B. LE PROBLÈME PARTICULIER DE LA POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE : UN PROJET DE LOI EN PRÉPARATION

L'actualité de l'année 1995 a mis en lumière l'acuité du problème de la pollution atmosphérique ; en effet, de nombreuses alertes à la pollution de l'air ont été déclenchées au cours des derniers mois à Paris et dans certaines grandes villes de province telles que Strasbourg ou Grenoble, suscitant certaines inquiétudes quant aux conséquences de cette pollution en termes de santé publique.

En particulier, s'agissant de l'agglomération parisienne, le seuil d'information n° 2 a été dépassé à plusieurs reprises cet été pour l'ozone, avec des taux supérieurs à 180 microgrammes par m 3 , alors que le seuil d'alerte n° 3 a été atteint le 10 octobre 1995 pour le dioxyde d'azote, avec un taux supérieur à 400 microgrammes par m3.

Le franchissement de ces seuils a entraîné la diffusion de messages d'information comprenant notamment des recommandations à l'intention des personnes sensibles (enfants, personnes âgées, asthmatiques...). En outre, la préfecture de police a, à plusieurs reprises, recommandé la limitation de l'utilisation des véhicules.

La surveillance de la qualité de l'air ainsi réalisée est effectuée par les associations de surveillance de la qualité de l'air agréées par le ministre de l'environnement dans le cadre du décret n° 74-415 du 13 mai 1974, modifié le 25 octobre 1991, relatif au contrôle des émissions polluantes dans l'atmosphère. Ce décret reprend notamment les normes européennes de qualité de l'air définies par quatre directives concernant la présence dans l'atmosphère des polluants suivants : dioxyde de soufre, poussières, plomb, dioxyde d'azote, ozone.

Il existe actuellement 31 associations agréées, dont deux ont été créées en 1995 (Airaq en Aquitaine et Atmosf air à Chalon-sur-Saône), qui bénéficient de financements provenant de la taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique.

Une trentaine d'agglomérations bénéficient donc du dispositif national de surveillance qui comprend environ 150 personnes et gère un parc de plus de 1.000 analyseurs automatiques mesurant la présence des différents polluants. Le coût de cette surveillance s'est élevé à 85,8 millions de francs en 1994.

Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, a fait savoir, peu après sa prise de fonctions, que la qualité de l'air constituait l'une de ses préoccupations prioritaires et elle a annoncé son intention de préparer un projet de loi tendant à réviser la loi sur l'air datant de 1961. À cette fin, elle a mis en place, au mois de juillet dernier, un groupe de travail réunissant des parlementaires, des élus locaux et des représentants des associations professionnelles intéressées, dont les conclusions seront rendues publiques.

Selon les déclarations du ministre devant la commission, le projet de loi aura deux objectifs principaux, le premier étant d'améliorer la prévention et le second de gérer au mieux les « pics de pollution ».

Dans le cadre du premier objectif, il pourrait comprendre des dispositions tendant à améliorer l'information du public sur la qualité de l'air, notamment grâce à l'extension des réseaux de surveillance de la qualité de l'air, afin de parvenir en cinq ans à la couverture de l'ensemble des agglomérations de plus de 100.000 habitants.

Il pourrait également prévoir la mise en place de plans de qualité de l'air au niveau régional, ainsi que la prise en compte du problème de la pollution atmosphérique dans les documents d'urbanisme.

Dans le cadre du second objectif, à savoir la gestion des situations de crise, des mesures pourraient être prévues afin de restreindre la circulation aux véhicules les moins polluants, cette réglementation relevant de l'État pour ce qui concerne les routes nationales et les voies radiales et des collectivités locales pour ce qui concerne la circulation en ville.

Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, a en particulier jugé souhaitable de responsabiliser les automobilistes, par exemple en leur attribuant une « vignette verte » lorsque leurs véhicules répondent à certaines « propres ».

Certaines des dispositions du projet de loi pourraient s'inspirer des propositions présentées par notre collègue Philippe Richert, sénateur du Bas-Rhin, dans le cadre d'un rapport sur la qualité de l'air et les réseaux de surveillance remis au Premier Ministre en mai dernier.

