtant essentielles dans un contexte où il s'agit de redonner à la France une image forte de pays de science, de technologie et d'innovation.
Les investissements informatiques nécessaires à la modernisation des outils et à la gestion des programmes de mobilité risquent également d'être affectés, affaiblissant la capacité de l'opérateur à piloter efficacement ses dispositifs. La suppression de postes, via des non-remplacements ou un plan de départs volontaires, pourrait également s'avérer nécessaire.
En deuxième lieu, la baisse du nombre de bourses nuira à la compétitivité de notre pays au plan international. En effet, le dispositif français demeure déjà moins généreux que ceux de ses principaux concurrents : le Royaume-Uni attribue près de 29 000 bourses dans le cadre du programme Turing, contre environ 13 000 pour le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, dont toutes ne comportent pas d'allocation de logement ou de durée longue. L'Allemagne, de son côté, finance environ 67 000 bourses, incluant des aides individuelles et sur projets, dans le cadre de sa politique de coopération universitaire et scientifique. Par ailleurs, la durée moyenne d'une bourse française, 5,6 mois, reste inférieure à celle observée dans la plupart des autres pays européens, qui offrent souvent des bourses complètes couvrant l'ensemble du cycle d'études. En France, les étudiants doivent encore s'acquitter de frais de formation et assumer leurs dépenses de logement sur la base de leur allocation de vie, ce qui limite l'attractivité du dispositif.
Afin de limiter l'impact de la baisse de SCSP, le MEAE a indiqué engager un recentrage de la politique de bourses, fondé à la fois sur un critère d'excellence (sélectivité accrue) et sur une orientation vers certains domaines prioritaires, notamment ceux liés aux hautes technologies. Un seuil de 10 % des étudiants boursiers a été fixé pour ces filières stratégiques.
Par ailleurs, le financement des bourses sera principalement consacré à la reconduction des aides existantes, plutôt qu'à l'attribution de nouvelles bourses.
Cette diminution des moyens dédiés aux bourses de mobilité intervient alors même que plusieurs évolutions réglementaires risquent d'accroître le coût des études en France pour les étudiants internationaux. Le relèvement du seuil minimal de revenus exigés pour l'obtention d'un visa étudiant, la volonté d'étendre l'application des droits différenciés, ainsi que la suppression envisagée dans le projet de loi de finances des allocations personnalisées au logement (APL) pour les étudiants internationaux, à l'exception d'une minorité bénéficiant de bourses sur critères sociaux du MESR, constituent autant de mesures susceptibles de réduire l'attractivité de la France en tant que destination universitaire.
IV. UNE DIMINUTION DE L'ENVELOPPE DÉDIÉE À L'INSTITUT FRANÇAIS PARIS QUI CONDUIRA À UNE NOUVELLE REVUE DE SES ACTIONS ET DE SES DÉPENSES EN 2026
La SCSP versée à l'Institut français s'élèvera à 25,5 M€, contre 26,5 M€ inscrits en loi de finances pour 2025, soit une diminution de 1 M€ (- 3,8 %), après une diminution importante intervenue l'an dernier (- 1,7 M€).
Dans ce contexte, l'opérateur a indiqué avoir inscrit à son budget initial 2026 un montant un peu inférieur à 30 M€, soit le plus bas niveau depuis sa création.
L'opérateur a indiqué avoir inscrit à son budget initial 2026 un montant un peu inférieur à 30 M€, soit le plus bas niveau depuis sa création.
Face à cette contraction continue de ses ressources, l'Institut français a procédé à une revue complète de ses programmes et de ses dépenses, dans une logique d'arbitrage raisonné et de meilleure lisibilité de ses actions.
La revue des actions et des dépenses 2026 introduit, pour la première fois, des efforts significatifs sur les charges de personnel, dans le but de maîtriser la progression tendancielle de la masse salariale. À ce stade, cinq gels complets de postes et deux gels partiels ont été décidés, permettant une réduction nette de 264,3 K€ de la masse salariale. Sans ces mesures, celle-ci aurait connu une progression spontanée d'environ 200 K€, soit un effort réel de 464,3 K€.
Les dépenses de fonctionnement de l'Institut ont, par ailleurs, connu une baisse très marquée au cours des dernières années, passant de 4,9 M€ en 2021 (12,7 % des crédits) à 1,6 M€ en 2025 (7 % des crédits). Cette diminution résulte notamment du projet immobilier ayant conduit au déménagement de l'opérateur dans le 11e arrondissement de Paris. Bien que le paiement du loyer ait repris en mai 2025 à l'issue d'une franchise de 17 mois, négociée lors de la signature du bail, l'Institut français prévoit un effort supplémentaire de réduction de ses frais généraux en 2026, y compris une diminution de 14 % de ses frais de mission.
