Rapport n° 59 (2003-2004) de M. Alain VASSELLE , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 12 novembre 2003

Disponible au format Acrobat (1 Moctet)

N° 59

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 12 novembre 2003

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Alain VASSELLE,

Sénateur.

Tome I :

Équilibres financiers généraux et assurance maladie

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Joël Billard, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, André Geoffroy, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Yves Krattinger, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mmes Valérie Létard, Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 e législ . ) : 1106 , 1156, 1157 et T.A. 194

Sénat : 54 (2003-2004)

Sécurité sociale.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Les dispositions financières du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale affichent l'une des plus fortes dégradations des comptes sociaux jamais connues ces dernières années.

Bien qu'il apparaisse encore « raisonnable » au regard de la situation des autres comptes publics, et notamment d'un déficit vraisemblable du budget général de 55 milliards d'euros, le déficit prévisionnel présenté par la sécurité sociale atteindrait spontanément, selon les prévisions de la Commission des comptes de la sécurité sociale et les annexes du présent projet de loi, plus de 13,5 milliards d'euros pour l'ensemble du régime général et 14 milliards d'euros pour sa seule branche maladie.

Cette situation dramatique est celle de la dérive solitaire de l'assurance maladie qui, n'étant jamais parvenue à équilibrer ses comptes, se trouve aujourd'hui bien dépourvue.

Devant ce constat, le choix du Gouvernement de ne pas augmenter tout simplement les prélèvements obligatoires ne relève pas de la stratégie d'évitement. D'aucuns affirment pourtant que le projet de loi cherche à gagner du temps et ce, au prix d'une dégradation financière d'ampleur et au recours à peine masqué, à toutes sortes d'expédients. Pire, certains accusent le Gouvernement de jouer en quelque sorte une « politique du pire » afin de préparer la voie à un démantèlement de la sécurité sociale d'ores et déjà programmé.

De telles affirmations ne correspondent en rien à la réalité d'un projet qui tout à la fois prépare l'avenir et préserve le présent, en contenant par des mesures responsables le déficit général à 10,5 milliards d'euros.

Confronté à un dialogue conventionnel avec les professionnels de santé laissé moribond, à un hôpital en désarroi et à l'explosion de la consommation médicale, le Gouvernement s'est attaché à renforcer, pour la crédibiliser, la démarche de médicalisation des dépenses et à poser les premières pierres de la convergence des activités hospitalières.

Ce faisant, il borne, avec suffisamment de rigueur, le champ de réflexion laissé à l'expertise du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie en matière de gouvernance et de domaine de compétence de l'assurance maladie, pour espérer désamorcer toute accusation de « dérobade ».

Pour sa part, la suppression du FOREC constitue un progrès considérable pour les finances sociales, de même qu'elle concrétise la tenue d'une promesse à laquelle le Parlement avait rappelé tout son attachement.

Toute avancée porte en elle-même son lot de risques, de déceptions et d'attente.

L'hypothèse de la suppression du FOREC comportait évidemment le risque qu'elle ne soit pas réalisée dans des conditions permettant d'assurer à la sécurité sociale l'exacte compensation des exonérations de charges. Ce fonds fut construit dans cette intention et, par une pirouette de l'histoire, il aurait pu remplir son office de manière pérenne en disparaissant. Déterminé à préserver une protection sociale que les ponctions réalisées sous la législature précédente ont durement fragilisée, le présent Gouvernement n'a pas voulu qu'il en soit ainsi et il a reporté, au sein du budget général, les recettes et les dépenses du fonds.

Les conditions qui sont proposées pour la suppression du FOREC suscitent toutefois une déception : celle que ne puissent être retournées aux régimes sociaux les sommes qui leur ont été autrefois détournées pour alimenter le fonds. Mais à ce titre, votre rapporteur comprend que, dans ce contexte économique difficile, la construction des budgets se trouve contrainte par les initiatives, bonnes ou mauvaises, des budgets précédents, et que souvent dans ces affaires-là, on se trouve en quelque sorte réduit à « pleurer sur le lait renversé ».

Au-delà, il rappellera que la disparition du FOREC doit être l'occasion de mettre en oeuvre ce chantier encore balbutiant de la clarification des relations financières entre les collectivités publiques et la sécurité sociale, dont les mesures contenues dans le présent projet de loi ne constituent que les prémisses.

Encore un effort ! Sur ce sujet, l'ambition n'est pas de satisfaire un quelconque désir d'esthétisme financier mais bien de franchir une étape préalable indispensable à toute réforme d'ampleur d'une protection sociale en mutation.

PREMIÈRE PARTIE
-
ÉQUILIBRES FINANCIERS GÉNÉRAUX

I. DES COMPTES SOCIAUX HANDICAPÉS PAR UNE CROISSANCE ATONE

A. L'EXÉCUTION DE LA LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2003 : PEUT-ON ENCORE FAIRE L'ÉCONOMIE D'UN COLLECTIF ?

1. Des recettes entamées par une croissance anémique

Construites sur une hypothèse de croissance du produit intérieur de 2,5 %, les recettes effectives pour 2003 n'ont pas correspondu aux attentes.

Rapidement contraintes à cause d'une croissance du PIB sur l'année proche de zéro (0,5 %), les recettes des organismes de base de la sécurité sociale s'écarteront en exécution de près de 1,4 % des prévisions initiales. Un tel recul, qui se traduit par un écart en valeur absolue de 4,5 milliards d'euros, s'explique par rang d'importance décroissante des facteurs, par :

- de moindres rentrées des produits d'origine fiscale se constatant sur tous les postes, notamment la contribution sociale généralisée (CSG), soit un manque à gagner total de 3,2 milliards d'euros ;

- de moindres rentrées des produits de cotisations (toutes catégories confondues) dues à l'évolution moins rapide que prévue de la masse salariale (2,3 % contre 4,19 % prévus), soit un manque à gagner total de 1,8 milliard d'euros ;

- en sens inverse, les deux postes des contributions publiques et des ressources diverses présentent une réalisation supérieure aux prévisions initiales, respectivement de 200 et 300 millions d'euros. Il est toutefois à noter que cette évolution positive des contributions étant due à l'augmentation de la subvention d'équilibre au BAPSA, elle constitue en fait la contrepartie d'un déficit de réalisation des prévisions des autres recettes et non pas une « heureuse surprise » !

Au total, l'exécution de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, sur le volet recettes, traduit l'accélération, au cours de l'année, de la dépression économique, dont l'ampleur n'avait pas été prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale initial.

La conditionnalité des recettes à la croissance explique le triplement de l'écart entre la prévision de recettes initiales et les recettes réalisées en 2003 (- 4,5%) par rapport à l'année précédente (1,3 %).

Prévisions
initiales LFSS 2003
(article 20 de la LFSS 2003)
(1)

LFSS 2003
révisée
(article 14 du PLFSS 2004)

(2)

Écart 2003 révisées/2003 initiales
(2)-(1)

Écart 2003
révisées/
2003
initiales
(en %)

Cotisations effectives

181,87

182,5

0,63

0,3

Cotisations fictives

32,48

29,9

- 2,58

- 7,9

Cotisations prises en charges par l'État

2,33

2,5

0,17

7,3

Autres contributions publiques

11,40

11,7

0,30

2,6

Impôts et taxes affectés

94,11

90,9

- 3,21

- 3,4

Transferts reçus

0,21

0,2

- 0,01

- 4,8

Revenus des capitaux

1,04

1,0

- 0,04

- 3,8

Autres ressources

4,07

4,3

0,23

5,7

Total des recettes

327,51

323,0

- 4,51

- 1,4

(milliards d'euros)

2. Des dépenses d'assurance maladie rebelles à toute maîtrise ?

La révision des objectifs de dépenses des quatre branches prend acte, pour 2003, comme ce fut le cas les années précédentes, d'une dégradation significative en exécution du budget de la sécurité sociale.

Le dérapage s'élève à 0,7 %, soit 2,3 milliards d'euros, imputables pour l'essentiel à l'évolution plus rapide des dépenses d'assurance maladie qui y participe à hauteur de 1,7 milliard d'euros (+ 1,3 %).

L'évolution des dépenses d'assurance maladie explique à elle seule 75 % du dérapage de l'agrégat des objectifs de dépenses.

Pour autant, l'exécution de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 présente une sensible amélioration par rapport à l'année précédente. En effet, et à la différence des recettes sur laquelle pèse une volatilité significative, l'évolution en exécution des dépenses reflète largement le caractère sincère de l'objectif initial.

A cet égard, la réalisation des objectifs de dépenses par branche pour 2003 témoigne d'une sensible amélioration, la sous-estimation initiale des dépenses de l'assurance maladie n'ayant été que de 1,3 % au lieu de 3,2 % en 2002, cette différence soulignant, à bien des égards, le caractère irréaliste de l'exercice de prévision auquel s'était livrée la précédente majorité.

Prévisions
initiales LFSS 2003

LFSS 2003
révisée

Écart 2003 révisées/2003 initiales

Écart 2003 révisées/2003 initiales
(en %)

Maladie, maternité, invalidité et décès

136,35

138,07

1,72

1,26

Vieillesse

140,36

140,68

0,32

0,23

Accidents du travail

9,40

9,39

- 0,01

- 0,11

Famille

43,62

43,98

0,36

0,83

Total des dépenses

329,73

332,12

2,39

0,72

(milliards d'euros)

3. Le relèvement par décret du plafond d'assurance

La loi de financement pour 2003 avait fixé le montant du plafond d'avance à 12,5 milliards d'euros, correspondant à un triplement de celui déterminé par la précédente loi de financement (4,4 milliards d'euros).

Selon l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) 1 ( * ) , l'évolution du profil de trésorerie du régime général pour l'exercice 2003 présente les caractéristiques suivantes :

- le solde moyen sur l'exercice est estimé à 5 milliards d'euros ;

- le point le plus bas a été atteint le 10 octobre 2003 à - 13,3 milliards d'euros ;

- le solde de fin d'année est estimé à - 13,2 milliards d'euros.

Ces considérations expliquent le relèvement du plafond à 15 milliards d'euros, qui correspond au point le plus bas prévu, majoré, par précaution, d'une marge d'environ 10 %.

Lors de la présentation de la loi de financement pour 2003, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, avait pris l'engagement, au nom du Gouvernement, de présenter un projet de loi de financement rectificatif si l'on devait observer un dérapage sensible par rapport aux prévisions initiales.

Cet engagement, ardemment réclamé par votre commission depuis plusieurs années, constituait un gage de la crédibilité que l'on pouvait attacher à la définition des hypothèses économiques - ambitieuses - soutenant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses pour 2003.

Or, d'après les informations disponibles, il apparaissait, dès le mois de mars dernier, que l'évolution des encaissements et des tirages respectifs des différentes branches auprès de l'ACOSS ne permettrait pas de tenir les prévisions initiales.

L'ACOSS considérait de ce fait, dès le mois d'avril 2003, qu'en l'absence de mesures correctives significatives, ce plafond risquait d'être insuffisant. Ceci a motivé, à la demande de son conseil d'administration, une intervention de son représentant à l'occasion de la Commission des comptes de la sécurité sociale du 15 mai 2003. Lors de la commission financière et statistique du 19 mai 2003 et du conseil d'administration du 23 mai 2003, il a été signalé qu'un retour des soldes dans les limites autorisées par la LFSS 2003 requérait des mesures de mise en conformité du profil de trésorerie avec les besoins réels du régime général et la prise de mesures exceptionnelles. En l'absence de ces mesures, un relèvement du plafond des avances semblait inévitable 2 ( * ) .

Le rapport remis par le Gouvernement en application de l'article L.O. 111-5 du code de la sécurité sociale, à la suite du relèvement par décret du plafond, indique pour sa part qu'« il est apparu en juillet que le plafond des avances serait dépassé malgré les diverses mesures de lissage de la trésorerie que le régime général et l'État pourraient prendre.

Or, le premier dépassement pouvait intervenir dès les premiers mois d'octobre. Il n'était donc pas possible, pour le Gouvernement, d'attendre la reprise des travaux parlementaires et de recourir à la partie rectificative du projet de loi de financement pour 2004 pour relever le plafond d'avances de trésorerie ».

Ces éléments l'avaient donc conduit à remédier à cette situation par décret pris en conseil des ministres dès la fin de l'été.

La date évoquée par son rapport ne fait toutefois référence qu'à l'ultime mesure d'alerte émise par le conseil d'administration de l'ACOSS et, de ce fait, elle ne semble qu'imparfaitement résumer les raisons qui l'ont conduit à écarter une voie législative, qui ne lui était d'ailleurs nullement imposée mais qu'il avait lui-même souscrite.

