INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi d'un projet de loi visant à ratifier l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République libanaise, d'autre part, signé à Luxembourg le 17 juin 2002.

L'accord a d'ores et déjà été ratifié par le Liban le 2 décembre 2002 , a fait l'objet d'un avis conforme du Parlement européen le 16 janvier 2003 et a été ratifié par l'Irlande le 27 janvier 2003.

Il s'inscrit, comme les accords préalablement examinés par votre Commission avec la Jordanie, l'Egypte ou plus récemment l'Algérie, dans le cadre du processus de dialogue et de coopération euro-méditerranéen relancé lors de la conférence de Barcelone en novembre 1995 . Aujourd'hui, seules la Libye, qui n'y participe pas, et la Syrie, avec laquelle des négociations sont en cours, n'ont pas signé d'accord avec l'Union européenne.

Votre rapporteur présentera la situation politique et économique du Liban, ainsi que l'état de nos relations bilatérales, avant d'analyser les principales dispositions de l'accord d'association.

I. LE FRAGILE ESPOIR D'UNE AMÉLIORATION DE LA SITUATION

A. LE LIBAN EST CONFRONTÉ À UNE SITUATION POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DIFFICILE

1. La situation politique intérieure

Les accords de Taëf (octobre 1989) ont marqué la fin de quinze années de guerre civile. Depuis lors, on a assisté au Liban à un retour progressif de l'autorité de l'Etat, à la restructuration de l'administration et à la réunification de l'armée libanaise.

Les institutions libanaises restent fondées sur une répartition confessionnelle des responsabilités politiques issue du « Pacte national » de 1943 : le Président de la République est maronite, le Président du Conseil est sunnite, le Président du Parlement est chiite. Mais un rééquilibrage entre ces institutions a été opéré, réduisant les prérogatives du Président de la République, autrefois personnalité dominante du régime, au profit du Président du Conseil. Les échéances électorales successives ont marqué un enracinement des institutions et un retour à une vie politique plus démocratique.

M. Hariri, Président du Conseil des ministres de 92 à 98, exerce de nouveau ces fonctions depuis octobre 2000 . Intervenue peu de temps après la chute de Bagdad et après plusieurs années de dégradations des liens entre M. Hariri et le Président de la République M. Lahoud, la démission du Gouvernement Hariri et sa reconduction ont semblé donner le signe d'un resserrement des liens entre la Syrie et le Liban. Le nouveau gouvernement est très majoritairement composé de ministres proches des positions syriennes et ne comprend ni chrétiens modérés favorables à un gouvernement d'union nationale, ni de chiites proches du Hezbollah.

Par ailleurs, la situation politique intérieure libanaise a connu une évolution contrastée durant ces derniers mois . Devant l'instabilité régionale croissante, le niveau de tolérance à l'égard des mouvements critiquant le pouvoir a baissé. Les pressions sur l'opposition chrétienne se sont accentuées. Les trois Présidents ont, en revanche, uni leur efforts dans un contexte économique difficile afin de permettre la tenue de la conférence dite de « Paris II » et la mise en oeuvre des réformes économiques planifiées par le gouvernement Hariri. Cette entente reste néanmoins fragile et la scène politique libanaise est régulièrement troublée par différentes affaires.

Du fait des difficultés économiques et des écarts sociaux grandissants mais aussi de l'environnement régional instable du Liban, le climat n'est pas encore totalement apaisé dans la société libanaise. Les règlements de compte restent fréquents. Ainsi, l'assassinat d'Elie Hobeika (ancien chef des Forces Libanaises), le 24 janvier 2002, puis ceux de Djihad Jibril (fils du dirigeant du FPLP-CG) et de Ramzi Irani (opposant chrétien), retrouvés assassinés, le 20 mai dernier, à Beyrouth, et enfin celui d'une ressortissante américaine à Saïda, fin novembre, reflètent une dégradation de la situation sécuritaire. Ce recours aux méthodes violentes, héritées de la guerre civile et dont le Liban se croyait définitivement débarrassé, est préoccupant. Une série d'attentats contre des enseignes américaines de restauration, à Tripoli dans le Nord, mais aussi dans les zones chrétiennes proches de Beyrouth, dont les auteurs ne sont pas nécessairement libanais, traduisent un anti-américanisme latent nourri par le conflit israélo-palestinien comme par la crise iraquienne.

