B. LES MOYENS DES SERVICES (TITRE III)

Les dépenses ordinaires constituent 99,8 % des crédits du budget de l'enseignement scolaire. Elles s'élèvent à 53,92 milliards d'euros (+ 2,3 %) dans le projet de loi de finances pour 2003.

Les moyens des services représentent 86 % des dépenses ordinaires. Ils s'établissent à 46,41 milliards d'euros en 2002.

Plus de 96 % des moyens des services, et plus 83 % des dépenses ordinaires, sont directement consacrées aux traitements des personnels en activité, aux pensions des retraités et aux charges sociales, pour un montant total de 44,8 milliards d'euros.

Cela souligne, s'il en est encore besoin, l'enjeu que représentent la politique salariale et la gestion prévisionnelle des emplois .

1. Les crédits destinés directement aux rémunérations et aux charges sociales des personnels

Les dépenses directement 81 ( * ) consacrées aux rémunérations et aux pensions progressent de 990 millions d'euros (+ 2,2 %) dans le projet de budget pour 2003.

Cette progression s'explique aux deux-tiers par la hausse des dépenses de pension prises en charge par la section budgétaire (+ 640 millions d'euros ). On peut d'ailleurs souligner de manière plus générale le dynamisme des dépenses de pensions, qui devraient doubler entre 1994 et 2004.

Evolution du montant des pensions de la jeunesse et de l'éducation nationale

(en milliards d'euros)

1994

1995

1996

1998

1999

2000

2001

2002

2003

Montant total

7,23

8,00

8,43

9,65

10,37

11,11

11,93

12,81

nc

dont au budget de l'enseignement scolaire

6,36

6,64

7,36

8,27

8,87

9,51

10,08

10,93

11,57

Source : ministère de l'éducation nationale.

Cette progression s'explique également, à hauteur de 223 millions d'euros , par l'effet en année pleine des mesures décidées par le précédent gouvernement , soit :

- à hauteur de 48 millions d'euros par l'incidence en année pleine des mesures de revalorisation du point de la fonction publique et des prestations familiales intervenues au cours du premier semestre 2002 ;

- à hauteur de 78 millions d'euros par l'effet en année pleine des créations d'emplois budgétaires (au nombre de 10.942) intervenues à la rentrée 2002 ;

- à hauteur de 97 millions d'euros par l'effet en année pleine des mesures de revalorisation catégorielles inscrites dans la loi de finances initiale pour 2002.

Cette progression résulte aussi, à hauteur d'environ 109 millions d'euros , des nouvelles mesures de revalorisation catégorielles prévues pour 2003, parmi lesquelles :

- la poursuite du plan d'intégration des instituteurs dans le corps de professeur des écoles (pour un coût de 40,7 millions d'euros en tiers d'année correspondant à l'intégration de 20.735 emplois en 2003, comme en 2002) ;

- la revalorisation du régime indemnitaire des personnels ATOS (pour un coût de 25,8 millions d'euros), des personnels de inspection (pour un coût de 0,4 million d'euros) et des personnels d'encadrement (pour un coût de 0,2 million d'euros) ;

- la poursuite du plan de revalorisation de l'indemnité de sujétions spéciales des directeurs d'école (pour un coût de 12,2 millions d'euros en 2003, comme en 2002) ;

- le financement (à hauteur de 11,9 millions d'euros) de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) dont bénéficient les fonctionnaires de l'éducation nationale impliqués dans la politique de la ville ;

- la création (à hauteur de 7,25 millions d'euros) d'heures supplémentaires d'enseignement (HSE) destinées à financer la réduction de 23 à 21 heures hebdomadaires des obligations de service des enseignants du premier degré exerçant dans les sections d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) et dans les écoles régionales d'enseignement adapté (EREA) ;

- le repyramidage des corps de personnels de direction (pour un coût de 3,6 millions d'euros en tiers d'année), dans le cadre de la réforme de leur statut ;

- enfin, la création d'une « provision » pour la revalorisation de la rémunération des infirmières (à hauteur de 2,2 millions d'euros).

Au total, l'ampleur des mesures de revalorisation catégorielles inscrites dans le projet de loi de finances pour 2003 est sans précédent au cours des dix dernières années.

Aux mesures de revalorisation précédentes, il convient d'ajouter la décision d'accroître les dépenses d'action sociale à destination des personnels du ministère de 1,5 millions d'euros , à 65,0 millions d'euros (soit une hausse de 2,4 %, contre - 0,1 % en 2002) 82 ( * ) .