Votre commission a défini dès 1999 ce qu'elle considérait devoir être « la pratique du collectif social » à une période où le gouvernement d'alors avait lui-même par décret 3 ( * ) relevé ce plafond, alors même qu'il avait déjà obtenu de l'Assemblée nationale, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale initial, une première majoration sensible.

Par cette « doctrine », votre commission s'est attachée à souligner l'importance que revêt, à ses yeux, le dépôt d'un collectif :

- lorsque le plafond d'avances devient insuffisant ;

- lorsque l'adoption de mesures correctrices est jugée nécessaire en cours d'année.

Sans doute, l'encombrement excessif de l'ordre du jour parlementaire impose-t-il de faire des choix. Pour autant, à la différence du précédent gouvernement qui raillait délibérément l'exercice de vérité que constitue l'examen d'un tel collectif - « nous devrions réunir le Parlement, chaque mois, dès la première grippe » 4 ( * ) - votre commission demeure attachée à la légitimité d'un instrument qu'elle estime largement justifié par la prolifération d'accords portant de véritables mesures nouvelles qui seront imparfaitement ratifiées dans la loi de financement suivante.

B. LES PRÉVISIONS DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2004 : CONTENIR L'EXPLOSION

1. Le choix de différer la réforme de l'assurance maladie

D'un point de vue financier, la branche maladie constitue « la branche malade » de la sécurité sociale. Même lorsque l'économie nationale affichait un taux de croissance particulièrement élevé, elle n'a jamais réussi à reconstituer un excédent.

La période 1998-2001 s'est traduite par un double échec dans la maîtrise des comptes de l'assurance maladie :

- un déficit cumulé sur la période de 6,94 milliards d'euros ;

- un dérapage de l'ONDAM de 7,8 milliards d'euros.

Assurance maladie 1998-2001

(en milliards d'euros)

1998

1999

2000

2001

Total

Dépassement ONDAM rebasé

1,40

1,50

2,50

2,40

7,80

Déficit assurance maladie

- 2,10

- 0,70

- 2,50

- 1,64

- 6,94

Source : commission des Affaires sociales

Evidente à la vue de ces chiffres, l'absence de maîtrise des coûts de la santé a été plus manifeste encore avec l'entrée dans une phase de ralentissement économique et la poursuite concomitante de l'évolution des dépenses sur un rythme spontané très élevé (déficit respectif de 10,6 et 14 milliards d'euros en prévisions et hors mesures PLFSS pour 2003 et 2004).

Evolution spontanée des soldes des différentes branches
et du régime général

Source : commission des Affaires sociales.

Lire le tableau ainsi : en 2003, le solde de l'assurance maladie est en définitive de 10,6 milliards d'euros et celui du régime général de 8,9 mais, sans l'assurance maladie, les autres branches présentent des soldes créditeurs de 1,7 milliards d'euros.

Il est désormais acquis que l'équilibre à court et moyen termes des finances sociales a pour prix une réforme majeure de l'assurance maladie sans laquelle l'ensemble des comptes sociaux resteront globalement dégradés.

Le Gouvernement a déjà engagé la phase de réflexion préalable à la concertation avec l'ensemble des acteurs, dont votre rapporteur a rendu compte 5 ( * ) comme d'une « réflexion dans l'urgence ».

Pour sa part, le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, créé par le décret du 7 octobre 2003, devra établir un diagnostic concerté et proposer des solutions avant l'été. En aucun cas, en effet, une réforme d'ampleur de l'assurance maladie ne saurait être plus avant différée.

2. Des prévisions de recettes fragiles

Les prévisions de recettes pour 2004, rapportées à celles de 2003, s'affichent en hausse de 3,7 %. Elles sont construites sur trois hypothèses macroéconomiques pour 2004 :

- une croissance du PIB de 1,7 % ;

- une évolution de la masse salariale de 2,7 % ;

- une évolution du plafond de sécurité sociale de 1,8 %.

Elles seront par ailleurs affectées par la rebudgétisation des ressources - et des dépenses - du FOREC 6 ( * ) qui résultera de la suppression de ce fonds en 2004.

Cette mesure modifie en effet substantiellement le montant des cotisations prises en charge par l'État (budget du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité) qui augmente de 17 milliards d'euros et participe pour une grande part à la réduction de 11,2 % du montant des impôts et taxes affectés (ITAF) aux régimes de sécurité sociale.

Trois raisons, jouant dans des sens contradictoires, expliquent les différences que produit l'effet FOREC, d'une part, sur les cotisations prises en charge, d'autre part, sur les ITAF :

- la croissance du montant des allégements compensés qui majorent, en 2004, les crédits budgétaires par rapport au périmètre FOREC 2003 ;

- l'augmentation spontanée des impôts et taxes affectés à la sécurité sociale ;

- l'augmentation des droits sur les tabacs, dont une partie significative demeure affectée à la CNAM.

Pour autant, ces prévisions conservent une part d'incertitude en raison du caractère volatile de leurs fondements.

Pour mémoire, votre rapporteur rappelle qu'en 2004 l'impact budgétaire d'une variation de faible ampleur de la masse salariale (0,1 point) équivaudrait à 150 millions d'euros de recettes, en plus ou en moins, et qu'une différence de réalisation de 1 % de CSG vaudrait 90 millions d'euros.

En outre, il souligne les réserves qu'appelle l'augmentation de la fiscalité sur le tabac spécifique au BAPSA qui, intervenant après une succession de fortes hausses du droit de consommation, pourrait introduire des écarts sensibles en réalisations. Pour reprendre les mots du rapporteur pour avis de la commission des Finances de l'Assemblée nationale : « certaines recettes, à l'instar des droits de consommation sur les tabacs, pâtissent de difficultés croissantes d'appréhension de leur élasticité de tarif » 7 ( * ) .

Incontestablement, un nombre croissant de recettes se trouvent perturbées par des évolutions rapides du contexte dans lequel elles évoluent (contraction de l'emploi, repli des marchés financiers). Les prévisions n'en sont que plus délicates à construire.

3. Des objectifs de dépenses dynamiques

Les objectifs de dépenses, toutes branches confondues, croîtront en prévisions sur un rythme proche de 4 % (345,4 milliards d'euros) en 2004, prenant comme base de référence les agrégats 2003 révisés et de 4,8 % en référence aux agrégats non révisés.

Les dépenses de l'assurance maladie

En 2004, les dépenses d'assurance maladie évolueront sur un rythme de 4 %, ce qui ne correspond pas à une évolution tendancielle de l'ONDAM évaluée à 5,5 % par la Commission des comptes de la sécurité sociale, mais à un objectif réduit par l'intégration de mesures de maîtrise significatives.

La réalisation de l'ONDAM 2003 s'établira à environ 6,4 %, c'est-à-dire en dépassement de 1,1 % de l'objectif initial (5,3%). Dans le même temps, il améliore de 0,8 point le taux de réalisation effectif de l'ONDAM en 2002.

Cet effort est d'autant plus notable que, sur 1,2 milliard d'euros de dépassement, la moitié correspond en fait au changement de base ayant affecté l'ONDAM, notamment par transfert d'environ 600 millions d'euros de charges en provenance du budget de l'État.

En l'absence de ces transferts, l'ONDAM serait resté aux environs de 6 %.

Les dépenses d'assurance vieillesse

L'évolution prévisionnelle dynamique des charges d'assurance vieillesse en 2004 est due essentiellement aux conséquences de la loi portant réforme des retraites.

En effet, la concession du départ anticipé aux salariés justifiant de carrières longues, qu'elle a accordée, pourrait coûter jusqu'à 1,19 milliard d'euros au régime général.

Hors toutes mesures nouvelles, le régime général aurait enregistré un excédent de près de 1 milliard d'euros.

Le coefficient de revalorisation pour 2004 demeure conforme à l'indice des prix hors tabac, majoré au titre d'un « rattrapage » pour 2003, soit 1,7 %.

Les dépenses de la branche famille

L'objectif de dépenses de la branche famille augmentera de 3 % en 2004, principalement du fait des mesures de la Conférence de la Famille (200 millions d'euros), dont l'instauration de la PAJE (150 millions d'euros) et l'augmentation (1,7 %) de la base mensuelle des allocations familiales (BMAF).

L'évolution des recettes de la branche, affectée par le ralentissement économique, ne lui permet plus d'assumer que très difficilement les ponctions structurelles dont la CNAF fait l'objet.

En 2004, la prévision du solde de la branche tangente le déficit, en affichant un résultat tout juste positif (+ 27 millions d'euros).

L'objectif de dépenses de la branche accidents du travail

Il pourrait augmenter de 2,7 %, soit 9,7 milliards d'euros, en raison d'une évolution rapide de certaines prestations (incapacités temporaires) et des transferts vers les fonds destinés à indemniser les victimes de l'amiante.

4. Des mesures de stabilisation permettent de contenir le déficit du régime général

Tendanciellement, les comptes du régime général de la sécurité sociale présenteraient un déficit de 13,5 milliards d'euros, dû à l'évolution de l'assurance maladie.

Plusieurs mesures prises par le Gouvernement permettent de contenir ce déficit à 10,3 milliards d'euros :

du côté des recettes, 2,2 milliards d'euros de ressources supplémentaires sont prévus, répartis entre :

- une augmentation des produits de la fiscalité du tabac (800 millions d'euros) ;

- la hausse des contributions requises des laboratoires pharmaceutiques et des producteurs et négociants de dispositifs médicaux (170 millions d'euros) ;

- l'amélioration de l'efficacité du recours contre tiers (100 millions d'euros) ;

- le remboursement par la CADES de la deuxième moitié de la dette FOREC 2000 pour 1,1 milliard d'euros ;

du côté des dépenses, plusieurs économies sont proposées à hauteur de 1,8 milliard d'euros sur la branche maladie.

Au total, le solde des mesures prises dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale permettrait de minorer le déficit attendu de 2,7 milliards d'euros.

Pour autant, ce plan de stabilisation appelle trois remarques :

- il repose pour 40 % sur la perception d'un versement exceptionnel en provenance de la CADES, qui s'apparente assez largement à une sorte de « reprise sur provisions ». Au-delà des réserves qu'appelle ce montage 8 ( * ) , il ne constitue qu'un rappel exceptionnel de ressources au titre de l'année 2000. La créance étant épuisée, ce versement devra rester le dernier ;

- il repose pour 30 % sur le produit de la hausse des tabacs. Votre rapporteur a déjà eu l'occasion de formuler une analyse de l'évolution de ces droits 9 ( * ) et rappelle la fragilité exprimée plus haut de l'activation de cette recette ;

- la décomposition d'un solde tendanciel et d'un « solde après mesure nouvelle » repose sur l'acceptation du classement ou de l'exclusion en mesures nouvelles de recettes et de dépenses, telles que présentées par l'annexe C. Or, cette répartition ne repose sur aucune convention définie, et demeure, à bien des égards, contestable (en exemple dépenses exclues des mesures nouvelles la dotation à certains fonds).

5. Un plafond d'avances encore jamais envisagé

Au courant du mois de septembre, une prévision des principales opérations de trésorerie a été réalisée par l'ACOSS, tenant compte des éléments chiffrés retenus dans le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre et des dispositions prévues par le présent projet.

Le profil de trésorerie laisse entendre que l'on accusera un point bas au 31 décembre 2004, à - 29,9 milliards d'euros. Mais, au regard des aléas pesant sur la progression de la masse salariale - et sur la progression de l'ONDAM - et au regard des variantes de prévision réalisées par l'ACOSS, il a paru opportun de fixer un plafond d'avance tenant compte d'une marge de précaution d'environ 10 %, fixé à 33 milliards d'euros.

Une telle prévision, qui constitue un précédent, pose nécessairement deux interrogations :

- celle du coût du financement des avances de trésorerie pour la sécurité sociale, et notamment pour l'assurance maladie ;

- celle de la capacité de la Caisse des dépôts et consignations à supporter financièrement et techniquement un tel volant d'avance, la caisse ne devant pas s'en trouver fragilisée.

Néanmoins, il n'existe, semble-t-il, pas sur le marché d'alternative à cette dernière. En effet, une solution complémentaire à la Caisse des dépôts et consignations a été expertisée en 2003, mais selon les informations recueillies par l'ACOSS, le coût des différentes alternatives s'élèverait au taux moyen du marché monétaire, majoré d'entre 100 et 1.000 points de base selon les solutions finalement retenues.

Les solutions alternatives ou complémentaires à la CDC n'existent donc que dans le secteur public, mais toutes ne sont pas simples à mettre en oeuvre (CADES, France Trésor...).

Les conditions de financement de l'ACOSS

Le rapport de la Cour des comptes de septembre 2003 indique qu'en matière de trésorerie, « les taux applicables sont fixés par la convention passée entre l'ACOSS et la CDC : le taux moyen pondéré du marché monétaire minoré de 1/8 e pour les intérêts créditeurs et majoré de un point pour les taux débiteurs ».