Le budget communication subit également une réduction, notamment sur la communication institutionnelle, grâce à une ré-internalisation de certaines tâches auparavant confiées à des agences de presse. En revanche, les crédits d'activité liés à l'accompagnement du réseau culturel ont été globalement préservés, en particulier les dispositifs de formation (en ligne, en local ou en France), maintenus à leur niveau antérieur. En revanche, les Ateliers de l'Institut français, qui réunissaient chaque année l'ensemble du réseau culturel, ont été suspendus pour 2026.
L'accompagnement des créateurs et des industries culturelles et créatives a été maintenu, notamment à travers le Programme international de diffusion artistique (PIDA), bien que son enveloppe budgétaire ait été réduite par rapport à 2025. De même, certains dispositifs de partenariat, notamment ceux conclus avec les collectivités territoriales, ont subi des réductions notables.
Les initiatives telles que l'appel à projets « Débat d'idées » ou le cycle « Face à la guerre - dialogues européens » se poursuivent, tandis que le Fonds culturel franco-allemand, considéré comme une priorité du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, est préservé à son niveau actuel.
Au total, l'Institut français a indiqué avoir réduit le budget de l'ensemble de ses programmes de 25 % en moyenne.
L'Institut français a réduit le budget de l'ensemble de ses programmes de 25 % en moyenne.
Parallèlement, l'Institut français poursuit ses travaux en vue de l'obtention de la certification PACA (Pillar Assessed Contribution Agreement). Un premier audit, réalisé par le cabinet Ernst & Young, a permis d'établir un plan d'actions correctif, dont la mise en oeuvre est en cours. Un nouvel audit, actuellement en cours, permettra d'ajuster le calendrier de dépôt officiel de la demande auprès de la Commission. Sous réserve de validation, l'Institut français espère pouvoir conduire l'audit de certification courant 2026, afin d'obtenir la certification PACA au début de l'année 2027.
V. UN RÉSEAU CULTUREL GLOBALEMENT PRÉSERVÉ... POUR L'INSTANT
Après une baisse sensible entre 2024 et 2025 (- 11,5 %), les moyens alloués à l'appui au réseau culturel et de coopération à l'étranger (établissements à autonomie financière, instituts français de recherche à l'étranger-unités mixtes des instituts français de recherche à l'étranger, Alliances françaises) sont, à ce stade, préservés (72,5 M€).
A. DES DOTATIONS AUX ÉTABLISSEMENTS À AUTONOMIE FINANCIÈRE (EAF) STABILISÉES À LEURS NIVEAUX DE 2025
Le PLF pour 2026 reconduit les dotations pour les établissements à autonomie financière (EAF) aux niveaux de 2025, soit 45,7 M€ en fonctionnement et 17,4 M€ en opérations2(*).
Les rapporteurs estiment que le maintien des crédits de fonctionnement était indispensable dans un contexte de dégradation de la situation financière des EAF. Ainsi, en 2024, 59 EAF, soit près de la moitié du total, ont affiché un résultat négatif.
En 2024, 59 établissements à autonomie financière ont affiché un résultat réel négatif.
B. UNE DIMINUTION DES CRÉDITS DÉDIÉS AUX ÉCHANGES D'EXPERTISE ET SCIENTIFIQUES ET À CERTAINES ACTIONS MISES EN oeUVRE PAR LE RÉSEAU
Si les dotations allouées aux établissements à autonomie financière (EAF) demeureront stables en 2025, les crédits d'intervention destinés au réseau culturel et de coopération enregistreront, quant à eux, une diminution de 5,4 M€, dont :
- 1,8 M€ seront retranchés de la ligne budgétaire consacrée aux échanges d'expertises et aux coopérations scientifiques ;
- 3,6 M€ seront prélevés sur la ligne « autres crédits d'intervention », qui regroupe les crédits gérés directement par l'administration centrale et finançant divers dispositifs : subventions à différents acteurs de la coopération (commission des fouilles, France Médias Monde, commission nationale France-UNESCO, etc.), appui au sommet Choose France, ou encore soutien aux appels à projets dédiés aux industries culturelles et créatives (ICC).
Invité par les rapporteurs à préciser l'impact, dispositif par dispositif, de cette contraction budgétaire, le MEAE a indiqué ne pas être en mesure, à ce stade, d'identifier les actions qui seront effectivement touchées ni l'ampleur des ajustements qui leur seront appliqués.
