C. L'ACTION DE L'EUROPE

C'est principalement sous l'impulsion de la France que fut signé, en 1982, le mémorandum de Paris qui lie aujourd'hui dix-huit pays : les treize de l'Union européenne qui ont un littoral, la Norvège, la Pologne, le Canada, la Russie et la Croatie. Il permet d'effectuer des contrôles opérationnels : en s'appuyant sur les dispositions prévues par l'organisation maritime internationale : l'objectif étant d'effectuer un contrôle sur 25 % du nombre estimé de navires de commerce entrés dans les ports des Etats contractants .

Ces contrôles doivent permettre de vérifier la capacité réelle des équipages à conduire le navire, et à réaliser les opérations commerciales en toute sécurité.

On sait que, faute de moyens humains suffisants, le taux de contrôle français est actuellement de l'ordre de 12 %, taux, signalons-le, qui demeure toutefois supérieur à la moyenne des pays membres signataires du mémorandum.

Les pays membres de l'Union ont su aussi défendre leurs intérêts économiques . Dès 1977, la CEE créait une zone de pêche communautaire de 200 milles au large des côtes des pays membres.

Mais un certain nombre de catastrophes (en particulier l'Amoco Cadiz en 1977 et l'Erika en 1999) qui ont directement et gravement affecté le littoral européen, ont conduit l'Europe communautaire à se doter de règles de protection spécifiques contre les pollutions et singulièrement les pollutions par hydrocarbures.

Deux dispositifs récents méritent d'être rappelés :

Le « paquet Erika I », adopté définitivement en décembre 2000 et entré en vigueur en juin 2002, comprend plusieurs aspects :

- le renforcement des contrôles dans les ports

Les navires immobilisés à plusieurs reprises pour leur mauvaise condition et qui battent pavillon de complaisance seront bannis et se verront désormais refuser l'entrée des ports de l'Union sur base d'une liste noire publiée par la Commission.

Tous les navires à risque seront soumis à une inspection annuelle renforcée obligatoire. Ces inspections seront décidées en fonction de l'âge et de la catégorie du navire (par exemple pétroliers âgés de plus de 15 ans tel que l'Erika), mais également en fonction de son « coefficient de ciblage », outil de mesure du risque potentiel posé par un navire.

Ces nouvelles règles ont pour objet de renforcer l'inspection des navires dans les ports et faciliter le respect par les Etats membres du seuil d'inspection obligatoire fixé par le « mémorandum de Paris ».

- l'amélioration du contrôle des activités des sociétés de classification

Les nouvelles règles introduisent notamment :

. une nouvelle sanction : la suspension d'agrément communautaire pour un an, qui peut conduire à un retrait définitif d'agrément si les défaillances qui ont provoqué la suspension subsistent ;

- l'exigence préalable de bonne performance de sécurité et de prévention des pollutions avant de se voir octroyer l'agrément communautaire ;

. des critères de qualité plus stricts, notamment le respect de certaines procédures en cas de changement de classe et plus de transparence dans la communication des informations sur les navires en classe.

- l'interdiction des pétroliers à simple coque au plus tard en 2015, selon un calendrier d'élimination progressive .

Le « paquet Erika II », adopté en mars 2002 et qui doit entrer en vigueur en 2003, contient :

- la mise en place d'une agence européenne de sécurité maritime qui devrait soutenir l'action de la Commission, des Etats membres et des Etats candidats à l'adhésion. Elle évaluera l'efficacité des mesures de sécurité maritime mises en place et aura aussi pour tâche la collecte d'informations, l'exploitation de bases de données sur la sécurité maritime, l'évaluation et l'audit des sociétés de classification maritime, et l'organisation de missions d'inspection dans les Etats membres pour vérifier les conditions de contrôle de l'état des ports.

- l'amélioration du signalement et du suivi des navires par un système de notification couvrant également les navires qui ne font pas escale dans les ports de la communauté rendant obligatoire, dans les eaux de la Communauté, la présence sur les navires de « transpondeurs » (systèmes d'identification automatique), ainsi que de « boîtes noires », similaires à celles utilisées dans l'aviation afin de faciliter les enquêtes en cas d'accident. Il s'agit d'améliorer les procédures concernant la transmission et l'exploitation des données relatives aux cargaisons dangereuses.

- la révision des régimes de responsabilité et de compensation des dommages de pollution en vigueur par la création d'un fonds de compensation des dommages de pollution , qui complèterait, à concurrence d'un plafond global de 1 milliard d'euros, l'indemnisation des victimes en cas de dépassement des plafonds fixés par les règles existantes qui s'élèvent actuellement à 200 millions d'euros.

La proposition de la commission européenne prévoit également l'imposition par les Etats membres d'amendes financières en cas de comportement négligent de la part de toute personne impliquée dans le transport des hydrocarbures par mer.

Les décisions adoptées tardent cependant à être mises en oeuvre. On sait que le 26 novembre dernier, au cours du sommet annuel franco-espagnol qui s'est tenu à Malaga 1 ( * ) , le Président de la République et le Premier ministre espagnol M. José Maria Aznar, ont souhaité reprendre l'initiative pour que l'Union européenne « mette en application » rapidement les mesures décidées en commun.

* 1 Cette réunion s'est tenue quelques jours après le naufrage du « Prestige » (le 19 novembre 2002) à 270 km des côtes de la Galice au-delà du plateau continental dans une zone profonde de 3.500 m ; ce navire-citerne, rappelons-le, était à simple coque et avait, au moment de l'accident, 26 ans d'âge.

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