Toutefois, les conditions ainsi décrites sont celles d'une convention en date de 1980, dont les termes ont été profondément modifiés par une nouvelle convention signée en octobre 2001. Cette dernière améliore sensiblement le coût de financement du régime général.

Rémunération du solde créditeur du compte à vue

De 0 à 3 milliards d'euros

> à 3 milliards d'euros

Eonia - 6 points de base

Eonia

Taux appliqués aux avances de trésorerie

De 0 à 3 milliards d'euros

De 3 milliards d'euros au plafond de la loi de financement

Dépassement de l'avance <> à 500 milliards d'euros

Découvert accidentel

Eonia + 20 points de base

Eonia + 25 points de base

Eonia + 70 points de base

Eonia + 100 points de base

Source : ACOSS

En outre, l'ACOSS a obtenu en 2003 de la CDC la mise en place d'avances « prédéterminées », annoncées un mois à l'avance et dont la rémunération a été abaissée à Eonia + 7 points de base (0,07 %).

II. LA SUPPRESSION DU FOREC : L'ARBRE QUI CACHE LA FORÊT ?

A. LA DISPARITION D'UN SYMBOLE

1. La caricature d'une réforme des cotisations sociales

Votre rapporteur ne fera ici que rappeler l'analyse déjà formulée dans son rapport sur les prélèvements obligatoires.

Durant la campagne électorale de 1997, l'équipe de Lionel Jospin avait pris l'engagement de procéder à une réforme ambitieuse des cotisations patronales, notamment en asseyant le calcul de ces dernières sur la valeur ajoutée.

Grâce à deux rapports qui se sont (opportunément ?) neutralisés - le rapport Chadelat, favorable à un passage progressif à une assiette valeur ajoutée, et le rapport Malinvaud, défavorable à une telle évolution -, l'assiette des cotisations patronales de sécurité sociale est restée assise sur les seules rémunérations.

La dénomination initiale du FOREC était « fonds de financement de la réduction du temps de travail » . Ainsi que l'avait déjà noté Charles Descours, « le choix de l'intitulé « fonds de financement de la réforme des cotisations patronales » présentait l'avantage de faire accroire qu'une telle réforme avait eu lieu puisque l'on était au stade de son financement. Il n'en est évidemment rien : le calcul des cotisations patronales n'est aucunement affecté par un élément « valeur ajoutée », un élément « pollution » ou un élément « bénéfices » ni, a fortiori, par un élément « tabac » ou « alcool ». En revanche, le coût des exonérations de cotisations sociales accordées dans le cadre de la réduction du temps de travail est bien financé en 2000 par quatre impositions affectées (tabacs, droits sur les alcools, contribution sociale sur les bénéfices, taxe générale sur les activités polluantes) que sont venus compléter en 2001 deux prélèvements supplémentaires (une fraction de la taxe sur les conventions d'assurance et la taxe sur les véhicules de sociétés) ».

Le gouvernement d'alors a bien évidemment prétendu qu'il s'agissait là d'une réforme ambitieuse des cotisations patronales, en affectant au remboursement des allégements les produits de quelques « rossignols de la fiscalité », c'est-à-dire des taxes à la constitutionnalité incertaine et au rendement décroissant.

En aucun cas le FOREC ne constituait une réforme ambitieuse des cotisations patronales mais symbolisait, en toute évidence, la caricature d'un engagement important - le calcul des cotisations sur la valeur ajoutée - qui, pour des raisons économiques majeures, avait été ajourné.

2. L'abcès principal des relations financières entre l'État et la sécurité sociale

Le FOREC n'a été constitué que très tardivement, bien après sa création législative.

Institué par la loi de la sécurité sociale pour 2000, le FOREC ne fut constitué que par le décret en Conseil d'État du 25 octobre 2001. Cette course de lenteur - la Direction de la sécurité sociale avait transmis un avant-projet de décret au ministre de l'emploi et de la solidarité dès le 17 décembre 1999 - n'avait d'autre objet que de masquer un solde dramatiquement déficitaire. Pas de fonds, pas de contrôle, pas d'organes ni de solde : l'insuffisance de dotation du FOREC était ainsi supportée par la trésorerie de la sécurité sociale.

Il a été alimenté par des recettes soustraites à la sécurité sociale , cette dernière se compensant en quelque sorte à elle-même les allégements de cotisations sociales décidés dans le cadre de la réduction du temps de travail (RTT).

Ainsi le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) ont été ponctionnés d'une fraction significative de leurs recettes (droits sur les alcools, taxe auto, taxe tabac, taxe prévoyance) pour un montant financier dépassant les 4,5 milliards d'euros annuels. Le financement du FOREC fut en outre à l'origine d'une onde de choc de grande ampleur ayant ébranlé durablement les comptes sociaux : le FSV et la CNAMTS durent être refinancés au moyen de « tuyaux » fixés sur les autres branches, ce fût le cas du remboursement des majorations de pension pour enfants transféré à la CNAF.

Il a été alimenté au fil du temps par un catalogue de recettes « à la Prévert » partagées le plus souvent avec l'État ou d'autres organismes.

Votre commission n'a ainsi jamais revendiqué la compétence sur « la fiscalité des grains minéraux naturels », que lui conférait pourtant l'affectation au FOREC du produit de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).

Recettes et dépenses du FOREC en 2003

(en droits constatés)

RECETTES

Droits de consommation alcools et boissons

2 510

Droits de consommation tabac

7 432

Taxe sur les conventions d'assurance

2 260

Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

740

Taxe sur les véhicules de société

770

Taxe générale sur les activités polluantes

500

Prélèvement VTM

965

Taxe prévoyance

490

Produits financiers

17

Produits divers

3

15 687

DEPENSES

Ristourne bas salaire 1,3 SMIC (jusqu'au 1 er juillet 003)

2 138

Aubry I

2 073

Aubry II (jusqu'au 1 er juillet 2003)

4 190

ARTT de Robien

530

Allégement unique (à compter du 1 er juillet 2003)

6 969

Diverses charges

9

15 909

RESULTAT NET

- 222

Il s'est trouvé rapidement en déficit d'où une dette de 2,4 milliards d'euros à l'égard de la sécurité sociale, que le présent Gouvernement fait rembourser à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

En outre, les conditions de sa mise en oeuvre ont suscité « une vacance comptable » entraînant une créance de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) sur l'État, de plus de 775 millions d'euros, qui restent à ce jour non soldés.


Le solde des exonérations anciennes non compensées

Des montants d'exonérations restent dus dans le contexte de la création du FOREC en 2000 ou de l'extension de son champ de compétences en 2001 (pour un total de millions d'euros). En effet, les exonérations :

- comptabilisées en janvier 2000 et correspondant essentiellement aux exonérations de décembre 1999 (ou du quatrième trimestre pour les employeurs de moins de dix salariés), pour les mesures de réduction dégressive sur les bas salaires (RDS) et Aubry I, non mises à la charge du FOREC compte tenu des modalités de la date d'effet de la création de ce fonds (1 er janvier 2000), n'ont pas été compensées par l'État. Ces montants s'élèvent à 594 millions d'euros pour le RDS et 118 millions d'euros pour le dispositif Aubry I ;

- comptabilisées en janvier 2001 et correspondant essentiellement aux exonérations de décembre 2000 (ou du quatrième trimestre pour les employeurs de moins de dix salariés), pour les mesures d'allégement dues à la réduction du temps de travail (ARTT - Robien) et d'exonération d'allocation non mises à la charge du FOREC compte tenu des modalités de la date d'entrée de ces mesures dans le champ du fonds, n'ont, de la même façon, pas été compensées par l'État. Ces montants s'élèvent à 45,9 millions d'euros pour l'ARTT et 12,9 millions d'euros au titres d'autres mesures.

3. Un scénario de suppression vertueuse

Dès l'an dernier, votre rapporteur avait, dans son rapport, dressé un tableau des deux solutions de suppression du FOREC dont il rappelle ici la teneur :

La suppression « vertueuse » du FOREC

Elle consisterait à inscrire ses recettes et ses dépenses au budget de l'Etat, c'est-à-dire à fondre ses recettes dans la masse des impôts et taxes et à inscrire les dotations budgétaires correspondantes à la compensation des différentes exonérations dans les dépenses du budget de l'Etat, comme cela était le cas avant la création du FOREC.

Cette solution pose un problème de masses financières (gonflement des dépenses de l'Etat d'environ 16 milliards d'euros), même si les soldes restent inchangés. Elle soulève également une interrogation quant à la cohérence de la répartition de certains impôts et taxes entre l'Etat et la sécurité sociale, puisque les droits de consommation sur les tabacs et les alcools sont des recettes importantes du FOREC. Or, il apparaît logique que ces recettes, qui obéissent à une logique de santé publique et qui demeurent dissuasives, restent affectées sinon à la sécurité sociale, du moins à la « sphère sociale ».

La suppression « dangereuse » du FOREC

Elle consisterait à dissoudre le FOREC et à affecter ses recettes directement aux différentes caisses et régimes concernés par les exonérations de cotisations.

En effet, le défaut du FOREC, qui tient à l'impossible ajustement annuel des recettes aux dépenses, serait ainsi accentué (et même multiplié par le nombre de caisses), ce qui rendrait le suivi de la compensation des exonérations à chaque caisse extrêmement difficile. Le contrôle du respect, par l'Etat, de l'obligation posée par la « loi Veil » de 1994, deviendrait alors irréalisable.

Le projet de loi propose la mise en oeuvre de la première hypothèse, ce qui démontre la « mauvaise affaire » que constituait le FOREC pour la sécurité sociale.

L'ensemble des recettes du FOREC est versé au profit du budget général. Elles comprennent notamment les droits de consommation sur les tabacs que l'article 24 du projet de loi de finances propose de répartir de façon à :

- affecter, conformément à l'engagement du Gouvernement, l'ensemble du produit de l'augmentation de la fiscalité sur le tabac à la CNAMTS ;

- figer le montant de ces droits affectés à l'État au niveau du montant dont bénéficiait le FOREC (en 2003, 7,3 milliards d'euros).

Ce tableau de réaffectation constitue en réalité une opération de « dégagement » du BAPSA, ce dernier bénéficiant de la moitié des droits - 50,16 % + 0,31 % du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FIPSA) - en contrepartie d'une rétrocession à l'État des recettes de TVA (4,6 milliards d'euros), du préciput sur les droits sur les alcools (19 millions d'euros) et de la disparition de sa subvention budgétaire d'équilibre (150 millions d'euros en 2003).

L'État procède donc à un échange de fiscalité sur le tabac contre des recettes de TVA.

Cette opération est-elle profitable à moyen et long termes pour la protection sociale agricole ? Les recettes de fiscalité sur le tabac ne croissent qu'en raison d'une augmentation massive de la pression fiscale (+ 20 % en 2003) qui, de fait, ne pourra se poursuivre indéfiniment, et sur une maîtrise de la contrebande aujourd'hui difficile à évaluer. A cet égard, les recettes de la TVA constituent sans doute une meilleure base de financement. L'échange entre une taxe, dont le produit a vocation à disparaître du fait de la baisse de la consommation résultant elle-même de la baisse de la fiscalité, contre une taxe croissante par nature (la TVA) constitue-t-il un marché équitable pour l'avenir ?

Le rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, François Goulard, précise pour sa part que, « globalement, la rebudgétisation du fonds se traduit par une charge nette, pour le budget de l'État, de 1,25 milliard d'euros. Cette charge n'est évidemment que très partiellement compensée par le versement en recettes non fiscales de 382 millions d'euros provenant du fonds de roulement du FOREC.

« Après 2004, le budget général devra supporter la charge croissante résultant de la différence de dynamique de l'assiette des impositions réaffectées au budget (soit 2 à 3 % par an), - à taux constant de ces différentes taxes -, et des allégements de charges sociales . Ainsi, selon le rapport général sur le projet de loi de finances pour 2004, l'impact de cet effort d'allégement de charges supplémentaires a d'ores et déjà été évalué à 3,2 milliards d'euros. »

Ce contrat laisse bien évidemment entendre quelle était la véritable motivation du montage FOREC, motivation rappelée par la Cour des comptes 10 ( * ) : « pour le ministère des finances du moins, la création du FOREC répondait aussi à l'idée qu'à l'avenir les taxes affectées pourraient se substituer à la logique du remboursement des exonérations - et donc à l'abandon du principe posé par la loi de 1994. Cette logique n'a finalement pas prévalu. Dès lors que le FOREC est resté dans une logique de remboursement, il n'apporte rien de plus par rapport au versement du montant des exonérations directement à l'ACOSS. »

Dans cette hypothèse, la sécurité sociale aurait supporté la déformation de la compensation entre le coût des allégements de cotisations plus dynamique que la progression des recettes censées la financer. Cette déformation François Goulard la constate à présent à l'envers. Cette opération « pour solde de tout compte » aurait abrogé, dans les faits, la règle de la compensation intégrale des exonérations de cotisations décidées par l'État, à laquelle votre commission demeure très attachée.

