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N° 144 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026 |
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Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025 |
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AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission de la culture, de
l'éducation, de la communication et du sport (1) sur le projet
de loi de finances,
considéré comme rejeté |
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TOME III Fascicule 1 ENSEIGNEMENT SCOLAIRE Enseignement scolaire |
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Par M. Jacques GROSPERRIN, Sénateur |
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(1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon, président ; MM. Max Brisson, Michel Savin, Jacques Grosperrin, Mme Marie-Pierre Monier, M. Yan Chantrel, Mme Samantha Cazebonne, M. Jérémy Bacchi, Mmes Laure Darcos, Monique de Marco, M. Bernard Fialaire, vice-présidents ; Mmes Anne Ventalon, Else Joseph, Colombe Brossel, M. Pierre-Antoine Levi, secrétaires ; Mmes Marie-Jeanne Bellamy, Catherine Belrhiti, Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, M. Christian Bruyen, Mmes Evelyne Corbière Naminzo, Karine Daniel, Nathalie Delattre, Sabine Drexler, M. Aymeric Durox, Mmes Agnès Evren, Laurence Garnier, Béatrice Gosselin, MM. Jean Hingray, Claude Kern, Mikaele Kulimoetoke, Mme Sonia de La Provôté, MM. Ahmed Laouedj, Michel Laugier, Jean-Jacques Lozach, Mmes Paulette Matray, Catherine Morin-Desailly, M. Georges Naturel, Mme Mathilde Ollivier, MM. Pierre Ouzoulias, François Patriat, Jean-Gérard Paumier, Stéphane Piednoir, Bruno Retailleau, Mme Sylvie Robert, MM. David Ros, Pierre-Jean Verzelen, Cédric Vial, Adel Ziane. |
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Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180 Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026) |
AVANT-PROPOS
Le projet de loi de finances (PLF) 2026 prévoit pour les cinq programmes relevant du ministère de l'éducation nationale 63,02 milliards d'euros hors CAS, soit un montant quasi stable par rapport à la loi de finances pour 2025 (+ 0,26 %).
Ce budget se distingue par la forte variation du nombre d'ETP qui présente un solde positif de 5 400. Celle-ci s'explique par un double mouvement : d'une part, une hausse de plus de 7 900 ETP, conséquence de l'application mécanique de l'avancement à bac + 3 des concours de l'éducation nationale suivie par deux années de formation en master sous statut de fonctionnaire, et d'autre part, une prise en compte de la déprise démographique.
Consciente de cette diminution des effectifs scolaires, la commission estime nécessaire de réduire le nombre d'ETP d'enseignants. À trop retarder cette baisse, le ministère de l'éducation nationale s'expose à un rattrapage brusque à moyen terme.
En revanche, il ne semble pas opportun au rapporteur d'aller au-delà des suppressions d'ETP prévues par le PLF au risque de les rendre difficilement absorbables socialement par les territoires et de remettre en cause les priorités fixées par le ministère.
La commission de la culture a émis un avis favorable sur les programmes 140, 141, 230, 139 et 214 de la mission « enseignement scolaire ».
I. UN BUDGET GLOBALEMENT STABLE DANS UN CONTEXTE DE DIMINUTION DU NOMBRE D'ÉLÈVES
A. UNE STABILITÉ DU BUDGET POUR 2026 FAISANT SUITE À UNE HAUSSE DE 12,13 MILLIARDS D'EUROS DEPUIS 2019
Hors CAS Pensions, les crédits en paiement des cinq programmes de la mission « enseignement scolaire » relevant du ministère de l'éducation nationale s'élèvent à 63,02 milliards d'euros. Ils sont en progression de 166 millions d'euros, soit de 0,26 %.
Cette quasi-stabilité fait suite à une hausse de 12,13 milliards d'euros depuis 2019, soit de 18,8 %.
Évolution des crédits entre la loi de finances pour 2025 et le projet de loi de finances pour 2026
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Programme (hors CAS Pensions) |
LFI 2025 (CP) millions d'euros |
PLF 2026 (CP) millions d'euros |
Évolution 2025/2026 millions euros |
Évolution 2025/2026 ( %) |
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P. 140 : enseignement scolaire public du 1er degré |
17 620,29 |
17 700,39 |
80,10 |
+ 0,45 % |
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P. 141 : enseignement scolaire public du 2nd degré |
26 524,44 |
26 670,90 |
146,46 |
+ 0,55 % |
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P. 230 : vie de l'élève |
7 449,60 |
7 395,26 |
- 54,34 |
- 0,73 % |
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P. 139 : enseignement privé du premier et du second degré |
8 866,60 |
8 801,89 |
- 64,70 |
- 0,73 % |
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P. 214 : soutien de la politique de l'éducation nationale |
2 393,82 |
2 452,65 |
58,82 |
+ 2,46 % |
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Total (hors enseignement technique agricole) |
62 854,76 |
63 021,10 |
166,34 |
+ 0,26 % |
Source : Ministère de l'éducation nationale - documents budgétaires
· Principales modifications de crédits hors titre 2
Les principales baisses des crédits hors titre 2 sont les suivantes :
Ø - 54 millions d'euros pour le renouvellement des manuels scolaires en 5ème. Les crédits de l'enseignement public ne permettent le renouvellement que d'un seul manuel sur les deux prévus, le ministère estimant que le second pourra être financé par le reliquat dont disposent les établissements scolaires au titre des précédents renouvellements ;
Ø - 36 millions d'euros concernant la gratification des stagiaires en voie professionnelle. Les effectifs de cette voie de formation connaissent une légère hausse à la rentrée 2025 et vraisemblablement à la rentrée 2026 mais devraient baisser légèrement entre 2027 et 2029. Le ministère justifie cette diminution des crédits par la trésorerie disponible au sein de l'agence des services et de paiement, chargé du versement de cette gratification, constituée lors des deux premières années de mise en oeuvre du dispositif ;
Ø - 20 millions d'euros pour le fonds d'innovation pédagogique. Lancé en 2022 pour le quinquennat et doté de 500 millions d'euros, ce fonds a été mis à l'arrêt au dernier trimestre 2024. Les crédits inscrits sur cette ligne budgétaire doivent uniquement permettre de financer en 2026 les projets déjà validés et engagés. Ils ne concernent que des écoles. ;
Ø - 10 millions d'euros pour le fonds de soutien au développement des activités périscolaires, en raison de sa quasi-extinction à la rentrée 2025, comme le prévoit l'article 143 de la loi de finances pour 2024. Il reste seulement accessible aux communes de Mayotte en application de l'article 45 de la loi n° 2025-797 du 11 août 2025 de programmation pour la refondation de Mayotte qui l'a maintenu pour ce territoire ;
Ø - 10 millions d'euros pour la part collective du pass Culture. Le ministère justifie cette baisse par la volonté de mieux réguler le dispositif et réduire les effets d'aubaine qu'il a pu provoquer auprès de certains prestataires (brusque augmentation des prix, création de structures culturelles spécifiquement pour bénéficier de cette aide...). Au-delà du montant consacré au pass Culture, la commission estime nécessaire de donner aux équipes pédagogiques et chefs d'établissement une visibilité couvrant au moins l'année scolaire. Elle rappelle l'annonce du brusque arrêt du pass Culture fin janvier, laissant aux chefs d'établissement à peine 48 heures pour renseigner et valider les projets sur la plateforme ADAGE avant sa fermeture jusqu'à la fin de l'année scolaire.
Trois actions connaissent une augmentation :
Ø + 21 millions d'euros pour la revalorisation des bourses sociales. Cette hausse tire les conséquences de l'automatisation de l'attribution des bourses pour les élèves de l'enseignement public à la rentrée 2025 et son extension à ceux de l'enseignement privé à la rentrée 2026, ainsi que la hausse du montant des échelons des bourses ;
Ø + 10 millions d'euros de revalorisation des frais de déplacement ;
Ø + 3 millions d'euros pour le forfait d'externat en raison de la revalorisation du montant de la contribution de l'État aux dépenses de fonctionnement des classes des établissements du second degré sous contrat ;
B. UN SCHÉMA D'EMPLOI MARQUÉ PAR LA RÉFORME STRUCTURELLE DE LA FORMATION INITIALE ET LA PRISE EN COMPTE DE LA DÉPRISE DÉMOGRAPHIQUE
· La création mécanique de 7 938 ETP au titre de la réforme de la formation initiale
La mise en place de la réforme initiale qui avance le concours à bac + 3 et prévoit un statut rémunéré d'élève stagiaire puis d'enseignant stagiaire pendant les deux années de master conduit mécaniquement à une hausse du nombre d'ETP au sein de la mission « enseignement scolaire ».
Conséquence mécanique de la réforme de la formation initiale sur les ETP
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Programme 140 : 1er degré public |
+ 3 506 ETP |
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Programme 141 : 2nd degré public |
+ 3 424 ETP |
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Programme 230 : vie de l'élève |
+ 190 ETP (CPE notamment) |
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Programme 139 : 1er et 2nd degrés privés sous contrat |
+ 818 ETP |
Source : documents budgétaires PLF 2026
· La suppression de près de 4 000 ETP d'enseignants titulaires dans un contexte de baisse démographique
Conséquence de la baisse de la natalité que connait la France depuis 15 ans, le nombre d'élèves est en forte diminution. Comme l'a déclaré devant la commission Édouard Geffray, ministre de l'éducation nationale : « nous aurons perdu 20 % de la population scolaire au cours des dix ou quinze prochaines années »1(*).
Cette chute est particulièrement marquée dans le premier degré. Elle concerne désormais le secondaire et notamment le collège. Après deux rentrées où la diminution du nombre de collégiens se limitait annuellement à 18 000, cette baisse va s'accentuer très fortement dès la prochaine rentrée. Entre 2023 et 2026, il y aura ainsi 218 000 collégiens en moins.
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Évolution des effectifs au primaire |
Évolution des effectifs dans le secondaire |
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Constat 2024 |
Variation 2025 |
Variation 2026 |
Variation 2027 |
Variation 2028 |
Variation 2029 |
Total variation 2024-2029 |
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Effectifs 1er degré |
6 260 558 |
- 90 730 |
- 116 812 |
- 118 933 |
- 113 775 |
- 120 518 |
- 560 768 |
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Effectifs Collège |
3 386 211 |
- 18 011 |
- 29 300 |
- 44 500 |
- 48 800 |
- 59 300 |
- 199 911 |
Source : ministère de l'éducation nationale
La commission estime nécessaire de tenir compte de la déprise démographique et soutient la baisse de 4 000 ETP d'enseignants titulaires inscrits dans le PLF. Elle alerte sur un « déni démographique » qui aurait de graves conséquences à moyen terme au moment du rattrapage qui devra nécessairement s'opérer après un trop long retard pris :
Ø pour les futurs enseignants, elle conduirait alors à une baisse drastique du nombre de places au concours ;
Ø pour les communes ainsi que la communauté éducative, cela entraînerait une fermeture massive de classes dans un délai très court conduisant à une fragilisation des équipes pédagogiques et une brusque remise en cause du maillage territorial.
En revanche, il ne semble pas opportun au rapporteur d'aller au-delà de la réduction des ETP prévus par le PLF au risque de profonds bouleversements :
· Un nombre important de fermetures de classes dans les territoires qui sera difficilement absorbable socialement,
· Une remise en cause des priorités définies par le ministère (cf. ci-après), notamment le développement du lycée professionnel, le développement des toutes petites sections, le renforcement des moyens médico-sociaux de l'éducation nationale, les efforts en faveur de l'école inclusive, avec la poursuite de la création d'ULIS et l'accompagnement des élèves à besoins éducatifs particuliers, une meilleure prise en compte des « écoles orphelines » et un effort en faveur des collèges particulièrement défavorisés : lors de son audition, le ministre a indiqué sa volonté de soutenir davantage les 15 % de collèges où plus de la moitié des élèves n'ont pas le brevet et qui concentrent 40 % de la très grande difficulté scolaire.
· une tentation de diminuer les effectifs des brigades de remplacement, à rebours de l'effort fait l'année dernière par le ministère pour les reconstituer du fait de la marge de manoeuvre offerte par la non-suppression des 4 000 ETP initialement prévus au PLF 2025.
· une brusque réduction du nombre de places au concours envoyant un signal négatif aux étudiants au moment où le ministère cherche à renforcer l'attractivité du métier via la réforme de la formation initiale.
· une remise en cause dans certains territoires de la capacité à déployer la réforme de la formation initiale dans de bonnes conditions : celle-ci prévoit notamment de faire passer le pourcentage - fixé actuellement à 30 % - du volume horaire de formation par un professionnel de terrain exerçant dans l'enseignement scolaire à 50 %.
· des conséquences pour l'enseignement privé sous contrat - le ministère appliquant la règle du 80/20 régissant les relations budgétaires entre l'enseignement public et l'enseignement privé sous contrat - pouvant aller jusqu'à la fermeture de certains établissements.
Le rapporteur souligne les tensions qu'a suscitée l'élaboration de la carte scolaire en 2025 alors même que le schéma d'emploi était quasiment stable.
L'utilisation des 4 000 ETP non supprimés du budget 2025
Le PLF pour 2025 prévoyait initialement la suppression de 4 000 ETP. La commission, à l'initiative de son rapporteur, avait proposé un amendement visant à diminuer de moitié (à 2 000 ETP) ces suppressions. Au final, le gouvernement est revenu sur la quasi-intégralité de ces suppressions. L'élaboration de la carte scolaire 2025 a fait l'objet de nombreuses incompréhensions dans les territoires au regard de ce schéma d'emploi et du constat de fermetures de nombreuses classes.
Interrogé par le rapporteur, le ministère a précisé la ventilation de ces 4 000 ETP « sauvés » :
* 2 685 ETP d'enseignants du 1er degré
* 504 ETP d'enseignants du 2nd degré
* 170 ETP de conseillers principaux d'éducation
* 641 ETP d'enseignants du 1er et du 2nd degrés privés
800 ETP dans le 1er degré public ont été fléchés vers le renforcement des capacités de remplacement, 500 ETP ont été dédiés à la création des pôles d'appui à la scolarité, 340 ETP ont permis de renforcer l'accompagnement des élèves de 4ème et de 3e dans la continuité de la mise en place des groupes de besoins en 6ème et 5ème et 170 ETP ont été fléchés pour la création d'emploi de conseiller principal d'éducation (CPE) dans le cadre du plan « tranquillité scolaire ». Les autres ETP (2 190) ont permis d'assouplir la mise en oeuvre de la carte scolaire.
Depuis plusieurs années, la commission appelle à une meilleure prévisibilité et une programmation pluriannuelle de la carte scolaire. Celles-ci resteront à l'état de promesses tant que la définition du nombre d'ETP sera annuelle. Il semble essentiel au rapporteur que soit élaboré un schéma pluriannuel d'emploi permettant de dessiner une trajectoire connue à l'avance de tous et d'anticiper les évolutions à l'échelle des territoires.
· des créations et fléchages de postes pour répondre à des besoins spécifiques et aux priorités définies par le ministère
Lors de son audition devant la commission, le ministre de l'éducation nationale a présenté ses priorités que traduit la création et le fléchage d'ETP prévus par ce projet de budget :
Ø Une poursuite des efforts en faveur de l'école inclusive
Le PLF 2026 prévoit 1 200 ETP supplémentaires d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Leur nombre est en constante augmentation pour atteindre désormais 90 902 ETPT.
Cette augmentation ne suffit toutefois pas à couvrir le nombre de notifications qui s'accroit chaque année. À la rentrée 2025, 350 000 enfants bénéficient d'une modification d'une Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) pour disposer d'un AESH. 50 000 d'entre eux n'en avaient pas malgré la notification - ils étaient en comparaison 36 000 à la rentrée 2024. Fin octobre 2025, plusieurs dizaines de milliers d'entre eux étaient toujours sans accompagnement.
Mise en oeuvre de la loi sur la prise en charge par l'État des élèves sur le temps méridien
La loi n° 2024-475 du 27 mai 2024 prévoit la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne. Le décret n° 2025-137 du 14 février 2025 relatif à l'intervention des accompagnants des élèves en situation de handicap sur la pause méridienne est venu préciser les modalités d'organisation des interventions des AESH pendant le temps méridien.
Le service de la Direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) a estimé à 1 650 les ETP nécessaires pour la mise en oeuvre de la loi Vial en 2024-2025. Ceux-ci ont été pris sur les 3 000 ETP supplémentaires créés à la rentrée 2024. Pour cette année, la DGESCO estime à 2 000 le nombre d'élèves nécessitant un accompagnement sur le temps méridien. Actuellement, seuls 65 % bénéficient d'un tel accompagnement.
Source : DGESCO
Par ailleurs, le ministère poursuit sa politique de développement des ULIS afin d'atteindre l'objectif d'une ULIS dans chaque collège en 2027. Pour cela, le PLF pour 2026 flèche 300 ETP vers le développement des ULIS.
Ø des moyens supplémentaires au nom de l'égalité des chances
Le ministre a souhaité prendre des mesures en faveur de l'égalité des chances. 100 ETP sont ainsi fléchés pour la poursuite du développement des toutes petites sections dans les quartiers prioritaires de la ville. Elle s'inscrit dans la politique menée par le ministère de l'éducation nationale du développement des toutes petites sections dans les quartiers prioritaires de la ville et en éducation prioritaire menée depuis 2024 (après l'ouverture de 60 TPS en 2024 par appel à projet, celui-ci a été reconduit pour les QPV à la rentrée 2025 pour 50 ETP. En 2026, 100 ETP sont prévus).
Par ailleurs, 100 ETP sont fléchés vers les écoles orphelines.
Ø L'amélioration de la santé physique et psychique des élèves
Le ministre a annoncé la création de 300 ETP d'infirmières scolaires, de psychologues et d'assistantes sociales. Plutôt qu'un « saupoudrage », le ministre souhaite prioriser les établissements les plus en difficulté en y implantant directement un trinôme infirmière scolaire - psychologue-assistante sociale.
Ø Un renforcement des contrôles des établissements privés et de l'accompagnement au numérique
La DGSCO a indiqué souhaiter flécher 100 ETP pour le renforcement des contrôles sur les établissements privés, notamment dans le cadre du programme « brisons le silence, agissons ensemble » ainsi que pour le renforcement des équipes numériques.
II. LA FORMATION INITIALE DES ENSEIGNANTS : UNE RÉFORME ATTENDUE, DES INTERROGATIONS QUI DEMEURENT
A. UNE RÉFORME DE LA FORMATION INITIALE DES ENSEIGNANTS REPRENANT PLUSIEURS PRÉCONISATIONS DE LA COMMISSION
Annoncée par Nicole Belloubet, alors ministre de l'éducation nationale en avril 2024, la réforme de la formation initiale des enseignants et personnels de direction entre en vigueur en 2026.
· Un concours avancé à bac + 3 et deux années de formation en master rémunérées sous statut de fonctionnaire
À partir de 2026, le concours actuellement positionné à bac + 5 pour les enseignants du premier degré, pour le Certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré (CAPES) ainsi que pour les CPE aura lieu à bac + 3. Deux années de transition sont prévues en 2026 et 2027 avec une cohabitation d'un concours à bac + 5 pour les étudiants actuellement en master Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation (MEEF) et celui à bac + 3.
L'avancement du concours répond à une double logique :
Ø Renforcer l'attractivité du métier d'enseignant, notamment en facilitant l'accès à ces études pour les étudiants d'origine modeste grâce à une rémunération des deux années de master ;
Ø Garantir une formation de qualité aux futurs enseignants en répondant à leurs besoins. Il existe un consensus auprès de l'ensemble des acteurs du monde éducatif pour juger le formation initiale « inadaptée ». Plus de 50 % des enseignants français expriment un manque de préparation s'agissant de la pédagogie et des pratiques de classes à l'issue de la formation2(*).
Le nouveau master « enseignement et éducation » - M2E - s'articule autour de quatre « blocs » :
- la maîtrise et l'enseignement des disciplines ;
- l'adaptation à la diversité des élèves et des contextes ;
- l'inscription de l'acte d'enseigner dans le cadre du service public de l'éducation ;
- l'initiation à la recherche et l'engagement d'une dynamique de développement continu.
Le M2E permet un renforcement du contrôle par le ministère de l'éducation nationale du contenu des masters et de la formation de ses futurs enseignants, ce que la commission appelle de ses voeux depuis de nombreuses années. En effet, le cadrage de ces masters est national. Il a été élaboré en commun au sein d'un groupe de travail associant la direction générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP) du ministère de l'enseignement supérieur, l'inspection générale de l'enseignement, du sport, de la recherche, la direction générale de l'enseignement scolaire et la direction générale des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale.
Ce master prévoit également des stages obligatoires, dont un stage en responsabilité la seconde année. Le rapporteur a entendu les interrogations des syndicats d'enseignants sur les modalités de mise en oeuvre de ce stage, notamment dans l'accompagnement de l'enseignant stagiaire. Il lui semble nécessaire de poursuivre les échanges entre les différentes parties prenantes à cet égard.
