2. Un régime confronté à des difficultés majeures

a) Un déficit permanent et croissant

La contestation dont ont fait l'objet les annexes VIII et X résulte du caractère permanent et croissant du déficit du régime qu'elles engendrent.

En 2000, le nombre d'allocataires indemnisés s'élevait à 92 440 et le nombre de cotisants à 120 000. Les allocataires relevaient pour 29,4 % de l'annexe VIII et pour 70,6 % de l'annexe X.

Au cours des années 80, l'accroissement du nombre des intermittents s'était accompagné d'une détérioration du rapport entre le montant des prestations et celui des cotisations : le rapport est en revanche demeuré constant dans les années 90.

Durant cette dernière période, le déficit est donc essentiellement imputable à la progression du nombre d'allocataires, qui a plus que doublé, et évidemment au caractère très favorable des conditions d'indemnisation.

Cette tendance s'est récemment accentuée au cours des dernières années : en effet, le nombre d'allocataires a progressé de 24 % entre 1998 et 2000.

Le tableau ci-après fait apparaître le rapport prestations versées/cotisations perçues entre 1991 et 2001 à partir des données fournies par l'UNEDIC : le montant du déficit mesuré par la différence entre le montant des prestations et le montant des cotisations est ainsi passé de 216,93 millions d'euros (1 423 millions de francs) à 610,86 millions d'euros (4 007 millions de francs), soit une augmentation de 281 %.

b) Le paradoxe d'un marché du travail à la fois en progression et en crise

Cette évolution préoccupante s'est accompagnée d'une dégradation de la situation des intermittents.

Au cours des dernières décennies, on a pu constater une forte augmentation de l'offre de travail. Entre 1986 et 1999, le nombre de jours de travail offert aux intermittents du spectacle a été multiplié par deux.

STATISTIQUES D'ALLOCATAIRES INDEMNISÉS DANS LE CADRE
DES ANNEXES 8 ET 10 DU RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE L'ASSURANCE CHÔMAGE

Allocataires mandatés au cours de l'année

Prestations versées (1)

Cotisations encaissées (2)

Rapport Presta/cotis

1991

Annexe 8

14 630

599

67

Annexe 10

26 408

1 104

213

Total

41 038

1 703

280

608 %

1992

Annexe 8

17 753

883

175

Annexe 10

31 448

1 630

268

Total

49 201

2 513

443

567 %

1993

Annexe 8

18 223

907

Annexe 10

33 282

1 595

Total

51 505

2 502

448

558 %

1994

Annexe 8

18 125

840

Annexe 10

34 954

1 607

Total

53 079

2 447

581

421 %

1995

Annexe 8

19 590

956

Annexe 10

37 721

1 849

Total

57 311

2 805

619

453 %

1996

Annexe 8

22 380

1 085

Annexe 10

42 423

2 172

Total

64 803

3 257

666

489 %

1997

Annexe 8

22 820

1 163

Annexe 10

44 820

2 485

Total

67 300

3 648

678

538 %

1998

Annexe 8

25 000

1 314

Annexe 10

49 450

2 821

Total

74 450

4 135

726

570 %

1999

Annexe 8

26 195

1 237

Annexe 10

58 905

3 348

Total

85 100

4 585

776

591 %

2000

Annexe 8

27 200

1 316

Annexe 10

65 240

3 554

Total

92 440

4 870

863

564 %

(1) Prestations versées au titre de l'assurance chômage en millions de francs (hors ASF et AGS)

(2) Cotisations encaissées au titre de l'assurance chômage, de l'ASF et de l'AGS en millions de francs

Dans le même temps, on constatait une augmentation encore plus forte des effectifs intermittents présents sur le marché du travail, leur nombre étant multiplié par trois.

Il résulte de ces deux évolutions une tendance à la dégradation continue des situations individuelles moyennes.

Ainsi, entre 1986 et 1999, on relève une baisse annuelle moyenne de la durée du travail de 40 % et une diminution de 37 % du montant des rémunérations annuelles moyennes.

L'existence de conditions avantageuses d'indemnisation du chômage permet d'atténuer les effets de la précarité croissante des conditions d'exercice des professions artistiques. Votre rapporteur indiquera qu'en 1999, le taux moyen des indemnités journalières était de 41,75 euros (273,87 francs).

Au vu de cette situation, on est en droit de se demander si le déficit des annexes VIII et X ne constitue pas une facilité de caisse permettant de financer l'essor du secteur culturel, facilité qui pèse sur les autres salariés au nom du principe de solidarité mais également sur les intermittents eux-mêmes dont la situation ne cesse de se dégrader.

Elle traduit le caractère paradoxal de ce régime qui, comme le relevait M. Pierre Cabanes dans son rapport en 1997 « génère et accroît le risque qu'il est censé couvrir. Ainsi un surcroît d'activité des entreprises en cause, loin de contribuer à l'équilibre financier du régime, en accroît le déficit (...) L'emploi intermittent chasse l'emploi permanent et par des procédés proches de la concurrence déloyale, l'entreprise « artificielle » sans véritable employeur contraint l'entreprise normale soit à disparaître soit à l'imiter ».

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