Les dépenses du FOREC sont, en conséquence, réintégrées au sein du budget général. Le chapitre 44-77 du titre IV du budget du ministère du travail récapitule les 18,204 milliards d'euros d'exonérations compensées.

Compensation de l'exonération des cotisations sociales

en millions d'euros

Exonération de cotisations sociales au titre de l'incitation à la réduction du temps de travail (loi du 13 juin 1998)

890,00

Exonération de cotisations sociales au titre de l'incitation à l'aménagement et à la réduction du temps de travail (loi du 11 juin 1996)

408,00

Réduction dégressive des cotisations sociales patronales sur les bas salaires (loi du 17 janvier 2003) (nouveau)

15.792,00

Exonération de cotisations sociales pour l'embauche du deuxième au cinquantième salarié dans les entreprises situées en zone de revitalisation rurale ou de redynamisation urbaine

27,05

Exonération de cotisations sociales en faveur des cinquante premiers salariés des entreprises situées dans les zones franches

294,94

Exonération de cotisations sociales au titre de la zone franche de Corse

10,06

Exonération de cotisations sociales des correspondants locaux de la presse régionale ou départementale

0,09

Exonération de cotisations sociales au profit des secteurs de production dans les DOM

668,65

Exonération de cotisations sociales au titre de l'article L. 241-14 du code de la sécurité sociale

104,20

Exonération de cotisations d'allocations familiales

10,00

Total

18.204,99

4. L'enjeu essentiel : bien sortir du FOREC

A bien des égards, le suppression du FOREC constitue la suppression d'un symbole. Mais cette suppression ne garantit pas à elle seule le respect de la lettre et de l'esprit de la règle posant le principe de compensation intégrale. Aussi est-il nécessaire de bien sortir du FOREC en neutralisant trois difficultés d'importance décroissante.

La neutralité de trésorerie pour l'ACOSS des versements du budget

Géré par le FSV, le FOREC verse présentement le produit des sommes destinées à la compensation par décade.

Ce rythme rapproché évite que le FOREC ne réalise des produits financiers en plaçant ces montants, et qu'en miroir, la sécurité sociale ne supporte « par découvert » le décalage des versements.

La budgétisation du FOREC réintroduit ce risque. Il n'existe pas de règle stricte fixant les rythmes de versement entre l'ACOSS et l'État. Tout au plus l'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale prévoit le principe que les relations financières entre l'État et la sécurité sociale sont neutres. Mis en oeuvre par convention, ce principe est relatif et contingent.

Ainsi, certaines petites « lignes », de quelques millions d'euros, font l'objet d'un versement annuel unique.

Les modalités de versement des compensations de l'ACOSS devront être fixées par révision de la convention précitée.

Ces modalités ne devront en aucun cas être moins favorables pour la sécurité sociale que celles prévues dans le cadre de ses relations avec le FOREC.

En effet, un rythme, par exemple mensuel, de versement entraînerait pour un chapitre budgétaire de près de 20 milliards d'euros, une forte charge de trésorerie pour la sécurité sociale.

Aussi votre commission vous propose d'encadrer strictement la convention État-ACOSS afin que celle-ci ne puisse prévoir, dans le cadre du remboursement des allégements, des conditions de trésorerie moins favorables que celles en vigueur avec le FOREC, soit le versement par décade.

Les risques de la période de transition

Le projet de loi prévoit que le FOREC cesse son activité le 1 er janvier 2004.

Lors de son audition, M. Michel Laroque, président du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), a souligné « qu'en l'état, le projet de loi dispose que la liquidation sera effective au 1 er janvier 2004 sans préciser si cette date inclut une période complémentaire d'inventaire ».

Votre rapporteur a interrogé l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) pour connaître les conséquences des deux interprétations possibles. M. Pierre Burban, président de son conseil d'administration, a apporté une réponse dont voici la teneur :

L'hypothèse selon laquelle le FOREC assurerait la gestion des exonérations relatives à l'exercice 2003 en droits constatés conduit à la situation suivante.

A ce stade, les prévisions de versement par le FOREC au titre de la compensation des allégements de cotisations sociales s'établissent pour 2003 à 15,171 milliards d'euros alors que les allégements de cotisations entrant dans le champ du FOREC s'élèveraient à 15,205 milliards d'euros. Les recettes correspondent aux versements du FOREC de janvier 2003 à celui du 4 janvier 2004 inclus, les charges portent sur les périodes d'emploi de janvier à décembre 2003 (y compris les montants comptabilisés en janvier 2004). Au final, le FOREC devrait être redevable auprès du régime général de 25 millions d'euros.

Dans ses prévisions, l'ACOSS a estimé que le FOREC lui verserait ses encaissements de la dernière décade 2003 le 5 janvier 2004 et que l'État assurerait les versements au titre de l'année 2004 à compter du 15 janvier. A cette fin, une proposition de modification de la convention État-ACOSS visant à assurer la neutralité en trésorerie (article L. 139-2 du code de la sécurité sociale) des versements de l'État au titre des exonérations générales a été transmise aux tutelles au cours du mois d'octobre. Les régularisations du FOREC au titre de l'année 2003 et années antérieures seraient assurées par le service de liquidation et versées à la fin du premier trimestre 2004.

Cette hypothèse présente l'avantage de maintenir des règles de gestion homogènes sur l'ensemble des exercices depuis 2001.

Si la date d'effet devait être interprétée de façon plus stricte, il y aurait un risque que le FOREC n'assume plus les exonérations de décembre et certaines exonérations du quatrième trimestre 2003 (comptabilisées en janvier 2004) qui seraient prises en charge par l'État. La régularisation annuelle du FOREC au titre de 2003 pourrait être arrêtée à décembre 2003 et calculée sur onze mois de référence. Dans cette hypothèse, les versements de l'État devraient être anticipés dès le 1 er janvier 2004.

La mise en place du FOREC s'était faite dans ces conditions et avait abouti à la constitution d'une créance de l'ACOSS sur l'État que ce dernier n'a toujours pas remboursée à ce jour.

Bien qu'inclinant à croire que le principe des droits constatés régissant les comptes sociaux depuis 2001 écarte cette hypothèse, votre rapporteur propose une précision du dispositif levant explicitement toute ambiguïté.

Le solde cumulé du FOREC

Interrogé par votre rapporteur, M. Michel Laroque, président du FOREC, a précisé que ce fonds, malgré un exercice 2003 fortement déficitaire, devrait présenter un solde cumulé positif de 267 millions d'euros 11 ( * ) au moment de son abrogation.

Le projet de loi de finances précise que les biens, droits et obligations du FOREC sont transmis à l'État, le solde figurant bien évidemment parmi ces droits.

Demeureraient deux catégories de dettes :

- celles dues au titre de l'exercice 2000, où le FOREC était créé par la loi mais n'était pas constitué (- 2,4 milliards d'euros). Cette dette, que le précédent gouvernement avait prétendu annuler, est remboursée en deux échéances par la CADES 12 ( * ) ;

- celles dues, éventuellement, au titre des exonérations de décembre 1999 n'ayant pas été prises en charge par l'État et non rattachées au FOREC, pour plus de 700 millions d'euros.

Ces sommes attendent un remboursement de l'État du fait de l'application de la compensation intégrale des exonérations de compensation par l'État.

Est-il légitime de retourner un solde à l'État au titre du FOREC, qui réduit artificiellement le déficit de l'État et majore celui de la sécurité sociale ?

Votre commission ne le pense pas. Aussi propose-t-elle une opération au demeurant parfaitement neutre au regard des critères de Masstricht, visant à préaffecter le solde résiduel du FOREC à la réduction des dettes de l'État à l'égard de l'ACOSS.

B. LA CLARIFICATION FINANCIÈRE EN RESTE AUX FONDATIONS

1. Les risques de confusion entre santé publique et assurance maladie

Le champ des dépenses de l'assurance maladie et, en particulier de l'ONDAM, s'est révélé particulièrement mouvant au cours de ces dernières années.

En effet, plusieurs mesures décidées, soit dans les projets de loi de financement de la sécurité sociale soit dans les projets de loi de finances, ont abouti à transférer la charge financière de dépenses inscrites au sein du budget de l'État vers l'assurance maladie.

Les frontières théoriques entre santé publique et assurance maladie pourraient apparaître clairement définies. La caisse nationale d'assurance maladie a pour objet de prendre en charge les prestations de soins dont bénéficient ses assurés (honoraires médicaux, médicaments, frais d'hospitalisation, etc.). Théoriquement, le budget de la santé devrait pour sa part être dévolu à des actions de solidarité (couverture maladie des personnes moins favorisées) ou de prévention en matière de santé publique.

Toutefois, ce partage n'a jamais été véritablement net, puisqu'au terme des dispositions prévues par le code de la sécurité sociale, la CNAM peut mener des actions de prévention au bénéfice de ces assurés.

Par ailleurs, en 1999, la branche maladie du régime général fut « invitée » à participer à la prise en charge du risque maladie des personnes non couvertes, et la CNAM ne fut alors que très partiellement indemnisée par la mise en place du volet de base de la couverture maladie universelle.

A cet égard, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 s'est inscrite dans une certaine continuité, puisqu'un certain nombre de dispositifs furent transférés du budget de l'État vers la sécurité sociale. Le montant de ces transferts nets s'élève à un peu plus de 600 millions d'euros. Ainsi, pour un petit montant, les centres de soins spécialisés aux toxicomanes sont désormais financés par l'enveloppe médico-sociale dédiée aux personnes handicapées de même que les prestations relatives à l'interruption volontaire de grossesse ont été financées par l'assurance maladie.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, en miroir avec les dispositions prévues par le projet de loi de finances, participe à cette incertitude des différents champs. Il propose en effet d'une part, que l'assurance maladie finance dans sa quasi-totalité la prévention du bioterrorisme (155 millions d'euros) d'autre part, qu'elle supporte l'aléa financier lié au volet complémentaire de la couverture maladie universelle (140 millions d'euros).

Il semblerait pour le moins nécessaire qu'une réflexion sérieuse s'engage au sein du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie afin d'établir une répartition claire des missions de chacun.

Cette réflexion apparaît d'autant plus nécessaire que si, à l'avenir, l'assurance maladie devait prendre de manière croissante en charge ce type de missions, il faudrait sans doute adapter les règles constitutionnelles régissant les lois de financement. En effet, les mesures précitées posent d'elles-mêmes quelques interrogations de cet ordre 13 ( * ) . Aussi, votre rapporteur formule la proposition qu'elles puissent être suspendues, dans l'attente des résultats de la réflexion menée par le Haut conseil sur ce sujet.

2. « L'onde de choc » du FOREC continue de produire ses effets

Les « montages complexes »

Comme il fut rappelé ci-dessus, le FOREC fut à l'origine d'un écheveau de tuyauteries entre les différentes caisses du régime général et les fonds concourant au financement de la protection sociale et de l'État.

L'an dernier, votre commission avait insisté pour que soit étudiée la possibilité de démêler les missions et les moyens dévolus respectivement à la CNAF, au FSV et à l'Etat 14 ( * ) .

Les propositions de la commission des Affaires sociales
au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003

Aujourd'hui

Proposition CAS

ETAT

Dette AGIRC/ARRCO

ETAT

FSV

Majorations pensions pour enfants

FSV

CNAF

Allocation de parent isolé

CNAF

La proposition alors formulée présentait au demeurant l'avantage d'être neutre financièrement pour l'ensemble des parties.

Des solutions ont pu être évoquées dans le cadre d'un groupe de travail mis en place par le ministre de la santé, relatif à la clarification des relations financières entre l'État et la sécurité sociale sans toutefois trouver de réalisations concrètes. Pour le moment, et votre rapporteur le regrette, ce montage complexe dû à la mise en place du FOREC n'a pu faire l'objet d'une « opération de dégagement ».

Le partage des recettes Etat - sécurité sociale

L'une des difficultés essentielles posée par le FOREC consistait à partager entre l'État et la sécurité sociale un catalogue de taxes sans cohérence particulière et à ce que leur discussion respective, en lois de finances et en lois de financement, aboutissait à ce que parfois, le montant des recettes affectées à la sécurité sociale se trouvât, une fois le vote de la loi de financement de la sécurité sociale acquis, modifié par voie d'amendement au projet de loi de finances pour l'année suivante ou au collectif de l'année en cours.