Enfin les camps palestiniens, où les forces de sécurité n'interviennent pas, constituent toujours un foyer de déstabilisation potentiel. Des manifestations de violence s'y déroulent régulièrement sans toutefois s'étendre en dehors des camps. Les réfugiés, de 250 000 à 400 000 selon les estimations, ne disposent d'aucun droit civique et leur situation sociale est désastreuse.

2. La situation économique

L'économie libanaise a connu une phase de reconstruction dynamique puis une dégradation régulière depuis 4 ans . L'économie libanaise était caractérisée en 1991, à la fin de la guerre civile, par la chute de l'investissement privé, l'effondrement du secteur public et une inflation de 120 %. La phase de reconstruction, quasi exclusivement basée sur le secteur immobilier et financée par endettement de l'Etat a permis un quadruplement du PIB en 10 ans à 17 milliards de dollars en 2002 (soit plus de 4 000 $ par habitant). La fin de la période a toutefois enregistré un ralentissement économique général (croissance de 3 % en 1998, 1 % en 1999, 0 % en 2000, 1 % en 2001). L'économie libanaise possède aujourd'hui un secteur privé dynamique, mais peu industriel, qui contribue à près de 90 % au PIB, et un secteur public en médiocre état (électricité, eau, téléphone fixe, transports...). Entre 1992 et 2001, l'inflation a été ramenée de 120 % à un taux quasi nul (en 2002, sous l'effet de la TVA, elle a redémarré pour atteindre 3 à 4 %) et le taux de chômage reste très élevé, de l'ordre de 20 % .

Le gouvernement de M. Hariri s'est employé, dès son investiture fin 2000, à restaurer la confiance (paiement des arriérés, baisse des taxes, politique de « ciel ouvert »). La baisse de moitié des droits de douane a fortement contribué à la reprise du commerce courant. M. Hariri a fondé son programme économique sur l'ouverture du pays (accord avec l'UE et relance du processus d'adhésion à l'OMC, marché commun arabe, incitations à l'investissement, fiscalité attractive), la privatisation des entreprises publiques, le redressement de la situation financière et le maintien strict de la parité Livre libanaise/dollar. Un budget d'austérité a été adopté le 18 janvier 2003 avec un déficit public qui devrait être ramené à 7,3 % du PIB contre 14% dans la loi de finances 2002 , une hausse de 17 % des recettes et une baisse de 9% des dépenses. L'élargissement de l'assiette fiscale, la diminution du service de la dette et le coup d'arrêt donné aux investissement publics constituent les lignes de force de ce budget. Son adoption malgré les fortes oppositions internes qu'il suscitait constitue une véritable réussite pour le gouvernement Hariri.

L'aide internationale annoncée lors de la conférence de Paris II devrait permettre la restructuration de la dette publique . Celle-ci s'élevait au 31 décembre 2002 à 31,3 milliards de dollars (dont 60 % en livres libanaises - LBP), soit environ 180 % du PIB , détenue à plus de 60 % par les banques locales. La conférence de Paris II (23 novembre 2002), rassemblant, à l'invitation du Président de la République, les représentants à haut niveau de 18 pays et 8 institutions financières internationales, a débouché sur un appui financier de 4,4 milliards de dollars au Liban. Sur cette somme, 3,1 milliards de dollars sont destinés au Trésor libanais sous forme de prêts à long terme et faibles taux d'intérêt pour être affectés à la restructuration de la dette publique alors que 1,3 milliard sera utilisé pour le financement de projets d'infrastructures par les organismes de financement multilatéraux (Banque Mondiale, Banque européenne d'investissement, Fonds arabes de développement). Dès les premières semaines qui ont suivi la conférence Paris II, la réaction positive des marchés s'est traduite par :

- une augmentation des réserves de change de la Banque du Liban (de moins de 4 milliards de dollars avant Paris II à 8,1 milliards de dollars aujourd'hui) ;

- une baisse des taux d'intérêt sur les bons du Trésor de 16,1 % à 9,2 % ;

- une baisse du taux de rémunération des dépôts bancaires en monnaie locale (un point) et en dollars (deux points) ;

- une baisse de la dollarisation des dépôts qui passe sous la barre des 70 % ;

- un afflux de capitaux qui a permis de réaliser un excédent de la balance des paiements de 1,5 milliard de dollars en 2002 (déficit de 1,17 milliard de dollars en 2001).