Par ailleurs, la progression des dépenses directes de rémunération s'explique aussi, à hauteur de 26 millions d'euros par le solde des mesure de transferts (d'un côté, le rattachement à la section budgétaire de 778 emplois en provenance de l'ancien ministère de la jeunesse et des sports, soit + 29 millions d'euros, de l'autre, le transfert de 70 emplois au ministère des affaires étrangères au profit de l'AEFE, soit - 3 millions d'euros) et, à hauteur de 11 millions d'euros , par la transformation fonctionnelle de 2.700 emplois d'enseignants du premier et du second degré en emplois de corps supérieurs 83 ( * ) .

Enfin, la baisse du nombre d'emplois budgétaires réduit de 20 millions d'euros en tiers d'année la progression des dépenses directes de rémunération.

En effet, le projet de budget de la jeunesse et de l'enseignement pour 2003 prévoit la suppression de 2.664 emplois budgétaires sur un total de 964.118 en 2002 (soit -0,3 %). Il s'agirait là d'une évolution sans précédent depuis les réductions d'emplois de 1992 et de 1997 (cf. le tableau ci-après).

Evolution des emplois budgétaires recensés par le ministère de l'éducation nationale

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000 84 ( * )

2001

2002

PLF

2003

Emplois budgétaires (en milliers)

937

942

944

945

946

941

941

942

942

954

964

961

Variation annuelle (en unités)

-2.851

5.399

2.026

751

1.055

-4.982

174

318

-154

12.838

10.942

-2.664

Sources : ministère de l'éducation nationale.

Pour apprécier l'ampleur de cette baisse, il convient toutefois de neutraliser les effets du rattachement à la section budgétaire des emplois « jeunesse » (soit + 778 emplois budgétaires), ainsi que ceux de diverses mesures de transferts vers d'autres ministères (- 73 emplois budgétaires au total, principalement sous l'effet du transfert de 70 emplois à l'AEFE), et ceux des mesures de transferts avec la section budgétaire « Enseignement supérieur » du budget du ministère.

Compte tenu de ces diverses mesures de transfert, le projet de budget pour la jeunesse et l'enseignement scolaire prévoit en fait la suppression d'un peu plus de 3.400 emplois budgétaires , cette baisse d'ensemble recouvrant toutefois des évolutions contrastées , dont les principales sont :

- d'un côté, la suppression de 5.600 emplois (sur 40.000) de Maîtres d'internat surveillants d'externat (MI-SE) à compter du 1 er septembre 2003, dont notre collègue Adrien Gouteyron, rapporteur spécial des crédits de l'enseignement scolaire, avait d'ailleurs souligné les conditions d'emploi difficiles dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2002 (cf. l'encadré ci-après) ;

- de l'autre, la création de 1.000 emplois d'enseignants du premier degré 85 ( * ) , (contre 800 prévus par le plan pluriannuel de recrutement 2001-2003 annoncé par le précédent gouvernement) et de 1.200 emplois non enseignants 86 ( * ) ;

- enfin, la stabilisation du nombre d'enseignants du second degré 87 ( * ) .

Ces chiffres doivent être nuancés. En effet, l'évolution des emplois budgétaires ne donne cette année encore qu'un pauvre aperçu de celle des effectifs réels. Cependant, contrairement à l'évolution observée au cours des douze dernières années 88 ( * ) , les effectifs réels s'inscrivent également en net repli.

La situation difficile des maîtres d'internat et surveillants d'externat

Les maîtres d'internat et surveillants d'externat (MI-SE), c'est à dire les « pions », sont a priori recrutés avec un double objectif :

- un objectif de pré-recrutement. L'article 1 er du statut des maîtres d'internat précise ainsi : « à égalité de titres, une priorité sera accordée aux candidats aux carrières de l'enseignement » ;

- depuis les années 1960, et de manière souvent prépondérante, un objectif d'aide sociale, ces emplois devant bénéficier en priorité aux jeunes issus de milieux modestes.

Le niveau de recrutement des MI-SE s'étage le plus souvent entre BAC et BAC+3, le niveau moyen étant très différencié selon les académies, certaines d'entre elles recrutant prioritairement des jeunes de niveau BAC ou BAC +1. Enfin, il est à noter qu'un grand nombre de MI-SE doivent suivre leurs études par correspondance, en raison de leurs contraintes de service, comme de l'éloignement des centres universitaires. Au total, le profil des MI-SE se rapproche fortement de celui des aides-éducateurs, même si ces derniers sont sans doute en moyenne un peu plus âgés, un peu plus motivés, et un peu moins bien rémunérés (5.800 francs par mois en 1999 pour les aides-éducateurs, contre 6.100 francs par mois pour les MI-SE).