Saisi à l'initiative du Sénat, le Conseil constitutionnel avait censuré une disposition de la loi de finances rectificative pour 2000 modifiant la part du produit de la taxe sur les tabacs affectée au FOREC, au motif que « ce transfert, en raison de son ampleur, modifierait de façon significative les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale pour l'année 2000, alors qu'aucune loi de financement de la sécurité sociale n'a pris en compte cette incidence et qu'aucune ne pourra plus le faire d'ici à la fin de l'exercice ».

La suppression du FOREC ne règle pas cette difficulté et demeurent, à ce titre, les risques de mauvaises articulations entre les deux budgets.

L'article 24 du projet de loi de finances prévoit la réaffectation des droits sur les tabacs précédemment dévolus au FOREC. Ceux-ci sont de nouveau partagés entre la sécurité sociale (CNAMTS, protection sociale agricole) et l'État.

Bien plus, du fait de l'application des dispositions de la réforme de la loi organique relative aux lois de finances, la répartition des recettes partagées entre l'État et d'autres personnes morales doit être effectuée par le budget général.

Cette disposition, au demeurant généreuse dans son inspiration puisqu'elle vise à améliorer la lisibilité des finances publiques, peut présenter des effets particulièrement pervers.

Ainsi, en 2004, les bases et les taux de la taxe sur les tabacs de même que la majorité du produit affecté à la protection sociale, se trouvent fixés en loi de financement, tandis que sa répartition entre ces mêmes organismes est opérée dans le projet de loi de finances.

Si ce dernier, in fine , décidait d'une répartition différente du produit des taxes sur les tabacs que celle implicitement prévue par les prévisions de recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, ceux-ci deviendraient insincères.

Cette difficulté de « montant » aboutit véritablement à ce qu'aucune discussion sur l'opportunité des modifications (taux ou affectations) de la fiscalité du tabac ne soit véritablement possible, du fait des rétroactions potentielles d'un texte sur l'autre, sauf au prix de l'inconstitutionnalité de l'un des deux textes.

La question du refinancement du FSV

L'une des principales conséquences de l'abondement non orthodoxe du FOREC, mais également d'autres mesures dont l'allocation personnalisée d'autonomie, fut de fragiliser profondément la situation financière du fonds de solidarité vieillesse (FSV) en le privant d'une part, de CSG, d'autre part, des droits sur les alcools ou de la taxe de prévoyance dont il avait été doté.

Après deux années de déficit historique, dont on ignore comptablement comment il a pu être pris en charge 15 ( * ) , les équilibres budgétaires prévoient en 2004 un solde bénéficiaire de 684 millions d'euros.

Outre deux recettes de poche (fonds consignés au titre du compte de la compensation, constitutions sur les préretraites) que la loi pour les retraites lui affecte, le FSV bénéficie en 2004 d'un apport supplémentaire de contribution sociale de solidarité sur les sociétés (C3S) dû pour l'essentiel à un raccourcissement du circuit de versement de celle-ci au fonds.

Si l'on peut légitimement se féliciter d'un retour à l'excédent en 2004, il ne saurait masquer qu'il repose à bien des égards sur une solution ponctuelle (l'effet de l'accélération du reversement de la C3S ne peut en toute évidence que se reproduire chaque année) et ne résout en définitive pas la fragilisation financière considérable dont ce fonds a été l'objet.

3. La refonte des règles de remboursement des services rendus reste à l'état d'un rapport

Les rapports entre l'État et la sécurité sociale sont tissés par les services étroits que se rendent les deux parties dans les domaines de compétences qui leur sont propres. La sécurité sociale verse pour le compte de l'État des prestations (revenu minimum d'insertion, allocation adulte handicapé, aides au logement), de même que l'État procède à des recouvrements de recettes pour le compte de la sécurité sociale.

Ces services donnent parfois lieu à une rémunération, calculée de manière erratique. En réalité, l'État rembourse imparfaitement les frais liés à la production de ces services au motif que les organismes sociaux - dont la CNAF - ne disposent pas de comptabilité analytique.

Le présent Gouvernement a marqué sa volonté d'améliorer cette situation, qui participe de l'inépuisable polémique « sur les charges indues ».

Par une lettre en date du 16 septembre 2002, les ministres en charge des finances et de la sécurité sociale ont confié une mission d'enquête aux inspections générales des affaires sociales (IGAS) et des finances (IGF), sur ce sujet.

Cette étude formule d'importantes propositions qui n'ont pourtant, semble-t-il, pas encore été mises en oeuvre.

La résolution de ces difficultés demeure essentielle. La nécessité de mettre en place, du fait de la décentralisation de certaines prestations sociales (RMI, APA), des règles transparentes et équitables de relations financières à l'heure où se présentent pour la sécurité sociale de nouveaux partenaires majeurs, les collectivités territoriales, prend toute son importance.

DEUXIÈME PARTIE
-
ASSURANCE MALADIE

I. ASSURANCE MALADIE : CRÉDIBILISER ET STABILISER

L'ONDAM est la somme des dépenses des régimes obligatoires de base, dont sont exclus les prestations invalidité-décès, les rentes d'accidents du travail, les indemnités journalières maternité, les dépenses d'action sanitaire et sociale, les prestations extralégales, les dépenses de gestion administrative et, au titre des divers fonds, les transferts et les frais financiers, et à laquelle sont ajoutées les dépenses des DOM.

Il se décompose traditionnellement en quatre agrégats :

- l'objectif « soins de ville », qui intègre les honoraires, les prescriptions et les indemnités journalières maladie ;

- l'objectif « établissements sanitaires » qui correspond à l'activité des établissements sous dotation globale, ainsi que les hôpitaux militaires ;

- l'objectif « établissements médico-sociaux », qui s'applique à l'activité des établissements destinés aux personnes âgées ou handicapées et aux enfants inadaptés ;

- l'objectif « cliniques privées », qui s'impose à l'activité des établissements qu'ils soient sous objectif quantifié national (OQN) ou qu'ils n'entrent pas dans le champ de cet OQN.

Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, l'ONDAM comprend en outre une cinquième enveloppe, destinée au financement des réseaux de santé (honoraires des professionnels de santé, dépenses de laboratoires, frais de transport des malades).

A. UNE BRANCHE MALADIE FRAGILISÉE

Dès le printemps dernier, la Commission des comptes de la sécurité sociale faisait le constat d'un retour de la sécurité sociale à une situation de « profond déficit » et surtout d'un déficit de l'assurance maladie « le plus élevé jamais enregistré ».

Cette situation n'est malheureusement pas pour surprendre votre commission qui, tout au long de la précédente législature, s'était inquiétée de l'extrême fragilité des comptes sociaux et du déficit persistant de l'assurance maladie.

1. La confirmation d'une situation financière dégradée

De fait, le régime général affiche pour 2003 un déficit global de 8,9 milliards d'euros, entièrement imputable à la branche assurance maladie dont les pertes s'élèvent à 10,6 milliards d'euros et portent son déficit cumulé à plus de 20 milliards d'euros pour la période 1999-2003.

Résultats du régime général

(en milliards d'euros)

1999

2000

2001

2002

2003 (p)

Maladie

- 0,7

- 1,6

- 2,1

- 6,1

- 10,6

Accidents du travail

0,2

0,4

0,0

0,0

- 0,1

Vieillesse

0,8

0,5

1,5

1,7

1,5

Famille

0,2

1,5

1,7

1,0

0,4

TOTAL

0,5

0,7

1,2

- 3,4

- 8,9

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale - septembre 2003

Le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale souligne ainsi « une caractéristique remarquable des dernières années, qui s'accentue en 2002-2003 : la concentration de la totalité du déficit du régime général sur la branche assurance maladie ». Il attribue la dégradation des comptes à un « effet de ciseaux très prononcé » et observe, en 2002, comme en 2003, un différentiel de croissance entre les dépenses et les recettes de l'ordre de deux points.

Ce différentiel entre des dépenses qui continuent globalement à croître rapidement et des recettes dont la progression ralentit sous l'effet du retournement conjoncturel, s'appliquant à des masses financières de l'ordre de 250 milliards d'euros, « conduit rapidement à des déficits importants qui se creusent d'année en année tant que le sens de l'écart n'a pas été inversé » 16 ( * ) .

La Commission des comptes note ainsi qu'« après deux années de croissance exceptionnelle (supérieure à 6 %), la masse salariale (sur laquelle deux tiers des recettes du régime général sont assises) connaît en 2002 une progression limitée estimée à 3,3 % », la prévision actuelle pour 2003 s'établissant à 2,7 %. Il en résulte un tassement des produits des cotisations et de la CSG.

Pour ce qui concerne la CSG sur les revenus du patrimoine et des placements, qui constitue environ 10 % de son produit total, elle affiche en 2002 une diminution de 7 % par rapport à 2001 (- 500 millions d'euros) et devrait se maintenir à ce bas niveau en 2003. Cette évolution est naturellement imputable à la chute des cours boursiers qui ont entraîné une diminution importante des plus-values. On peut y voir les limites d'un financement de la protection sociale par la taxation des opérations financières.

Au total, la dégradation du solde du régime général en 2003, par rapport à la prévision associée à la loi de financement, serait supérieure à 4 milliards d'euros, dont 3 milliards résulteraient de moins-values de recettes et 1 milliard de l'évolution des dépenses principalement du fait de l'assurance maladie.

Il reste que, comme le souligne la Commission des comptes, le déficit de l'assurance maladie représente aujourd'hui 9 % des recettes de la branche ou encore « plus de deux fois les honoraires remboursés aux généralistes et plus de 60 % des dépenses de médicaments prises en charge par la caisse ».

Dans cette situation, l'exécution de l'ONDAM 2003 apparaît paradoxale.

2. Le paradoxe de l'ONDAM 2003

Votre rapporteur n'a jamais manqué de regretter que seul le premier ONDAM de l'histoire parlementaire, celui de 1997, ait été respecté. En effet, non seulement cet objectif a été systématiquement dépassé depuis 1998, mais encore son dépassement est allé croissant sur la période jusqu'en 2002.

Montant de l'ONDAM voté et réalisation entre 1997 et 2003

(en milliards d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004*

ONDAM voté

91,5

93,6

96,0

100,4

105,7

112,8

123,5

129,7

ONDAM réalisé

91,4

95,1

97,6

103,0

108,8

116,7

124,7

Dépassement

- 0,1

1,5

1,6

2,7

3,1

3,9

1,2

*prévisions

Or, comme le soulignait le Directeur général de l'ANAES 17 ( * ) , la recherche de crédibilité est fondamentale à la fois pour des raisons financières et pour mesurer le degré d'utilité accordé à l'ONDAM :

« Le fait que l'ONDAM soit voté chaque année et qu'il soit dépassé dans des proportions importantes a trois conséquences. Tout d'abord, cela décrédibilise ceux qui le votent. Ensuite, cela décrédibilise ceux qui le proposent. Enfin, les acteurs professionnels sont sceptiques quant à leur engagement dans une démarche quelconque de maîtrise. Ils ont le sentiment que la sanction au dérapage sera directement fonction de la capacité de pression du groupe de professionnels concernés. Donner l'impression que les dérapages, les abondements et les rebasages se règlent dans la rue, n'est pas une bonne manière de répondre à l'espoir de voir un débat politique sur le sujet de la santé. »

A cet égard, l'ONDAM 2003 fait figure d'exception relative, car s'il est vrai qu'il porte le déficit de l'assurance maladie à des sommets jamais atteints, il est aussi l'objectif le mieux exécuté depuis 1997 : la sous-estimation initiale des dépenses n'a été que de 1,1 % ; elle s'élevait à 3,2 % en 2002.

Montant de l'ONDAM voté et réalisation entre 1997 et 2003

(en pourcentage)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

ONDAM voté

1,7

2,4

1,0

2,9

2,6

4,0

5,3

4,0

ONDAM réalisé

1,5

4,0

2,6

5,6

5,6

7,2

6,4

Il n'est d'ailleurs pas inutile de préciser que, en 2003, sur les 1,2 milliard d'euros de dépassement de l'ONDAM, la moitié correspond en fait à un changement de base ayant affecté cet agrégat, notamment par l'inclusion de dépenses précédemment à la charge de l'État. Les comparaisons annuelles ne s'en trouvent pas facilitées.

Selon les informations disponibles, les principaux écarts entre les prévisions votées et l'exécution constatée sont les suivants :

- l'enveloppe de soins de ville a été dépassée de 870 millions. La consommation des soins ambulatoires s'est poursuivie à un rythme soutenu en 2003, avec une croissance de 7,7 %. Dans cette évolution, les mesures de revalorisation tarifaires accordées aux professionnels de santé en 2002 ont produit un effet report évalué à 350 millions d'euros.