Enfin un accord a été signé entre la Banque centrale libanaise et l'association des banques libanaises , en décembre dernier, selon lequel les 62 établissements financiers opérant au Liban doivent souscrire des bons du Trésor en livres libanaises ou des « eurobonds » en devises à intérêt zéro sur deux ans à hauteur de 10 % de leurs dépôts évalués au 31/10/02.

Cette évolution positive de la situation économique et financière libanaise a été largement reconnue au sein du Fonds monétaire international (FMI), lors du dernier examen de la situation financière du Liban, le 28 février dernier. Cette nouvelle dynamique, associée à la signature de l'accord de libre échange avec l'Union européenne et à la procédure en cours d'accession du Liban à l'OMC, suppose toutefois la poursuite de l'entente politique entre les responsables libanais de toutes tendances et confessions et la réalisation du programme de privatisation et de titrisation des secteurs des télécommunications, de l'électricité et de l'eau qui, seul, permettra de réduire le stock de la dette. Elle reste également dépendante de l'évolution de la situation régionale.

Le Liban a, en effet, déposé sa candidature à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en janvier 1999 . Un groupe de travail d'accession s'est constitué en avril 1999 et le mémorandum a été signé en janvier 2001. Dans le cadre du processus d'accession, le Liban devrait déposer très prochainement une offre de libéralisation de ses services. Le processus devrait durer encore plusieurs années.

B. UN ENVIRONNEMENT RÉGIONAL SOUS FORTE TENSION

1. Les relations avec la Syrie

La Syrie et le Liban entretiennent, depuis les accords de Taëf, une relation très imbriquée, qui se traduit de plusieurs façons :

- sur le plan militaire , par une présence militaire de 20 000 soldats et d'environ 6.000 membres des services secrets syriens . Trois redéploiements des forces syriennes se sont déroulées en juin 2001, en avril 2002 et enfin en février dernier dans le cadre d'une application progressive des accords de Taëf ;

- sur le plan politique , la relation spécifique entre le Liban et la Syrie a été juridiquement consacrée par la conclusion, en mai 1991, du traité de fraternité, de coopération et de coordination. Mais le contrôle syrien tient avant tout aux liens qu'entretient Damas avec la classe politique libanaise et à l'action des services spéciaux syriens qui ont su organiser un réseau ramifié d'allégeances et de clientèles ;

- sur le plan économique , par l'implication syrienne dans l'économie libanaise et par la présence de 300 000 Syriens au Liban , qui apportent des devises à la Syrie.

Les trois redéploiements syriens et la visite historique du Président Bachar el Assad, en mars denier à Beyrouth traduisent le souci de Damas d'apaiser, dans une certaine mesure, la relation avec le Liban. L'évolution vers un accord de paix au Proche Orient devrait permettre à ces deux pays de redéfinir progressivement leurs relations.

2. Les relations avec Israël

En dépit du retrait israélien du Sud-Liban, en mai 2000, aucune paix n'a encore été conclue entre le Liban et Israël .

Une « ligne bleue ' », destinée à permettre la vérification de l'application de la résolution 425, a été tracée par les Nations Unies qui ont néanmoins précisé « qu'il ne s'agissait pas pour l'ONU de procéder à la démarcation d'une frontière ». Le Conseil de Sécurité a ensuite entériné, le 27 juillet 2000, par la résolution 1310, un rapport du Secrétaire général prenant acte du retrait israélien, appelant au déploiement de la FINUL (Force d'interposition des Nations unies au Liban) dans l'ensemble de la zone libérée et demandant au Liban d'y assumer ses responsabilités. La position de la France découle de la décision du Conseil de Sécurité. Notre pays considère , comme le Secrétaire Général des Nations Unies, que le retrait israélien a été effectué . Cependant pour le Liban comme pour la Syrie, ce retrait n'est pas complet. Ils estiment en effet la zone des « fermes de Chebaa », occupée par Israël en 1967, comme un territoire libanais et non syrien. Cette approche justifie, pour le Hezbollah, la poursuite de ses opérations contre Israël.