Suivant les conclusions de son rapporteur, la Commission des Affaires économiques et du Plan a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du budget de l'environnement inscrits au projet de la loi de finances pour 1996.

EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Lors de l'examen du budget du ministère de l'environnement, au cours de la séance du vendredi 10 novembre 1995, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de M. Jean-Pierre Thomas, un amendement tendant à une réduction à hauteur de 2 millions de francs des crédits de paiement et à hauteur de 5,5 millions de francs des autorisations de programme (les amendements initialement adoptés par la Commission des Finances, qui tendaient à une réduction plus importante des crédits du ministère, ayant été retirés au profit de l'amendement de M. Jean-Pierre Thomas).

Ces réductions de crédits, qui concernaient les seules subventions d'investissement (Titre VI) se répartissaient comme suit :

- 0,5 million de francs en crédits de paiement et 1,5 million de francs en autorisations de programme sur les actions de gestion des eaux et des milieux aquatiques, et plus spécialement les opérations d'assainissement ;

- 0,5 million de francs en crédits de paiement et 1,5 million de francs en autorisations de programme sur les subventions d'investissement à l'ADEME ;

- 0,5 million de francs en crédits de paiement et 1,5 million de francs en autorisations de programme sur les actions de protection de la nature, et particulièrement les actions de gestion de l'espace et d'évaluation environnementales (crédits d'études et de colloques) ;

- 0,5 million de francs en crédits de paiement et 1,5 million de francs en autorisations de programme sur les dépenses du Fonds de la recherche scientifique et technologique.

Les crédits inscrits au budget du ministère de l'environnement ont cependant été à nouveau modifiés à l'issue de la seconde délibération, intervenue le mercredi 15 novembre 1995.

En effet, trois amendements ont alors affecté les crédits du ministère de l'environnement :

- le premier a majoré de 0,5 million de francs les crédits d'intervention inscrits au Titre IV, et plus précisément au chapitre 44-10 article 20 (Protection de la nature et des paysages) ;

- le deuxième a abondé, à hauteur de 0,5 million de francs en crédits de paiement et en autorisations de programme, le chapitre 57.50 du Titre V, article 20 (Etudes concernant la protection de la nature) ;

- enfin, le troisième a majoré de 4,485 millions de francs en crédits de paiement et en autorisations de programme les subventions d'investissement inscrites au chapitre 67-20 du Titre VI, ces majorations étant réparties entre les articles 30 (Gestion des eaux et des milieux aquatiques), 60 (Protection de la nature), 92 (Pollutions, nuisances urbaines et éco-produits) et 97 (Prévention des risques technologiques et naturels majeurs).

Au total, le solde des modifications apportées par l'Assemblée nationale est donc légèrement positif en termes de crédits de paiement (+ 3,485 millions de francs) et à peine négatif en termes d'autorisations de programme (- 0,515 millions de francs) ce qui apparaît donc tout à fait satisfaisant eu égard au contexte général de recherche systématique d'économies budgétaires.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 14 novembre 1995, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis sur le budget de l'environnement pour 1996.

M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que le budget du ministère de l'environnement n'avait pu bénéficier, cette année, de la priorité dont il avait fait l'objet les années précédentes, compte tenu de l'effort général de réduction des dépenses publiques, mais qu'il devrait néanmoins permettre la poursuite des principales actions prioritaires déjà entreprises.

Il a précisé que ce budget atteignait 1.751 millions de francs en moyens de paiement, soit une quasi stabilité par rapport au budget voté pour 1995 (- 0,3 %).

Il a, toutefois, constaté que l'Assemblée nationale avait adopté un amendement réduisant de 2 millions de francs ces crédits, mais que cette réduction portait sur des chapitres non prioritaires.

Le rapporteur pour avis a ensuite rappelé l'importance de la dépense publique pour l'environnement, évaluée à 83 milliards de francs pour 1995, le budget du ministère de l'environnement ne représentant donc qu'une part minime des ressources publiques consacrées à la politique de l'environnement.

Il a, à cet égard, souligné la montée en puissance progressive des différentes taxes parafiscales instituées en application du principe du « pollueur-payeur ».