Toute diminution supplémentaire des moyens des EAF, comme le propose un amendement de la commission des finances, qui prévoit une baisse de 10 M€ des crédits de l'action 08 « Appui au réseau culturel et de coopération » (et de 5 M€ des crédits de l'action 11 « crédits centraux ») se traduira par un affaiblissement de ces établissements, pourtant déjà dans une situation fragile, si le choix est fait d'imputer cette baisse sur leurs crédits de fonctionnement, ou par la remise en cause pure et simple d'actions de coopération.
C. UN MAINTIEN DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX ALLIANCES FRANÇAISES ET À LA FONDATION DES ALLIANCES FRANÇAISES
Pour 2026, il est prévu un maintien du soutien de l'État au réseau des Alliances françaises qu'il s'agisse du montant des subventions versées aux Alliances françaises locales (6,7 M€) comme de la subvention versée à la Fondation des Alliances françaises et des crédits dédiés à la coordination et à la modernisation du réseau (1,2 M€).
Le 3 décembre 2025, sous la présidence de M. Cédric Perrin, la commission a émis un avis favorable concernant l'adoption des crédits relatifs au programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » de la mission « Action extérieure de l'État » dans le projet de loi de finances pour 2026.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours de sa réunion du mercredi 3 décembre 2025, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous la présidence de M. Cédric Perrin, président, a procédé à l'examen des crédits du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence ».
Mme Catherine Dumas, rapporteure pour avis. - Monsieur le président, mes chers collègues, le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 place une nouvelle fois la diplomatie d'influence de la France sous tension.
Les crédits du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » sont ainsi prévus en net recul de 46 millions d'euros, passant de 652 millions d'euros à 606 millions d'euros.
Cette diminution intervient alors que l'exercice 2025, déjà affecté par une réduction massive de crédits de 72 millions d'euros, a été marqué par une mesure d'annulation et deux mesures de surgel. Afin d'y faire face, il a notamment été enjoint aux postes de suspendre tout engagement budgétaire de bourses dont l'attribution n'avait pas fait l'objet d'une notification écrite aux bénéficiaires avant le 12 août 2025.
Or les programmes d'échanges peuvent faire l'objet de cofinancements par les partenaires étrangers de la France. De telles décisions, même temporaires, peuvent fragiliser la crédibilité progressivement - et parfois durement - acquise par notre pays dans le domaine de la coopération culturelle et scientifique.
Pour 2026, la contraction budgétaire prévue dans le PLF concerne en premier lieu les opérateurs du programme : l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), l'Institut français et Campus France.
S'agissant de la politique d'accueil des étudiants étrangers, qui constitue un levier d'influence déterminant, l'enveloppe dédiée aux bourses de mobilité devrait diminuer de 20 %, passant de 70 millions d'euros à 56,2 millions d'euros.
Moins de bourses, des durées plus courtes, des allocations moins généreuses : c'est notre compétitivité académique qui se trouve directement affectée, au moment même où nos partenaires investissent massivement dans leur propre attractivité.
En effet, l'Allemagne finance environ 67 000 bourses, le Royaume-Uni 29 000 bourses dans le cadre du programme Turing, quand notre dispositif se réduit à environ 8 000 boursiers dotés d'une allocation de vie. Dans un contexte de concurrence mondiale accrue, la direction envisagée est donc très préoccupante.
L'Institut français, autre pilier de notre diplomatie culturelle, n'est pas épargné. Sa subvention pour charges de service public (SCSP) diminue une nouvelle fois de 1 million d'euros, après une réduction de 1,7 million d'euros l'an dernier.
L'opérateur a inscrit pour 2026 un budget inférieur à 30 millions d'euros, soit le niveau le plus bas depuis sa création. Face à cette contraction continue, l'Institut a été contraint à une revue draconienne de ses programmes et de ses actions : gels de postes, baisse marquée des dépenses de fonctionnement, réduction de 25 % en moyenne du budget de l'ensemble de ses programmes.
S'agissant des crédits consacrés au réseau culturel et de coopération, si les dotations aux Alliances françaises et aux établissements à autonomie financière sont maintenues, cet équilibre demeure fragile.
59 établissements à autonomie financière, c'est-à-dire la moitié de nos Instituts français, affichaient ainsi un résultat négatif en 2024. L'amendement proposé par la commission des finances, qui prévoit une baisse de 10 millions d'euros des crédits du réseau culturel et de coopération - et de 5 millions d'euros sur les crédits centraux - est donc difficilement compréhensible dans ce contexte, et nous y sommes évidemment défavorables.