Malgré le déploiement de la FINUL dans la zone évacuée et l'envoi dans sa partie nord par les autorités libanaises d'une force mixte armée-gendarmerie de 1000 hommes, le Hezbollah y conserve une certaine liberté de mouvement. Une réduction progressive des effectifs de la FINUL s'est achevée à la fin de l'année 2002 (de 3 500 à 2 000 hommes) pour adapter son format à son rôle effectif sur le terrain (observation et aide au rétablissement de l'autorité de l'Etat dans la zone libérée).

Après la multiplication des incidents au premier semestre 2002, la situation s'est apaisée au Liban Sud. Néanmoins la nervosité persiste de part et d'autre de la « ligne bleue ». Les opérations sporadiques du Hezbollah se poursuivent dans la zone de Chebaa. Le projet du Wazzani est aujourd'hui une nouvelle pomme de discorde avec Israël. Une station de pompage des eaux de la source Wazzzani , qui se jette dans le Hasbani, a été inaugurée le 16 octobre dernier suscitant de vives tensions entre Israël et le Liban. Des démarches ont été réalisées auprès des parties, qui ont fait preuve de retenue à ce stade. Des experts français, européens et américains se sont rendus sur place pour établir des rapports techniques sur cette question. Les négociations politiques devraient se poursuivre sur cette base.

C. LES RELATIONS AVEC LA FRANCE ET L'UNION EUROPÉENNE

1. Les relations franco-libanaises sont particulièrement nourries

. Les relations politiques

La France entretient traditionnellement avec le Liban des relations privilégiées . Le Président de la République a effectué quatre visites au Liban depuis 1996 (avril 1996, octobre 1996, mai 1998 et plus récemment du 17 au 20 octobre dernier à l'occasion du Sommet de la francophonie). Le Président de la République libanaise, M. Emile Lahoud , a effectué une visite d'Etat en France fin mai 2001 (28-29/05). Le Ministre des Affaires étrangères s'est pour sa part rendu au Liban le 5 juillet 2002. Les visites ministérielles libanaises en France sont quant à elles fréquentes et nombreuses. L'organisation de la Conférence de Paris II de soutien aux réformes économiques du Liban, le 23 novembre 2002, a marqué une nouvelle fois l'intérêt que la France portait aux intérêts du Liban.

Sur le fond, une constante de l'action de notre pays reste la défense de la souveraineté et de l'indépendance du Liban , pays pluriconfessionnel original à la stabilité duquel la France est attachée. Elle s'est ainsi félicitée en mai 2000 du retrait israélien du Sud-Liban. Nous encourageons aujourd'hui les autorités libanaises à assumer toutes leurs responsabilités conformément aux résolutions des Nations unies, en rétablissant leur pleine autorité sur l'ensemble de la zone libérée. Dans le cadre du processus de paix au Proche-Orient, nous insistons pour que tout règlement ne se fasse pas au détriment du Liban et de la Syrie, en rappelant que la paix ne saurait être durable si elle n'est pas « juste et globale ».

. La coopération financière avec le Liban

Depuis dix ans, la France contribue activement à la reconstruction du Liban. La coopération financière bilatérale, poursuivie pendant la guerre civile, a repris fortement après 1992. Le Liban a ainsi bénéficié de cinq protocoles financiers (engagés à hauteur de 80 %) entre 1993 et 1997, pour un montant total de 200 millions d'euros. Le soutien de la France s'est porté sur des secteurs stratégiques (eau, électricité, transport aérien et maritime) mais aussi sur la remise à niveau de certains services clés de l'Etat. L'Institut des finances, centre de formation du ministère des finances, en est le meilleur exemple. L'INSEE a également signé en mai 2002 un accord de coopération avec le ministère de l'Economie libanais pour créer une équipe libanaise de calculs des comptes nationaux du Liban. Inscrit dans la Zone de solidarité prioritaire (ZSP) au début de 1999 , le Liban bénéficie des concours de l'Agence française de développement (AFD), dont les financements s'élèvent à 56,5 millions d'euros (3 projets dans le secteur de l'eau et 20 millions d'euros de lignes de crédit de Proparco). Un nouveau projet de 10 millions d'euros est en cours d'instruction dans le domaine de la réhabilitation urbaine en co-financement avec la Banque Mondiale.