Il convient toutefois de souligner que le taux de progression des dépenses de soins en 2003 marque une légère décélération par rapport à l'augmentation 2002 qui s'établissait à 8,3 %.

- l'enveloppe hospitalière croît de 80 millions d'euros, celle des cliniques privées (objectif quantifié national) de 191 millions d'euros et l'enveloppe médico-sociale de 45 millions d'euros. En 2002, les dépenses au titre des établissements publics (dotation globale) avaient crû de 5,7 %, les dépenses des cliniques de 5,9 % et les dépenses au titre des établissements pour personnes handicapées de 8,8 %.

Objectif 2003

Prévisions tous régimes

Montant

Evolution

Prévisions tous régimes

Dépassement

Taux d'évolution

Obj./Base 2002
(a)

Obj./Réal.2002
(b)

ONDAM métropole

120,46

5,3 %

5,4 %

121,64

1,18

6,4 %

Soins de ville

57,76

5,6 %

6,1 %

58,63

0,87

6,4 %

Dépenses déléguées

26,91

7,7 %

Autres soins de ville

31,72

7,6 %

Etablissements

62,66

4,9 %

4,6 %

62,97

0,31

5,2 %

Etablissements sanitaires publics

46,07

4,6 %

4,4 %

46,15

0,08

4,6 %

Etablissements sous DG

45,75

4,6 %

4,9 %

45,75

0,00

4,9 %

Cliniques privées

7,54

4,8 %

3,5 %

7,73

0,19

6,1 %

Etablissements médico-sociaux

9,04

6,7 %

7,0 %

9,09

0,05

7,6 %

Personnes handicapées

5,85

5,8 %

6,1 %

5,85

0,00

6,1 %

Personnes âgées

3,19

8,2 %

8,7 %

3,23

0,05

10,3 %

Réseaux

0,05

0,05

0,00

ns

Prestations des DOM

2,85

6,5 %

4,8 %

2,87

0,02

5,5 %

Ressortissants français à l'étranger

0,21

0,02 %

- 2,5 %

0,21

0,00

- 2,5 %

ONDAM France entière

123,52

5,3 %

5,3 %

124,72

1,20

6,4 %

Lecture - La colonne (a) indique les objectifs de taux d'évolution des différents postes de dépenses par rapport à la base 2002 telle qu'elle était estimée par la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2002. Les objectifs de chaque sous-enveloppe étant fixés en valeur et non en taux d'évolution, la réévaluation de la réalisation 2002 (compte tenu des dépenses effectives de la fin de l'année 2002) modifie les taux de croissance qui doivent respecter chaque sous-enveloppe pour atteindre l'objectif en 2003 : ces taux de croissance modifiés sont indiqués dans la colonne (b).

En définitive, l'exécution de l'ONDAM 2003 témoigne d'un ralentissement du taux de progression des dépenses de santé réel, mais dans un contexte de forte dégradation des comptes de l'assurance maladie qui interdit d'accorder le moindre satisfecit à la meilleure exécution enregistrée depuis 1997.

B. UN ONDAM STABILISÉ ET MÉDICALISÉ

A l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, votre rapporteur avait approuvé l'effort entrepris par le Gouvernement pour médicaliser et crédibiliser l'ONDAM. En constatant la poursuite de cette tendance, il ne peut donc qu'émettre le même avis favorable cette année, malgré l'ampleur des difficultés financières à laquelle doit faire face l'assurance maladie.

1. Un ONDAM de stabilisation pour 2004

La première présentation de l'ONDAM 2004 a été faite par la Commission des comptes de la sécurité sociale, lors de sa réunion du 23 septembre 2003, sur la base d'une prévision tendancielle d'évolution de 5,5 %.

Le rapport publié à cette occasion indiquait que cette prévision est réalisée : « à partir de la poursuite des tendances de consommation en volume et intègre l'effet report des mesures décidées les années précédentes (revalorisations tarifaires, création du tarif forfaitaire de remboursement, baisse du taux de remboursement des médicaments à service médical rendu faible et déremboursement échelonné des médicament à service médical rendu insuffisant) ».

A la différence des années précédentes, cette première projection établie par la Commission des comptes de la sécurité sociale ne correspond pas au montant de l'ONDAM inscrit à l'article 44 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, car les mesures nouvelles proposées ensuite par le Gouvernement pour contenir le volume du déficit n'ont pas été intégrées dans son rapport.

Ces mesures nouvelles consistent en plusieurs dispositifs dont le fil directeur demeure la volonté de rationaliser et de médicaliser les dépenses.

Mesures nouvelles

(en millions d'euros)

Régime général

Autres régimes de base

Total des dépenses de la branche maladie

Clarification des règles d'exonération du ticket modérateur pour les actes cotés en K50
(mesure réglementaire)

- 530

- 70

- 600

Augmentation du forfait hospitalier à 13 euros (mesure réglementaire)

- 159

- 21

- 180

Baisse du remboursement des médicaments homéopathiques
(mesure réglementaire)

- 62

- 8

- 70

Diminution de la marge des grossistes-répartiteurs
(mesure réglementaire)

- 88

- 12

- 100

Economies dans le domaine du médicament et des dispositifs médicaux (mesures réglementaires)

- 106

- 14

- 120

Economies de gestion réalisées par les caisses
(mise en oeuvre dans la convention d'objectifs et de gestion)

- 60

0

- 60

Mesures de maîtrise médicalisée des dépenses ambulatoires
(art. 35 à 37 plfss)

- 706

- 94

- 800

Augmentation des dépenses prises en charge au titre de la CMU complémentaire (art. 82 plf)

+ 140

0

+ 140

Total

- 1 571

- 219

- 1 790

Cette énumération fait apparaître que les mesures d'ordre réglementaire auront un impact financier important sur les conditions d'exécution de l'ONDAM 2004 et plus particulièrement trois d'entre elles :

- l'exonération du ticket modérateur pour les actes cotés en K50 .

Cette décision résulte de l'observation suivant laquelle les dépenses de soins de ville exonérées de ticket modérateur ont augmenté de 11,2 % en 2002, soit deux fois plus vite que les dépenses non exonérées. Un tel différentiel conduit à s'interroger sur les règles actuelles de l'attribution des exonérations et notamment celles liées à un acte ou une série d'actes dont le coefficient global est égal ou supérieur à 50.

La mesure proposée vise à clarifier le champ de l'exonération en la ciblant sur les actes les plus coûteux, c'est-à-dire les actes dont la cotation est supérieure à 50 et les soins réalisés dans les seules périodes d'hospitalisation au cours de laquelle l'acte est réalisé ou consécutif à cette hospitalisation, lorsque l'acte initial est réalisé à l'hôpital ;

- la diminution de la marge des grossistes-répartiteurs .

La marge des établissements de vente en gros de médicaments est réglementée par arrêté. Elle est dégressive et correspond à 10,74 % du prix fabricant hors taxe pour la partie du prix de base comprise entre 0 et 22,90 euros et à 6 % pour la fraction supérieure.

La nouvelle mesure modifie les taux de rémunération et crée une troisième tranche, assortie d'un taux de rémunération moindre. Elle devrait rapporter à l'assurance maladie une économie de 100 millions d'euros ;

- le déremboursement des médicaments homéopathiques .

Cette mesure s'inscrit dans la démarche générale du Gouvernement conduite en matière de médicament.

Le plan d'économies ainsi établi permet au Gouvernement de comprimer les dépenses et de ramener l'ONDAM de son taux spontané, 5,5 %, à celui de 4 %, calculé à partir de l'objectif 2003 rebasé tel qu'il figure à l'article 43 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

Au total et compte tenu des mesures prévues par le Gouvernement, la progression des différentes enveloppes constitutives de l'ONDAM serait la suivante :

- + 3,2 % pour la médecine de ville ;

- + 4,2 % pour l'hôpital ;

- + 10 % pour les personnes âgées ;

- + 6 % pour le handicap.

2. Une médicalisation de l'ONDAM qui se poursuit

Outre les mesures prises pour ralentir la progression tendancielle de l'ONDAM 2004 et réduire les déficits, le Gouvernement a réaffirmé son ambition de mettre en place une maîtrise médicalisée des dépenses de santé, conformément aux axes tracés par le Président de la République devant le congrès de la Mutualité française en juin dernier.

A cet effet, il a prévu une série de mesures spécifiques aux soins de ville qui visent, en renforçant l'efficacité médicale des actes, à permettre un meilleur contrôle des dépenses.

Cette même conviction est partagée par le Directeur général de l'ANAES, qui, dans son rapport relatif à la médicalisation de l'ONDAM 18 ( * ) , a identifié les leviers qui pouvaient être actionnés pour conduire cette médicalisation :

« Ces leviers sont au nombre de trois : la coordination des soins, la responsabilité des acteurs, l'évaluation des pratiques professionnelles et des prestations.

Le Gouvernement s'est résolument engagé dans cette voie en se fixant l'objectif ambitieux, mais réaliste, de réduire de 800 millions d'euros les dépenses consacrées aux soins de ville. Ces économies peuvent se décomposer de la manière suivante :

Economies liées à la maîtrise médicalisée

800

Dont :

Baisse de 1 % de la croissance du volume des actes [objectif de dépenses déléguées (ODD)]
(soit un ODD à + 4,9 % avant autres mesures d'économies)

260

Dont :

Baisse de 3 % de la croissance des exonérations de ticket modérateur au titre de l'affection longue durée (ALD)

105

Exclusion des actes non remboursables (certificats médicaux...)

35

Engagements de bonnes pratiques, AcBUS (0,5 % des actes)

120

Baisse de 1,6 % de la croissance des prescriptions
(soit des prescriptions à + 5 % avant autres mesures d'économies)

540

Dont :

Baisse de 3 % de la croissance des exonérations de ticket modérateur au titre de l'ALD

195

Baisse de 2 % de la croissance des indemnités journalières
(croissance de 10 % en 2002)

160

Progression des génériques hors tarif forfaitaire de responsabilité

35

Réduction des prescriptions inutiles (0,5 % des prescriptions)

150

(en millions d'euros)

Ces mesures font apparaître que les deux voies explorées pour la maîtrise médicalisée des soins de ville sont, d'une part, une réduction de la croissance du volume des actes (- 1 %), d'autre part, une réduction de la croissance des prescriptions (- 1,6 %).

Ces actions s'accompagnent du renforcement de l'efficacité médicale des actes par le développement des relations conventionnelles (AcBUS, contrat de bonne pratique) et d'une rationalisation de certains dispositifs de prise en charge (affections de longue durée, prescriptions inutiles).

Parallèlement à ces actions dans le domaine des soins de ville, le Gouvernement engagera, dès 2004, la réforme du mode de financement hospitalier par l'introduction d'une tarification à l'activité qui touchera l'ensemble des établissements de santé et dont la mise en oeuvre se déroulera jusqu'en 2012. Ce faisant, le Gouvernement insuffle des modalités d'allocation de ressources totalement nouvelles à l'hôpital qui devraient permettre de rendre plus efficaces les dépenses de santé engagées dans ce secteur.

Cette démarche de développement et de modernisation des outils de maîtrise médicalisée sera complétée par une refonte complète de la politique de santé publique, grâce au projet de loi actuellement en cours d'adoption en la matière et dont l'une des ambitions principales est le développement de la prévention.

Le passage à la tarification à l'activité dans les établissements de santé aura des conséquences sur la définition des futurs ONDAM.

Dès 2006, son découpage actuel sera modifié pour tenir compte des nouvelles règles d'imputation des dépenses dans les différents objectifs et enveloppes, créés à l'occasion de la mise en place de la tarification à l'activité.

Les dépenses correspondant aux dotations globales hospitalières et au champ de l'objectif quantifié national (OQN) seront éclatées en trois parties :

- un objectif de dépenses médecine-chirurgie-obstétrique (MCO), commun aux secteurs public et privé ;

- une enveloppe de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC), commune aux secteurs public et privé ;

- une enveloppe de dépenses hors MCO (soins de suite, rééducation et psychiatrie).

II. SOINS DE VILLE : MAÎTRISER ET RATIONALISER

Symbole du retour à la confiance et au dialogue entre l'ensemble des acteurs du système de santé, l'accord du 5 juin 2202 avec les médecins généralistes a été salué par une majorité de syndicats médicaux comme un texte exemplaire, tandis que la CNAMTS évoquait un compromis historique.

Cet accord était d'ailleurs conçu comme une première étape destinée à ramener les partenaires autour de la table afin de reprendre les négociations dans le cadre fixé par la loi du 6 mars 2002.