Mes chers collègues, c'est toute la cohérence d'ensemble de notre diplomatie d'influence qui se trouve affaiblie par le présent projet de budget. Le PLF pour 2026 met à mal notre soft power, au moment même où la compétition internationale en matière d'influence n'a jamais été aussi vive.
Pour toutes ces raisons, et malgré la reconnaissance du travail remarquable effectué par les opérateurs et les agents du ministère, qui permet encore à la France de tenir son rang, nous proposons que la commission émette un avis d'abstention sur les crédits du programme 185.
J'ajoute que si les crédits du programme 185 devaient être adoptés, une exécution à l'euro près serait indispensable pour l'exercice 2026, de même qu'une meilleure visibilité en gestion afin de permettre aux postes diplomatiques de planifier et de respecter leurs engagements vis-à-vis de nos partenaires et de gérer efficacement les ressources.
M. Didier Marie, rapporteur pour avis. - Monsieur le président, mes chers collègues, quelques mots d'abord pour rappeler le contexte général : le programme 185, qui porte les moyens consacrés à notre diplomatie culturelle et d'influence, devrait subir une nouvelle baisse globale de ses crédits de 7 %, après une première coupe déjà très importante en 2025. Cette tendance interroge profondément la capacité de la France à maintenir une diplomatie d'influence ambitieuse.
Je concentrerai mon intervention sur l'AEFE, dont la situation devient préoccupante. Avec une hausse de ses charges et une baisse de ses moyens, l'AEFE sera confrontée à un effet de ciseaux la plaçant devant une équation budgétaire intenable. Sa SCSP baissera une nouvelle fois de 25 millions d'euros, après une réduction de 38 millions d'euros en 2025. Dans le même temps, deux mesures accroîtront ses dépenses : d'une part, la hausse de quatre points du taux employeur de la pension civile, pour un surcoût estimé à 10 millions d'euros ; d'autre part, les conséquences de la réforme du statut des personnels détachés, dont le coût devrait atteindre 24,3 millions d'euros en 2026.
Les conséquences sont directes. La trésorerie des services centraux devrait s'établir à 49,7 millions d'euros fin 2025, mais pourrait être inférieure à 10 millions d'euros fin 2026. Un tel niveau de trésorerie ne permettrait plus à l'Agence de faire face à ses besoins courants.
Deux leviers exceptionnels sont envisagés pour passer ce cap : d'abord, l'accélération du recouvrement des créances dues par les établissements, qui représentent environ 20 millions d'euros ; ensuite, une augmentation temporaire de la participation financière complémentaire versée par les établissements en gestion directe et conventionnés, de trois à quatre points supplémentaires. Cette seconde mesure pourrait générer environ 33 millions d'euros, mais elle se traduirait mécaniquement par une hausse des frais de scolarité pour les familles.
Le paradoxe est d'autant plus grand que la dynamique des effectifs d'élèves, pourtant annoncée comme l'un des axes majeurs de la stratégie présidentielle « Cap 2030 », n'est pas au rendez-vous. Pour tenir l'objectif, le ministère a désormais recours à ce que l'on peut qualifier d' « artifice comptable » en intégrant les effectifs des établissements labellisés LabelFrancÉducation, soit environ 200 000 élèves.
La question immobilière constitue un autre motif majeur de préoccupation. Le réseau des établissements en gestion directe connaît une dégradation progressive de ses infrastructures, faute de moyens suffisants pour investir. Les schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) couvrant les périodes 2011-2015 et 2016-2020 ne sont toujours pas achevés, avec un reste à réaliser de plus de 90 millions d'euros.
Le nouveau plan d'investissement, qui porte sur les cinq années à venir, fait apparaître un besoin global de plus de 200 millions d'euros pour moderniser et rénover les bâtiments. Or l'Agence ne dispose plus des marges nécessaires : son statut d'organisme divers d'administration centrale lui interdit d'emprunter et la contraint à avoir recours aux avances de l'Agence France Trésor (AFT), dont la durée n'est pas adaptée au financement de projets immobiliers. De leur côté, les établissements constituent une trésorerie pour réaliser certaines opérations. Cette solution, bien que nécessaire, présente plusieurs limites, notamment en cas de fluctuations des taux de change susceptibles d'entraîner une dépréciation de la valeur des fonds constitués.
Le Gouvernement a mis en place un groupe de travail interministériel pour réformer le modèle économique de l'AEFE. Plusieurs pistes sont étudiées telles que le renforcement de la participation financière des établissements partenaires ou encore la réforme du dispositif de participation à la rémunération des résidents et détachés (PRRD), dont l'assiette inclurait les cotisations sociales.