. Les échanges économiques bilatéraux

Après avoir enregistré une certaine reprise en 2001, les échanges commerciaux franco-libanais se sont contractés en 2002 pour atteindre 621 millions d'euros , sous l'effet d'une croissance économique insuffisante (2 %), de l'absence de grands contrats significatifs et de la modification de la parité euro-dollar au cours du deuxième semestre. Les ventes se situent encore en retrait de l'année 1997, où soutenues par les nombreux contrats financés sur protocoles, elles avaient été multipliées par quatre par rapport à 1990, fin de la guerre civile. Elles se développent toutefois de façon satisfaisante dans un environnement globalement peu favorable. L'excédent commercial en faveur de la France se maintient (572 millions d'euros). Le Liban représentait en 2002 notre 17ème excédent commercial et notre 2ème excédent au Proche Orient après l'Egypte. La France voit sa part de marché se réduire depuis quelques années à 8 % en 2002, après 8,4 % en 2001. Elle conserve sa place de troisième fournisseur du Liban derrière l'Italie et l'Allemagne (respectivement 10,8 % et 9 % en 2002) et devant les Etats Unis (7,2 %).

Le déblocage récent de plusieurs contrats financés sur des anciens protocoles et la livraison de six Airbus A 321 commandés par la Middle East Airlines sont susceptibles de relever significativement le niveau de nos exportations en 2003.

Avec près d'une centaine d'implantations , principalement concentrées dans le domaine des services, la France est aujourd'hui le premier investisseur étranger au Liban. Les établissements bancaires, financiers et d'assurance constituent le noyau dur de notre présence. France Télécom , à travers son réseau de téléphonie mobile (250 000 abonnés), est le principal investisseur français (270 M €) suivi par TOTAL (15,24 M €), qui est le premier distributeur de carburant dans le pays. D'autres grands groupes sont bien implantés, soit industriellement (Air liquide, Alcatel câbles, Lafarge, Colas), soit commercialement (l'Oréal, AXA, AGF). Cette présence est complétée par de nombreuses PMI/PME présentes dans les secteurs en développement. Le nombre de franchisés libanais de sociétés françaises progresse rapidement dans le domaine des biens et services mais aussi dans la distribution : le BHV et Monoprix ont ouvert leur première implantation internationale à Beyrouth.

2. Les relations économiques avec l'Union européenne

. Les échanges commerciaux

Depuis la signature de l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et le Liban en 1977 , les relations commerciales entre les deux parties se sont régulièrement développées : entre 1980 et 2001, les exportations européennes vers le Liban ont cru de 4,6 % en moyenne annuelle, tandis que les importations européennes augmentaient de 9,3 %.

La balance commerciale est largement en faveur de l'Union européenne, principal partenaire du Liban (déficit commercial libanais de 2,75 Mds € en 2001) . Les principaux exportateurs vers le Liban au sein de l'Union européenne sont l'Italie, l'Allemagne et la France. Les exportations libanaises vers l'Union européenne ont toutefois fortement augmenté en 2001, et ce déficit devrait progressivement se réduire sous l'effet de la libéralisation des échanges en matière de produits agricoles en particulier (mise en oeuvre anticipée du volet commercial de l'accord d'association depuis le 1 er mars 2003).

Les exportations européennes vers le Liban sont assez diversifiées (machinerie, produits agricoles, produits chimiques, matériel de transport pour l'essentiel). Les exportations libanaises sont sensiblement plus concentrées (35% produits manufacturés, 10% produits agricoles).

. La coopération financière

Pour faire face à sa plus grave crise économique depuis la fin de la guerre civile, le Liban s'est tourné vers l'Union européenne et d'autres bailleurs lors de la Conférence de Paris II, pour trouver auprès d'eux un indispensable soutien politique et économique au moment de mettre en oeuvre sa stratégie de réforme économique (en particulier, important programme de privatisations). La France à elle seule a contribué à hauteur de 500 millions d'euros.