Or un récent rapport 90 ( * ) de l'inspection générale de l'administration de l'Education nationale (IGAENR) souligne que le bilan de l'insertion professionnelle des MI-SE est « sombre » :

- « la qualité des études poursuivies est médiocre et, en tout état de cause, le plus souvent mal prise en compte dans la gestion des établissements » ;

- les chances de réussite aux concours d'accès aux fonctions d'enseignement sont « faibles » ;

- à l'issue de leur contrat, les MI-SE connaissent donc une insertion professionnelle difficile : le ratio anciens MI-SE attributaires d'allocations chômage / MI-SE en poste serait ainsi de l'ordre de 20 % à 30 %.

Les observations de l'IGAENR reproduites ci-dessus appelaient réaction et action de la part du ministre de l'Education nationale. Dans le cadre d'un essai d'évaluation des suites apportées à ses rapports, l'IGAENR relevait toutefois en juillet 2000 : « le rapport a été normalement diffusé dans les services. Ceux-ci, interrogés dans le cadre de la présente enquête, indiquent qu'ils n'ont engagé aucune étude de la mise en oeuvre des conclusions présentées, dans l'attente d'une directive du cabinet qui n'est pas venue ».

Interrogé de nouveau en 2001 par votre commission des finances sur les suites qu'il entendait au rapport de l'IGAENR, le ministère s'est contenté de répondre : « les suites données au rapport de l'IGAENR 99-0025 seront communiquées ultérieurement ». Cette réponse « ultérieure » ne fut jamais transmise.

Source : rapport de M. Adrien Gouteyron au nom de la commission des finances du Sénat sur le projet de budget de l'enseignement scolaire pour 2002.

* 81 Il convient toutefois de rappeler que les dépenses de personnel ne sont pas toutes retracées dans ces chapitres.

* 82 A cet égard, on peut signaler qu'un rapport de l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR) de mars 2001 relatif à l'action sociale au sein de l'administration centrale du ministère avait relevé que l'Education nationale ne consacrait aux titre des opérations ministérielles d'action sociale que 62,5 euros par agent et par an, contre 223 euros en moyenne pour les autres ministères, et respectivement 311, 534 et 242 euros pour trois ministères à la structure d'emploi comparable (culture, emploi et solidarité, justice). Ce même rapport observait ainsi que le ministère l'éducation nationale ne disposait que de 62,5 médecins équivalent-temps plein au titre de l'action sociale (pour environ 1,2 millions de personnes, enseignants du privé compris), contre 146 médecins pour le ministère de l'économie et des finances (pour 0,2 million d'agents).

* 83 Le solde des autres mesures d'ajustement est par ailleurs proche de l'équilibre.

* 84 En l'an 2000, les créations d'emplois budgétaires se sont accompagnées du transfert sur crédits de la rémunération de 4.270 maîtres d'internat et surveillants d'externat (MI-SE), de sorte que le nombre total d'emplois budgétaires fut finalement quasiment inchangé.

* 85 Dont 23 formateurs en langues vivantes.

* 86 Dont 262 personnels médico-sociaux (210 infirmiers, 35 assistants de service social et 17 médecins) et 30 personnels d'inspection.

* 87 A ces créations d'emplois sur postes budgétaires s'ajoutent 550 nouveaux emplois supplémentaires sur crédits (302 enseignants et 248 non enseignants) consacrés à la résorption de l'emploi précaire dans les établissements publics et les GRETA, et qui viennent donc en substitution d'emplois précaires.

* 88 Ainsi, selon les reconstitutions effectuées par le bureau des études de la direction des affaires financières du ministère, et publiés en avril 2001 dans le cadre de la brochure annuelle « Financement et effectifs de l'enseignement scolaire », entre 1990 et l'an 2000 les emplois budgétaires n'ont progressé que de 14.000 (de 928.000 à 942.000, soit une hausse de 1,5 %), tandis que les effectifs équivalent-temps plein rémunérés sur le budget de l'enseignement scolaire ont augmenté de 136.000 89 (de 1.084.000 à 1.220.000), dont + 70.000 emplois jeunes, + 34.000 personnels enseignants, d'éducation et d'orientation dans le second degré public, + 12.700 enseignants du privé, + 14.500 contrats emplois solidarité, + 5.700 personnels administratifs et techniques (ATOS) titulaires, + 4.000 assistants étrangers, + 3.000 maîtres d'internat et surveillants d'externat (MI/SE) et - 8.200 enseignants du premier degré (cette baisse s'expliquant pour 2.900 par le transfert des IUFM vers le budget du supérieur et pour 6.000 par la diminution du nombre de stagiaires).

* 90 « Le recrutement et l'insertion des maîtres d'internat et des surveillants d'externat », IGAENR, avril 1999. Depuis lors, l'IGAENR a de nouveau préconisé dans un rapport de novembre 2001 relatif à l'autonomie des établissements la réforme du recrutement des MI-SE, afin que soit pris en compte l'avis des chefs d'établissements.

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