Nous regrettons que la nécessaire refonte du modèle économique, dont la nécessité est connue de longue date, intervienne dans l'urgence et se borne à considérer une augmentation des contributions des établissements, entraînant une augmentation des frais de scolarité, voire même des déconventionnements. Ce serait un recul grave.
L'AEFE est donc « à la croisée des chemins », confrontée à des contraintes budgétaires qui fragilisent son modèle, sa capacité d'investissement et, à terme, la cohésion de tout le réseau de l'enseignement français à l'étranger. Or ce réseau est un atout stratégique majeur pour la France : il forme des générations d'élèves francophones, structure des communautés expatriées, entretient un lien durable avec des élites étrangères et représente par conséquent un instrument de rayonnement unique au monde.
Dans ces conditions, il ne nous semble pas possible de soutenir ces crédits en l'état, à plus forte raison si l'amendement de la commission des finances, qui prévoit une baisse de 15 millions d'euros des crédits du programme 185 et de 50 millions d'euros sur la mission « Action extérieure de l'État », devait être adopté.
Autant nous sommes favorables à l'augmentation des crédits afin de mettre notre défense à niveau, autant il est contradictoire et dangereux de réduire notre capacité d'influence : nous considérons que la stratégie d'influence et de défense forme un tout et soutient la présence de la France dans le monde.
M. Olivier Cadic. - Nous ne partageons pas la même analyse. Dans les faits, la dotation de l'État vient contribuer au financement des frais de scolarité des élèves inscrits dans les établissements en gestion directe, et nous appelons de vos voeux la révision du modèle économique depuis un certain nombre d'années.
Compte tenu des contraintes actuelles, les parents d'élèves vont devoir payer : il faut rappeler que c'est déjà le cas dans toutes les écoles partenaires - qui représentent la très grande majorité des établissements - et il me semble qu'il est temps d'étudier cette piste alors que le modèle économique actuel montre ses limites. L'argent du contribuable ne peut pas éternellement venir compenser ce qui devrait être payé par un certain nombre de parents.
M. Didier Marie, rapporteur pour avis. - J'entends ce que dit notre collègue, mais nous avons là une divergence de fond, puisque nous considérons que le service public de l'éducation garantit une qualité d'enseignement que d'autres acteurs ne peuvent pas nécessairement proposer, malgré tous leurs efforts. De manière générale, le service public nécessite des moyens publics : si l'on considère que le service public de l'enseignement à l'étranger est nécessaire, il doit donc être doté des ressources adéquates.
De surcroît, une éventuelle fin de l'intervention du service public entraînera une augmentation des frais de scolarité, qui exclura toute une partie des expatriés et des futures élites étrangères qui peuvent suivre nos enseignements de qualité.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » au sein de la mission « Action extérieure de l'État ».
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Jeudi 16 octobre 2025 :
- Mme Donatienne Hissard, directrice générale de Campus France et Mme Roxane Lundy, chargée de mission
Mardi 21 octobre 2025 :
- Mme Claudia Scherer-Effosse, directrice générale de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE)
Jeudi 23 octobre 2025 :
Direction générale de la mondialisation :
- Mme Valérie Brisset, directrice adjointe de la diplomatie culturelle
- M. Stéphane Robert, chargé de mission auprès de la directrice de la diplomatie culturelle
- Mme Sarra Mebarki, cheffe du pôle budget à la DGM/DPS
- Mme Sophie Buis, cheffe du pôle des opérateurs à la DGM/DPS
- M. Clément Fernandez, chargé de mission auprès du directeur du pilotage et de la stratégie (DGM/DPS)
Jeudi 6 novembre 2025 :
- M. Hugues Ghenassia de Ferran, directeur général de l'Institut français et M. Thomas Hannebique, secrétaire général
* 1 Dans le cadre du décret n° 2025-374 du 25 avril 2025 portant annulation de crédits.
* 2 Les instituts français locaux (EAF pluridisciplinaires) apportent leur soutien à diverses actions visant à valoriser l'enseignement supérieur français, les industries culturelles ainsi que la création contemporaine (cinéma et audiovisuel, arts, secteur du livre, etc.), tout en contribuant au rayonnement de la langue française.
Les IFRE/UMIFRE s'investissent dans l'ensemble des missions liées aux centres de recherche en sciences humaines et sociales : attribution de bourses, accueil de chercheurs et de doctorants, accompagnement à l'édition et à la traduction, organisation de colloques internationaux et de séminaires doctoraux, appui aux chantiers archéologiques et animation de débats d'idées.