A. UN RETOUR PROGRESSIF À LA CONFIANCE

A la suite de ce premier accord, les professions de santé et l'assurance maladie ont recherché des moyens d'entente susceptibles de déterminer les obligations respectives des parties : la revalorisation des actes accordée aux professions de santé devait avoir pour contrepartie des engagements de bons usages de soins, conformément à la ligne tracée par le ministre de la santé dès sa prise de fonction.

En définitive, la conclusion de ces négociations devait traduire la conviction maintes fois réaffirmée de Jean-François Mattei que « l'on ne réformera qu'avec les professionnels de santé 19 ( * ) ».

1. Une année de négociations conventionnelles

Ainsi, au cours des douze derniers mois, toutes les professions de santé (médecins généralistes, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes chirurgiens-dentistes, orthophonistes, orthoptistes, transporteurs sanitaires, sages-femmes, directeurs de laboratoires) ont été concernées par au moins un avenant à leur convention nationale.

Dans la plupart des cas, ces avenants introduisent des mesures de maîtrise médicalisée des dépenses de santé par la conclusion d'accords de bons usages de soins, de contrats de santé publique et de contrats de bonne pratique.


L'architecture conventionnelle instaurée par la loi du 6 mars 2002

1 - Un accord-cadre applicable à l'ensemble des professions de santé

Cet accord cadre conclu pour une durée maximale de cinq ans à pour vocation de fixer des dispositions transversales communes à l'ensemble des professions et qui entrent dans le champ des conventions actuelles. Il peut déterminer les obligations respectives des caisses d'assurance maladie et des professionnels de santé exerçant, les mesures que les partenaires conventionnels juges appropriées pour garantir la qualité des soins dispensés, les conditions d'une meilleure coordination des soins, ou la promotion des actions de santé publique.

Sont concernés les médecins, les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes, les auxiliaires médicaux, les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes, les directeurs de laboratoires privés d'analyses médicales et les entreprises de transports sanitaires. L'accord doit être conclu par la CNAMTS, une autre caisse et le centre national des professions de santé. Il ne s'applique à une profession concernée que lorsqu'au moins une organisation syndicale représentative de cette profession a marqué son, adhésion en le signant.

2 - Des conventions professionnelles

Ces conventions dont la durée est fixée à cinq ans au plus, déterminent :

- les tarifs des honoraires, rémunération et frais accessoires dus aux professionnels de santé par les assurés sociaux en dehors des cas de dépassement autorisés par la convention pour les médecins et les chirurgiens dentistes (ces tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires sont fixés dans le cadre d'avenants à chaque convention);

- les engagements des signataires, collectifs ou individuels, le cas échéant pluriannuels, portant sur l'évolution de l'activité des professions concernées. Ces engagements prennent la forme d'accords de bon usage de soins (L. 162-12-17 du code de la sécurité sociale) qui constituent dans ce cas une annexe de la convention médicale professionnelle ou de contrats de bonne pratique (L. 162-12-18 du code la sécurité sociale).

3 - Des contrats de santé publique

Ces contrats de santé publique (L. 162-12-18 du code de la sécurité sociale) doivent avoir été déterminés dans le cadre conventionnel, avant que les professionnels de santé puissent adhérer individuellement. Ces contrats fixent les engagements des professionnels et ouvrent droit à une rémunération forfaitaire.

Le 29 avril dernier, le conseil d'administration de la CNAMTS s'est félicité d'être arrivé « au terme d'un processus de négociation qui lui a permis de conclure des accords conventionnels avec toutes les professions de santé, à la seule exception des médecins spécialistes ».

Lors du débat sur l'assurance maladie organisé à l'Assemblée nationale le 13 mai dernier, le ministre « a pris acte, en la regrettant, de la rupture du dialogue entre les caisses et les médecins spécialistes » alors qu' « un accord conventionnel était à portée de main » sur la base du document signé le 10 janvier 2003.

Cette rupture « concourt à attiser le désespoir des professionnels et la tension entre les caisses et les médecins spécialistes » poursuivait le ministre « je ne peux m'en satisfaire ». Cette « situation complique également, sans l'interdire, la prise des mesures nécessaires à l'optimisation des dépenses ambulatoires qui doivent permettre d'améliorer les conditions d'exercice des spécialistes tout en maîtrisant la croissance des volumes d'actes et de prescription ».

2. La publication d'un règlement conventionnel minimum

Conscients que cette situation d'échec, limitée à cette seule catégorie, n'était bénéfique pour aucune des parties et provoquait un blocage de la situation professionnelle des médecins spécialistes conventionnés en secteur 1 (tarifs conventionnels), les trois caisses nationales d'assurance maladie (CNAMTS, CANAM et MSA) et la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), principal syndicat chez les médecins spécialistes, ont pris l'initiative de transmettre au ministre de la santé, le 25 août dernier, un relevé de conclusions commun.

Ces propositions, qui s'inscrivent dans la droite ligne de l'accord conclu le 10 janvier avec la quasi-totalité des syndicats médicaux, comportent un engagement des médecins spécialistes dans les dispositifs de maîtrise médicalisée des dépenses et, en particulier, des accords de bon usage des soins et de prescription.

En contrepartie, il a été prévu une majoration de 2 euros pour les consultations de tous les médecins spécialistes cliniciens du secteur 1, actuellement de 23 euros, et de 2,70 euros pour les consultations des psychiatres, neuropsychiatres et neurologues du secteur 1, actuellement 34,30 euros.

De plus, des contrats de pratique professionnelle seront conclus afin de reconnaître les spécificités d'exercice de la médecine (exercice en milieu rural, en zone périurbaine, exercice faisant appel à des plateaux techniques lourds), et de faire bénéficier d'honoraires forfaitaires les médecins qui choisiront d'adhérer à ces contrats, en contrepartie d'engagements sur la qualité et l'organisation des soins.

La signature de cet accord entre l'assurance maladie et la CSMF permet de pallier l'absence de convention nationale et ouvre la possibilité, pendant une période qui doit rester transitoire, d'amorcer une revalorisation des honoraires des médecins spécialistes conventionnés.

Satisfait des progrès que constitue cet accord, le ministre de la santé lui a donné une traduction juridique en publiant, le 25 septembre 2003, un arrêté modifiant le règlement conventionnel minimal (RCM) applicable aux médecins spécialistes.

3. La difficile évaluation du coût de la vie conventionnelle ou « le coût du dialogue social »

Le coût de la revalorisation des honoraires des médecins a fait l'objet de chiffrages divergents selon qu'ils avaient été établis par la Cour des comptes ou par la CNAM.

Selon la Cour 20 ( * ) , la somme de 664 millions d'euros représentait le coût des mesures prises au titre des accords de janvier et de juin 2002, alors que le chiffre avancé par la CNAM, 220 millions d'euros environ, ne rendait compte que du coût du protocole du 5 juin. Par ailleurs, la même incertitude planant sur les contreparties résultant de ces accords, l'économie estimée à 150 millions d'euros par la CNAM, s'élevait, d'après la Cour, au maximum à 70 millions d'euros.

Dans son rapport de septembre, la Commission des comptes de la sécurité sociale, souligne que la progression des dépenses de soins de ville, « qui a été très forte en 2002, a connu un creux au début de l'année 2003 notamment du fait du faible contexte épidémique, la progression des dépenses remboursées ayant depuis retrouvé un rythme soutenu . »

(en millions d'euros)

Intitulé

Effets en 2003 des mesures 2002

Effets en 2003 des mesures 2003

Total des effets des mesures sur 2003

Omnipraticiens (dont revalorisation du C et du V)

242,4

242,4

Spécialistes (dont mesures en faveur des professionnels de la naissance et RCM)

33,3

73,7

84

Chirurgiens-dentistes

62,6

62,6

Sages-femmes

1,4

0,7

2,1

Infirmières

65,6

68,7

134,3

Masseurs-kinésithérapeutes

2,3

0

2,3

Orthophonistes

3,9

2,7

6,6

Orthoptistes

2,3

0

2,3

Biologistes

53,0

0

53,0

Transports sanitaires

14,7

40,0

54,7

Total des mesures sur les dépenses déléguées

418,9

265,1

664,0

Centres de santé (forfait référent)

10,4

10,4

Médicaments (dont baisse de taux de remboursement baisse de prix des médicaments à SMR insuffisants)

- 70,8

- 281,4

- 352,2

Total des mesures sur les soins de ville

348,1

- 6

319,2

Source : Rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2003

La conclusion que l'on peut tirer de ce débat est que, dans un premier temps, la revalorisation des tarifs de consultation s'est traduite par une augmentation des dépenses, non compensée par des économies consécutives à la modification des pratiques.

Elle s'est toutefois accompagnée d'une moindre progression des dépenses, en attendant que le changement de comportement escompté ne produise ses effets.

Le Gouvernement et la CNAM l'ont bien compris en poursuivant la mise en oeuvre de nouvelles mesures de médicalisation (AcBUS, campagne publicitaire sur la consommation d'antibiotique,...) dont l'objet est bien la réduction des dépenses, mais également le renforcement de la qualité des actes assurés et prescrits par les professionnels de santé.

B. LA MARCHE VERS UNE OPTIMISATION MÉDICALISÉE DES DÉPENSES

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 avait posé les premières bases d'un nouveau mode de régulation, fondé sur la confiance partagée, la qualité des soins et l'optimisation médicalisée des dépenses, en supprimant le système pernicieux des lettres-clés flottantes et en donnant une nouvelle impulsion aux négociations conventionnelles.

Le présent projet de loi confirme ces orientations, mais de façon modeste, afin de ne pas obérer les marges d'action de la prochaine réforme de l'assurance maladie.

1. La modernisation des instruments conventionnels

La volonté du ministre de la santé de renouer le dialogue conventionnel se fonde sur la conviction qu'il n'est pas possible de réformer le système de santé sans la confiance et la collaboration des professionnels concernés.

Renouer le dialogue avec les professionnels de santé est l'occasion de faire évoluer l'organisation des soins, des usages et des pratiques mais aussi le contenu des prescriptions. Cette manière d'agir est susceptible de permettre une allocation plus optimale des ressources d'assurance maladie tout en respectant, voire en améliorant, la qualité des traitements et la santé des populations.

Cette utilisation d'outils diversifiés d'intervention en collaboration avec les professionnels de santé est fréquente à l'étranger. Le rapport de l'IGAS, en mai 2002, consacré à l'encadrement et au contrôle de la médecine ambulatoire soulignait l'importance des mécanismes d'accompagnement de partenariat et de conseil alors que les mécanismes purement quantitatifs ou les sanctions collectives se heurtent à des limites et sont progressivement abandonnés : « une triple convergence peut-être observée en matière d'outils de la qualité : diversité, similitude des outils, dynamique forte. (...) l'Allemagne et la France sont en retrait de ce mouvement au coeur de l'encadrement de la médecine ambulatoire aux États-unis, en Angleterre, aux Pays-Bas. Le médecin de ville américain, anglais, hollandais est accompagné par des dispositifs consistant en une obligation de moyens (formation continue, recertification hollandaise...) il doit aussi, de plus en plus, faire évaluer sa pratique professionnelle et voir ses résultats analysés. La « sanction » est, pour schématiser, un plan d'accompagnement personnalisé. »

En France, l'accord national de bon usage de soins signé le 26 août 2002 entre la CNAMTS et les médecins généralistes, est un exemple de cette logique. Il a en effet permis la mise en place d'une nouvelle tarification pour les visites à domicile, variable en fonction de la justification médicale des actes.

Ces dispositions sont appelées à se développer et, d'ailleurs, le ministre de la santé a approuvé quarante accords de bon usage de soins depuis mai 2002.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 accentue encore cette démarche. Il prévoit un ensemble de dispositions qui devraient permettre de dynamiser la maîtrise médicalisée des dépenses de santé. Elles passent par plusieurs aménagements des dispositions conventionnelles.

Le Gouvernement souhaite en effet renforcer la validité des accords de bon usage de soins (AcBus) et des contrats de bonne pratique d'une part, et de santé publique d'autre part, en les assortissant d'une légitimité médicale et scientifique supplémentaire, obtenue auprès de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES).

Toujours animé par ce souci de faciliter le développement et l'application de tels accords, qui favorisent l'efficacité des soins, le Gouvernement souhaite mettre en place une procédure d'approbation plus souple et ouvrir la voie à des accords et des contrats régionaux plus nombreux, tout en maintenant leur articulation avec les conventions nationales.

Enfin, le Gouvernement propose d'encourager les échanges entre les unions régionales des caisses d'assurance maladie, qui ont en charge la gestion du risque, et des réseaux de professionnels de santé afin d'inciter les professionnels à l'évaluation, ce qui pourrait déboucher sur « l'inflexion de certaines pratiques sensibles en termes de maîtrise des dépenses » , dit le présent texte.