Toutefois, il souligne le progrès que constitue ce stage obligatoire - celui-ci est facultatif en master MEEF - afin de permettre à l'enseignant stagiaire de se retrouver confronter à la réalité de la classe et de pouvoir revenir sur cette expérience dans le cadre de leur formation.
Modalités spécifiques de formation pour les lauréats au concours titulaires de certains diplômes
Le décret n° 2025-352 du 17 avril 2025 modifiant les conditions de recrutement et de formation des corps enseignants, du personnel d'éducation et des maîtres de l'enseignement privé sous contrat du ministère chargé de l'éducation nationale fixe les conditions de formation des lauréats au concours.
Les lauréats des concours externes ayant précédemment validé une première année de master ou titulaires d'un titre ou diplôme reconnu équivalent par le ministre chargé de l'éducation pourront, si leur formation antérieure est jugée suffisamment en adéquation avec les fonctions qu'ils ont vocation à exercer, être dispensés, dans des conditions prévues par arrêté des ministres chargés de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la fonction publique, de la première année de formation.
Ils bénéficieront donc d'une formation d'une seule année en qualité de fonctionnaire stagiaire, qui sera adaptée selon leur parcours universitaire et professionnel antérieur. La titularisation interviendra à l'issue de la formation à la condition d'être titulaire du master.
Source : ministère de l'éducation nationale - documents budgétaires
La commission salue la reprise dans le cadre de cette réforme de deux de ses recommandations :
Ø une présence renforcée parmi les formateurs de professionnels du terrain exerçant dans l'enseignement scolaire. Il est ainsi prévu que 50 % du volume horaire de la formation en master soient assurés par ces professionnels ;
Ø le développement de la formation continuée : le ministère travaille sur la définition d'un nouveau référentiel de formation des enseignants allant de la licence aux trois années suivant la titularisation. Celui-ci pose le principe d'un développement progressif des compétences professionnelles des enseignants dans un continuum de huit ans. Ce référentiel est en cours d'élaboration.
· La nouvelle licence de professorat des écoles (LPE)
En complément de la modification de la place du concours, une nouvelle licence de professorat des écoles est créée à partir de la rentrée 2026.
La commission salue cette nouvelle voie de formation qui répond à une carence actuelle du parcours préparant aux concours de professeur du premier degré : proposer une licence pluridisciplinaire correspondant à la polyvalence attendu d'un enseignant du premier degré. Interrogé lors des travaux de la commission en 2024, Guillaume Gellé, Président de France Universités avait souligné que « ce parcours de formation construit en cinq ans permet de sortir de l'illusion que l'on peut former un enseignant en deux ans » 3(*).
Selon les informations transmises au rapporteur, les deux tiers des enseignements seront consacrés à la maîtrise des savoirs à enseigner (notamment le français et les mathématiques) et à la spécificité de leur enseignement en primaire.
Par ailleurs, cette nouvelle licence prévoit a minima dix semaines de stage, dont au moins six semaines en milieu scolaire et au moins une semaine continue de stage en école primaire à la fin du premier semestre.
La commission souligne le caractère essentiel de ces confrontations des étudiants le plus tôt possible aux réalités de la profession d'enseignants pour les confirmer dans leurs parcours ou, le cas échéant, pouvoir accompagner leur réorientation. Elle rappelle un chiffre présenté par le SNUIPP-FSU à l'occasion des travaux de la commission précédemment évoqués sur cette réforme : 29,5 % des professeurs des écoles lauréats du concours n'ont jamais réalisé de stage avant leur prise de poste.
B. DES QUESTIONS QUI DEMEURENT
· Un calendrier particulièrement serré
En raison de l'instabilité politique que connaît notre pays depuis deux ans, les discussions sur la mise en oeuvre de cette réforme ont pris du retard.
Les nouvelles mentions du master M2E ont été créées par l'arrêté du 9 septembre 2025 après sa présentation au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) du 5 septembre 2025. À la suite de la publication de cet arrêté, un dossier d'accréditation a été transmis aux universités qui devaient le renseigner au plus tard pour le 31 octobre 2025. Les délibérations concernant les demandes d'accréditation doivent être communiquées avant le 1er décembre 2025. Ce calendrier particulièrement contraint est dû à la nécessité de prise en compte de cette nouvelle offre sur la plateforme « mon master » qui ouvrira pour la session 2026-2027 le 2 février prochain.
Cette course contre la montre est encore plus forte pour les LPE, dont le projet d'arrêté fixant le cadre national a été présenté au Cneser du 15 juillet 2025. Chaque université disposait jusqu'au 30 septembre pour adresser un dossier d'accréditation au ministère. Celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour instruire les dossiers. Le Cneser doit donner un avis sur ces dossiers en décembre. L'enjeu est de pouvoir dévoiler les LPE nouvellement créées sur Parcoursup en même temps que l'offre globale de formation de premier cycle, soit le 17 décembre 2025.
Au regard de la mobilité parfois restreinte des étudiants, il est essentiel de prévoir un maillage territorial suffisamment équilibré de ces licences pour couvrir l'ensemble des territoires. Selon les informations transmises au rapporteur, il est prévu dans chaque académie l'ouverture de près de 5 000 places au sein d'une LPE à la rentrée 2026, en lien avec 60 établissements d'enseignement supérieur.
· Une implication du ministère dans la mise en oeuvre de cette réforme à confirmer
Si le rapporteur salue la part accrue du volume horaire au sein du master qui doit être assuré par des professionnels de terrain permettant aux lauréats de mieux appréhender les réalités du métier et les pédagogies actuelles, il s'interroge sur la capacité du ministère à mettre les moyens humains nécessaires à disposition.
En effet, la maquette actuelle des Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé) prévoit une prise en charge par des personnels de l'éducation nationale à hauteur de 30 %. Or, cette proportion est difficilement atteinte dans certains territoires.
Interrogé à ce sujet, Édouard Geffray, ministre de l'éducation nationale, a indiqué être confiant sur la capacité du ministère à répondre à cet objectif « à condition que le pilotage politique soit fort, ce qui est le cas, et qu'un travail fin soit mené, ce qui sera le cas aussi ».
· Une notation des épreuves au concours du premier degré à préciser
Pour le concours de recrutement de professeurs des écoles (CRPE), le ministère souhaite que les étudiants ayant suivi et validé leurs années de licence de professorat des écoles dans des conditions restant à définir soient dispensés des deux épreuves écrites d'admissibilité qui viseront à tester les connaissances du candidat en mathématiques et français ainsi que dans les autres domaines d'enseignement.
L'arrêté du 17 avril 2025 fixant les modalités d'organisation du concours externe et des concours externes spéciaux de recrutement de professeurs des écoles prévoyant que chacune des quatre épreuves (2 épreuves d'admissibilité et 2 épreuves d'admission) se voit attribuer une note allant de 0 à 20, le rapporteur s'interroge sur les modalités de calcul des notes pour les candidats dispensés des épreuves d'admissibilité.
Lors de leur audition, les syndicats ont indiqué que seules les notes des épreuves d'admission pourraient être prises en compte. Des précisions doivent être rapidement apportées aux étudiants notamment sur le fait de savoir si la note aux épreuves d'admissibilité sera calculée en fonction des résultats obtenus lors des trois années de licence. Il convient également de préciser les conditions de dispense pour des étudiants qui intègreraient cette licence au cours du premier cycle d'études.
· Les modalités d'accès au M2E
Les conditions d'accès au M2E doivent également être clarifiées tant dans le choix du lieu de formation pour les lauréats d'un même concours (par exemple au sein d'une académie pour le CRPE), mais aussi sur la possibilité pour les candidats ayant échoué au concours de pouvoir s'y inscrire, afin de poursuivre leur formation et préparation.
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* *
La commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a émis, lors de sa réunion plénière du 25 novembre 2025, un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances pour 2026
EXAMEN EN COMMISSION
MARDI 25 NOVEMBRE 2025
___________
M. Laurent Lafon, président. - Nous poursuivons nos travaux avec l'examen de l'avis de notre collègue Jacques Grosperrin sur les crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis des crédits relatifs à l'enseignement scolaire. - Je salue la présence de M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission « Enseignement scolaire ».
Dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026, le budget des cinq programmes du ministère de l'éducation nationale s'élève à 63,02 milliards d'euros, hors compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ». Il enregistre une légère hausse de 166 millions d'euros, soit 0,26 %, par rapport à l'an dernier.
Avant de m'arrêter sur les équivalents temps plein (ETP), dont la variation va constituer le coeur de nos débats, je souhaite revenir sur les principales hausses et baisses hors titre 2.
On observe une baisse de 54 millions d'euros pour le renouvellement des manuels scolaires. Si deux manuels doivent être renouvelés pour la classe de cinquième, le ministère estime que l'un des deux renouvellements peut se réaliser à partir des reliquats dont disposent les établissements scolaires au titre des précédents renouvellements de manuels financés.
Par ailleurs, la ligne relative à la gratification des stages professionnels enregistre une baisse de 36 millions d'euros. Le ministère justifie cette décision par la trésorerie importante de l'Agence de services et de paiement (ASP) lors des deux premières années de mise en oeuvre du dispositif.
Deux fonds sont mis en quasi-extinction. Concernant le fonds pour l'innovation pédagogique (FIP) lancé en 2022 par le Président de la République, les travaux de notre commission ont montré une absence de pilotage et de définition précise de l'innovation pédagogique. Les crédits inscrits dans le PLF pour 2026 financent des projets engagés avant décembre 2024. Le fonds de soutien au développement des activités périscolaires (FDSAP), quant à lui, n'existe plus depuis la rentrée 2025, à l'exception des communes de Mayotte pour lesquelles il est maintenu.
Les crédits dédiés à la part collective du pass Culture sont en diminution de 10 millions d'euros. Le ministre a indiqué vouloir recentrer le dispositif, afin de mieux le contrôler et d'éviter les effets d'aubaine. Au-delà du montant de l'enveloppe dans le contexte budgétaire actuel, je souhaite revenir sur les évènements de janvier dernier. Les chefs d'établissement ont appris qu'ils avaient 48 heures pour valider l'ensemble des projets avant la fermeture jusqu'à la fin de l'année scolaire de la plateforme Adage. La raison de ce brusque arrêt est liée à une consommation trop rapide des crédits, le ministère craignant de dépasser le montant de l'enveloppe dédiée.
Lors de l'audition, les personnels de direction ont alerté sur les difficultés entraînées par cette coupure en cours d'année. C'est la deuxième fois qu'un tel procédé est utilisé après l'annonce d'une suspension de l'attribution des heures supplémentaires effectives (HSE) en mai 2024, suivie d'un rétropédalage du ministère. Si des réductions budgétaires peuvent arriver, il est important de donner aux chefs d'établissement et aux équipes pédagogiques une visibilité budgétaire allant au moins jusqu'à la fin de l'année scolaire.
La revalorisation des bourses sociales, à hauteur de 21 millions d'euros, a également retenu mon attention. Celle-ci est liée à l'automatisation de l'attribution des bourses pour les élèves du public depuis la rentrée de 2025, et à son extension à ceux du privé lors de la rentrée de 2026. Par ailleurs, le montant des échelons a été légèrement revalorisé.
Le schéma d'emploi prévoit la création de 5 440 ETP. Celui-ci résulte de deux actions qu'il convient de distinguer : d'une part, la réforme de la formation initiale et, d'autre part, la déprise démographique. Sachant l'avancement du concours à bac + 3, les lauréats poursuivront pendant deux ans leur formation en master sous le statut de fonctionnaire ; je reviendrai plus tard dans mon propos sur cette réforme.
Dans le même temps, nous devons tenir compte de la déprise démographique. La situation est connue de tous : le nombre d'élèves diminue. Dans le premier degré, on prévoit une baisse de 116 000 élèves pour la rentrée de 2026 ; entre 2024 et 2029, on annonce une baisse de 560 000 élèves dans nos établissements. Cette baisse atteint également le collège, avec une diminution de 29 000 élèves en 2026 et de 44 500 élèves l'année suivante.
Par rapport à l'an dernier, la diminution du nombre d'ETP d'enseignants titulaires prévue dans le cadre du PLF - soit 4 000 postes - me semble raisonnable. À trop attendre, nous risquons dans quelques années une cassure nette au moment du rattrapage qui devra nécessairement avoir lieu. Cela aurait des conséquences pour les étudiants avec une forte diminution du nombre de places au concours, ainsi que pour les collectivités territoriales et les équipes pédagogiques, avec des fermetures de classes et une déstabilisation du maillage territorial scolaire.
En revanche, il ne me semble pas opportun d'aller au-delà du schéma d'emploi proposé, car cela entraînerait un nombre important de fermetures de classes dans les territoires, avec de fortes conséquences au niveau social. Les petites écoles seront sans doute préservées, sachant qu'il est difficile de fermer une classe dans une école où l'on en compte seulement deux ou trois. Seront principalement touchées les villes de taille moyenne, qui connaissent déjà un sentiment de déclassement, ainsi que les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) ; c'est la France périphérique qui va souffrir le plus.
Pour amortir le choc, le ministère devra sans doute renoncer à certaines de ses priorités ; je pense au développement des toutes petites sections, aux mesures en faveur des écoles orphelines, à l'accompagnement renforcé de 15 % des collèges les plus défavorisés concentrant la très grande difficulté scolaire, ou encore au développement des unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis). Sans doute sera-t-il tenté également de rogner sur les effectifs des brigades de remplacement, à rebours de l'effort effectué cette année pour les reconstituer.
On peut aussi s'interroger sur les conséquences d'une suppression d'ETP plus importante que prévu sur les recrutements. Cela entraînera une diminution du nombre de places au concours, au moment où le ministère réforme celui-ci pour le rendre plus attractif. Par ailleurs, cela entravera la capacité du ministère à mettre à disposition suffisamment de personnels pour assurer 50 % du volume horaire des cours du nouveau master. Enfin, l'enseignement privé sera touché du fait de l'application du principe budgétaire des 80-20, avec des fermetures d'établissements en prévision.
Je ne serai pas beaucoup plus long sur l'analyse de ce budget, car je souhaite évoquer la mise en oeuvre de la réforme de la formation initiale. Je mentionnerai seulement un effort en faveur du médico-social, avec le recrutement de 300 assistants sociaux, infirmiers et psychologues scolaires. Le ministère souhaite éviter un saupoudrage en concentrant les personnels dans les établissements où les besoins sont les plus importants.
Enfin, le budget prévoit la création de 1 200 postes d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Cette nouvelle hausse ne satisfait pas pour autant les besoins. Fin octobre 2025, 36 000 enfants bénéficiant d'une notification AESH étaient encore en attente d'attribution. Une réforme systémique de l'école inclusive s'impose.
Mes chers collègues, en l'état, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
Je souhaite maintenant faire un point sur la mise en oeuvre de la réforme initiale au regard des recommandations de la commission. Dans un consensus partagé par tous les acteurs du monde éducatif, nos travaux avaient établi le constat d'une formation initiale inadéquate ; je vous renvoie au rapport de juin 2024 de nos collègues Max Brisson et Annick Billon sur cette réforme.
Nous appelions à une reprise en main par l'éducation nationale de la formation de ses futurs enseignants : le nouveau master éducation et enseignement (M2E) prévoit une présence renforcée de formateurs exerçant dans l'enseignement scolaire, afin de délivrer un enseignement au plus près de la réalité pédagogique et du métier. Par ailleurs, le ministère envisage une formation continue, de la licence aux trois années qui suivent la titularisation, impliquant un développement progressif des compétences professionnelles des enseignants sur un continuum de huit ans.
J'en viens à la nouvelle licence du professorat des écoles (LPE), qui répond aux besoins d'une formation pluridisciplinaire et polyvalente pour les enseignants du premier degré. Celle-ci implique des stages obligatoires en milieu scolaire, notamment dès la fin du premier semestre pour confronter rapidement les étudiants à la réalité du métier et, le cas échéant, leur permettre de se réorienter.
Je rappelle ce chiffre : près de 30 % des lauréats actuels du concours du professorat des écoles n'ont jamais effectué un stage d'observation avant leur prise de poste.
Toutefois, de nombreuses interrogations demeurent, d'autant que cette réforme se réalise dans la précipitation et avance par à-coups en raison de l'instabilité politique.
Il est urgent de finaliser les procédures d'accréditation des universités qui proposeront le nouveau master, ainsi que la carte des formations de la licence. Dans moins de trois semaines, la plateforme Parcoursup sera ouverte afin de présenter l'ensemble des formations disponibles ; il s'agira d'y retrouver l'ensemble des LPE, avec un maillage territorial suffisant. L'enjeu est le même pour les masters avec la plateforme Mon Master, qui sera ouverte début février 2026.
Concernant le concours du premier degré, il convient de préciser rapidement les modalités de passage de celui-ci pour les étudiants issus des LPE. Le ministère souhaite exempter des deux épreuves d'admissibilité les étudiants ayant montré leur maîtrise des connaissances disciplinaires au cours de la licence. Or, le concours prévoit quatre épreuves, avec une note allant de 0 à 20 pour chacune d'elles. Comment noter les étudiants sur ces deux épreuves qu'ils n'auront pas passées ? Les notes d'admissibilité, liées à des oraux, seront-elles les seules prises en compte pour tous les candidats ?
L'échéance est encore lointaine, les premiers concours concernés ayant lieu en 2029. Mais, si la moyenne des trois années de licence est prise en compte, la question se posera plus tôt, dès les examens du premier semestre 2027. Par ailleurs, cela risque de compliquer une intégration de la LPE en cours de formation.
La réussite de cette réforme repose sur la capacité de mobilisation du ministère ; je pense notamment à ces 50 % du volume horaire des cours en master qui devront être assurés par ses personnels. Les services déconcentrés, en lien avec les universités, doivent également proposer aux étudiants en licence et en master un nombre suffisant de stages d'observation et de responsabilité, proches de leur lieu d'études ou de résidence afin de tenir compte de leur faible mobilité.
En conclusion, je souhaite revenir sur la carte scolaire pluriannuelle. Celle-ci restera à l'état de belle idée tant que la définition du nombre d'ETP sera annuelle. Il est essentiel de définir un schéma pluriannuel des ETP permettant de dessiner une trajectoire connue de tous à l'avance. Cela aurait peu de sens de le faire en 2026 en raison des échéances électorales nationales. En revanche, quel que soit notre groupe politique, nous pourrions porter collectivement cette demande à partir de 2027. Sans cela, l'école ne pourra que subir la déprise démographique et se cantonnera à une navigation à vue, année après année.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la commission des finances sur les la mission « Enseignement scolaire ». - Différents éléments ont conduit à l'élaboration de ce budget consacré à l'enseignement scolaire. Premièrement, il y a le contexte financier. Je ne reviendrai pas sur la dette, mais celle-ci a orienté les réflexions du ministère et celles de la commission des finances afin de proposer certains ajustements.
Deuxièmement, j'évoquerai - c'est peut-être le point le plus important - l'effondrement démographique de notre pays. En termes d'effectif scolaire, après une baisse de 100 000 élèves l'an dernier, celle-ci est de 107 000 élèves cette année et sera de 140 000 élèves l'année prochaine, avec l'arrivée dans les écoles maternelles des enfants nés en 2022 et 2023, deux années où l'on avait observé une diminution de 7 % des naissances.
Cet « hiver démographique » n'est pas spécifique à la France ; il est commun à tous les pays industrialisés. En France, le taux de fécondité décline, pour atteindre aujourd'hui 1,6 enfant par femme. Nous sommes obligés de tenir compte de ce phénomène à la fois triste et inquiétant afin de mettre en adéquation notre système scolaire et la démographique de notre pays.
Pour la première fois, entre le 1er juin 2024 et le 31 mai 2025, le nombre des naissances a été inférieur à celui des décès. En 2023, on recensait 653 000 naissances, contre 833 000 en 2010.
Troisièmement, depuis quelques années, le nombre d'enseignants s'est stabilisé. Entre 2015 et 2025, on observe même une légère augmentation, aussi bien dans le premier que dans le second degré.
Quatrièmement, on constate un manque d'attractivité du métier, raison pour laquelle le ministère a engagé une réforme de la formation continue. Le nombre de places vacantes lors des concours s'avère de plus en plus important. Le métier n'attire plus pour de nombreuses raisons, la principale étant financière. Le Gouvernement a fait des efforts ; par exemple, la promesse du Président de la République sur les salaires des nouveaux professeurs, s'engageant à passer la barre des 2 000 euros mensuels, a été tenue.
En revanche, la situation des enseignants en milieu de carrière laisse à désirer, surtout si on la compare à celle de nos voisins européens. Au-delà de la réforme de la formation initiale, il convient d'effectuer un effort financier. Pour cela, dans le contexte budgétaire actuel, la commission des finances propose d'augmenter le nombre de non-renouvellements de postes afin d'utiliser une partie de l'argent dégagé - au moins 25 millions d'euros - pour revaloriser les salaires de cette catégorie d'enseignants ; voilà ce que nous sommes en train de négocier avec le ministre.
