Article 45
Habilitation du Gouvernement
au titre de l'article 38 de la Constitution

Le présent article tend à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives nécessaires à l'extension et à l'adaptation des dispositions du projet de loi à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, aux îles Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, conformément à l'article 38 de la Constitution.

1. Le droit en vigueur

Dans les collectivités précitées, le régime juridique de l'entrée et du séjour des étrangers n'est pas fixé par l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945
et est établi par les textes suivants :

- l'ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour dans les îles Wallis-et-Futuna ;

- l'ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en Polynésie française ;

- l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte ;

- l'ordonnance n° 2000-374 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), qui a modifié la loi statutaire n° 71-569 du 15 juillet 1971 ;

- l'ordonnance n° 2002-388 du 20 mars 2002 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en Nouvelle-Calédonie.

Ces ordonnances définissent des règles proches de celles de l'ordonnance du 2 novembre 1945 tout en adaptant les règles relatives à l'entrée et au séjour des étrangers aux spécificités des collectivités concernées .

2. Le texte soumis au Sénat

Le présent article tend tout d'abord à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour adapter les dispositions du projet de loi à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna, et en tirer les conséquences sur l'ensemble d
u territoire de la République , dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution (I) 370( * ) .

Ce dernier indique que « le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ».

Pour les collectivités d'outre-mer, l'application du projet de loi aurait également pu avoir lieu par la procédure de l'article 74-1 nouveau de la Constitution, inséré par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République, qui prévoit une habilitation constitutionnelle permanente permettant au Gouvernement d'étendre par voie d'ordonnances les dispositions législatives en vigueur en métropole, moyennant les adaptations nécessaires et la consultation des assemblées délibérantes intéressées 371( * ) .

Le recours aux ordonnances , très encadré par les textes et par la jurisprudence, constitue une dérogation au principe de l'article 34 de la Constitution selon lequel « la loi est votée par le Parlement ». Le Gouvernement a ainsi la possibilité d'accélérer la mise en oeuvre de son programme et d'alléger l'ordre du jour législatif des dispositifs les plus techniques.

Les prérogatives du Parlement sont toutefois protégées puisque l'habilitation du Gouvernement à prendre des ordonnances doit lui permettre d'exécuter son programme : le Gouvernement a donc l'obligation d'indiquer avec précision, lors du dépôt d'un projet de loi d'habilitation, « quelle est la finalité des mesures qu'il se propose de prendre » 372( * ) .

En l'espèce, les mesures envisagées adapteraient outre-mer les dispositions du projet de loi et tireraient les conséquences de cette adaptation « sur l'ensemble du territoire de la République » (validité de la carte de résident ; mesures d'éloignement et d'interdiction du territoire dans les collectivités d'outre-mer concernées).

Les ordonnances fixeraient également les mesures nécessaires à l'actualisation des dispositions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers dans les Terres australes et antarctiques françaises (II) 373( * ) .

Le Conseil constitutionnel a par ailleurs précisé que l'urgence, « est au nombre des justifications que le Gouvernement peut invoquer pour recourir à l'article 38 de la Constitution » 374( * ) .

Par ailleurs, l'article 38 de la Constitution indique que l'habilitation ne doit être donnée que pour un « délai limité » .

Le présent article fixe ainsi un délai d'habilitation d'un an à compter de la promulgation de la future loi pour prendre les ordonnances (I-2).

En effet, toujours selon l'article 38 de la Constitution, « à l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif ».

Pris en conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, les projets d'ordonnances devront être soumis pour avis selon les cas :

- aux institutions compétentes prévues par la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française et par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

- à l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna ;

- au conseil général de Mayotte , conformément à l'article L. 3551-12 du code général des collectivités territoriales.

Enfin, le présent article indique également le délai pendant lequel les projets de loi de ratification des ordonnances doivent être déposés au Parlement, sous peine de caducité. Ainsi, le paragraphe 3 du présent article dispose que ces projets de loi de ratification devraient être déposés « dans les dix-huit mois de la promulgation de la présente loi ».

La ratification des ordonnances conditionne leur valeur législative : tant qu'elles n'ont pas été ratifiées, les ordonnances ont une valeur réglementaire et peuvent être contestées devant le juge administratif 375( * ) . Le Conseil constitutionnel a cependant admis la validité des ratifications implicites, la ratification procédant alors « d'une manifestation de volonté implicitement mais clairement exprimée par le Parlement » 376( * ) .

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 45 sans modification .

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