II. LES DISPOSITIONS DE L'ACCORD D'ASSOCIATION AVEC LE LIBAN

A. LE BILAN DE L'ACCORD DE 1977 ET DE L'APPLICATION DU PROGRAMME MEDA

1. Le bilan de l'accord de 1977

Depuis l'entrée en vigueur de l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et le Liban, celui-ci a reçu de la CEE puis de l'Union européenne, son premier bailleur de fonds (31 % de l'aide extérieure) 1,8 milliard d'euros , dont 533 millions d'euros sous forme de prêts de la BEI, 332 millions d'euros en dons (essentiellement les quatre protocoles financiers et MEDA), et plus de 900 millions d'euros par les Etats membres (essentiellement Italie, France et Allemagne).

Les priorités de l'aide européenne ont évolué : ciblée sur la reconstruction du pays au début des années 90 (infrastructures, développement rural), elle s'est progressivement réorientée vers l'appui à la transition économique et aux réformes, la réhabilitation des institutions publiques, la modernisation industrielle, ainsi que vers la lutte contre la pauvreté (programmes sociaux), dans le cadre des priorités du processus de Barcelone.

2. L'application du programme MEDA

La coopération entre l'Union européenne et le Liban dans le cadre de MEDA a commencé avec MEDA I (1996-2000). MEDA II (2000-2006) poursuit les mêmes priorités, définies dans le document stratégique pour le Liban : appui aux réformes économiques, promotion du développement social, environnement, développement des ressources humaines et promotion des droits de l'homme.

Sur la base du Programme indicatif national 2002-2004, une aide de 80 millions d'euros a été accordée au mois de mars 2002 au Liban pour l'appui à la mise en oeuvre du futur accord d'association et les réformes commerciales (45 M €), le développement rural (10 M € ; ciblée sur les exploitants agricoles et la petite industrie agroalimentaire), la protection de l'environnement (22 M €), ainsi que l'enseignement supérieur (programme Tempus, 3 M €). Les programmes concernant la mise en oeuvre de l'accord et l'enseignement supérieur ont déjà été lancés en 2002.

Si les grands axes de la coopération avec le Liban sont donc fixés à moyen terme, les modalités de leur mise en oeuvre peuvent être adaptées en fonction des contraintes locales : c'est ainsi qu'il est question aujourd'hui de réviser le Programme indicatif pour tenir compte des importantes difficultés économiques du Liban.

B. UN DISPOSITIF CLASSIQUE

1. Le projet d'un partenariat politique

L'accord d'association s'inscrit dans le cadre du renforcement de la politique méditerranéenne de l'Union européenne, qui s'est traduit par le lancement, lors de la conférence de Barcelone en novembre 1995 du partenariat euro-méditerranéen réunissant les 15 Etats de l'Union et 12 pays de la rive Sud.

Ce partenariat global s'articule autour de trois grands volets : politique et sécurité ; économique et financier ; social, culturel et humain. Il avait plusieurs objectifs. Il s'agissait tout d'abord d'adapter les relations commerciales euro-méditerranéennes aux nouvelles règles commerciales issues du cycle de l'Uruguay Round. Il s'agissait également de rééquilibrer la politique extérieure de l'Union européenne, alors même qu'elle préparait son élargissement vers les pays d'Europe centrale et orientale. En outre, avec l'entrée en vigueur du traité de Maastricht créant une politique européenne de sécurité commune (PESC), il est apparu important d'étendre le champ des nouveaux accords aux relations politiques. Enfin, à travers ces accords, les pays européens ont eu la volonté de faire de l'Europe un acteur qui compte dans le processus de paix au Proche-Orient.

Cependant, malgré ces objectifs ambitieux, le volet politique et le dialogue multilatéral entre les pays de l'Union européenne et les pays du Sud de la Méditerranée n'a pas donné les résultats escomptés. Le processus a été presque entièrement bloqué par la dégradation de la situation au Proche-Orient. La dernière grande conférence de Marseille en 2000 avait d'ailleurs manqué d'être reportée en raison de l'hostilité de la plupart des pays arabes ou maghrébins vis à vis d'Israël.