Mme Marie-Pierre Monier. - Depuis quelques années, les ministres de l'éducation nationale se succèdent plus rapidement que nos exercices budgétaires. À regarder le nombre de suppressions de postes - 4 018 ETP d'enseignants, dont 1 891 postes dans le premier degré et 1 365 postes dans le second degré -, les crédits de la mission connaissent moins de nouveautés. On a l'impression de revenir à la version initiale du PLF de 2025, que notre mobilisation avait permis d'améliorer au fil de l'examen du budget.
Nous regrettons le choix comptable proposé au nom de l'évolution démographique. La dernière étude de l' Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), parue en septembre 2025, rappelle que la France a un taux d'encadrement plus défavorable que la moyenne des autres pays. À nos collègues qui trouvent raisonnable cette suppression de postes, je rappelle les conséquences d'une fermeture de classes dans les territoires ruraux. Se mobiliser pour préserver des postes au niveau local n'a de sens que si nous luttons, au moment du budget, pour maintenir le nombre de postes nécessaire.
Concernant le second degré, les 1 365 suppressions de postes programmées vont plus loin encore que l'évolution démographique. En 2026, la baisse des effectifs dans le secondaire correspond à seulement 1 000 postes. Je rappelle par ailleurs que lorsque la démographie était en hausse dans le second degré, nous y avons supprimé des postes.
Concernant l'amélioration des conditions de travail des professeurs, dans un contexte où la carrière d'enseignant est confrontée à une crise d'attractivité sans précédent, le budget s'avère défaillant. En 2025, 1 700 postes sont restés vacants à l'issue des concours. Les départs volontaires d'enseignants représentent désormais plus de 15 % des sorties de la fonction publique, contre 2 % en 2012. Et cette année encore, 2 500 enseignants manquaient à l'appel le jour de la rentrée.
Sur le plan de la revalorisation budgétaire des professeurs, aucun nouvel effort significatif n'est prévu. Un rapport de l'OCDE paru en 2024 montre que les salaires des enseignants français n'ont progressé que de 1 % en huit ans, contre 4 % en moyenne dans les pays membres.
Si nous ne voulons pas que nos personnels enseignants renoncent, nous devons davantage les accompagner et les protéger face à la recrudescence des violences et des remises en cause. En 2023-2024, 57 % des enseignants du second degré ont vécu une atteinte à leur personne ou à leur bien. Le nombre de faits graves recensés dans les établissements a doublé en cinq ans. La protection fonctionnelle n'est pas accordée de façon systématique ; au-delà de l'écriture de la loi, des moyens supplémentaires sont nécessaires pour garantir sa mise en oeuvre sur le terrain et s'assurer que le « pas de vagues » ne corresponde plus à une réalité.
Enfin, sur le sujet de l'inclusion scolaire, la commission d'enquête menée à l'Assemblée nationale (AN) sur la prise en charge du handicap a conclu à de nombreuses lacunes. Lors de la dernière rentrée scolaire, près de 50 000 enfants étaient en attente d'un accompagnement malgré une notification en bonne et due forme. Aujourd'hui, 14 % des enfants ne bénéficient pas de l'accompagnement auquel ils ont droit, soit une augmentation de 33 % par rapport à l'an dernier. Face à ce constat dramatique, le recrutement de seulement 1 200 AESH supplémentaires n'est pas à la hauteur des enjeux.
Pour l'ensemble de ces raisons, notre groupe s'oppose à l'adoption des crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - La promesse républicaine de l'école consiste à élever le niveau général et à donner à tous les mêmes chances. Avec un tel budget, nous n'atteignons pas les objectifs fixés par cette promesse. Sachant les conditions de travail des personnels de l'éducation nationale, nous souhaitons que la baisse démographique ne s'accompagne pas d'une baisse des effectifs.
Aujourd'hui, les missions des personnels enseignants sont de plus en plus variées. L'enseignement doit s'adapter aux profils particuliers et aux besoins spécifiques des enfants. Le non-renouvellement des livres annonce également des complications à gérer pour les enseignants.
Concernant la réforme de la formation initiale, je m'interroge sur la capacité du ministère à mobiliser un nombre de formateurs suffisant. Il est précisé que la moitié du volume horaire doit être assuré par des praticiens de l'enseignement scolaire ; or, le ministre a indiqué que la cible ne serait pas atteinte cette année. Par ailleurs, il convient de préciser qui sont ces professionnels de l'éducation nationale.
Une autre interrogation porte sur l'attractivité du métier. Certes, on note une revalorisation des salaires en début de carrière, mais rien n'est fait pour les enseignants en milieu de carrière. Je souhaite également mettre l'accent sur un élément souvent oublié dans l'élaboration des politiques publiques : l'usure du métier.
Je dénonce les baisses budgétaires concernant la formation continue. Celles-ci témoignent d'un abandon des personnels et d'une dégradation des conditions d'accueil des élèves.
Enfin, l'inclusion scolaire repose sur le corps non reconnu des AESH, dont le nombre de recrutements demeure insuffisant.
Au regard de ce budget, l'école de la République subit des décisions précipitées et mal mesurées par le Gouvernement. Aussi, notre groupe s'oppose à l'adoption des crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
M. Max Brisson. - Le rapport de M. Grosperrin permet d'y voir plus clair sur les non-choix du Gouvernement en matière d'éducation. Les débats se focalisent déjà sur la question des postes supprimés. Le rapporteur spécial de la commission des finances a rappelé les enjeux de la baisse démographique. Si l'on appliquait la seule logique comptable, 18 000 postes seraient supprimés en deux ans ; le Gouvernement propose d'en supprimer 4 000, et notre rapporteur souscrit à cette proposition.
J'invite à dédramatiser le débat. Les 4 000 postes supprimés correspondent au nombre de postes non pourvus dans le cadre du concours l'année dernière. On peut vouloir ouvrir des postes, mais encore faut-il des candidats. Par ailleurs, la proposition de revaloriser les salaires des enseignants en milieu de carrière mérite d'être étudiée.
Nous sommes contraints à des rabotages budgétaires, car nous avons toujours refusé de réaliser les réformes structurelles. Les premières victimes sont les écoles rurales. Dans mon département, par le jeu des RPI, 101 professeurs exercent seuls dans leur école. Cela signifie que, si l'on supprime un poste dans ces territoires, on supprime l'école. Il serait donc judicieux de mener une réflexion sur l'offre scolaire en zones rurales. Par exemple, pourquoi ne pas intégrer le collège à cette offre ? Actuellement, celle-ci est le résultat de choix empiriques, avec de nombreuses fermetures de postes, de classes et d'écoles, sans jamais associer les élus à la réflexion.
Alors que s'impose cette réforme de l'offre pédagogique en zones rurales, le ministère de l'éducation nationale a précisé qu'il ne souhaite pas réformer, mais piloter. Jusqu'à présent, nous avons concentré nos réflexions sur les moyens et le nombre de postes ; or, rien ne bouge et tout décline. Faute de réformes structurelles, nous sommes aujourd'hui dans une impasse.
Mme Laure Darcos. - Il est dramatique de constater que 4 000 postes manquent à l'appel et que ce métier souffre encore d'un manque d'attractivité. Le dédoublement des classes a amélioré les conditions d'apprentissage des enfants, à un âge où s'acquièrent les savoirs fondamentaux. Le nombre de postes supprimés correspond à celui des postes non pourvus ; il s'agit de s'en tenir au nombre annoncé.
Je déplore le manque d'AESH, et soutiens l'initiative de mes collègues qui souhaitent créer un corps dédié.
Concernant le secteur paramédical, les infirmières, psychologues et médecins scolaires sont toujours, du fait de la décentralisation, affiliés à l'éducation nationale. Alors que la santé mentale des jeunes est devenue une cause nationale, nous manquons de personnels, le chiffre ne correspond pas à l'ambition fixée.
Comme l'an dernier, ce budget m'inspire un arrière-goût un peu amer. Ce qui m'attriste aujourd'hui, ce sont la résignation des syndicats et le sentiment de mal-être de nos enseignants. Sans doute est-ce dû aussi à la multiplication du nombre de ministres au cours de ces deux dernières années.
Mme Annick Billon. - Sur la base des conclusions données, notre groupe suivra l'avis du rapporteur, avec quelques points de vigilance toutefois. L'enseignement scolaire devient le deuxième budget de l'État, après la défense, en autorisations d'engagement (AE). La baisse démographique est un séisme, qui pourrait entièrement redessiner la carte scolaire. Entre 2025 et 2029, les effectifs du premier degré devraient baisser de 7 %, soit moins de 450 000 élèves en cinq ans. Sur la même période, les effectifs du second degré reculeraient d'environ 4 %.
Nous aurons un débat pour savoir s'il convient de supprimer des postes ou d'améliorer l'encadrement. Je rappelle que les classes françaises sont parmi les plus denses, avec en moyenne 21,6 élèves par classe dans le premier degré - davantage que dans des pays comme l'Allemagne, la Finlande et le Portugal - et 25,9 élèves par classe dans le second degré - seul le Japon, parmi les pays membres de l'OCDE, a un nombre supérieur.
Avec la création de 5 440 ETP dans le PLF pour 2026, du fait des 7 938 postes supplémentaires de stagiaires, le plafond d'emploi s'avère en hausse. Ces créations sont contrebalancées par la suppression d'environ 4 000 emplois titulaires. Le fait de supprimer 8 000 postes, comme le propose M. Paccaud, impliquerait de fermer 1 500 écoles, pour la plupart dans nos territoires ruraux. Aussi, même si cela permettrait peut-être de revaloriser les salaires d'enseignants en milieu de carrière, je ne suis pas favorable à cette suppression de postes.
Le projet de revalorisation des enseignants est resté au fond du cartable. De même, concernant le pacte enseignant, le bilan est mitigé. Celui-ci serait majoritairement utilisé par les hommes, entraînant un accroissement des inégalités de genre.
Sur l'inclusion scolaire, je soutiens une hausse du nombre d'AESH. Lors de la dernière rentrée scolaire, 42 000 enfants ne bénéficiaient pas de l'accompagnement auquel ils avaient droit. Le slogan affiché s'avère en décalage avec la réalité des familles. Dans certains territoires, il arrive que des AESH accompagnent 10 élèves en situation de handicap. Par ailleurs, on observe un manque de places dans les instituts médico-éducatifs (IME), ce qui entraîne une dégradation de la chaîne éducative.
Je souhaite également évoquer l'éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars) ; il en a beaucoup été question lors de la dernière rentrée, avec de nombreuses formations proposées. Encore une fois, le slogan est en décalage avec la réalité, sachant que seulement 15 % des élèves bénéficient de ces cours pourtant inscrits dans la loi.
Mme Monique de Marco. - Comme l'a indiqué ma collègue Annick Billon, pour la première fois, l'enseignement scolaire ne constitue pas le premier poste de dépenses de l'État. Cela illustre un changement dans les priorités de la Nation, et confirme la poursuite de la politique d'austérité menée depuis plusieurs années. Notre pays continue de sous-financer son école. Par ailleurs, l'éducation nationale est aujourd'hui reléguée au neuvième rang protocolaire dans le Gouvernement.
La création de 5 440 ETP cache la suppression massive et sèche de 4 018 postes d'enseignants. Cette dernière est justifiée par une logique comptable à laquelle je ne souscris pas. C'était l'occasion de revenir sur les taux d'encadrement et sur la taille des classes. Les marges de manoeuvre restent importantes, car toutes les études démontrent les effets significatifs de la réduction de la taille des classes sur les résultats scolaires, ainsi que sur le bien-être des élèves et des enseignants.
Cette suppression de postes risque de provoquer la fermeture de classes en zones rurales, notamment au niveau du premier degré. L'école constitue parfois le dernier service public dans ces territoires, et il faudrait réfléchir à une réforme de l'offre pédagogique comme l'a proposé M. Brisson.
La création de postes d'enseignants stagiaires est temporaire. Elle vise à permettre la mise en oeuvre progressive de la réforme initiale des enseignants et des conseillers principaux d'éducation (CPE). Celle-ci, annoncée au mois de mars dernier, reporte à 2026 la mise en place du concours d'entrée à bac + 3 au lieu de bac + 5.
On observe un ralentissement dans la création des postes d'AESH. Le PLF pour 2026 prévoit la création de seulement 1 200 postes, soit deux fois moins que l'an dernier et trois fois moins qu'il y a deux ans. Ces créations de postes s'avèrent donc une goutte d'eau dans l'océan.
J'en viens à la diminution des crédits liés à la formation. Cette importante coupe budgétaire de 1 milliard d'euros dépend d'une logique uniquement comptable. Cela témoigne du moindre intérêt que le Gouvernement accorde à la formation des enseignants, alors que les besoins ne cessent de s'exprimer. Selon une enquête de l'OCDE, 47 % des enseignants français considèrent qu'il n'existe pas de formations appropriées à leurs besoins. Le constat de cette sous-utilisation des crédits aurait dû conduire le Gouvernement à proposer des leviers d'amélioration de la formation continue des enseignants.
Monsieur Paccaud, je m'interroge sur votre proposition de revaloriser le salaire des enseignants en milieu de carrière. Où comptez-vous trouver les 25 millions d'euros nécessaires ? Pourquoi ne pas utiliser l'argent supprimé pour la formation ?
Concernant le pass Culture, on observe une diminution des crédits de 10 millions d'euros par rapport à l'an dernier. Ce dispositif favorise pourtant les sorties pédagogiques et l'accès à la culture dans les zones rurales et périurbaines. En janvier dernier, des projets n'ont pu aboutir faute de financements. Il existe une véritable attente sur ce sujet.
On ne parle plus du « choc des savoirs ». Parfois, on a donc raison avant tout le monde.
M. Bernard Fialaire. - Nous abordons ce projet de budget pour 2026 alors que s'invite dans le débat public la question des rythmes scolaires et des temps de l'enfant. Cela rend d'autant plus pertinentes les réflexions de notre collègue Max Brisson sur la nécessité d'engager une grande réforme de l'éducation nationale.
Je me désole de cette chute démographique, même si celle-ci doit permettre de diminuer les effectifs dans les classes. Par ailleurs, comme l'a rappelé Mme Darcos, nous avons observé le bénéfice des dédoublements de classes partout où cela a pu se réaliser.
Concernant les écoles rurales, il s'agit de ne pas vouloir maintenir à tout prix un service quand tant d'autres font défaut. Le sort des enfants ne doit pas servir d'alibi pour aborder le sujet.
Il n'est plus possible que les compétences du secteur médico-social soient gérées à la fois par les collectivités et l'éducation nationale. Concernant le handicap, la protection maternelle et infantile (PMI) prend en charge le dépistage avant de passer le relais à la médecine scolaire. Avec davantage de cohérence, nous gagnerons en efficacité. De même, concernant les AESH, lorsque les intercommunalités ont pris en main le recrutement, de nombreux postes en attente ont été pourvus. Nous devons clarifier la prise en charge du médico-social dans l'école et en dehors de l'école.
Au-delà de ces points de vigilance, je suivrai l'avis du rapporteur quant à l'adoption des crédits.
Mme Samantha Cazebonne. - Avec 89,6 millions d'euros en AE et en crédits de paiement (CP), les crédits de la mission sont préservés. Leur évolution s'inscrit dans la continuité d'une hausse progressive depuis 2019, de l'ordre de 3,15 milliards d'euros en six ans.
Ce budget traduit des priorités stratégiques essentielles : la maîtrise des savoirs fondamentaux, la lutte contre les inégalités sociales et territoriales, la lutte contre le harcèlement ou encore le soutien à la politique de l'école inclusive. En 2026, la mission portera une réforme d'ampleur, celle de la formation initiale, qui doit permettre de remédier aux difficultés d'attractivité du métier en rémunérant de futurs enseignants encore en formation.
Le PLF pour 2026 prévoit la création de 8 800 postes de fonctionnaires stagiaires. En parallèle, la baisse des effectifs d'enseignants de 4 600 ETP anticipe une diminution importante du nombre d'élèves dans le premier degré qui devrait s'accentuer dans les prochaines années.
J'attire votre attention sur le programme 214 concernant le soutien de la politique de l'éducation nationale. En commission des finances, trois amendements adoptés sur l'initiative du rapporteur spécial ont diminué, de façon importante, les subventions allouées à plusieurs établissements publics administratifs nationaux.
Le réseau Canopé, opérateur clé de la formation des enseignants et des alliances éducatives territoriales qui jouent un rôle particulièrement pour les Français de l'étranger, est déjà concerné par 111 des 142 emplois supprimés au sein des opérateurs de l'éducation nationale. L'adoption d'un amendement tendant à diminuer sa subvention de 20 millions d'euros risque de fragiliser plus gravement encore sa capacité à assurer ses missions de service public. Cela aurait de fortes conséquences sur la trésorerie de l'établissement. Je défendrai en séance un amendement visant à augmenter le budget alloué à cet opérateur, conformément à celui qui a été adopté par la commission des affaires culturelles de l'AN.
Le Centre national d'enseignement à distance (Cned) joue un rôle essentiel dans l'enseignement à distance à tous les niveaux de formation. Cet opérateur a également vu sa subvention diminuer de 15 millions d'euros en commission des finances.
Enfin, l'Office national d'information sur les enseignements et les professions (Onisep), opérateur national de l'orientation, est touché par une baisse de subventions votée par la commission des finances, de l'ordre de 5 millions d'euros.
Ces baisses risquent de fragiliser les opérateurs, dont le rôle est pourtant essentiel en matière de formation et d'enseignement. J'en appelle donc à rester vigilant et à ne pas suivre la position de la commission des finances.
Pour toutes ces raisons, notre groupe préfère s'abstenir concernant le vote des crédits relatifs à l'enseignement scolaire.
M. Stéphane Piednoir. - Je souhaite mettre l'accent sur la réduction du nombre de postes dans l'éducation nationale. Il s'agit de prendre en compte la déprise démographique qui risque de s'accentuer dans les prochaines années. Quand on examine un budget, on ne peut pas s'exonérer de la logique comptable.
Par ailleurs, il convient d'améliorer la pratique et le quotidien des professeurs confrontés aujourd'hui à des difficultés qui relèvent davantage de l'évolution de la société que des moyens de l'éducation nationale. Le taux d'encadrement, notamment dans le premier degré avec 21 élèves par classe, s'avère en nette baisse. Certes, il existe des disparités importantes, mais la situation s'est améliorée.
La perte d'intérêt pour le métier d'un certain nombre de professeurs est liée à l'absence de motivation. Quand on annonce que, au bout du compte, 96 % des candidats auront le baccalauréat, on dénature l'exercice du métier.
L'an dernier, des mesures de réduction des effectifs avaient été envisagées sans finalement aboutir. Cette année, entre 4 000 et 8 000 suppressions de postes sont proposées. Il s'agit de revaloriser ce métier tout en développant des formations d'accompagnement.
Mme Colombe Brossel. - En complément des observations pertinentes formulées par Marie-Pierre Monier et d'autres collègues qui nous conduiront à ne pas suivre l'avis favorable du rapporteur, je souhaiterais que nous repartions de la situation concrète observée à la rentrée à l'intérieur des écoles, des collèges et des lycées. Je remercie d'ailleurs Jacques Grosperrin pour les auditions qu'il a organisées, car elles nous permettent de balayer largement le sujet et de disposer d'informations utiles.
Nous pouvons ainsi affirmer que l'annulation de la suppression de 4 000 postes, l'année dernière, n'a pas du tout servi à la revalorisation des salaires des enseignants, mais, selon la direction générale de l'enseignement scolaire (Dgesco), à créer 540 ETP en quatrième et troisième pour les groupes de besoins, à prévoir 500 ETP pour la création des pôles d'appui à la scolarité (PAS) - ils ne seront finalement pas généralisés -, 60 ETP pour les toutes petites sections (TPS), 800 ETP pour les remplacements et enfin 100 ETP pour le pilotage et l'encadrement.
La réalité observée dans nos territoires, quelles que soient leurs spécificités, est la suivante : dans le premier degré, les remplaçants sont tous « réservés » dès le premier jour, ce qui réduit à zéro nos capacités à assurer des remplacements ; dans le second degré, il manquait au moins un enseignant dans plus de 60 % des établissements. Dans ce contexte, est-il vraiment raisonnable de continuer à supprimer des postes, en ayant à choisir entre la proposition du ministère de supprimer 4 000 postes et celle de nos collègues de la commission des finances visant à en supprimer le double ? Si elle était retenue, cette dernière aurait, selon moi, de graves conséquences.
Pour ma part, je pense qu'il faut continuer à créer des postes d'enseignants, afin de continuer à réduire le nombre d'élèves par classe. Par ailleurs, nous continuons à payer le fait qu'un certain nombre de réformes n'en ont en fait que le nom et qu'elles sont mal pilotées. Je prends un exemple qui illustre à merveille les travers de notre système que nous payons, encore plus lorsque nous supprimons des postes par milliers : avec la mise en place du pacte enseignant, les heures supplémentaires effectives (HSE) ont quasiment disparu ; néanmoins, du fait du recentrage du pacte sur les remplacements, des séances d'éducation à la vie affective et relationnelle, et à la sexualité, qui étaient précédemment financées par le biais des HSE, ne peuvent plus être effectuées dans un certain nombre d'académies, alors même que l'Evars est rentrée dans les programmes ! Allons-nous continuer longtemps ainsi ?