Le rapporteur pour avis a, en effet, constaté que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) disposerait en 1996 de plus de 900 millions de francs de ressources au titre du produit de ces différentes taxes, notamment en raison de l'augmentation du taux de la taxe de stockage des déchets ménagers et de la création d'une nouvelle taxe sur les déchets industriels spéciaux, destinée à la réhabilitation des sites pollués dits « orphelins ». Il a déclaré que cette situation avait permis de diminuer sensiblement le montant des subventions budgétaires affectées à l'ADEME, ainsi que l'avait précisé le ministre au cours de son audition.

M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, a ajouté que les nouvelles taxes instituées par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, -à savoir la taxe de passage due par les utilisateurs de véhicules, qui empruntent un ouvrage d'art reliant une île maritime au continent et la taxe perçue sur les passagers embarqués à destination de certains espaces naturels protégés-, seraient mises en place prochainement.

II a, par ailleurs, noté que la politique de déconcentration du ministère serait poursuivie en 1996, grâce à un certain nombre de transformations d'emplois au profit des directions régionales et qu'un effort particulier serait effectué au profit du renforcement des moyens des différents organismes de recherche existant dans le domaine de l'environnement.

M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, a cependant souligné que la prévention des risques naturels resterait en 1996, comme en 1995, la principale priorité du budget de l'environnement.

Il a rappelé les conséquences dramatiques des inondations survenues au cours des trois dernières années et a souligné la nécessité de développer la politique de prévention.

Le rapporteur pour avis a, alors, évoqué la procédure d'expropriation mise en place par la loi du 2 février 1995 pour assurer la sécurité des populations menacées par certains risques naturels majeurs. Il a constaté qu'en dépit de l'urgence invoquée par le Gouvernement au cours des débats parlementaires, aucune procédure n'avait été effectivement engagée à ce jour, des études ayant cependant été réalisées en vue de mettre en oeuvre ce dispositif sur le site de la Séchilienne dans l'Isère.

M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, a ensuite abordé le problème de la cartographie des risques. Il a rappelé que les moyens prévus à cet effet avaient été fortement accrus et que la loi du 2 février 1995 avait substitué aux différents documents existants un document unique : le plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPR), faisant appel à une procédure d'élaboration simplifiée, à l'efficacité renforcée.

Il a, cependant, constaté qu'en 1995 aucun PPR n'avait pu être approuvé dans l'attente de la sortie du décret d'application, et il a noté avec satisfaction que le ministre avait annoncé que 200 PPR pourraient être mis en place en 1996.

Puis, le rapporteur pour avis a indiqué que les crédits prévus pour la politique de l'eau en 1996 seraient essentiellement et prioritairement consacrés à la poursuite de l'exécution des plans décennaux « prévention des risques naturels » et « Loire grandeur nature » dont il a rappelé le contenu. À propos de la modernisation des systèmes d'annonce des crues, il a notamment souligné les difficultés particulières de la prévision des crues des rivières méditerranéennes.

Il a. par ailleurs, évoqué les importants moyens financiers des agences de l'eau.

S'agissant de la protection de la nature, autre priorité du budget de l'environnement pour 1996, M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, a insisté sur les moyens prévus pour la création d'un nouveau parc national en Guyane, précisant que la protection de la forêt guyanaise constituait une priorité résultant des engagements pris par la France à la Conférence de Rio de 1992 sur la diversité biologique.

Il a également évoqué les différents projets de création de parcs nationaux marins.

Le rapporteur pour avis a en outre fait part à la commission des mesures prévues en faveur du Conservatoire du littoral, qui bénéficiera désormais de l'extension de la procédure de dation en paiement. Au sujet de l'action du Conservatoire, il a déclaré qu'elle avait permis de protéger plus de 8 % des côtes de France, mais que la Cour des comptes avait émis, dans son dernier rapport annuel, certaines réserves quant à la cohérence de la politique d'acquisition, la mise en valeur des terrains acquis et la rigueur de la gestion financière.