2. Les principaux axes du dispositif retenu

L'architecture générale de l'accord signé avec le Liban est similaire à celle des autres accords conclu avec les pays de la rive Sud. Il a pour but d'établir un dialogue politique régulier, de fixer les conditions de la libéralisation progressive des échanges de marchandises, de définir les modalités du droit d'établissement et des prestations de service, de définir les règles de circulation des capitaux et de concurrence, de renforcer la coopération économique, d'instituer un dialogue en matière sociale et culturelle et d'encourager la coopération financière.

Le texte de l'accord prévoit, en outre, dans son article 2, une clause de respect des droits de l'homme . Il « constitue un élément essentiel », dont la violation peut aller jusqu'à la suspension de l'accord.

Le dialogue politique est organisé par le titre I er . Il prévoit la mise en place d'un dialogue politique et de sécurité régulier permettant d'établir des liens durables de solidarité contribuant à la prospérité, à la stabilité et à la sécurité de la région Il se déroule au niveau ministériel et des hauts-fonctionnaires.

La libre circulation des marchandises est organisée par le titre II. Il confirme l'objectif général de l'établissement d'une zone de libre échange à la fin d'une période de transition de 12 ans après l'entrée en vigueur de l'accord. Il convient cependant de distinguer le régime accordé aux produits industriels (libre accès au marché communautaire) de celui des produits agricoles pour lesquels une « clause de rendez-vous » est prévue. Le volet commercial de l'accord est applicable depuis le 1 er août 2002 de façon à ouvrir sans retard supplémentaire les périodes transitoires mises en place.

Dans ce même esprit de liberté du commerce, l'accord prévoit la libéralisation des échanges de services et de capitaux. Les parties s'accordent, en matière de service, le traitement de la nation la plus favorisée.

Afin d'accompagner cette libéralisation économique les deux parties s'engagent à coopérer. Dans les faits, l'Union européenne va apporter son aide dans les domaines économique, social et culturel .

C. LES PARTICULARITÉS DE L'ACCORD D'ASSOCIATION AVEC LE LIBAN

La négociation de l'accord a duré près de cinq ans. Dès son arrivée au pouvoir en 2000, M. Harriri s'est employé à en accélérer le rythme de façon à conclure rapidement.

Les principales difficultés ont porté sur deux points, d'une part le désarmement tarifaire industriel et agricole et, d'autre part, la prise en compte du terrorisme :

- Le Liban a mis plus de trois ans à accepter le principe du démantèlement tarifaire dans la négociation. Il a fini par renoncer à sa demande de compensation des pertes des revenus douaniers qui, à ce jour, représentent 50 % des recettes budgétaires libanaises. Pour répondre à cette attente, l'Union européenne a proposé un démantèlement asymétrique prévoyant un délai de grâce de cinq ans durant lequel le Liban maintient ses droits de douanes intacts. A l'issue de ces cinq ans, le Liban s'engage à réduire en une fois ses droits pour les importations de produits agricoles européens (sauf pour quelques produits sensibles), et à procéder à une diminution graduelle étalée sur plusieurs années de ses droits de douane pour les produits industriels et produits agricoles transformés. De son côté, l'Union européenne réduit ou supprime ses droits immédiatement.

De fait, le mécanisme de démantèlement asymétrique offrira immédiatement un accès au marché européen presque totalement libre pour les exportations agricoles libanaises. En effet, même pour les produits dont l'entrée sur le marché communautaire restera limitée en quantité, les faibles capacités d'exportation du Liban ne lui permettront sans doute pas d'utiliser la totalité des différents quotas mis en place pour protéger les productions sensibles de l'Union européenne.

Parallèlement à cet effort de démantèlement, le Liban s'est engagé à réformer son système fiscal , c'est à dire à introduire la TVA afin de compenser ses pertes prévisibles de recettes douanières qui n'interviendront pas avant l'arrivée à échéance du délai de grâce, c'est à dire en 2007 .

- Sur le terrorisme, le Liban et l'Union européenne sont convenus de procéder à un échange de lettres par lequel ils s'engagent à coopérer dans ce domaine. Il est intervenu le 17 juin 2002. Cette coopération reprend les termes déjà agréés dans l'accord d'association entre l'Union européenne et l'Algérie. Elle portera sur les moyens de lutte contre le terrorisme, mais également sur des échanges d'informations sur les « groupes terroristes et leurs réseaux ».

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