Pour prendre un autre exemple, et même si je souscris à la nécessité de revaloriser les rémunérations en milieu de carrière, il s'avère que le pacte enseignant a amplifié les inégalités entre les enseignants du premier et du second degré, car ils n'y ont pas tous droit dans les mêmes conditions. De surcroît, le pacte a aussi été un accélérateur des inégalités de genre : alors que la profession est fortement féminisée, les enseignants hommes se positionnent le plus souvent pour effectuer des heures du pacte.
Face à ces dysfonctionnements récurrents, la seule réponse apportée consiste à continuer à supprimer des ETP, ce qui ne contribue en rien à améliorer notre système.
De la même manière, le dispositif « Devoirs faits » est devenu obligatoire dans tous les collèges en sixième, mais les moyens de le financer - qu'il s'agisse des HSE ou du pacte - ne sont ni obligatoires ni prévus dans l'ensemble des établissements : la réponse à ce dysfonctionnement, une fois encore, consiste-t-elle à couper la poire en deux entre une proposition de suppression de 4 000 postes et une autre visant à supprimer 8 000 postes ? Non, je ne le crois pas.
S'agissant enfin du médico-social, on pourrait a priori se satisfaire des créations de postes prévues par le budget, mais celles-ci sont fort éloignées des besoins et des réalités vécues dans les établissements : il n'y a ainsi qu'un psychologue scolaire pour 1 600 élèves, tandis que seuls 7 800 postes d'infirmiers scolaires existent alors qu'il en faudrait au moins le double, et je ne parle même pas des médecins scolaires, dont la rémunération est si faible que personne ne se porte candidat à ce métier. Là résident les véritables sujets et les nécessaires créations d'emplois, et pas à hauteur de 300 postes alors que l'éducation nationale accueille 12 millions d'élèves.
M. Pierre Ouzoulias. - Je m'interroge sur cette notion d' « hiver démographique » censé toucher tous les pays occidentaux : la Chine est peut-être devenue un pays occidental, car le nombre d'enfants par femme s'y élève à 1,15, contre 1,24 enfant par femme en Italie. Je pense que cet hiver est corrélé à un hiver démocratique : en effet, les citoyennes et les citoyens ne procréent plus lorsque la société ne fait plus sens pour eux, et c'est bien ce qui se passe dans cet Occident élargi à la Chine.
Je crois justement que l'éducation et la connaissance pourraient être un levier pour que les citoyens aient de nouveau foi en l'avenir et qu'ils fassent de nouveau des enfants. Au lieu de considérer qu'il faudrait accompagner la baisse démographique par la diminution du nombre de postes, nous pourrions considérer qu'une politique ambitieuse de la connaissance pourrait être un moyen de combattre la diminution de la natalité. Cette solution permettrait notamment d'éviter l' « ultra-métropolisation » de notre territoire, car les territoires ruraux perdront en attractivité du fait du manque d'enseignants, au profit des zones urbanisées.
Bernard Fialaire a évoqué les conclusions de la convention citoyenne sur les rythmes scolaires, que je trouve extrêmement inquiétantes en ce qu'elles révèlent une volonté de diminuer une nouvelle fois le nombre d'heures enseignées. Je me demande s'il ne faudrait pas, à l'inverse, profiter de ce recul démographique pour augmenter le nombre d'heures enseignées : si nos élèves se situent aujourd'hui à une place aussi basse dans les classements, c'est également à cause de la diminution du nombre d'heures à l'oeuvre depuis vingt ans.
S'agissant des professeurs, je vous laisserai le soin de leur proposer de travailler plus ; l'autre solution consiste à en conserver un certain nombre, de manière à disposer d'un plus grand nombre d'enseignants par classe et d'augmenter le nombre d'heures : cette réforme est selon moi indispensable, car il faut arrêter de considérer qu'une baisse du nombre d'heures enseignées peut être une solution viable dans une société « hyper-technologisée » telle que la nôtre.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis. - Je tiens à rappeler qu'il s'agit d'un budget d'urgence, qui ne satisfait logiquement ni les uns ni les autres. N'oublions pas que sept ministres se sont succédé en moins de deux ans et que la dissolution insensée décidée par le Président de la République nous a placés dans une situation très délicate. Partant de ce constat, il nous incombe de faire preuve de responsabilité et de voter un budget.
Je tiens à remercier mes collègues qui étaient présents aux auditions.
Notre collègue Olivier Paccaud a insisté sur la diminution du nombre d'élèves, dont nous sommes tous conscients.
Concernant le métier d'enseignant, les candidats le choisissent d'abord par vocation. Toutefois il regarde aussi la rémunération. Les efforts de rémunération faits sur les débuts et en fin de carrière ne doivent pas nous dispenser de travailler sur la revalorisation des rémunérations en milieu de carrière. J'espère que nous pourrons trouver un chemin pour avancer sur ce sujet, d'autant que vous devez débattre avec le ministre d'un arbitrage sur ce point.
Madame Monier, c'est triste à dire, mais le temps va jouer pour nous concernant le nombre d'élèves par classe. Ne nous leurrons pas : des suppressions de postes auront lieu chaque année, même si la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne devrait pas être retenue pour l'éducation nationale. Vous avez aussi évoqué la crise de l'attractivité du métier, et je rappelle à tous mes collègues que la suppression de postes n'envoie pas un signal positif à ceux qui souhaitent exercer ce métier : soyons donc prudents en la matière.
Madame Corbière Naminzo, vous avez dressé un tableau assez noir de la situation. Constatons toutefois que des progrès ont été faits en matière d'inclusion scolaire, même si de trop nombreux enfants sont dans l'attente d'une solution de la part d'un pays tel que la France.
Comme le souligne Max Brisson, ce n'est effectivement pas en rajoutant toujours plus de moyens que nous parviendrons à faire mieux. Il faut dédramatiser le débat, notamment autour de la carte scolaire, mais il est vrai que les écoles rurales sont les premières affectées lorsque des postes sont supprimés.
Cela nous renvoie aux travaux que nous avons pu mener sur le maillage territorial, et je suis persuadé que nous devrons travailler différemment : l'école socle que vous évoquiez pourrait être une solution parmi d'autres, car diverses méthodes peuvent être employées afin de proposer une offre pédagogique étoffée.
Madame Darcos, vos réflexions m'invitent à recommander la lecture du livre intitulé Tout se joue avant six ans de Fitzhugh Dodson, tant les années allant de la petite section jusqu'au CE1 jouent un rôle crucial pour l'enfant.
Concernant les organisations syndicales, il est vrai qu'une grande résignation s'est exprimée au cours des tables rondes, mais, pour prendre le côté positif des choses, j'ai apprécié de les voir adopter une approche plus axée sur la proposition que sur la contestation : un changement semble être à l'oeuvre.
Madame de Marco, le budget de l'éducation n'est plus que le troisième budget de l'État, derrière celui de la défense, mais aussi celui du remboursement de la dette. Quant au « choc des savoirs », je pense qu'il a été rendu impossible par la valse des ministres à l'oeuvre depuis deux ans.
Notre collègue Bernard Fialaire a souligné la nécessité de renforcer la cohérence des actions dans le champ médico-social.
Madame Cazebonne, vous avez rappelé à juste titre les diminutions de crédits pour le réseau Canopé, le Cned et l'Onisep pour un total de 40 millions d'euros. Je tiens toutefois à rappeler le contexte budgétaire dans lequel nous nous trouvons.
Monsieur Piednoir, vous avez raison de souligner que la logique comptable n'est pas un gros mot : nous aurons ce débat et chacun défendra ses choix politiques.
Colombe Brossel évoquait l'annulation de la suppression de 4 000 postes. En complément des chiffres qu'elle a donné sur l'utilisation de ces postes, j'ajoute que 170 ETP de CPE ont été créés dans le cadre du plan « tranquillité scolaire ». Par ailleurs, le Pacte est venu renforcer les inégalités de salaire entre le premier degré et le second.
Enfin, monsieur Ozoulias, il faudra en effet augmenter le nombre d'heures dans un certain nombre de matières, car l'avenir de notre Nation passe par l'éducation et par nos jeunes.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à l'enseignement scolaire au sein de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances pour 2026.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Lundi 3 novembre 2025
- Secrétariat général de l'enseignement catholique (SGEC) : M. Guillaume PRÉVOST, secrétaire général.
- Direction générale des ressources humaines du ministère de l'éducation nationale (DGRH) : M. Christophe GÉHIN, directeur général des ressources humaines.
Jeudi 6 novembre 2025
Table ronde des syndicats représentant les personnels de direction :
- Syndicat indépendant des personnels de direction de l'éducation nationale (iD-FO) : Mme Agnès ANDERSEN, secrétaire générale ;
- Syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale (SNPDEN) : M. Bruno BOBKIEWICZ, secrétaire général.
- Direction générale de l'enseignement scolaire du ministère de l'éducation nationale (Dgesco) : M. Erwan COUBRUN, sous-directeur des programmes budgétaires et Mme Céline KERENFLEC'H, cheffe de service du budget et des politiques éducatives territoriales.
Jeudi 20 novembre 2025
Table ronde des représentants des enseignants du premier degré
- Syndicat national des lycées, collèges, écoles et du supérieur (SNALC) : MM. Jean-Rémi GIRARD, président national et Xavier PERINET-MARQUET, membre du bureau national ;
- Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC (FSU-SNUipp) : Mme Marie-Hélène PLARD, secrétaire départementale 93 et M. Rivomalala RAKOTONDRAVELO, secrétaire départemental Mayotte ;
- Fédération SUD éducation : M. Romain DELAPORTE, co-secrétaire fédéral ;
- Syndicat des enseignants (SE-UNSA) : M. Matthieu DROUHIN, conseiller national en charge du dossier Moyens et rémunérations et Mme Anne-Lise ESCALETTES, conseillère nationale en charge des dossiers moyens et rémunérations et parcours professionnels.
Table ronde des représentants des enseignants du second degré :
- Syndicat national des lycées, collèges, écoles et du supérieur (SNALC) : MM. Jean-Rémi GIRARD, président national et Sébastien VIEILLE, secrétaire national chargé de la pédagogie ;
- Fédération SUD éducation : Mmes Marion MAURICE-JASSERON, co-secrétaire fédérale et Coline WIATROWSKI, co-secrétaire fédérale ;
- Syndicat des enseignants (SE-UNSA) : M. Gilles LANGLOIS, secrétaire national secteur droits des personnels réglementation et moyens.
ANNEXE
Audition de M. Édouard Geffray, ministre de l'éducation nationale
MERCREDI 5 NOVEMBRE 2025
___________
M. Laurent Lafon, président. - Dans le cadre de nos auditions budgétaires, nous accueillons cet après-midi M. Édouard Geffray. Au nom de tous les membres de cette commission, permettez-moi, monsieur le ministre, de vous féliciter pour votre nomination.
Vous connaissez très bien ce ministère puisque vous en avez été le directeur général des ressources humaines, puis le directeur général de l'enseignement scolaire (DGESCO), entre 2019 et 2024, sous cinq ministres différents, dont vous étiez chargé de mettre en oeuvre les orientations. Pendant ces quelques années, vous avez eu l'occasion d'être entendu à plusieurs reprises par notre commission et nos rapporteurs budgétaires.
Vous prenez vos fonctions dans un contexte budgétaire, politique et scolaire que nous connaissons tous. Les attentes des enseignants, des élèves et de leurs familles sont nombreuses. Il y a quelques jours, vous avez même déclaré : « Si on parle de l'état de l'école en général, évidemment que la situation est extrêmement inquiétante. » Face à ce constat, quelles seront vos actions prioritaires ?
Pour en venir au projet de loi de finances (PLF) pour 2026, les crédits des programmes relevant de votre ministère s'élèvent, hors compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », à 63 milliards d'euros, soit un montant quasiment stable, puisqu'en augmentation d'à peine 0,3 %.
La question principale que pose ce budget est celle des équivalents temps plein (ETP). D'un côté, leur nombre augmente en raison de la réforme initiale de la formation des enseignants. Où en est cette réforme ? Reste-t-il des étapes importantes à franchir, pour lesquelles il existerait encore des points qui font débat entre les acteurs ? Si oui, lesquels ?
De l'autre côté, le nombre de postes de titulaires diminue d'environ 4 000 ETP dans le premier et le second degrés, ce qui répond en partie à la baisse du nombre d'élèves. Pouvez-vous revenir sur les ordres de grandeur des changements démographiques auxquels notre système scolaire est confronté ? Il y a quelques mois, notre commission a rendu un rapport sur le maillage territorial des établissements scolaires. Nous partageons tous un constat : il faut sortir d'une élaboration annuelle de la carte scolaire. Quelles sont vos orientations en la matière ?
Enfin, il y a quelques mois, le Sénat a adopté une proposition de loi visant à protéger l'école de la République et les personnels qui y travaillent, qui prévoit notamment l'octroi automatique de la protection fonctionnelle. Quelle est votre position sur ce point ?
Voilà, monsieur le ministre, quelques-uns des sujets sur lesquels nous attendons des précisions. Après votre intervention liminaire, vous serez interrogé par notre rapporteur pour avis, Jacques Grosperrin, puis par ceux qui le souhaiteront. Je rappelle que cette audition est retransmise en direct sur le site internet du Sénat.
M. Édouard Geffray, ministre de l'éducation nationale. - Je suis très heureux de vous retrouver en audition, même si je me présente aujourd'hui avec un positionnement différent, avec des convictions et une méthode qui sont les miennes, et sur lesquelles je reviendrai.
Je commencerai par vous remercier, ainsi que l'ensemble de la représentation nationale, car les parlementaires se sont très fortement mobilisés pour obtenir la libération de Cécile Kohler et Jacques Paris, que nous avons apprise hier soir. Pour tous les Français, ce sont des compatriotes, pour la maison éducation nationale, ce sont aussi des collègues que j'ai rencontrés dans le cadre du dialogue social, et je suis intensément soulagé de savoir qu'ils sont désormais dans les murs de notre ambassade.
Pour en venir à l'objet de cette audition, nous faisons face collectivement à deux types d'enjeux. D'abord, nous sommes confrontés à des enjeux de long terme, liés à l'immense défi que pose l'évolution de notre démographie pour les vingt prochaines années. Entre 2019 et 2029, nous aurons perdu 1 million d'élèves dans le premier degré. Un enfant qui naît aujourd'hui et entrera à l'école en 2028 passera son baccalauréat en 2043, alors que le système scolaire comptera deux millions d'élèves de moins qu'en 2015. Nous aurons donc perdu 20 % de la population scolaire au cours des dix ou quinze prochaines années.
Cette chute très importante a déjà commencé et s'accélère d'année en année. Ainsi, nous avons perdu 100 000 élèves à cette rentrée et en perdrons 150 000 à la rentrée prochaine. La démographie chute quasiment partout, mais plus vite encore dans certaines zones rurales. Dans certains départements ruraux, le taux de naissance a baissé de 30 % en dix ans.
Deux options s'offrent à nous : soit la démographie nous dicte notre avenir et nous la subissons année après année, soit nous essayons d'anticiper et de nous adapter. Je souhaite promouvoir la seconde option, en généralisant notamment les observatoires des dynamiques rurales, y compris au-delà du monde rural puisque tous les départements sont désormais touchés.
Il est aussi nécessaire d'avoir une vision pluriannuelle des risques démographiques et des risques de fermetures de classes, même si cette vision restera prévisionnelle, car subordonnée à l'adoption des PLF.
Les autres enjeux auxquels nous sommes confrontés sont plus immédiats, car nous travaillons à la fois pour les élèves qui quitteront le système éducatif dans vingt ans, mais aussi pour ceux qui y sont actuellement. Sur ce point, je suis animé par la préoccupation de stabiliser le système. Stabilité ne signifie pas immobilisme et il faut avancer, notamment sur plusieurs sujets, sur lesquels je reviendrai. Cependant, il est nécessaire de ne pas engager de nouvelles réformes organisationnelles, qui auraient pour effet d'ajouter des transformations à celles qui ont déjà été engagées.
En gardant cette idée à l'esprit, je me consacre à trois priorités.
La première concerne le niveau général des élèves, ce qui suppose que nous ayons des professeurs compétents, formés, accompagnés et soutenus. La compétence passe notamment par le modèle de recrutement et la formation initiale.
Nous avons engagé une réforme de la formation initiale, qu'il s'agit à présent de faire « atterrir », puisque les premiers concours auront lieu au mois de mars. Nous avons augmenté de 46 % le nombre de postes ouverts au concours, afin de relancer l'attractivité du métier et de préparer l'avenir. Nous devons aussi travailler sur la suite du parcours, notamment sur le contenu du master, pour qu'il soit de qualité.
Ma deuxième priorité concerne la très grande difficulté scolaire. Dans 15 % des collèges, plus d'un élève sur deux n'obtient pas le brevet ; nous ne pouvons pas l'accepter. En changeant la donne dans ces collèges, nous répondrons à 40 % de la très grande difficulté scolaire du pays. Il s'agit donc d'investir massivement dans ces établissements, en termes de pédagogie, d'accompagnement social et de santé, et éventuellement de moyens d'enseignement. Il s'agit aussi de faire en sorte que les recteurs définissent, établissement par établissement, avec les équipes éducatives et les collectivités, un plan d'action pour redresser la barre.
Je poursuivrai aussi le travail sur d'autres enjeux d'inégalité scolaire, tels que l'inégalité entre les filles et les garçons, ou les inégalités culturelles, déterminantes pour la suite des parcours.
La troisième priorité concerne la santé physique et psychique de nos élèves. D'après le rapport d'étape de l'étude Mentalo, menée par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et l'Université Paris Cité, un tiers des jeunes de 11 à 24 ans présentent ou ont présenté des troubles anxieux ou dépressifs. Je ne peux me satisfaire d'une telle situation, d'autant que ce phénomène est deux fois plus important chez les filles que chez les garçons et que la proportion s'élève à 45 % à l'entrée en seconde. Ces chiffres sont en grande partie corrélés à la consommation d'écrans.
Nous avons un devoir collectif à cet égard et devons travailler autour de la santé de nos élèves, de leur prise en charge et de leur orientation vers la médecine de ville quand un problème est détecté. Nous devons aussi oeuvrer contre les violences, notamment contre le harcèlement scolaire.
J'en viens à l'état d'esprit qui m'anime et à la façon dont le PLF permet d'y répondre. Je ne conçois pas que l'on puisse travailler sur la vie dans l'école sans associer les parties prenantes : les organisations syndicales et les collectivités territoriales. Pour avancer, tout le monde doit être à bord et nous devons construire ensemble les trajectoires.
Je songe notamment aux territoires ruraux marqués par une forte baisse démographique et par des fermetures de classes ou d'écoles. Dès la rentrée 2026, je voudrais travailler, à titre expérimental pour l'instant, avec des territoires volontaires ou pilotes, départements ou intercommunalités, pour réfléchir à l'offre scolaire. Il ne s'agit pas de se contenter de fermer une classe quand il n'y a plus assez d'élèves ; il faut s'interroger sur la façon de transformer la contrainte démographique en aubaine, pour repenser l'offre scolaire, avec des moyens qui seront peut-être légèrement en baisse, mais resteront plus élevés en proportion que ce que le nombre d'enfants exige. Dans ces territoires, nous pourrions par exemple allouer un peu plus de moyens pour que les élèves puissent rester à l'école jusqu'à 17 h 30 et bénéficier de cours de soutien. Il existe des pistes de travail au niveau territorial et j'accompagnerai ce mouvement, afin que nous ne fassions pas face à des fermetures sèches, année après année, au gré de la démographie.
Par ailleurs, s'il ne faut pas taire les difficultés de l'école, il faut aussi en reconnaître le potentiel et les forces considérables. Je suis fier de savoir qu'un actif sur trente travaille actuellement à faire progresser les enfants des autres. La figure symbolique du professeur et des personnels de l'éducation nationale, leur rôle, leur place sociale et leur inviolabilité constituent des éléments absolus. Les professeurs sont à la fois notre fierté et notre espoir, et nous avons collectivement intérêt à le percevoir comme un intérêt général.
Notre école est capable de faire progresser les élèves. Nous avons beaucoup fait dans le premier degré et, ces dernières années, les résultats s'y sont sensiblement améliorés. Le second degré représente un sujet d'inquiétude, notamment au niveau du collège, comme le montrent les résultats des évaluations internationales, telles que celle menée par le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (Pisa). Cependant, année après année, nous avons réussi à grappiller des points de maîtrise supplémentaires dans le premier degré, qui démontrent une amélioration du niveau des élèves, due à l'investissement des professeurs.