M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, a enfin abordé le problème de la pollution atmosphérique dont il a souligné l'acuité. Il a, à cet égard, rappelé que le ministre de l'environnement préparait actuellement un projet de loi sur la qualité de l'air qui devrait être prochainement soumis au Sénat.

En conclusion, il a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits inscrits au budget du ministère de l'environnement pour 1996, qu'il a qualifié de budget de continuité et considéré comme satisfaisant dans le contexte actuel de restriction budgétaire.

À l'issue de cet exposé, M. Charles Ginésy a évoqué le problème posé par la présence de loups dans le parc national du Mercantour. Il a en effet rappelé les difficultés causées par l'acclimatation du loup et s'est interrogé sur la compatibilité de la présence des loups avec le maintien de l'élevage ovin.

Sur ce sujet, M. Gérard Larcher a souligné la nécessité de réguler, le cas échéant, la population des loups, précisant qu'il existait des dispositions européennes permettant de réguler les populations protégées, lorsque celles-ci deviennent surabondantes.

M. Charles Ginésy a alors estimé que la spécificité des problèmes posés par la présence du loup mériterait d'être étudiée.

M. Francis Grignon a interrogé le rapporteur pour avis sur les opérations de réhabilitation des sites pollués « orphelins » en cours, notamment dans le Bas-Rhin, sur la répartition géographique des terrains acquis par le Conservatoire du littoral et sur la perspective d'une limitation de la circulation automobile dans les villes, afin de réduire la pollution atmosphérique.

M. Marcel Bony a souligné l'importance du rôle joué par les parcs naturels régionaux, qui, tout en préservant l'environnement, permettent de maintenir les activités économiques. Il a donc souhaité que les aides aux parcs régionaux puissent être accrues et que l'implantation des parcs nationaux soit en revanche limitée.

M. Jean Peyrafitte est, pour sa part, intervenu sur le problème de la protection des ours et sur la difficulté de poursuivre cette politique dans les Pyrénées, la frontière avec l'Espagne, qui ne pratique pas la même politique, n'empêchant pas les migrations d'un pays à l'autre.

En réponse aux différents intervenants, M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il interrogerait le ministre sur les difficultés liées à la protection des loups et des ours. Il a précisé à l'attention de M. Francis Grignon qu'il ne disposait pas d'une liste précise des sites pollués orphelins en cours de traitement, mais lui a en revanche fait part de la répartition des acquisitions du conservatoire du littoral entre les différentes régions concernées.

S'agissant de la pollution atmosphérique, il a estimé que sans aller jusqu'à limiter la circulation automobile dans les villes, des mesures d'amélioration technique pouvaient être envisagées pour la limiter.

Il a, par ailleurs, souligné les avantages des parcs naturels régionaux, tout en constatant qu'aucun projet de création de nouveau parc naturel régional n'était prévu dans le cadre du budget pour 1996.

Enfin, M. Jacques de Menou a abordé le problème de la pollution agricole et de la mise aux normes des bâtiments d'élevage. Il a relevé que, dans ce domaine, le financement d'une politique de protection de l'environnement était assuré par le budget du ministère de l'agriculture.

M. Francis Grignon a, alors, constaté que le financement des stations d'épuration n'était pas non plus financé par le ministère de l'environnement.

La commission a ensuite donné un avis favorable aux crédits inscrits au titre de l'environnement dans le projet de loi de finances pour 1996.

AUDITION DE MME CORINNE LEPAGE, MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT

Préalablement à l'examen des crédits, la commission a procédé à l'audition de Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, sur le projet de loi de finances pour 1996, le 14 novembre 1995.

Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, a tout d'abord qualifié le budget de l'environnement pour 1996 de « civique », en ce qu'il participait à l'effort collectif de réduction des déficits.

Elle a indiqué que le projet de budget de son ministère s'établissait à 1.842 millions de francs en moyens d'engagement et 1.751 millions de francs en moyens de paiement, en progression respective de 0,5 et 0,8 % par rapport à la loi de finances rectificative du printemps 1995.

Elle a toutefois précisé que l'Assemblée nationale avait adopté un amendement tendant à réduire au total de deux millions de francs ces crédits, en ce qui concerne les seules subventions d'investissement. Elle a expliqué qu'elle avait accepté cette diminution modeste, compte tenu de la nécessité de parvenir aux deux milliards de francs d'économies demandées par l'Assemblée nationale.

Le ministre a ensuite présenté les quatre grandes priorités retenues pour l'action de son ministère en 1996.

Elle a, tout d'abord, détaillé les actions relevant de la première de ces priorités, consistant à poursuivre la mise en oeuvre des programmes décennaux qui tendent à améliorer la prévention des risques et notamment des inondations.

S'agissant du plan décennal de prévention des risques majeurs, elle a expliqué que ce plan prévoyait l'amélioration de la cartographie des risques à travers un dispositif juridique modernisé et simplifié : le plan de prévention des risques naturels (PPR), appelé à se substituer aux nombreux documents existants.

Le ministre a indiqué que l'ensemble des PPR devraient être établis dans un délai de cinq ans et a souligné l'importance qu'elle attachait au développement de l'effort de prévention. Elle a en effet constaté que, pendant de nombreuses années, on avait laissé se développer l'urbanisation dans des zones à risque et que cette situation conduisait aujourd'hui à dégager des moyens financiers importants pour effectuer des travaux de protection.

Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, a ensuite noté que l'exécution du plan de restauration et d'entretien des cours d'eau, qui prévoit 10,2 milliards de francs de travaux sur 10 ans, financés à 40 % par l'État, serait poursuivie en 1996, ainsi que l'amélioration des systèmes d'annonce des crues, notamment grâce à la construction de nouveaux radars météorologiques.

Elle a, par ailleurs, rappelé que la loi du 2 février 1995 avait institué un mécanisme d'expropriation pour assurer la sécurité des populations menacées par certains risques majeurs et que le décret d'application de cette disposition venait d'être publié.

S'agissant du plan « Loire grandeur nature », le ministre a indiqué que ce plan avait connu un début d'exécution en 1994 et s'était intensifié en 1995, le montant total des travaux prévus s'élevant à 1,8 milliard de francs, dont 700 millions à la charge de l'État. Elle a précisé que la mesure la plus spectaculaire prise dans le cadre de ce plan en 1995 avait consisté dans le déménagement de trois entreprises dont les installations empiétaient sur le lit de la Loire à Brives-Charensac.

Le ministre a, enfin, relevé que 65 millions de francs de dépenses ordinaires et 263 millions de francs d'autorisations de programme étaient inscrits dans le projet de budget pour assurer la poursuite de la mise en oeuvre de ces deux plans décennaux.

Abordant ensuite la deuxième priorité d'action du ministère, à savoir l'amélioration des connaissances scientifiques et des outils de gestion, Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, a souligné que les moyens consacrés à la recherche étaient en progression sensible dans le projet de budget pour 1996 et que cet effort permettrait de développer un certain nombre de programmes de recherche incitatifs portant notamment sur la qualité de l'air urbain, ainsi que de consolider les moyens accordés à l'Institut français de l'environnement (IFEN) pour développer les statistiques dans le domaine de l'environnement.

Le ministre a ensuite présenté la troisième priorité d'action retenue pour 1996, qui concerne la protection de la nature. Elle a précisé qu'un nouveau parc national serait créé l'année prochaine en Guyane et elle a considéré qu'il s'agissait là d'une innovation importante dans la mesure où aucun parc national n'avait été créé depuis 1989 et où une occasion était ainsi donnée à la France, seul pays développé disposant d'une forêt tropicale, de montrer ce qu'elle savait faire en matière de protection de l'environnement.

Elle a également noté la mise en oeuvre d'un programme d'action en faveur de la « biodiversité » grâce à la création au sein du Muséum national d'histoire naturelle d'un Institut d'écologie et de gestion de la biodiversité, en liaison avec le « centre thématique nature ».

Le ministre a, à cet égard, souligné que la France avait la chance de posséder un patrimoine végétal et animal remarquable et que le programme d'action en faveur de la biodiversité constituait un enjeu mal connu mais important, correspondant à un engagement international et dont les répercussions économiques étaient potentiellement importantes.