Le PLF qui vous est soumis essaie de répondre à ces enjeux. Comme vous l'avez dit, monsieur le président, le budget de l'éducation nationale s'élève à 63 milliards d'euros, ce qui représente une augmentation de plus de 30 % depuis 2017. Pour ce PLF, nous avons un système de va-et-vient entre les postes, à la marge bien sûr, si l'on considère les 1,2 million d'agents publics que compte le ministère. Ce système nous permet d'amorcer certaines évolutions.
Je me suis permis d'apporter quelques graphiques sur la situation démographique, afin que chacun mesure bien de quoi nous parlons lorsque nous évoquons 4 000 suppressions d'emplois. Le premier degré, qui passera d'environ 6,7 millions d'élèves à la rentrée 2019 à 5,7 millions d'élèves à la rentrée 2029, connaît une chute démographique.
Or, ces dernières années, nous observons une stabilité, voire une progression, du nombre de professeurs. Nous n'avons donc pas suivi l'hémorragie du nombre d'élèves et ne proposons pas de la suivre. En effet, si nous le faisions, nous ferions peser une contrainte très forte sur l'ensemble du système. Il s'agirait d'appliquer une règle de trois bête et méchante, alors que la réalité territoriale est infiniment diverse. De plus, l'enjeu comporte quatre dimensions.
La première dimension consiste à admettre la chute démographique et à en tirer en partie les conséquences. Nous procédons donc à 4 000 suppressions d'emplois, qui correspondent approximativement à la moitié de la baisse démographique. Comme il ne s'agit que de la moitié, nous profitons de la triste aubaine offerte par l'évolution démographique pour améliorer les conditions d'intervention ailleurs, notamment pour diminuer progressivement le nombre moyen d'élèves par classe. En 2017, nous comptions 23,5 élèves par classe en moyenne. En 2026, ce chiffre ne sera plus que de 21, ce qui constitue un record historique dans l'histoire du système éducatif français et dans celle de la République.
Il faut donc tirer les conséquences de cette évolution démographique tout en limitant ses effets, notamment en termes de fermetures de classes. Si nous en profitons pour réduire progressivement le nombre d'élèves par classe, nous le faisons sans nous précipiter. En effet, si nous voulions atteindre trop vite la moyenne de l'OCDE, qui est de 19, nous créerions une crise du recrutement dans quinze ou vingt ans. Il nous faut aussi anticiper cette trajectoire.
En parallèle, il faut renforcer l'accompagnement des élèves dans des dimensions qui ne sont pas celles de l'enseignement, en augmentant notamment les emplois liés à la santé et à la prise en charge sociale. Nous proposons donc de créer 300 postes d'infirmières, de psychologues de l'éducation nationale et d'assistants sociaux, ainsi que 1 200 postes d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), pour continuer de suivre la trajectoire d'inclusion scolaire. Il s'agira aussi de créer 300 unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) supplémentaires. Enfin, nous continuerons d'augmenter le nombre de contrôles dans les différents établissements, notamment dans les établissements privés, sous contrat ou hors contrat.
Enfin, il s'agit aussi de préparer l'avenir en créant 8 000 postes supplémentaires grâce à la réforme du recrutement. Ainsi, le ministère de l'éducation nationale présentera un solde positif de 5 200 postes.
La trajectoire se dessine : nous tempérons les effets de la démographie, nous améliorons les conditions d'emploi, nous amorçons la pompe de l'attractivité et nous accompagnons nos jeunes dans les différentes dimensions de leur vie, notamment en termes de santé physique et psychique.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à l'enseignement scolaire. - Monsieur le ministre, vous avez toujours été à l'écoute du Sénat dans vos fonctions antérieures, ce dont je tenais à vous remercier.
Pap Ndiaye est resté un an, Gabriel Attal six mois, Amélie Oudéa-Castéra trois mois, Nicole Belloubet sept mois, Anne Genetet deux mois, Élisabeth Borne dix mois ; combien de temps allez-vous rester en poste ? Je sais que cela ne dépendra pas de vous, mais il faut mettre fin au tournis terrible qui a saisi les enseignants, les chefs d'établissement, les familles, les politiques et nous-mêmes. La stabilité est primordiale pour ce ministère, qui assure l'avenir de la Nation.
Mes premières questions porteront sur la réforme de la formation initiale, qui constitue l'une de vos priorités. Selon les informations qui m'ont été transmises lors des auditions, en licence professorat des écoles (LPE) et en master mention métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation (MEEF), l'enseignement sera assuré par des personnels de terrain de l'éducation nationale pour 50 % du volume horaire. Cette disposition reprend d'ailleurs une recommandation formulée par notre commission, dans le rapport de nos collègues Max Brisson et Annick Billon. Or certains rectorats ont déjà des difficultés pour atteindre 30 % du volume horaire ; comment parvenir à 50 % ?
Ensuite, la durée d'engagement demandée aux élèves stagiaires est-elle déjà fixée ? On entend dire qu'il s'agirait de quatre années ; à compter de la réussite du concours ou de la titularisation ? Par ailleurs, comment justifier une durée d'engagement moindre que dans d'autres situations semblables ? À titre d'exemple, les élèves de l'École normale supérieure (ENS) s'engagent pour dix ans.
Enfin, pensez-vous que tout sera prêt pour le concours du printemps 2026 et pour les nouvelles LPE ? Concernant ces licences, le maillage territorial doit être connu très rapidement, afin que les informations soient diffusées sur Parcoursup, qui doit dévoiler le 17 décembre la carte des formations pour la rentrée 2026. Si une dissolution ou une démission du Gouvernement devaient advenir, quelles incidences seraient à prévoir en la matière ?
J'en viens à l'avenir de la carte scolaire. L'année dernière, j'avais déposé un amendement pour revenir partiellement sur la suppression de 4 000 ETP que prévoyait le projet de loi de finances initial. Le texte final est allé au-delà, puisqu'il n'y a eu quasiment aucune suppression d'ETP au niveau national. Cependant, dans nos territoires, la carte scolaire pour la rentrée 2025 a fait l'objet d'une forte incompréhension, en raison des nombreuses suppressions de classes. Beaucoup d'élus locaux s'attendaient à sa quasi-stabilité en raison du maintien des postes. Comment ces 4 000 postes ont-ils été utilisés ?
Par ailleurs, les travaux que nous avons menés sur le maillage scolaire, avec Annick Billon et Colombe Brossel, ont montré la défiance qui existe désormais entre les élus locaux et les personnels du rectorat quant à l'élaboration de la carte scolaire. L'opacité des critères choisis en est l'une des causes. Un dialogue renforcé sur ce point est-il envisageable ?
Enfin, j'évoquerai rapidement deux sujets importants. Qu'en est-il de la revalorisation du milieu de carrière pour les enseignants ?
Vous avez dit vouloir « changer de braquet » sur la formation continue au niveau du ministère ; nous serons vigilants sur ce point, prêts à critiquer ou à soutenir.
M. Édouard Geffray, ministre. - Je vais me permettre de ne pas répondre sur la question de ma durée de vie à ce poste, qui est tout à fait indépendante de ma volonté.
Concernant la réforme de la formation initiale, j'ai été amené à prendre un certain nombre de décisions cette semaine, afin de clarifier les choses.
L'engagement est bien quadriennal, à compter de la titularisation, mais il ne vaut pas pour tous les lauréats du concours, seulement pour ceux qui le passent en L3. Ils sont rémunérés pendant leur formation, 1 400 euros par mois pendant la première année et 1 800 euros la deuxième année. La Nation fait donc un investissement, qui justifie cet engagement. En pratique, la vocation va généralement bien au-delà de quatre ans.
Pour la préparation de la rentrée scolaire 2026, je suis confronté à deux enjeux. Le premier est de faire « atterrir » le concours 2026, qui se déroulera au mois de mars. Les inscriptions sont ouvertes. Je n'ai pas encore de chiffres consolidés, mais elles interviennent à un rythme relativement soutenu.
Le deuxième enjeu est celui du contenu du master qui suit la réussite du concours. La formation doit répondre à plusieurs considérations : elle doit dispenser une formation disciplinaire solide, comprendre une dimension didactique et prendre en compte l'environnement global de l'élève, notamment sa psychologie.
Nous travaillons sur le contenu exact du master et ses maquettes, avec mon homologue de l'enseignement supérieur et la conférence des universités. Les choses sont en bonne voie et s'inscrivent dans un cadre de dialogue social assez soutenu.
Les LPE seront mises en place à la rentrée. L'objectif, partagé par l'enseignement supérieur et l'éducation nationale, est qu'elles puissent apparaître dans Parcoursup dès son ouverture. La maquette pédagogique détaillée sera développée ensuite, université par université, ce qui est normal. En revanche, le descriptif global, le contenu et la localisation seront connus.
Je dois voir les recteurs jeudi prochain au sujet des heures devant être assurées à 50 % par des enseignants. Dans l'ensemble de cette réforme, ce n'est pas le point qui me préoccupe le plus. L'institution sait faire, à condition que le portage politique soit fort, ce qui est le cas, et qu'un travail fin soit mené, ce qui sera le cas aussi.
J'en viens à l'avenir de la carte scolaire. Je voudrais d'abord préciser qu'une fermeture de classe est toujours douloureuse. Depuis 2017, le taux d'encadrement a augmenté et s'est amélioré dans tous les départements, de façon constante.
En ce qui concerne les 4 000 postes qui n'ont pas été supprimés l'année dernière, il faudrait que je me penche sur les archives du ministère pour savoir comment ils ont été utilisés à l'unité près. Cependant, connaissant l'institution, je pense qu'ils ont dû être massivement utilisés pour renforcer les besoins de remplacement, davantage que pour être directement implantés dans les écoles sur le territoire. Si toutes les suppressions de postes envisagées avaient eu lieu, beaucoup plus de classes auraient été fermées en milieu rural.
Enfin, l'élaboration de la carte scolaire doit se faire avec les élus locaux et les collectivités territoriales, dans le cadre d'un « dialogue renforcé », mots que j'ai employés il y a deux jours quand j'ai réuni en visioconférence les recteurs et les directeurs académiques des services de l'éducation nationale (Dasen), pour parler avec eux de la carte rurale. Je leur ai bien dit que les collectivités territoriales et les élus locaux devaient être au coeur du processus.
La revalorisation du milieu de carrière constitue un enjeu. Nous avons beaucoup revalorisé les débuts de carrière, et le salaire mensuel des professeurs néo-titulaires est passé de 1 600 euros à 2 100 euros en sept ans. Cette progression a eu pour effet mécanique d'aplatir la progression et de générer un effet de plateau au niveau du milieu de carrière.
Il faudra travailler sur ce sujet. Cependant, le contexte budgétaire contraint ne me permet pas de l'envisager à très court terme. Dès que des marges de manoeuvre apparaîtront, j'examinerai la question.
Enfin, j'ai effectivement employé l'expression « changer de braquet » au sujet de la formation continue. Il s'agit d'une conviction assez profonde. D'abord, quand toutes les formations viennent d'en haut, elles ne correspondent pas toujours aux besoins du terrain. Je suis favorable aux formations d'initiative locale, qui émanent d'un collectif pédagogique, dans une école ou dans un collège, ayant identifié ce dont il a besoin. Aujourd'hui, un chef d'établissement et son équipe disposent de tous les outils d'évaluation nécessaires. Ils connaissent les difficultés de leurs élèves de façon précise et savent les évaluer par rapport au reste de leur académie ou aux écoles comparables.
Il faudra probablement revoir l'équilibre entre les formations d'initiative locale et les formations nationales. Je mènerai ce travail avec les organisations syndicales au cours des prochaines semaines et ne veux pas m'engager sur l'issue de ce dialogue.
Ensuite, il faut adopter une approche qualitative de la formation proposée. À cet égard, je poursuivrai le combat déjà engagé afin qu'on ne demande plus aux professeurs de traverser leur rectorat pour aller en formation, mais pour que la formation se passe au plus près de chez eux. Quand on commence à travailler en ce sens, on parvient à obtenir des modifications de contenu, mais aussi à développer une façon de prendre soin de nos collègues à laquelle je tiens, qui envoie un message un peu différent de celui que l'institution a tendance à envoyer parfois, à son corps défendant.
Mme Marie-Pierre Monier. - Vous avez communiqué avec force sur le chiffre de 21 élèves en moyenne par classe, alors qu'il était déjà atteint en 2024. Par ailleurs, dans de nombreuses écoles du pays, les classes comptent plus de 25 élèves. Il serait peut-être plus judicieux d'utiliser la médiane que la moyenne. Cet écart peut notamment s'expliquer par l'intégration dans la moyenne des classes dédoublées des réseaux d'éducation prioritaire (REP) et des REP+, qui peut fausser le résultat. La baisse démographique permettrait de corriger ce déséquilibre caché derrière la moyenne ; pourquoi ne pas en profiter ?
Par ailleurs, j'ai été récemment confrontée de près au cas d'une enseignante menacée verbalement et intimidée physiquement par un parent. La première réaction de l'inspecteur de l'éducation nationale a été de remettre en cause le comportement de l'enseignante ; il n'y a eu ni déplacement ni appel. Peut-on vraiment dire que le « pas de vagues » n'a plus cours au sein de la hiérarchie de l'éducation nationale ?
La protection de nos personnels enseignants continue d'être un sujet de préoccupation. Une note des services statistiques du ministère de l'éducation nationale, parue en juillet dernier, pointe que 57 % des enseignants du second degré ont vécu une atteinte à leur personne ou à leurs biens et que 15 % ont subi des moqueries ou des insultes, pendant l'année scolaire 2023-2024. Plusieurs mesures visant à mieux protéger les personnels enseignants font consensus dans nos rangs, comme l'octroi automatique de la protection fonctionnelle, voté par le Sénat en 2025. Le Gouvernement a-t-il enfin prévu d'avancer sur ce sujet ?
J'ai été alertée en cette rentrée sur l'injonction faite à des AESH de signer des avenants à leur contrat, qui leur imposent une extension de leur secteur d'intervention géographique pouvant aller jusqu'à plusieurs dizaines de kilomètres, sous peine de sanctions pouvant aller jusqu'au licenciement. En Ille-et-Vilaine, 24 AESH ont vu leur licenciement validé en raison de leur refus de signer le document. Comment justifier de telles méthodes, dans un contexte où les AESH manquent déjà à l'appel ?
Je terminerai par un sujet qui me tient à coeur : l'éducation à la vie affective et relationnelle, et à la sexualité (Evars). Au sein de notre commission, mais aussi de la délégation aux droits des femmes, les attentes sont très fortes quant à la mise en oeuvre de ce programme. La loi rend cette formation obligatoire depuis 2001, mais un rapport pointe que moins de 15 % des élèves bénéficient des trois séances prévues. Où en est-on de la mise en oeuvre de ce programme en cette rentrée ? L'ensemble des formations prévues pour les enseignants ont-elles pu se déployer de façon efficace ?
Enfin, Mme Borne avait fixé à 30 % la proportion de jeunes filles dans les classes préparatoires scientifiques à l'horizon 2030 ; maintenez-vous cet objectif ?
M. Bernard Fialaire. - Dans le contexte démographique, l'enseignement agricole est en passe de gagner son pari, puisque la barre symbolique des 200 000 élèves et étudiants a été dépassée pour la première fois depuis dix ans. Si cette dynamique se maintient, les cibles fixées par la loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture semblent atteignables. Les indicateurs de réussite aux examens et d'insertion professionnelle à court terme sont au vert.
Toutefois, j'attire votre attention sur la spécificité du programme 143, « Enseignement technique agricole », sur lequel je suis rapporteur pour avis. En effet, 95 % des dépenses sont contraintes et la diminution des crédits de 18 millions d'euros l'an dernier au cours de la navette parlementaire a été difficilement absorbable. Des investissements, pourtant essentiels, ont dû être repoussés. Je rappelle que si nous avons sauvé 4 000 emplois dans l'enseignement, 45 postes ont été supprimés en 2025 dans l'enseignement technique agricole, qui connaît pourtant chaque année une hausse de 1 % de ses effectifs.
Depuis la rentrée 2023, le pacte enseignant permet aux professeurs qui le souhaitent de remplir des missions complémentaires rémunérées. Le dispositif est largement plébiscité dans l'enseignement agricole, puisque l'enveloppe consacrée au pacte est consommée à 97,7 %. En plus de permettre une revalorisation du salaire de base, on note un meilleur accompagnement des élèves et une amélioration du taux de remplacement.
Le PLF pour 2026 propose une baisse des crédits de personnels de 22 millions d'euros pour l'enseignement technique agricole. Cette baisse de 1,92 % s'explique largement par la réduction du volume du pacte enseignant, qui atteint 20 millions d'euros. Comment préserver ce dispositif qui fonctionne bien ? En 2024, un transfert avait été opéré depuis le programme 141, « Enseignement scolaire public du second degré », vers le programme 143 ; ce choix sera-t-il réitéré ?
Enfin, je voudrais revenir sur une façon de dégraisser le mammouth. Quand conviendra-t-on que l'éducation nationale doit se concentrer sur l'enseignement et qu'on doit laisser le médico-social aux départements, l'orientation aux régions et l'accompagnement des élèves aux communes ou aux intercommunalités ? Les AESH, qui ne sont pas des personnels enseignants et sont prescrits par les départements, doivent être assumés par les départements.
M. Max Brisson. - Monsieur le ministre, j'ai lu l'interview que vous avez donnée au Figaro avec beaucoup d'enthousiasme et j'attendais que vous nous fassiez part ce soir de votre vision de l'école.
Nous ne parlons que des réductions des effectifs de professeurs, mais n'y a-t-il pas une administration administrante à l'éducation nationale ? Ne doit-elle pas aussi faire un effort en matière de réduction des effectifs ?
La suppression de 4 000 ETP permet-elle de respecter les objectifs en matière de déficit budgétaire ? L'éducation nationale participe-t-elle à l'effort attendu ?
Vous avez évoqué les cartes scolaires pluriannuelles, mais on nous en parle depuis cinq ans ! Est-ce si compliqué d'entrer dans une démarche pluriannuelle, partenariale et conventionnelle avec les collectivités locales ? Faut-il encore une commission Théodule sur ce sujet, sur lequel nous avons interpellé vos éphémères prédécesseurs pendant cinq ans ?
Vous avez été DGESCO et vous avez servi cinq ministres différents. Comment expliquez-vous que nous en restions toujours à un débat sur les moyens et que nous soyons dans l'incapacité de conduire une réforme structurelle de fond et durable ?
Vous m'avez fait rêver dans votre très belle interview du Figaro. Vous avez parlé de mettre fin à une organisation universelle, vous avez expliqué que l'école n'est pas un « jardin à la française » et qu'elle doit s'adapter aux réalités territoriales. La différenciation pilotée par le haut ne marche pas ; nous sommes le seul pays d'Europe à penser le contraire. Le seul remède à cette organisation universelle que vous dénoncez n'est-il pas l'autonomie des établissements ?
Sur cette question de la différenciation et de la réalité territoriale, je voudrais revenir sur le rapport d'information sur l'enseignement des langues régionales e j'ai présenté avec Karine Daniel devant notre commission, qui comportait vingt-trois recommandations ; envisagez-vous de les reprendre à votre compte ? Le moment n'est-il pas venu de demander à chaque recteur et à chaque directeur académique d'assurer dans leur académie, avec les collectivités, la mise en oeuvre de ces recommandations, formulées pour apporter des réponses en matière de vivier et de formation des professeurs en langue régionale, de poursuite des parcours, de réduction de l'érosion entre le primaire et le secondaire ?
Enfin, les langues régionales constituent un beau sujet pour édifier le jardin à l'anglaise que vous semblez appeler de vos voeux pour notre école.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Concernant la reconnaissance des enseignants, quelles garanties apportez-vous, dans ce PLF, pour l'amélioration du déroulement de la carrière des enseignants ? Je songe notamment à la réduction de la durée de certains échelons, à une progression plus fluide et à une augmentation progressive des promotions à la hors classe.
Pour 2026, votre ministère a confirmé la non-ouverture du concours national d'agrégation de langue vivante régionale, option créole, ce qui a provoqué indignation et incompréhension. En Guadeloupe, en Martinique, en Guyane et à La Réunion, une majorité de la population parle le créole, sans compter ceux qui vivent dans l'Hexagone et le parlent. L'article 75-1 de la Constitution protège la langue créole, qui fait partie du patrimoine de la France. L'agrégation était un signe de reconnaissance et de valorisation de notre langue maternelle, et la disparition de l'option créole est ressentie comme un mépris. Les syndicats dénoncent un grave recul de la reconnaissance institutionnelle de la langue créole, arrachée de haute lutte dans chaque territoire. Comptez-vous réviser votre position ? La reconnaissance des langues régionales participe à la réussite scolaire des élèves ultramarins.
J'en viens aux discriminations engendrées par Parcoursup pour les lycéens ultramarins. En effet, ces derniers ne peuvent pas se rendre aux journées portes ouvertes des écoles se trouvant dans l'Hexagone. De plus, de nombreux oraux ont lieu en présentiel dans l'Hexagone. Est-il envisageable d'imposer aux écoles de proposer à ces publics éloignés de passer les entretiens en visioconférence ou d'octroyer une bourse pour couvrir les frais de déplacement ? En tant que ministre de l'éducation nationale, comment pouvez-vous agir pour plus de justice et d'égalité ?