Elle a par ailleurs indiqué que le Conservatoire du littoral bénéficierait désormais de l'extension de la procédure de dation en paiement, ainsi que de la création d'un emploi supplémentaire.

Enfin, Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, a déclaré que la quatrième priorité de son ministère serait fondée sur un effort de participation à la réforme de l'État, grâce à une amélioration qualitative et quantitative des moyens des structures régionales, directions régionales de l'environnement (DIREN) et directions régionales de l'industrie de la recherche et de l'environnement (DRIRE), et au développement des procédures d'information des citoyens sur les risques et de concertation avec les acteurs locaux, notamment dans le cadre des commissions locales d'information et de surveillance des risques, ainsi que des associations.

En conclusion, le ministre a souligné que ce projet de budget traduisait de la part de son ministère un effort de rationalisation et une meilleure adaptation des moyens aux missions prioritaires qui lui étaient confiées. Elle a donc estimé que, tout en participant à la volonté du Gouvernement de réduire les déficits publics, la stagnation des moyens du ministère de l'environnement lui permettrait cependant d'avoir une action ciblée sur des priorités fortes.

M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, a demandé au ministre d'exposer les raisons de la diminution des crédits budgétaires consacrés à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME).

Convenant de ce que la réduction des crédits de l'ADEME constituait une forme de débudgétisation, le ministre a rappelé que l'augmentation du produit des taxes perçues par l'ADEME compensait la diminution de l'aide de l'État. Il a estimé que cet accroissement du produit des taxes résultait de la mise en oeuvre du principe « pollueur-payeur ». Il a, en outre, ajouté que le budget total de l'environnement ne se limitait pas aux crédits de son département et qu'il souhaitait un véritable « budget civil » de l'environnement.

À la question de M. Bernard Hugo, rapporteur pour avis, sur l'application de la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, le ministre a répondu que 5 décrets avaient d'ores et déjà été publiés au journal officiel à savoir :

- le décret n° 95-635 du 6 mai 1995 relatif aux rapports annuels sur le prix et la qualité des services publics de l'eau potable et de l'assainissement (JO du 7 mai 1995) ;

- le décret n° 95-636 du 6 mai 1995 relatif aux groupements d'intérêt public constitués pour exercer des activités dans le domaine de la protection de la nature (JO du 7 mai 1995) ;

- le décret n° 95-1027 du 18 septembre 1995 relatif à la taxe sur le traitement et le stockage des déchets (JO du 18 septembre 1995) ;

- le décret n° 95-1089 du 5 octobre 1995 relatif aux plans de prévention des risques naturels prévisibles (JO du 11 octobre 1995) ;

- le décret n° 95-1115 du 17 octobre 1995 relatif à l'expropriation des biens exposés à certains risques naturels majeurs menaçant gravement des vies humaines (JO du 19 octobre 1995).

Le ministre a ajouté que quatre décrets étaient en cours de signature :

- un décret relatif à la prévention du risque sismique, dont la publication était prévue pour novembre 1995 ;

- un décret relatif à la taxe sur les passagers maritimes embarqués à destination d'espaces naturels protégés, dont la publication était également prévue pour novembre 1995 ;

- un décret relatif au droit départemental de passage institué sur les ouvrages d'art reliant le continent à certaines îles maritimes, dont la publication était prévue pour novembre-décembre 1995 ;

- un décret modifiant certaines dispositions du livre II du code rural, relatif à l'extension aux Français résidant à l'étranger des dispositions relatives à la licence de chasse applicables aux étrangers non résidents.

Enfin le ministre a indiqué que quatre décrets avaient été transmis au Conseil d'État pour avis à savoir :

- un décret relatif aux modalités d'attribution de l'aide aux conseils généraux et au fonctionnement du comité consultatif de la gestion des déchets ménagers et du comité de gestion de la taxe sur les déchets industriels spéciaux (DIS) ;

- un décret relatif à l'agrément des associations de protection de l'environnement, dont l'examen par le Conseil d'État devrait avoir lieu en novembre ;

- un décret relatif aux actions de représentation conjointe des associations agréées de protection de l'environnement, qui devrait également être examiné par le Conseil d'État en novembre ;

- un décret relatif à la consultation du public et des associations en amont des grandes décisions d'aménagement (TGV, autoroutes...), dont la publication était prévue pour décembre 1995.