Enfin, dans le cadre de l'examen de la proposition de loi visant à renforcer le parcours inclusif des enfants à besoins éducatifs particuliers, mon groupe avait fait adopter un amendement visant à appliquer un barème de notation différencié pour les épreuves orales du diplôme national du brevet et du baccalauréat, en fonction de la situation des élèves porteurs du trouble autistique. Les difficultés de communication sociale d'un élève porteur du trouble autistique ont un impact sur le déroulement d'une épreuve orale et doivent être prises en compte dans les barèmes.
Le texte a été renvoyé à l'Assemblée nationale et doit achever son parcours législatif. Cet aménagement peut être opéré par voie réglementaire ; envisagez-vous d'intervenir à ce niveau ?
M. Aymeric Durox. - Ma question porte sur la nouvelle mutuelle à laquelle les personnels de l'éducation nationale seront obligés d'adhérer à partir d'avril 2026, pour leur protection sociale complémentaire (PSC).
Une comparaison fine entre l'option 2 de ce futur contrat PSC de la mutuelle générale de l'éducation nationale (MGEN) pour les agents du ministère et l'option 2 du contrat proposé à leurs collègues d'autres ministères, comme celui de la défense, démontre une inégalité sur la quasi-intégralité des tarifs. J'ai relevé quelques chiffres. Pour les honoraires d'hospitalisation, la base de remboursement est couverte à 200 % chez les enseignants et à 220 % pour les personnels du ministère de la défense. De la même manière, les courts séjours et les nuitées en maternité sont couverts à hauteur de 60 euros par nuit pour les enseignants, contre 100 euros pour les armées. Les prises en charge dans les établissements conventionnés s'élèvent à 38,50 euros par jour pour les premiers, contre 45 euros pour les seconds. Enfin, les consultations chez un médecin généraliste sont prises en charge à hauteur de 100 % de la base de remboursement pour les enseignants, contre 220 % pour les agents de la défense. Il en va de même pour les spécialistes, les actes techniques ou les prothèses médicales.
Si nous comparons les coûts des mutuelles obligatoires pour chaque ministère, les enseignants sont également perdants : ils doivent cotiser à hauteur de 30,33 euros par mois, alors que ce montant s'élève à 26,50 euros au ministère de la défense, à 24,41 euros au ministère de l'agriculture et à 21,73 euros pour les magistrats.
Par ailleurs, les enseignants n'auront plus de liberté de choix à partir d'avril 2026. L'État a-t-il encore une fois mal négocié ou s'est-il fait avoir ? La MGEN a obtenu une augmentation des cotisations de 5 % par an. Pourtant, l'État est en position de force avec 1,4 million d'agents concernés ; il devrait le faire valoir.
Je m'interroge sur une telle iniquité entre différents fonctionnaires de l'État alors que le métier de professeur souffre d'un grave déficit d'attractivité, dû notamment à des conditions matérielles qui sont parmi les plus faibles de tous les pays de l'OCDE.
Cette question de la mutuelle constitue un véritable sujet de préoccupation parmi les enseignants ; quelles mesures prendrez-vous afin de remédier à cette injustice ?
Mme Annick Billon. - Nous devons à la fois préserver l'école et la réussite des élèves, en métropole comme dans les territoires ultramarins, sans nous inscrire dans une logique purement comptable.
La baisse de la natalité appelle une réflexion à moyen et long terme, comme nous l'avions soulignée dans nos travaux avec Colombe Brossel et Jacques Grosperrin. Cependant, la succession des ministres empêche de développer une vision et d'assurer la stabilité nécessaire. Avez-vous la capacité et la vision nécessaires pour assurer cette stabilité ?
À la rentrée 2025, sur 352 102 élèves notifiés pour bénéficier d'un AESH, 48 000 restaient en attente d'un accompagnement. Ils étaient encore 42 000 en octobre. Les conséquences pour les élèves et leurs familles sont très lourdes.
Après leur expérimentation, les pôles d'appui à la scolarité (PAS) sont en cours de généralisation. À ce jour, 500 pôles ont déjà été mis en place et l'objectif est d'atteindre les 3 000 en 2026. Quels moyens seront déployés pour y parvenir ?
La Cour des comptes a souligné l'effet très positif du pacte enseignant, notamment sur les remplacements de courte durée. Le PLF pour 2026 propose des économies en la matière ; comment seront-elles réparties ?
Concernant le projet de revalorisation des rémunérations des enseignants en milieu de carrière, le décret attendu n'a jamais été publié, faute de ressources budgétaires en 2025 ; qu'en est-il à présent ?
D'après les derniers chiffres, seuls 15 % des élèves bénéficient des trois séances par an et par niveau prévues dans le cadre du programme Evars par la loi de 2001. Combien d'enseignants sont-ils formés à cet effet ? L'autoformation en ligne sur la plateforme M@gistère constitue-t-elle une réponse efficace à ce besoin de formation ?
A priori, les séances d'Evars ne bénéficient d'aucune heure fléchée et il incombe donc aux enseignants de se concerter et de s'organiser, pour libérer du temps dans des plannings déjà très chargés. Quels sont les moyens alloués à la mise en oeuvre de ce nouveau programme ?
Enfin, nous avons débattu de la proposition de loi du président Lafon visant à protéger l'école de la République et les personnels qui y travaillent. Que comptez-vous faire sur ce sujet important ?
Mme Laure Darcos. - En juin dernier, lors de l'examen de la proposition de loi visant à renforcer le parcours inclusif des enfants à besoins éducatifs particuliers, j'avais déposé un amendement relatif à la prise en compte des enfants sourds communiquant en langue française parlée complétée (LfPC). À ce jour, le code de l'éducation garantit aux enfants sourds un accès à un enseignement en communication bilingue, en langue des signes française et en langue française. Cependant, cette rédaction a pour effet d'exclure la LfPC, privant ainsi certaines familles du libre choix du mode de communication le mieux adapté à leur enfant. Cette situation engendre une inégalité de traitement pour les familles concernées, souvent contraintes de mobiliser des ressources associatives ou de recourir à un financement personnel afin d'assurer à leur enfant un parcours éducatif véritablement inclusif.
Mon amendement avait été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution. Le Gouvernement pourrait-il le reprendre dans le cadre de l'examen du PLF pour 2026 ?
Par ailleurs, vous avez beaucoup parlé des enjeux liés à la démographie scolaire, notamment dans les milieux ruraux. Dans mon département, trois classes qui devaient fermer ont été épargnées, grâce à une directrice générale très attentive. En contrepartie, elle a demandé aux communes concernées de réfléchir à des regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI). Cependant, ces derniers peuvent créer des problèmes pour les communes rurales, notamment des problèmes de financement, quand les RPI concernent des communes qui ne sont pas dans la même intercommunalité, ou des problèmes de transport scolaire. Je suis d'accord pour continuer à travailler sur ce sujet d'avenir, mais nous devons faire attention aux dégâts collatéraux.
J'en viens aux manuels scolaires. Nous observons partout un recul du numérique, au profit des manuels papier. Qu'en est-il du financement de ces manuels classiques dans ce PLF ? Par ailleurs, quand vous étiez DGESCO, l'introduction de la labellisation des manuels a été décidée. Où en est-on en la matière ? Ce processus a-t-il conduit à exclure des maisons d'édition ? Un tel phénomène serait dramatique au regard de la situation économique du monde de l'édition scolaire.
Mme Monique de Marco. - Le PLF pour 2026 prévoit la suppression de 142 emplois au sein des opérateurs de l'éducation nationale, dont 111 pour le réseau Canopé, qui a déjà perdu 17 % de ses postes depuis 2016. Comment justifier de telles coupes budgétaires pour un opérateur dont la présence territoriale est essentielle à l'accompagnement pédagogique des enseignants ?
Ensuite, les révélations concernant certains établissements privés sous contrat, comme Bétharram ou Stanislas, ont mis en lumière de graves dysfonctionnements. Or les contrôles pédagogiques et financiers restent insuffisants. En outre, le cadre légal ne prévoit aucun contrôle du personnel non enseignant, pourtant au centre de la plupart des plaintes. De plus, les décisions des inspections varient également selon les territoires et manquent de transparence.
Monsieur le ministre, vous annoncez le recrutement de 30 ETP pour l'inspection et de 60 ETP en appui administratif. Comment ces moyens, qui paraissent dérisoires, permettront-ils de renforcer le contrôle des établissements privés sous contrat, d'assurer la protection des élèves et de garantir la transparence des inspections ?
Par ailleurs, Mme Borne avait annoncé la création d'une mission d'appui au sein de l'inspection générale de l'éducation, appelée à intervenir dans les situations particulièrement problématiques ; qu'en est-il ?
Elle avait également prévu l'inspection de 40 % des établissements privés sous contrat en deux ans, dont la moitié par des visites sur place. Compte tenu de la faiblesse des effectifs annoncés, comment comptez-vous atteindre cet objectif ? De quel type d'inspection s'agira-t-il : administrative, pédagogique ou financière ?
Enfin, la rénovation des bâtiments scolaires est la grande perdante du budget 2026. Les crédits du fonds vert connaissent une nouvelle contraction et cette réduction intervient alors que près de 10 millions d'élèves seront exposés à des épisodes de forte chaleur, d'ici à 2030. Les collectivités locales ne peuvent plus financer seules ces travaux nécessaires. Il s'agit également d'un enjeu sanitaire, alors que de nombreux bâtiments scolaires sont vétustes et que certains contiennent des matières dangereuses, comme l'amiante. Quelles mesures le ministère entend-il prendre pour garantir la sécurité, la santé et la performance énergétique des établissements scolaires dans ce contexte de coupe budgétaire ?
M. Édouard Geffray, ministre. - Concernant l'état d'esprit des enseignants et leur nécessaire protection, j'évoquerai un principe, des modalités d'adaptation et une culture.
Le principe est clair : on ne touche pas à un professeur, on ne remet pas en cause ses enseignements et on n'est pas juge de l'enseignement des professeurs. Je suis catégorique sur ce point. Nos professeurs ne peuvent pas être les réceptacles ou les cibles des tensions de notre société, des visions idéologiques des uns ou des autres et des théories complotistes les plus folles.
S'agissant des modalités d'adaptation, depuis plusieurs années déjà, la protection fonctionnelle est quasiment automatique en pratique. Ainsi, dès qu'un agent est menacé ou se trouve en situation de conflit, on lui propose immédiatement cette protection, on l'accompagne pour les dépôts de plainte et on prend éventuellement des mesures de protection. L'an dernier, le nombre de protections fonctionnelles accordées a augmenté de 26 % et s'élevait à plus de 5 000.
Faut-il aller jusqu'à l'adoption d'une proposition de loi prévoyant automaticité et présomption ? Je suis convaincu par le caractère automatique, mais j'ai une interrogation juridique sur l'inversion complète de la présomption. En effet, dans certains cas rares, l'agent a pu commettre une faute personnelle. Il ne faudrait pas qu'une forme d'une présomption presque irréfragable aboutisse à devoir faire des efforts démesurés face à une situation où l'e personnel serait manifestement lui-même fautif. Cette réserve est de l'ordre du réglage. Je partage en revanche votre position sur l'ordre du principe.
J'en viens au paramètre culturel, qui est le plus difficile à modifier. Plusieurs de mes prédécesseurs ont dit : « Le “pas de vagues”, c'est fini. » Comme moi, ils en étaient convaincus. Cependant, dans une structure qui accueille 20 % de la population française tous les jours, qui compte 1 million de personnes dans 60 000 implantations, il est difficile de garantir que tout responsable, tout cadre et toute personne aura le courage de franchir le cap nécessaire et de parler.
En tout cas, ma ligne est claire : on ne met pas les choses sous le tapis et, si l'on touche à un professeur, toute l'institution doit réagir, par tous les moyens qui sont à sa disposition.
J'en viens à l'Evars, qui est devenu un programme. Or un programme, ça s'applique partout, ce n'est ni négociable ni amendable. En revanche, un enjeu de formation demeure. Nous avons engagé 119 millions d'euros au cours de la dernière année et de cette année. Plus de 15 000 professeurs ont déjà été formés en présentiel, d'autres sont formés à distance. Il s'agit d'un plan de formation assez massif, mais il existe toujours un délai entre le moment où l'on forme des formateurs et le moment où ces formateurs peuvent former leurs collègues.
À ce stade, les remontées du terrain indiquent que nous ne rencontrons pas de difficulté majeure, malgré quelques instrumentalisations du contenu du programme. Il suffit de rappeler qu'au moins un enfant par classe est victime de violences sexuelles intrafamiliales pour être convaincu qu'il est important de conduire ce travail, autour du respect de la personne et de son corps, et de la notion de consentement. Deux enquêtes complètes seront menées sur la mise en oeuvre du programme, en décembre et en juin.
Concernant les femmes et les sciences, je m'inscris dans les pas d'Élisabeth Borne, qui a pensé un plan ambitieux auquel j'ajouterai ma patte. Il faut appréhender cette question dès le départ, puisque c'est dès le CP que les résultats en mathématiques des filles deviennent moins bons que ceux des garçons. En fin de CM2, on constate un écart de quasiment dix points entre les filles et les garçons, en termes de maîtrise. Ce n'est pas acceptable.
Quant au nombre moyen d'élèves par classe, madame Monier, il n'a pas cessé de baisser. Il faut regarder le chiffre au-delà de la virgule et c'est la moyenne 21,0 par classe qui sera atteinte pour la première fois cette année.
Monsieur Fialaire, je ne suis pas le mieux placé pour évoquer l'enseignement agricole. Cependant, je me réjouis de l'inversion de la tendance observée, notamment pour notre souveraineté alimentaire. Nous y avons notamment travaillé en améliorant la visibilité de cet enseignement sur la plateforme Affelnet. Il faudrait aussi permettre aux jeunes de faire des stages dans ces écoles, de passer quelques jours dans les internats et sur les plateaux techniques, pour qu'ils puissent observer ce que sont les métiers du vivant.
Les crédits alloués au pacte enseignant connaissent une baisse dans le PLF. Il ne s'agit pas de baisser drastiquement les financements dédiés à ce dispositif très largement apprécié, mais de les recentrer sur certaines missions. Les missions fléchées sont majoritairement plébiscitées, comme le remplacement de courte durée et le dispositif « Devoirs faits », auxquels sont respectivement dédiés 34 % et 16 % des crédits. Nous voulons porter l'effort sur d'autres missions, moins prédéfinies.
Monsieur Fialaire, vous avez également évoqué la question des personnels non enseignants. Je ne reprendrai pas l'expression que vous avez employée à leur sujet, que je ne parviendrai jamais à faire mienne. Le ministère de l'éducation nationale est probablement le ministère le moins administratif en termes de personnel. Je vous invite à comparer les ratios « gérants-gérés » des différents ministères et vous verrez que celui de l'éducation nationale est le plus faible, de très loin.
Par ailleurs, je considère que l'école a deux missions : instruire et protéger. Nous devons avoir la vision la plus intégrée possible de l'élève et de ses besoins.
Monsieur Brisson, il me faudrait un peu plus de temps pour développer ma vision de l'école, tant ce sujet m'anime profondément, d'abord en termes de contrat social. J'associe l'école à ce qu'est la République, seul régime qui repousse l'horizon chaque fois qu'elle l'atteint : l'horizon des droits, l'horizon du progrès de l'esprit humain, l'horizon de l'intégration sociale et celui de la maturité politique. La condition pour que la République vive et demeure, pour qu'elle puisse continuer de repousser l'horizon, c'est que l'école tienne sa double promesse.
Sa première promesse est d'emmener chacun au bout de ses potentialités, quelles que soient ses origines géographiques, sociales, familiales, territoriales et financières, quelles que soient ses convictions politiques, philosophiques et religieuses ou celles de ses parents. La seconde promesse est de faire de chaque élève un futur citoyen libre, éclairé, doué des mêmes droits et des mêmes devoirs que les autres, conscient de partager une destinée commune avec ses congénères.
Si nous sommes dans une démocratie et si le peuple exerce sa souveraineté par le biais de ses représentants, c'est parce que nous le construisons depuis 150 ans. Il nous faut continuer de le faire, sur tout le territoire national, ce qui a un certain nombre de conséquences.
D'abord, le niveau d'exigence doit être commun et ne peut être adapté en fonction des territoires. Ensuite, si le cadre national doit être garanti à tous, il doit aussi y avoir des déclinaisons et une autonomie, car on ne peut penser depuis la rue de Grenelle que telle organisation pédagogique ou telle réforme aura vocation à s'appliquer partout avec le même degré de réussite. Il faut donc articuler une exigence partagée et une respiration locale, qui doit tenir compte des difficultés scolaires et sociales, et des particularités propres à certains territoires. C'est la raison pour laquelle l'éducation nationale ne peut pas être un « jardin à la française ».
En ce qui concerne les langues vivantes régionales, nous allons nous voir bientôt et nous aurons l'occasion de parler de vos vingt-trois recommandations dans le détail. J'ai déjà eu l'occasion d'être clair sur le sujet, lors des questions au Gouvernement, à l'Assemblée et au Sénat. D'abord, on connaît bien une langue quand on en connaît une deuxième. Les langues régionales constituent donc un élément de progression des élèves. Il s'agit aussi d'une question de patrimoine culturel commun. Nous sommes confrontés à l'enjeu de former de nouvelles générations de locuteurs complets.
De ce point de vue, nous sommes plutôt bons dans le premier degré, mais on observe un tassement assez net dans le second. C'est sur cette articulation que j'ai envie de travailler. Cette ambition renvoie notamment à la formation initiale des enseignants. Cette dimension a été intégrée dans le parcours préparatoire au professorat des écoles (PPPE) et il faudra que ce soit le cas aussi dans les LPE.
J'en viens à la question du créole. Nous n'avons pas supprimé l'agrégation option créole. Les concours de l'agrégation et du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré (Capes) sont créés de manière permanente, mais sont ouverts ou non selon les années. Le principe de rotation tient compte de deux éléments : du nombre de professeurs dans la discipline et de la perspective d'offrir des admissions dans les différents concours ouverts. En effet, les agrégés constituent un petit corps par rapport aux certifiés ; ils ne sont que 48 000 professeurs sur un peu plus de 800 000. Nous n'ouvrons donc pas toutes les agrégations chaque année.
L'agrégation de créole a été ouverte ces dernières années, généralement pour un poste, mais deux postes ont été pourvus l'an dernier. Elle n'est donc pas ouverte cette année, mais le sera l'an prochain. Je voudrais rassurer tout le monde : le nombre d'enseignants en créole augmente. Entre 2020 et 2024, ce nombre est passé de 71 à 86, ce qui représente une progression de 20 % en quatre ans.
En ce qui concerne les difficultés rencontrées par des lycéens ultramarins avec Parcoursup, ma compétence s'arrêtant à l'éducation nationale, je ne peux pas imposer de mesures aux écoles du supérieur. Cependant, je suis nécessairement touché quand des lycéens n'ont pas la même facilité que les autres pour accéder aux formations du supérieur. J'examinerai donc ce point avec mon homologue de l'enseignement supérieur, notamment sur l'éventuelle organisation d'oraux à distance. Une piste pourrait consister à organiser ces oraux en visioconférence depuis nos établissements scolaires, pour offrir un accès à un canal sécurisé et assurer que l'élève ne soit pas aidé.
J'en viens à la prise en compte des troubles du spectre autistique dans les barèmes de notation pour les épreuves orales. Ce point n'a jamais été porté à ma connaissance et je ne peux vous répondre immédiatement. Je vais examiner le sujet avec attention.
Monsieur Durox, je vous remercie d'avoir partagé ces éléments de comparaison, que je ne connaissais pas. La PSC a été rendue obligatoire dans le cadre d'accords collectifs conclus après l'adoption de la loi de 2019 de transformation de la fonction publique. Il s'agit d'un progrès collectif, puisque nous prenons dorénavant en charge une partie de la protection sociale qui restait avant aux seuls frais de l'agent.
Ensuite, des marchés publics ont été passés par chaque ministère ou groupe de ministères. Pour l'éducation nationale, la MGEN l'a remporté. J'imagine que les paramètres propres à chaque population concernée ont pu avoir des conséquences sur la prise en charge offerte, mais je vais me pencher sur cette question, que vous avez raison de soulever.
Madame Billon, je ne peux répondre à votre question sur ma capacité à assurer la stabilité, qui ne dépend pas de moi. En tout cas, je n'adopterai pas de nouvelle grande réforme pour demander aux professeurs de préparer une rentrée 2026 différente de la rentrée 2025 ; ils n'en ont pas besoin. Il faut les laisser faire leur métier et consolider ce qui a déjà été mis en place.
Nous devons mettre l'accent sur ce qui constitue notre coeur de métier, la pédagogie et le traitement des inégalités scolaires, corriger certains éléments, mais certainement pas bouleverser le système.
J'en viens aux AESH et à l'école inclusive. Nous avons créé un service public de l'école inclusive en l'espace de quelques années, qui a permis d'obtenir des résultats remarquables. En conséquence, nous courons après la croissance du nombre de notifications, qui augmente de 10 % chaque année. Même avec la meilleure volonté du monde, on ne peut pas répondre à tous les besoins, le vivier étant très variable d'un point de vue territorial.
De plus, les prescriptions connaissent de fortes variations calendaires. On peut penser au mois de juillet que la rentrée sera à peu près stable, pour découvrir au mois de septembre 10 000 ou 20 000 prescriptions supplémentaires d'AESH.
Nous sommes aussi confrontés à un enjeu d'organisation. Depuis quelques années, nous avons construit l'école inclusive sur le principe de compensation, notamment sur le principe de l'aide humaine. En cas de handicap, cette aide est devenue la première attente des parents, celle des enseignants aussi parfois, et elle devient la première réponse institutionnelle.
Cependant, nous devrions d'abord nous poser la question de l'accessibilité et de l'adaptation pédagogique. Si nous constatons que ce qui est mis en oeuvre n'est pas suffisant pour permettre un apprentissage autonome de l'élève, alors il faut mettre en place un accompagnement humain. Il nous faut encore travailler collectivement sur cette dimension. En effet, dans bien des cas, un AESH ne suffit pas à résoudre la question.
De ce point de vue, les PAS apportent une partie de la réponse puisqu'ils permettent de faire travailler ensemble l'éducation nationale et le secteur médico-social. Pour prendre en charge certains troubles sur toute la durée du temps scolaire, nous avons besoin de compétences qui ne sont pas nos compétences historiques. À titre d'exemple, nous n'avions jamais eu d'éducateurs spécialisés à l'école, mais les PAS permettent de mettre en place cette coopération. Ces pôles vont continuer à se déployer et je vais aller à la rencontre des équipes sur le terrain, pour voir comment les choses se passent, pour prendre la mesure d'éventuelles difficultés et identifier comment les résoudre.
En ce qui concerne le milieu de carrière, un projet de décret a été travaillé au printemps dernier, dont le contenu est intéressant. Dès que j'aurai les marges de manoeuvre suffisantes, il aura vocation à connaître une suite.
Madame Darcos, je prends note de votre point concernant la langue française parlée complétée.
S'agissant des manuels scolaires, la généralisation du manuel numérique à laquelle nous avons assisté en l'espace de quelques années soulève une réelle interrogation : un manuel papier présente le grand avantage de pouvoir être feuilleté et de pouvoir remonter de la leçon à l'exercice, par exemple. Je ne suis pas en mesure de dire aujourd'hui si la version numérique présente une plus-value par rapport à la version papier, et j'ai sollicité de nouveau mes équipes sur le sujet, en leur demandant si des études permettent ou non de qualifier la situation, afin de retravailler le sujet avec les collectivités territoriales. La documentation sur le sujet est assez lacunaire à ce stade.
Le projet de labellisation des manuels, quant à lui, n'a pas été mis en oeuvre. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une priorité, même si l'idée était intéressante : nous devons choisir nos combats.
Madame de Marco, vous avez relevé une diminution du plafond d'emplois du réseau Canopé à hauteur d'une centaine de postes. L'opérateur a effectivement connu d'importantes évolutions ces dernières années, puisqu'il a quasiment mis un terme à sa mission d'édition et qu'il est devenu un opérateur de la formation. De plus, il s'articule désormais avec les écoles académiques de la formation continue (EAFC) sur lesquelles je souhaite miser. Ces mutations aboutissent donc au nouveau schéma qui vous est soumis.
Pour ce qui est des contrôles des établissements privés et du plan « Brisons le silence, agissons ensemble », je rappelle tout d'abord que ce plan - et, de manière générale, la lutte contre les violences scolaires - est commun à l'ensemble du système éducatif. Nous devons donc porter le même niveau d'exigence partout, avec des personnels qui sont animés par la même volonté d'instruire et de protéger.
Néanmoins, il convient de continuer à contrôler les établissements privés sous contrat et de poursuivre les actions engagées avec le même volontarisme. D'ici à la fin de l'année, nous aurons contrôlé 1 000 établissements et nous tiendrons bien le cap consistant à contrôler 40 % des établissements privés sous contrat d'ici à 2027. Quelles que soient les situations, le travail d'inspection a vocation à être exhaustif, en examinant à la fois les aspects pédagogiques, administratifs et financiers. Sur le plan pédagogique, je rappelle que les professeurs du privé sous contrat sont régulièrement évalués par les inspecteurs de l'éducation nationale, dans les mêmes conditions que leurs collègues de l'enseignement public.
Concernant l'enjeu sanitaire, qui me tient particulièrement à coeur, je propose de créer 300 postes d'infirmières scolaires, de psychologues et d'assistantes sociales. Si cette création est actée dans le PLF, il faudra ensuite éviter tout « saupoudrage » et concentrer nos efforts sur les établissements les plus en difficulté en termes d'accompagnement, en y implantant directement un trinôme infirmière scolaire-psychologue-assistante sociale, afin que la donne change à la rentrée 2026.
M. Jean-Gérard Paumier. - De nombreuses communes, particulièrement en zone rurale, sont ou seront confrontées à court terme à la baisse des effectifs scolaires, d'où des fermetures de classes, d'écoles, ainsi que la fragilisation de certains RPI et de certains collèges. Cette situation appelle, comme vous l'avez souligné, un dialogue renouvelé de l'État avec les élus locaux pour décloisonner et mutualiser les forces.
En mars 2023, le ministère de l'éducation nationale annonçait le lancement « de la nouvelle école des territoires » visant « à garantir l'amélioration durable de la qualité du service public de l'éducation » au sein de ces territoires.
Quelle qu'en soit la forme - agrandissement d'une école existante, construction d'une école neuve ou installation d'une école au sein d'un collège en baisse d'effectifs -, cette « école des territoires » ne pourra voir le jour qu'à deux conditions.
En matière d'investissement, l'effort financier de l'État doit être à la hauteur des enjeux pour accompagner les collectivités locales. L'État doit aussi garantir le fonctionnement de cette structure pendant une période minimale, y compris en cas de baisse d'effectifs durant cette période.
Pour ce qui est du fonctionnement, pourquoi ne pas envisager, au lieu de continuer à effectuer un recrutement via le mouvement, un recrutement sur des postes à profil, avec des primes et des points importants, afin de fidéliser les enseignants sur le long terme en milieu rural ?
En résumé, votre budget pour 2026 porte-t-il l'ambition d'un maillage scolaire garant de l'égalité des chances dans les territoires, en lien avec les élus locaux ?
Mme Colombe Brossel. - Monsieur le ministre, vous avez déclaré : « On essaie de tempérer au maximum les fermetures de classes et on réinvestit les moyens où les classes sont chargées. » Élue à Paris, j'ai interrogé nombre de vos prédécesseurs sur les fermetures de classes massives dans la capitale et ai systématiquement obtenu la même réponse, à savoir que le nombre d'élèves s'établit en moyenne à 20 élèves et qu'il convient de s'en féliciter.
Néanmoins, nos enfants ne sont pas des moyennes : dans le XIXe arrondissement, le fait que les trois quarts des écoles soient placés en REP permet en effet de disposer d'effectifs adaptés, avec des résultats tangibles sur les résultats des enfants ; en revanche, des représentants de la communauté éducative d'une école du XVe arrondissement ont évoqué des classes de maternelle comptant pas moins de 28 élèves.
Quel est donc, dans l'ensemble de notre pays, le nombre et la proportion de classes dans lesquelles l'effectif est supérieur à 25 élèves ?
Pour en revenir au rapport d'information évoqué par Jacques Grosperrin et Annick Billon, nous portions notamment trois propositions précises : la mise en place d'observatoires des dynamiques scolaires partout sur les territoires ; l'adoption d'une stratégie éducative territoriale sur six ans, en précisant les critères qui permettent l'ouverture et la fermeture de classes ; enfin, l'élaboration d'une carte scolaire pluriannuelle. Pouvez-vous vous engager, monsieur le ministre, sur ces trois propositions, et non pas sur des propos généraux ?
Vous avez également qualifié la situation de l'école d' « extrêmement inquiétante », notamment en termes d'inégalités sociales et scolaires. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain avait déposé une proposition de loi visant à assurer la mixité sociale et scolaire dans les établissements d'enseignement publics et privés sous contrat du premier et du second degrés : si elle n'avait pas été adoptée par le Sénat, tous les élus présents s'étaient accordés sur le fait qu'il n'était plus possible de nier les difficultés en la matière compte tenu des disparités entre établissements publics et de la ségrégation croissante des établissements privés sous contrat.
Qu'allez-vous entreprendre dans ce domaine, au-delà d'un protocole non obligatoire qui ne s'est jamais concrétisé, malgré moult promesses de vos prédécesseurs ?
Mme Catherine Morin-Desailly. - Monsieur le ministre, vous avez été à la tête de l'enseignement scolaire et n'êtes donc pas sans savoir que la loi pour une école de la confiance, adoptée en 2019, avait été amendée par notre commission afin de fixer, à l'ère du numérique, un certain nombre d'obligations en matière de formation des formateurs. L'ambition que nous portions pour ces derniers - d'ailleurs soutenue par Jean-Michel Blanquer - était la suivante : « Ils forment des étudiants et des enseignants à la maîtrise des outils et ressources numériques, à leur usage pédagogique, ainsi qu'à la connaissance et la compréhension des enjeux liés à l'écosystème numérique et à la sobriété numérique. »
Par conséquent, la maquette des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé) devait être revue, un nombre d'heures devait y être dédié et des budgets devaient y être consacrés. Depuis lors, année après année, j'interroge avec patience et ténacité chacun des ministres de l'éducation nationale pour obtenir des renseignements sur la ligne budgétaire dédiée et sur l'effectivité de cette mesure adoptée à l'unanimité.
Peut-être pourrez-vous m'apporter une réponse sur ce sujet important, à l'heure où la santé mentale des jeunes est souvent évoquée et où les enseignants et les parents peuvent se retrouver démunis face à ces enjeux d'éducation et de sensibilisation aux dangers des réseaux sociaux.
Sur un autre sujet, notre commission a aussi tâché de sensibiliser vos prédécesseurs aux conséquences de la réforme du remplacement de courte durée sur le dispositif « Ma classe au cinéma ». Mme Borne vous avait confié la rédaction d'un rapport - d'ailleurs excellent - qui vise justement à établir une ambition renouvelée en matière d'éducation à l'image, notamment via le développement de ce dispositif.
Comment comptez-vous associer la ministre de la culture et le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) pour faire en sorte que ce type de dispositifs puisse être pleinement déployé ?
M. Cédric Vial. - La proposition de loi visant à renforcer le parcours inclusif des enfants à besoins éducatifs particuliers a été mentionnée précédemment : celle-ci a vu son parcours s'interrompre en commission mixte paritaire et devait être renvoyée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale et au Sénat. Pensez-vous qu'elle sera réinscrite à l'ordre du jour et allez-vous militer en ce sens ? Ce texte comporte en effet une série d'outils qui permettront de mieux prendre en charge l'école inclusive, après les importantes modifications portées par le Sénat.
La même proposition de loi évoque également les pôles d'appui à la scolarité au sujet desquels je serai moins enthousiaste que vous, car ils ne me paraissent guère de nature à régler les problèmes de compensation et d'accessibilité que vous évoquiez. Certes, les PAS peuvent éventuellement y contribuer, mais les pôles inclusifs d'accompagnement localisés (Pial) auraient très bien pu constituer une réponse adéquate si les moyens nécessaires leur avaient été consacrés.
De plus, je rappelle que les PAS ne concernent pas uniquement les enfants en situation de handicap, mais qu'ils élargissent le périmètre à tous les enfants ayant des besoins particuliers. Outre les 520 000 enfants en situation de handicap comptabilisés à l'heure actuelle, dont le nombre progresse d'environ 10 % par an, combien d'enfants à besoins particuliers recensons-nous ? Nous n'avons jamais réussi à obtenir ce chiffre, et nous ne pouvons que nous interroger quant à notre capacité à prendre correctement en charge un public à ce point élargi : disposez-vous de ces éléments chiffrés ?
L'école inclusive coûte actuellement environ 4 milliards d'euros, mais ne fonctionne toujours pas de manière satisfaisante, malgré les moyens considérables qui y ont été alloués par les gouvernements successifs. Pire encore, la situation se dégrade : au moment du vote de la loi visant la prise en charge par l'État de l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne, environ 70 % des enfants avaient trouvé une solution, proportion qui a chuté à 40 % ou à 50 % en début d'année 2025 : ce n'est pas acceptable alors que nous avons voté un budget de 32 millions d'euros pour la prise en charge de ces enfants.
Un déficit de pilotage semble l'expliquer et il faut désormais mettre les mains dans le cambouis afin que le dispositif fonctionne. Comment allez-vous faire en sorte d'y parvenir, notamment afin que la prise en charge sur le temps méridien ne se fasse pas au détriment de la prise en charge sur le temps scolaire ?
Mme Pauline Martin. - Je porte une proposition depuis deux ans en matière de recrutement d'AESH : ne faudrait-il pas déployer des modules de formation permettant de décloisonner les métiers d'animateurs de centres de loisirs et d'AESH ? Il convient de renforcer l'attractivité de ces métiers alors que les communes font face à des problèmes notoires de recrutement pour ces deux professions.
Mme Karine Daniel. - Je souhaitais porter deux points à votre attention, monsieur le ministre.
Le premier concerne le développement de l'offre du passeport du civisme et les propositions de l'entreprise Lift, financée notamment par le Fonds du bien commun, qui a été créé par Pierre-Édouard Stérin. Les prises de position de celui-ci suscitent de légitimes inquiétudes qui m'ont conduite, aux côtés de plusieurs collègues, à vous interpeller.
Il semble que ces initiatives se revendiquent d'un soutien du ministère de l'éducation nationale, point sur lequel nous souhaitions avoir votre éclairage. Selon la presse, des maires se sont sentis abusés et se retirent de cette offre de passeport du civisme, notamment dans le Finistère.
Je souhaite également attirer votre attention sur un cas particulièrement alarmant, à savoir le projet d'école primaire hors contrat à Abbaretz, en Loire-Atlantique. Porté par une association sédévacantiste qui revendique une vision rigoriste de la morale catholique et qui s'oppose à l'avortement, au divorce et à l'homosexualité, ce projet repose sur un financement du fonds de dotation Pierre Favre, sans que les sources ni les montants soient clairement identifiés à ce stade.
Avant même que le rectorat ne soit saisi de cette demande, et alors que les locaux sont en cours de finition, la maire d'Abbaretz subit de fortes pressions, bien qu'elle ait déjà alerté les autorités préfectorales et exigé des porteurs du projet qu'ils communiquent précisément sur sa teneur.
Ces projets se développent à la faveur d'un manque d'encadrement, d'un flou juridique et de délais de réponse assez serrés. Pouvons-nous nous contenter de ces dispositifs et, surtout, pouvons-nous laisser les élus locaux en première ligne sur ces sujets qui posent des problèmes d'ordre public ?
Plus globalement, cet exemple nous interpelle sur l'augmentation du nombre d'établissements privés hors contrat : alors que vous avez présenté des chiffres reflétant une démographie à la baisse, nous constatons que ces établissements accueillent un nombre grandissant d'élèves, ce qui doit nous interroger.
Nous confions en effet à l'école la mission de faire partager aux élèves les valeurs républicaines, la France étant une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Comment ne pas craindre pour notre pacte républicain et pour le principe de laïcité, qui est le fondement du système éducatif français ?
Quelles mesures comptez-vous prendre pour garantir une instruction rigoureuse des demandes d'ouverture d'écoles privées hors contrat, afin d'éviter que des structures ne se développent en marge des valeurs républicaines ?
Mme Marie-Jeanne Bellamy. - Je souhaite tout d'abord évoquer le fonds de soutien au développement des activités périscolaires (FDSAP). En dépit des promesses de M. Gabriel Attal et de Mme Élisabeth Borne, ce fonds, qui était doté de 15 millions d'euros, s'est éteint le 1er septembre 2025. Les conséquences de sa disparition sont importantes pour nos petites communes rurales, mais aussi pour les communes comptant des zones en REP, les cités éducatives n'ayant pas pris le relais.
Parallèlement, un fonds de soutien similaire a toutefois été créé par la loi du 11 août 2025 de programmation pour la refondation de Mayotte, avec une dotation d'environ 4,5 millions d'euros. Comme l'avait promis M. Attal, ne pourrions-nous pas réfléchir à la mise en place, en métropole, d'un fonds de soutien ciblé sur les communes ayant les plus forts besoins ?
S'agissant ensuite de la suppression de classes en milieu rural, j'ai écouté attentivement votre audition à l'Assemblée nationale et me réjouis de votre souhait de mettre en place une modélisation de la carte scolaire à trois ans. Sera-t-elle réalisée dès cette année ?
Cependant, vivre en ruralité ne doit pas constituer une perte de chance éducative et les suppressions de postes annoncées risquent, une fois de plus, de fragiliser nos territoires ruraux. Afin de préserver l'attractivité de ces derniers, il est essentiel d'adopter une vision prospective tenant compte des distances à parcourir, des investissements engagés par les communes, des perspectives d'implantation de nouvelles familles, de la dynamique territoriale, mais aussi des conditions d'enseignement.
Ne faudrait-il pas réfléchir à mettre en place, comme cela a pu être fait dans les zones de montagne et les REP, un dispositif tenant compte des spécificités du monde rural et de la nécessité d'y maintenir un service public de l'éducation de qualité ?
Enfin, j'ai pris bonne note de votre souhait de mettre en place des expérimentations permettant de travailler, à l'échelle de l'intercommunalité, sur l'offre scolaire en milieu rural et je vous propose d'y associer le département de la Vienne.
M. David Ros. - À défaut de garantir la stabilité à l'avenir, nous pouvons déjà, au regard de la précision de vos réponses, nous féliciter de la stabilité que vous incarnez, d'autant plus que votre collègue de l'enseignement supérieur a été reconduit dans ses fonctions.
Vous nous avez montré des courbes très intéressantes sur l'évolution du nombre d'élèves et d'enseignants, ce qui permet d'anticiper les évolutions démographiques et, comme vous l'avez dit, de « préparer l'avenir ».
Disposez-vous de courbes identiques pour les compétences visées et les évaluations à venir, afin de comparer ces données avec nos voisins européens, en lien avec le Conseil supérieur des programmes ? Ne convient-il pas de planifier le renforcement des compétences scientifiques dont nous aurons fort besoin à l'avenir ? Je songe notamment à l'usage de l'intelligence artificielle, mais aussi aux mathématiques.
Vous avez d'ailleurs évoqué le premier concours de mathématiques qui se tiendra cette année en classe de première : ne faudrait-il pas poursuivre l'enseignement des mathématiques jusqu'en terminale, quelles que soient les options choisies, de manière à laisser des passerelles pour rejoindre des filières scientifiques ?
Par ailleurs, vous êtes sans doute trop modeste lorsque vous affirmez que vos compétences s'arrêtent aux portes d'entrée de l'enseignement supérieur. Ne pourrions-nous pas envisager un plan pluriannuel visant à renforcer les liens entre l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur, à l'aide de Parcoursup ? Votre collègue Philippe Baptiste nous a en effet fait part des difficultés que rencontrent les universités à accueillir des élèves qui n'avaient pas validé l'ensemble des connaissances nécessaires pour réussir dans les filières choisies.
S'agissant enfin des rythmes scolaires, la ville d'Orsay, que j'ai eu l'honneur de diriger pendant seize ans, est la dernière commune - hors Paris - en Île-de-France qui continue à appliquer les cinq matinées travaillées. Sans relancer le débat sur la valeur pédagogique des différents rythmes - la liberté de choix ayant été laissée aux villes -, il faudrait néanmoins s'interroger dès lors que l'exception devient la règle : l'éducation nationale a, me semble-t-il, un rôle à jouer afin de veiller à l'homogénéité des règles sur l'ensemble du territoire.
Mme Agnès Evren. - Je rebondis sur l'interrogation de Colombe Brossel relative aux fermetures de classes à Paris. Pourquoi le programme 139 « Enseignement privé du premier et du second degrés » perd-il 43,75 millions d'euros dans le PLF pour 2026 ? Quelles sont les justifications pédagogiques et budgétaires de cette diminution ?
Dans une réponse du 30 octobre dernier à l'une de mes questions écrites portant sur la fermeture de classes dans l'enseignement privé parisien, vous assumiez le fait que la fermeture de dix d'entre elles était liée non pas à l'évolution des effectifs, mais à une volonté d'améliorer la mixité sociale. Quels sont, dès lors, les indicateurs que vous avez mis en place pour mesurer l'efficacité de ces fermetures dans l'atteinte de cet objectif ?
Plus largement, comment évaluez-vous l'impact des baisses des moyens alloués à l'enseignement privé sous contrat ?