Puis, le ministre a évoqué les vingt-deux projets de décrets en cours d'élaboration.

Parmi ceux-ci, il a mentionné un décret relatif à l'affichage et à la publicité, complétant le décret n° 80-923 du 21 novembre 1980 portant règlement de la publicité et du décret n° 82-211 du 24 février 1982 portant règlement national des enseignes et fixant certaines dispositions relatives aux préenseignes a été soumis à l'arbitrage.

Trois décrets étaient en cours de négociation avec les ministères et les acteurs concernés, ainsi que :

- un décret relatif à l'établissement des listes d'aptitude aux fonctions de commissaires enquêteurs, prévues à l'article 2 de la loi n° 83-630 modifiée du 12 juillet 1983 ;

- un décret relatif aux plans régionaux d'élimination des déchets industriels spéciaux (article 60-II) ;

- un décret relatif aux plans départementaux ou interdépartementaux des déchets ménagers ou assimilés.

Le ministre a, en outre, rappelé que ses services travaillaient au code de l'environnement, dont le projet, soumis au Conseil d'État, serait présenté au Parlement à la fin 1995 ou au début 1996.

M. Bernard Hugo a alors interrogé le ministre sur l'état d'avancement des plans de prévention contre les risques (PPR).

Sur ce point, Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, a indiqué qu'elle s'était rendue à la Séchilienne où un éboulement menaçait environ 400 familles et pourrait entraîner les dommages à la zone industrielle de Grenoble et qu'elle avait demandé que l'on mette au point un mécanisme de surveillance de la zone. Elle a ajouté, en ce qui concerne les PPR, que l'administration prévoyait d'approuver environ 200 plans en 1996, et qu'elle souhaitait que le Parlement lui accorde des moyens suffisants pour mener à bien cette tâche.

Répondant à M. Bernard Hugo qui l'interrogeait sur les mesures prises à la suite des observations de la Cour des comptes sur le fonctionnement du conservatoire du littoral, le ministre a répondu qu'il était très attentif d'une part à ce que les opérations conduites par le conservatoire concernent des unités fonctionnelles (dunes, estuaires) et d'autre part à ce que les plans de gestion et de mise en valeur soient utilisés par le conservatoire. Il a remarqué en outre que le conservatoire, s'il restait perfectible, avait effectué un bon travail et a rappelé que la Cour des comptes avait mis en lumière le manque de moyens qui lui étaient dévolus.

Sur ce point précis, le ministre a ajouté que les moyens du conservatoire avaient été réduits lors du dernier collectif, afin de préserver les crédits consacrés à la prévention des risques. Il a indiqué qu'il ne considérait pas comme souhaitable de voir la protection de l'environnement durablement sacrifiée à la prévention des risques.

À une question de M. Bernard Hugo relative à la préparation du projet de loi sur l'air, Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, a répondu qu'elle avait créé en juin 1995 un groupe de travail, réunissant des parlementaires, des maires, des associations professionnelles, et qu'elle entendait rendre publiques les conclusions du groupe de travail. Quant au projet de loi, elle a déclaré qu'il devait être présenté au Premier ministre dans une semaine environ, mais qu'une concertation interministérielle avait eu lieu en amont.

Le ministre a ensuite précisé que le projet de loi aurait deux objectifs principaux. Le premier objectif serait d'améliorer la prévention et le second de gérer au mieux les « pics de pollution ».

Elle a jugé qu'il serait par conséquent nécessaire d'améliorer l'information du public sur la qualité de l'air conformément au texte de la directive cadre sur la qualité de l'air adoptée cet été par le Conseil de l'Union européenne sous la présidence française, notamment par un maillage du territoire national en instruments de mesures. Elle a estimé qu'il faudrait en outre associer les élus locaux, notamment en faisant prendre en compte dans les documents d'urbanisme les problèmes de circulation et de stationnement. La gestion des situations de crise ne pouvant s'improviser, elle devrait faire l'objet de plans spécifiques aux termes desquels l'État demeurerait compétent en ce qui concerne les routes nationales et les voies radiales, tandis que les collectivités locales assureraient la réglementation de la circulation en ville.

En ce qui concerne les restrictions de la circulation, le ministre a fait valoir qu'il serait utile de responsabiliser les automobilistes, par exemple en leur attribuant une « vignette verte » lorsque leurs véhicules répondaient aux normes prescrites. Elle a jugé qu'il n'était, pour l'instant, pas possible de n'attribuer cette vignette qu'aux voitures dotées de pots catalytiques, compte tenu du fait que ces véhicules ne représentaient que 18 % du parc automobile.

Le coût total des mesures prévues par le projet de loi, a indiqué le ministre, pourrait être d'environ 600 à 800 millions de francs sur cinq ans en ce qui concerne la surveillance. Quant au coût de l'amélioration des transports publics et des infrastructures, il serait sans doute beaucoup plus lourd.

Le ministre a conclu son propos relatif au projet de loi sur l'air en ajoutant qu'il était dès à présent nécessaire d'inverser la tendance à la dégradation de la qualité de l'air.

Interrogé par M. Bernard Hugo sur le rôle de son département ministériel dans la préparation du projet de loi sur l'espace rural, le ministre a indiqué que, jusqu'à présent, ce texte relevait des services du ministre chargé du développement rural, tout en souhaitant qu'à l'avenir son ministère soit associé à sa préparation.

Répondant à M. Philippe François qui l'interrogeait sur la question du développement des biocarburants, partiellement traité par l'article 84 de la loi du 2 février dernier, le ministre a précisé que la préparation du décret d'application prévu par ce texte relevait du ministère de l'industrie, puis a précisé qu'une opération pilote avait été lancée à Dunkerque. Le ministre s'est, en outre, déclaré favorable au développement de l'utilisation des carburants oxygénés, et a admis que la loi sur l'air pourrait favoriser ce développement.

M. Philippe François a alors fait remarquer que les États-Unis étaient parvenus, malgré des résistances nombreuses, à encourager les carburants propres et que la France pourrait prendre exemple sur l'expérience des États étrangers.

M. Philippe François a alors fait remarquer que les États-Unis étaient parvenus, malgré des résistances nombreuses, à encourager les carburants propres et que la France pourrait prendre exemple sur l'expérience des États étrangers.

Après avoir observé que certains raffineurs estimaient que ce projet n'apporterait rien, le ministre a souhaité que les industriels du secteur de l'automobile poursuivent leurs recherches en la matière, notamment en ce qui concerne la voiture « bimode » qui disposerait d'un moteur électrique et d'un moteur à combustion.

À une question de M. Jacques de Menou sur les problèmes posés par la mise aux normes des bâtiments d'élevage, le ministre a répondu que les crédits consacrés aux mesures agroenvironnementales, -soit 140 millions de francs-, relevaient du ministère de l'agriculture, tout en observant que l'ADEME pouvait aider des opérations d'épuration du lisier des volailles.

M. Jacques de Menou a par ailleurs regretté que des financements consacrés à des prototypes d'habitation adaptés au bruit, qui perçoivent à ce titre une aide du ministère de l'environnement, ne soient pas éligibles à la procédure des prêts locatifs aidés (PLA).

M. Gérard César a, alors, attiré l'attention du ministre sur l'utilité qui résulterait de l'accélération des procédures de concertation relatives aux grands ouvrages d'art, en général et à l'autoroute Bordeaux, Clermond-Ferrand « A89 » en particulier.

Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, lui a répondu qu'elle souhaitait que ses services soient informés en amont du déroulement de ces procédures de concertation.

Répondant à une autre question de M. Gérard César, relative aux plans d'exposition aux risques d'inondations (PER), elle a estimé qu'il serait nécessaire d'assurer l'homogénéité de ces plans à l'échelon des vallées.

M. Gérard César a, enfin, évoqué le problème posé par le rejet des effluents viticoles. Il a indiqué qu'il considérait que la signature de conventions entre les agences de bassins et les professionnels constituait une amorce de solution, mais qu'il était nécessaire, de surcroît, que l'administration publie les textes d'application relatif à cette question.

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