Par ailleurs, vous avez soulevé le sujet majeur de la santé physique et psychique de nos jeunes. Vous incluez, parmi les facteurs de dégradation de cette dernière, la surexposition aux écrans, qui dilue aussi bien l'attention que la concentration et qui nuit au sommeil et aux apprentissages. Si les écrans sont à bien des égards porteurs de progrès et d'opportunités, l'hyperconnexion a des effets délétères sur nos jeunes, victimes de la bataille de l'attention que se livrent les plateformes. Autrefois, l'école marquait une rupture dans leur journée ; désormais, la vie scolaire se confond avec la vie à la maison, dans la mesure où ils y partagent, de la même manière, du contenu et des like.
À ce titre, pouvez-vous nous indiquer pourquoi le dispositif « Portable en pause » est mis en place dans si peu de collèges ? Combien d'établissements l'appliquent-ils à ce jour ? La nécessité pour les départements de financer les casiers permettant de stocker les téléphones constitue-t-elle un frein à la pleine mise en oeuvre de cette pause numérique ? Enfin, comment le ministère compte-t-il articuler la politique numérique éducative - espaces numériques de travail (ENT), tablettes - avec cette exigence de déconnexion des enfants ?
Mme Catherine Belrhiti. - La réforme des concours de la formation dispose-t-elle d'un budget suffisant pour garantir le nombre et la qualité des entrants ? Dans ce domaine, quelle est votre projection pour les cinq à dix années à venir ?
Par ailleurs, la baisse démographique est-elle uniquement considérée comme une variable d'ajustement budgétaire ou comme une opportunité de rénover le système, en réduisant les effectifs par classe ou en améliorant l'encadrement ?
Je note, sur un autre point, que la part des contractuels a sensiblement augmenté en l'espace de cinq années, ce qui m'interroge quant au niveau de recrutement alors que l'on évoque une baisse du niveau scolaire.
J'en viens à l'enseignement privé, régulièrement attaqué par des médias orientés et des élus qui le sont tout autant, avec à la clé des enquêtes administratives qui sont très mal vécues sur le terrain. Cette agitation soulève une question qui me semble essentielle : comment garantir la pérennité de la diversité éducative, qui fait la richesse de notre pays ?
Les dérives et les actes qui ont été relevés ne sont pas le seul fait de l'enseignement privé sous contrat et sont malheureusement présents dans toutes les couches de la société, y compris dans l'enseignement public.
Le principe de la liberté de l'enseignement figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ; les établissements privés sous contrat assurent un enseignement de qualité, et les fortes demandes d'inscription en témoignent puisque 20 % des élèves y sont scolarisés. Ils contribuent à la mixité sociale et scolaire, renforcent l'accueil des élèves à besoins éducatifs particuliers et la mise en place d'une contribution familiale modulée en fonction des ressources y devient la norme.
En résumé, les établissements privés sous contrat offrent un cadre de vie à nos enfants et permettent à nombre d'entre eux de devenir des citoyens éclairés, parfaitement insérés dans la société : ils sont un maillon essentiel de notre système éducatif.
Pouvez-vous donc nous assurer, monsieur le ministre, que les moyens qui leur sont alloués ne seront pas remis en cause ?
Mme Sonia de La Provôté. - Où en est votre réflexion concernant le redéploiement des enseignants dans les écoles rurales dites « prioritaires », c'est-à-dire celles qui sont confrontées à un contexte social particulièrement difficile et complexe ? Envisagez-vous de déployer des ressources identiques à celles qui ont été mobilisées pour les zones d'éducation prioritaire ?
Les quartiers prioritaires ont d'ailleurs connu une expérimentation portant sur un nouveau zonage et une nouvelle forme d'accompagnement : dans un contexte de difficultés budgétaires et de diminutions du nombre d'emplois dans l'éducation nationale, allez-vous maintenir les renforts d'effectifs tels qu'ils étaient prévus ?
Mme Sabine Drexler. - Le dispositif des PAS a été généralisé à la rentrée de septembre 2025 : comme vous l'avez rappelé, il vise à mieux accompagner les élèves à besoins éducatifs particuliers et les enfants en situation de handicap, en leur apportant des réponses rapides.
Les PAS constituent un progrès en ce qu'ils permettent une évaluation plus précoce des besoins et une meilleure coordination pluridisciplinaire. Je salue notamment le renforcement de la collaboration entre l'éducation nationale et le secteur médico-social, la mutualisation des moyens et des ressources dans les territoires étant une avancée notable.
Toutefois, le rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR) a relevé une grande disparité entre les territoires, avec des faiblesses particulièrement marquées dans les zones rurales. Ce dispositif ne pourra être efficace que lorsqu'il sera s'appuiera sur des professionnels de santé, des médecins scolaires, des psychologues scolaires et des centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP).
Or, si je prends l'exemple de la circonscription d'Altkirch, nous sommes confrontés à une pénurie de médecins et de psychologues scolaires, tandis que le délai d'attente s'élève à deux ans pour le CMPP. Pourtant, le nombre de demandes d'aide explose, les enfants comme les familles étant en détresse tandis que les enseignants ne savent plus vers qui se tourner.
En permettant le décloisonnement et la coopération entre les acteurs éducatifs, les professionnels de santé et les structures médico-sociales, les PAS sont donc un progrès, mais ils ne peuvent à eux seuls remplacer des professionnels ou des structures dont nous ne disposons plus.
Qu'est-il prévu dans le PLF pour 2026 afin de continuer à développer ce dispositif, aussi bien en termes de moyens humains que de ressources matérielles et pédagogiques ?
Par ailleurs, comment allez-vous procéder pour identifier les écoles et les secteurs prioritaires, et quels indicateurs retiendrez-vous à cette fin ?
M. Edouard Geffray, ministre. - Monsieur Paumier, j'ai indiqué aux recteurs et aux Dasen que les observatoires des dynamiques démographiques, initialement construits autour de la ruralité, doivent couvrir l'ensemble du territoire.
Pour ce qui concerne le processus d'ouverture et de fermeture de classes, je souhaite que nous nous entendions sur les réalités : je demanderai aux recteurs et aux Dasen de documenter le travail mené au niveau local de manière pluriannuelle, en précisant bien que le PLF joue un rôle décisif et que ces responsables ne pourront pas s'engager sur une ouverture ou une fermeture de classe dans trois ans.
En revanche, ils pourront partager, à titre prévisionnel, la perspective de voir telle ou telle ouverture ou fermeture se produire : soyons bien clairs sur ce sujet, car il ne faudrait pas que les uns et les autres se sentent liés par un engagement qui dépend, in fine, de la loi de finances que vous voterez.
En ce qui concerne les postes à profil, mécanisme déjà bien implanté dans le système éducatif, j'estime qu'ils peuvent trouver à s'appliquer dans le cadre d'un projet territorial impliquant une reconfiguration liée à la démographie : l'appréciation des besoins au niveau local doit alors prévaloir, et je ne me vois guère dicter ce genre de décisions depuis le niveau national.
Madame Brossel, la situation à Paris est particulièrement favorable comparé au reste du territoire : pour 100 élèves, le taux d'encadrement est de 6,63 enseignants, contre 6,05 enseignants sur le plan national. Par ailleurs, la capitale a perdu entre 3 000 élèves et 4 000 élèves par an dans le premier degré.
Il ne s'agit effectivement que de moyennes, et je suis le premier à dire que nos enfants ne peuvent pas être réduits à ces chiffres ; pour autant, je note que le chiffre de 19 élèves par classe au niveau des pays de l'OCDE est souvent utilisé dans le débat public, en regrettant la position de la France dans le classement, mais il s'agit là aussi d'une moyenne. J'accepte donc que l'on raisonne en moyenne, mais il faut alors tenir la logique jusqu'au bout et comparer des éléments qui peuvent l'être.
Au demeurant, l'effectif des classes peut varier - en fonction de l'habitat d'un quartier et de la taille de l'école - et atteindre parfois 27 élèves, ce qui est très lourd dans le premier degré, tandis que les classes peuvent compter dix élèves de moins dans d'autres endroits. Je n'ai aucune difficulté à partager les données dont dispose la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (Depp), mais elles ne seront pertinentes qu'en les analysant par niveaux - petite section, moyenne section, etc. - afin que nous puissions travailler ensemble sur le sujet.
En revanche, la répartition précise, classe par classe et école par école, nécessiterait un important travail de type académique que je n'ai guère le temps de réaliser.
Pour ce qui est des critères retenus afin de décider des ouvertures et des fermetures de classes, nous ne pouvons pas nous limiter à la démographie, mais il faut également prendre en compte l'éloignement. Selon moi, un indice plus fin d'éloignement culturel pourrait aussi être intégré dans nos évaluations. Je précise cependant que l'addition de ces critères ne doit pas déterminer automatiquement nos décisions, et qu'une appréciation humaine et politique - au sens de notre politique publique d'éducation - doit être apportée afin de protéger nos territoires autant que possible.
Toujours sur la mixité sociale et scolaire, je rappelle qu'une analyse de la Depp a déterminé que la mixité sociale à l'école est liée pour deux tiers au logement, situation que je ne suis pas en mesure de corriger seul. Une forme de polarisation est à l'oeuvre et est d'ailleurs confortée par l'évolution démographique actuelle : les deux seuls déciles de population qui ont plus de deux enfants par femme aujourd'hui sont le décile le plus favorisé et le décile le moins favorisé.
Les tendances démographiques actuelles accentuent donc la polarisation sociale, tandis que les classes moyennes « encaissent » la chute démographique. Je tiens à ce que nous conservions ces éléments à l'esprit, car tous les problèmes ne peuvent pas être résolus par des proclamations.
Outre le sujet de la carte scolaire, que nous retravaillons beaucoup, nous avons déployé des dispositifs tels que les secteurs multi-collèges dans la moitié des départements, ce qui suppose de pouvoir s'appuyer sur un tissu de collèges et d'écoles assez dense.
Pour ce qui concerne l'enseignement privé sous contrat, qui ne doit pas être stigmatisé, il existe là aussi une polarisation des CSP+ (catégories socioprofessionnelles), qui privilégient ces établissements. Au-delà du protocole qui a été signé, nous devons mener une action plus fine en appréciant des éléments très concrets tels que le taux de boursiers et son évolution par établissement : nous avons fixé des objectifs et je dois échanger prochainement avec le secrétariat général de l'enseignement catholique (Sgec) à ce sujet.
J'ajoute qu'il existe un sujet spécifique à Paris, les transferts d'élèves depuis la proche banlieue pouvant générer des distorsions, comme l'a très bien analysé Julien Grenet. Nous adopterons donc probablement des réponses différentes pour la capitale.
Madame Morin-Desailly, je ne suis pas sûr que l'on sache aujourd'hui isoler l'effort budgétaire spécifiquement dédié au domaine numérique. En tout état de cause, le fait que les jeunes passent quatre heures et quarante-sept minutes par jour en moyenne sur leur écran est un problème de société. Prenons garde, d'ailleurs, à ne pas reproduire l'affrontement du pot de fer et du pot de terre : une heure d'enseignement moral et civique (EMC) par jour ne suffira pas à contrecarrer près de cinq heures d'exposition à des contenus qui discréditent la science et la raison, par exemple, alors que l'école est justement dédiée au progrès de l'esprit humain et à la culture de la raison.
Nous devons donc identifier les moyens permettant de réduire l'exposition aux écrans, y compris à l'école, et je pense que nous avons besoin d'une doctrine plus claire sur ce point : je considère que tout écran doit être proscrit avant l'âge de 6 ans, sauf dans l'hypothèse très particulière d'un enfant en situation de handicap en difficulté avec le geste scripteur et pour qui une tablette permet de compenser ce geste, mais il s'agit alors d'une logique de substitution, et non pas d'un mode d'apprentissage de droit commun.
Se pose ensuite la question de l'utilisation de l'écran à des fins pédagogiques. Nous avons introduit cette année une coupure de la communication via les ENT durant les week-ends et les vacances, ce qui a d'ailleurs suscité des réactions angoissées.
En tout état de cause, il ne faut pas que nous cultivions, chez nos jeunes, l'idée que l'entrée dans le savoir passe en premier par l'écran : si l'école envoie un tel message, il ne servira plus à rien de mener des combats d'arrière-garde. La clé de l'entrée dans le savoir est au contraire l'apprentissage dans la classe, par l'enseignement du professeur, le numérique pouvant ensuite venir en aide à cet apprentissage.
Enfin, nous reviendrons sur le dispositif « Ma classe au cinéma », et sur l'éducation aux écrans en général, dans le cadre d'une concertation à venir avec le CNC et le ministère de la culture.
J'en viens aux sujets relatifs à l'école inclusive soulevés par le sénateur Vial. L'organisation de la prise en charge sur le temps de la pause méridienne n'est à l'évidence pas satisfaisante, ce qui soulève des enjeux de pilotage national et territorial : il faut le renforcer.
Les PAS, quant à eux, ne résolvent certes pas tous les problèmes, mais peuvent améliorer la situation. Je suis assez convaincu par la démarche qui consiste à croiser les regards et les compétences, car il s'agit, selon moi, d'un levier puissant pour bâtir une culture commune du handicap. Par le passé, ce dernier était quasi absent de l'école ; il pourrait presque paraître omniprésent aujourd'hui dans la mesure où quasiment toutes les classes comptent un enfant en situation de handicap.
L'inclusion scolaire a donc accompli des progrès, mais nous avons encore besoin de renforcer cette culture de l'inclusion scolaire par le biais de formations communes associant les personnels scolaires et les personnels des collectivités.
Pour ce qui est du passeport du civisme et des associations en général, madame Daniel, l'éducation nationale fonctionne avec un système d'agréments qui simplifient les relations avec les établissements, mais qui n'en conditionnent pas l'ouverture : un établissement peut donc faire intervenir une association sans qu'elle soit agréée. Dans ce cadre, certaines associations sont susceptibles de pratiquer l'entrisme et d'effectuer des interventions incompatibles avec le programme de l'éducation nationale.
Il convient donc de faire preuve de prudence ; en tout état de cause, nul ne peut revendiquer le soutien du ministère de l'éducation nationale s'il n'a pas été agréé, et nous disposons d'une série d'outils pour mettre un terme à cet usage, ce qui est régulièrement nécessaire. En général, des mises en demeure suffisent.
Je n'ai pas connaissance du cas de l'école primaire que vous avez évoqué, mais je rappelle que le cadre juridique a été très sensiblement renforcé avec la loi visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat, ainsi qu'avec la loi confortant le respect des principes de la République.
Je n'éprouve donc pas le besoin d'un durcissement de la législation, le corpus de mesures actuel étant suffisant. En revanche, une vigilance particulière doit être de mise et vous pouvez compter sur moi pour le rappeler aux recteurs. J'ajoute que les équipes d'inspecteurs affectés aux établissements hors contrat ont été singulièrement renforcées ces dernières années, de manière à prévenir toute forme de séparatisme social, intellectuel ou autre. Cette surveillance s'effectue toujours dans le respect de la liberté d'enseignement, qui est une liberté constitutionnelle, mais qui ne peut s'exercer sans contrôle.
Madame Bellamy, le FSDAP s'est effectivement éteint en dehors de Mayotte et je prends note de la candidature de votre département pour participer à l'expérimentation relative à l'offre scolaire en milieu rural.
Monsieur Ros, je compte m'appuyer une fois encore sur les travaux de la Depp pour ce qui est de la visibilité scientifique des années à venir. Vous avez compris que je suis fortement préoccupé par les enjeux démographiques, qui auront d'importantes répercussions sur le marché du travail, ce qui nécessite de se préparer collectivement afin d'éviter d'être surpris, comme cela a été le cas avec le pic démographique des années 2000, qui a ensuite créé des besoins, notamment en termes d'ouvertures de lycées.
Les données dont nous disposons nous conduisent d'ores et déjà à modifier régulièrement la carte des formations, notamment dans la voie professionnelle. Nous avons ainsi ouvert 51 % de places supplémentaires sur les secteurs industriels d'avenir tels que le nucléaire ou la cybersécurité, tout en réduisant le nombre de places pour les filières du tertiaire moins porteuses.
Pour ce qui est de nos liens avec l'enseignement supérieur, j'évoquais simplement une délimitation de compétences et non pas la nécessaire cohérence que mon collègue Philippe Baptiste et moi-même devons porter. Sur le plan de l'orientation, il nous faut sans doute raisonner sur un horizon non plus « - 3/+ 3 » c'est-à-dire du lycée à la licence, mais « - 5/+ 5 » incluant le collège. Les schémas d'orientation se construisent très tôt, dès la quatrième ou la troisième, même de manière négative : si certaines portes sont fermées à ce moment, elles le restent ensuite définitivement dans l'esprit des jeunes.
Mon idée consiste donc à agir très tôt pour ouvrir ces portes et travailler sur le continuum de ces schémas, ce que permet la réforme du lycée avec le choix des spécialités.
Concernant le rythme scolaire, une homogénéisation dans un sens ou dans l'autre me semble exclue, le système actuel fonctionnant convenablement.
Madame Evren, je ne peux que souscrire à l'idée de mettre le portable en pause et d'installer des casiers de stockage lorsque c'est possible, mais je rappelle que la première pause du portable est l'interdiction, qu'il nous revient de faire respecter. Je ne peux que me réjouir des cas où il est possible de conforter l'interdiction avec des installations spécifiques, mais je ne peux pas imposer aux départements d'acquérir des casiers. Plusieurs centaines d'établissements fonctionnent ainsi, avec des retours qui laissent apparaître une nette satisfaction.
Pour ce qui est des fermetures de classes dans l'enseignement privé, je rappelle qu'une « dérivée budgétaire » s'applique du public vers le privé. À titre personnel, je juge logique de la voir s'appliquer à Paris comme ailleurs : dans le cas contraire, nous nous exposerions à un déséquilibre assez profond entre la capitale et la proche banlieue, ainsi qu'à un déséquilibre entre l'enseignement public et l'enseignement privé sous contrat.
Madame Belrhiti, la réforme de la formation initiale a bien été budgétée en recherchant un équilibre entre l'amorce des recrutements futurs et la réponse aux urgences démographiques. Si la démographie n'est pas une variable d'ajustement, elle représente une sorte de triste aubaine : il est évidemment regrettable d'avoir perdu 15 % à 20 % d'enfants par génération, mais nous devons en même temps adapter au mieux l'éducation nationale en fonction de ces évolutions.
Concernant les effectifs des contractuels, le paysage est en réalité assez diversifié : au nombre de 20 000 en début d'année, ils sont près de 40 000 en fin d'année en raison des remplacements. Par ailleurs, les contractuels sont plus nombreux dans l'engagement professionnel et plus rares dans le premier degré, dans lequel on entre traditionnellement par la voie du concours : de mémoire, on y compte ainsi environ 2 400 contractuels pour 360 000 professeurs du premier degré.
Concernant l'enseignement privé, ma vision est très claire : les principes sont constitutionnellement garantis, les programmes s'appliquent partout de la même façon - je serai intraitable sur ce point - et chaque euro alloué par l'État doit servir à l'enseignement. Pour autant, dans le cadre de leur « caractère propre », les établissements sont libres de développer leurs propres activités à la condition qu'elles ne contredisent pas les programmes. Enfin, le fait qu'ils puissent faire l'objet de contrôles est le corollaire de leur situation : lesdits contrôles doivent être conduits avec à la fois raison, lucidité et fermeté.
Madame de La Provôté, je vous répondrai ultérieurement à propos des secteurs ruraux prioritaires. Pour ce qui concerne l'éducation prioritaire, la refonte du zonage établi en 2014 s'impose, car notre carte est en grande partie périmée.
Cela étant dit, nous devons tenir compte du calendrier : s'atteler à une réforme de la carte de l'éducation prioritaire à la veille des élections municipales n'est pas chose aisée, car nous devrons attendre la constitution des nouvelles équipes municipales au mois d'avril ; ensuite, quinze à dix-huit mois seront nécessaires pour retravailler la carte, alors que les scrutins de 2027 approcheront.
Je ne suis donc pas sûr de pouvoir, compte tenu de cet agenda politique, de mener à bien cette refonte globale ; en revanche, je souhaite que nous nous penchions sur la situation de la vingtaine de réseaux qui ne sont pas catégorisés en éducation prioritaire malgré un indice de position sociale (IPS) extrêmement défavorable.
M. Laurent Lafon, président. - Merci pour ces réponses précises, monsieur le ministre.
* 1 Audition du 5 novembre 2025.
* 2 Formation initiale et continuée des professeurs : au-delà des effets d'annonce, bâtir sur la durée une formation de qualité fondée sur la simultanéité des apprentissages académiques et des pratiques professionnelles, rapport n°683 de Mme Annick Billon et M. Max Brisson, session 2023-2024.
* 3 Formation initiale et continuée des professeurs : au-delà des effets d'annonce, bâtir sur la durée une formation de qualité fondée sur la simultanéité des apprentissages académiques et des pratiques professionnelles, rapport n°683 de Mme Annick Billon et M. Max Brisson, session 2023-2024.