2. Une politique du médicament centrée sur l'innovation et le développement des génériques

La politique du médicament mise en oeuvre par le ministre de la santé est aujourd'hui axée autour de trois grandes priorités : le soutien à l'innovation, la recherche d'une efficacité accrue pour les dépenses existantes et la simplification des dispositifs de régulation.

Afin de favoriser la diffusion des médicaments innovants, le Gouvernement a choisi, à l'occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2004, de fournir un effort supplémentaire en consacrant 200 millions d'euros à l'acquisition de médicaments particulièrement coûteux diffusés à l'hôpital.

La mise en oeuvre de la réforme de la tarification à l'activité est également l'occasion, pour le Gouvernement, de traiter la question du médicament à l'hôpital. Les nouvelles dispositions relatives au prix d'achat et de rétrocession des médicaments par les pharmacies hospitalières vont permettre de prendre en compte l'importance thérapeutique et le coût d'un certain nombre de médicaments innovants qui pourront ainsi faire l'objet d'une facturation supplémentaire

Dans un second temps, le Gouvernement souhaite accélérer la vente en pharmacie des médicaments les plus innovants. Le délai moyen actuel de mise sur le marché est de deux cent quarante jours, il devrait pouvoir être réduit à environ cent jours.

Parallèlement au soutien qu'il apporte à l'innovation, le Gouvernement a réaffirmé à plusieurs reprises sa volonté d'optimiser les dépenses dans le secteur du médicament en réduisant les coûts supportés par l'assurance maladie au titre des molécules existantes.

Pour cette raison, le Gouvernement a développé une politique volontariste en faveur des produits génériques . Ces médicaments qui sont de 30 à 40 % moins coûteux que les originaux n'occupent qu'un peu plus de 6 % du marché français, alors qu'ils dépassent plus de 20 % chez certains de nos voisins.

L'accord du 5 juin 2002 entre les médecins et la caisse d'assurance maladie a permis d'impliquer les médecins dans la politique de promotion des génériques.

Cependant, la montée en puissance des médicaments génériques étant trop lente au regard des besoins de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement a décidé d'en anticiper les gains en mettant en place des tarifs forfaitaires de responsabilité (TFR). Ce mécanisme ne concerne que les groupes génériques pour lesquels les médicaments génériques éprouvent des difficultés à prendre des parts de marché. Il consiste à ne rembourser les médicaments, originaux ou répliqués, que sur la base du prix des génériques : un assuré qui choisirait d'acheter un princeps devra en assumer le surcoût. L'économie attendue pour la sécurité sociale à ce titre s'élève à environ 110 millions d'euros en année pleine. Cette mesure, entrée en vigueur le 8 septembre 2003, est devenue pleinement effective en octobre 2003. Une seconde vague de groupes génériques soumis aux tarifs forfaitaires de responsabilité est prévue pour le début de l'année 2004.

Enfin, le Gouvernement mène une politique de gestion active des produits remboursés. La réévaluation commencée en 1999 a permis de mettre en évidence huit cents produits ne justifiant plus une prise en charge par les pouvoirs publics et huit cents autres ne présentant pas un service médical rendu (SMR) suffisant pour une prise en charge à 65 %. En octobre 2002, le ministre a annoncé le déremboursement, sur trois ans, de l'ensemble des produits à service médical rendu insuffisant. Les produits à service médical rendu modéré ou faible, qui n'étaient pas encore pris en charge à 35 %, viennent d'être ramenés à ce taux.

Cette politique est animée à la fois par le double souci de protéger l'industrie et d'agir sur le coût des médicaments au sein de l'ensemble des dépenses de remboursements effectués par l'assurance maladie.

III. HÔPITAL : RÉFORMER ET MODERNISER

A l'occasion de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées avait présenté les grandes lignes du plan « Hôpital 2007 » qui, selon ses propres termes, devait redonner « ambition et espoir » au monde hospitalier.

Ce plan s'organise autour de quatre grandes orientations : un soutien volontariste à l'investissement, la rénovation du mode de financement des établissements, l'assouplissement des règles de planification et une plus grande autonomie de gestion.

Dès 2003, le Gouvernement en a mis en oeuvre les premières mesures, notamment à travers l'ordonnance du 4 septembre 2003 21 ( * ) , qui organise de nouvelles modalités d'investissements au bénéfice des établissements de santé et réforme la planification hospitalière.

En 2004, le Gouvernement poursuit l'application des grandes orientations du plan « Hôpital 2007 » par l'instauration d'un nouveau mode d'allocation des ressources aux établissements de santé : la tarification à l'activité (T2A).

A. LA TARIFICATION À L'ACTIVITÉ : UNE NOUVELLE AMBITION POUR L'HÔPITAL

Avant la présentation du plan « Hôpital 2007 », la réforme des modes d'allocation de ressources des établissements de santé avait déjà fait l'objet de plusieurs séries d'expérimentations, organisées notamment par la loi hospitalière de 1991, par la loi portant création de la couverture maladie universelle (CMU) en 1999 et par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

1. Les objectifs de la réforme

Cette évolution repose sur plusieurs constats. Tout d'abord, le système de santé français se caractérise par une dualité du mode de financement des établissements. Les hôpitaux publics et privés sans but lucratif sont, depuis 1984, soumis au régime de la dotation globale (montant 2003, 44 milliards d'euros), tandis que les cliniques à but lucratif sont financées en proportion des actes et des journées réalisés (objectif quantifié national pour 2003, 7,4 milliards d'euros). Cette dichotomie a fait l'objet de nombreux travaux qui mettent en évidence les insuffisances de l'un et l'autre système, sans compter leur hétérogénéité qui rend impossible toute comparaison.

De plus, et la mission « tarification à l'activité » créée au sein du ministère de la santé a tenté de les mettre en exergue, le système actuel est générateur d'effets pervers :

- la dotation globale de financement, en ne liant que très faiblement la budget à l'activité réalisée, conduit soit à la constitution de rentes de situation, soit à un manque de financement pour les structures les plus actives ;

- le montant des prestations versées pour le même acte dans le secteur privé (sous OQN) varie en fonction de sa situation sur le territoire et peut également aboutir, de ce fait, à la constitution de rentes ou à des sous-financements de certaines activités.

En s'appuyant sur le recueil d'information du programme de médicalisation du système d'information (PMSI), le Gouvernement souhaite aujourd'hui unifier les modes de rémunération des deux secteurs, en mettant en oeuvre la tarification à l'activité.

Selon les indications données par le ministre de la santé 22 ( * ) , lors du débat relatif au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 à l'Assemblée nationale, « une simulation a été conduite sur 488 établissements : 389 en sont sortis gagnants, 179 perdants. Quant à l'expérimentation proprement dite, elle a concerné 60 établissements, dont 30 sont sortis gagnants et 30 perdants, sans qu'il y ait de règle selon que l'établissement est public ou privé, gros ou petit : 13 des 24 CHU concernés par l'expérimentation sont gagnants. Il y aura donc immanquablement des surprises. C'est la raison pour laquelle le délai prévu pour le public est plus long, afin que la réforme puisse aussi avoir une vertu pédagogique ».

La mission « tarification à l'activité », a établi comme suit le déroulement détaillé de l'expérimentation :

En ce qui concerne les établissements sous DGF : En ce qui concerne les établissements sous OQN :

2. Les activités et les établissements concernés

Tous les établissements publics et privés titulaires d'autorisation de médecine, chirurgie ou obstétrique (MCO) entrent dans le champ de la réforme.

Les activités de psychiatrie, les soins de suite ou de réadaptation (SSR), les soins de longue durée (SLD) sont maintenus hors du périmètre des activités touchées par ce nouveau mode de tarification, de même que le secteur médico-social.

Comme pour les activités, les établissements font l'objet d'un traitement circonstancié. Ainsi, les hôpitaux locaux, les établissements du service de santé des armées, les établissements nationaux de Fresnes et de l'Institut national des Invalides sont exclus du champ de la réforme, ainsi que les établissements de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte jusqu'à leur intégration dans le régime de financement du droit commun.

La généralisation de ce système de tarification à l'activité interviendra à partir de 2004 et les bénéfices attendus sont les suivants :

- une meilleure médicalisation du financement ;

- une responsabilisation des acteurs qui les incitera à s'adapter ;

- une équité de traitement entre les secteurs ;

- le développement des outils de pilotage médico-économiques (contrôle de gestion) au sein des hôpitaux publics et privés.

L'objectif du Gouvernement est de permettre, à travers cette réforme, la coopération entre les hôpitaux publics et privés, afin de favoriser la recomposition hospitalière.

3. Les principes généraux de financement

Pour être mise en oeuvre, la tarification à l'activité recourt à cinq grandes modalités de paiement.

Tout d'abord trois modalités de financement directement liées à l'activité réalisée sont définies :

- le paiement d'un tarif par séjour (dit groupe homogène de séjour-GHS) ;

- le paiement d'un tarif par prestation pour les activités de consultation et les actes externes d'urgence (hospitalisation publique), de prélèvement d'organes, ainsi que l'hospitalisation à domicile (activités non décrites par les GHS) ;

- le paiement de certaines fournitures, en plus des tarifs de prestation (certains médicaments coûteux et les dispositifs médicaux implantables (DMI) comme les prothèses). Une liste des molécules et des DMI concernés sera établie par voie réglementaire, en fonction de leur caractère onéreux et de l'hétérogénéité qu'il introduit dans les tarifs par séjour (GHS).

Viennent ensuite les modalités de financement mixte , pour certaines activités de soins, correspondant à un montant de ressources annuelles fixes, mais déterminé en fonction de l'activité réalisée. Un forfait annuel financera ainsi les coûts fixes liés aux urgences.

Dernier volet des modalités nouvelles, le financement non fondé sur une tarification à l'activité , mais sur des dotations annuelles avec le versement d'une enveloppe de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC). Cette enveloppe recouvre, notamment, l'enseignement et la recherche, l'innovation, les CECOS et les lactariums. Les MIGAC feront l'objet d'une contractualisation avec les agences régionales de l'hospitalisation (ARH), afin d'en assurer le suivi et l'évaluation.

Les modalités de financement de la T2A

Financements directement liés à l'activité

Autres financements (dotations)

TARIFS PAR SEJOUR
(GHS et suppléments)

MISSIONS D'INTÉRÊT GÉNÉRAL
ET D'AIDE
À LA CONTRACTUALISATION
(MIGAC)

TARIFS PAR PRESTATION
(consultations et actes externes,
urgences, PO, HAD)

PAIEMENT SUPPLÉMENTAIRE
(médicaments, DMI)

Financements mixtes
FORFAITS ANNUELS
(Urgences, prélèvements d'organes)

(PO : prélèvement d'organes - HAD : hospitalisation à domicile - DMI : dispositifs médicaux implantables)

L'esprit de la réforme, dictée par le pragmatisme, est bien d'établir un financement mixte qui distingue, d'un côté les missions de soins qui ont vocation à être financées directement à l'activité et, de l'autre, les missions d'intérêt général , ou missions de service public, qui recouvrent, d'une manière générale, toutes les missions et activités couvertes par le PMSI et qui seront financées par dotation ; il en sera ainsi pour les dépenses liées à la recherche ou à l'enseignement.

En marge de ces grandes lignes directrices, un certain nombre de points a fait l'objet de travaux techniques coordonnés par la mission « tarification à l'activité ». Ces travaux concernent, notamment, le traitement des séjours extrêmes, la réanimation et les soins palliatifs, les médicaments très coûteux, les prothèses, les prestations inter établissements et la prise en compte des surcoûts structurels, tels que l'isolement géographique ou l'installation en zone à fortes contraintes financières - liées, par exemple, au coût du foncier. La prise en compte de l'impact de la réforme sur la qualité des pratiques sera également assurée.

4. La mise en oeuvre de la réforme

La mise en oeuvre d'une réforme d'une telle ampleur est forcément complexe, aussi le Gouvernement a-t-il souhaité y procéder graduellement de 2004 à 2012.

Afin de limiter l'ampleur du choc que constituera, pour les établissements, la fin de la dotation globale et le passage à un système où les recettes seront directement déterminées par l'activité, le Gouvernement, en accord avec les organisations représentatives des établissements publics et privés, a souhaité une transition en trois étapes :

- la première étape concerne l'année 2004. Le cadre budgétaire et comptable, la procédure budgétaire, ainsi que les modalités d'allocation de ressources actuelles sont maintenus. En revanche, les budgets sont déterminés et ajustés sur la base de l'activité mesurée par le PMSI ;

- la deuxième étape commence dès le mois de septembre 2004, avec la préparation de la campagne budgétaire 2005. La mise en place de la nouvelle procédure budgétaire implique une réforme du régime budgétaire et comptable des établissements : les recettes liées à l'activité sortent du cadre de la dotation globale. Pour des raisons techniques, un circuit administratif et financier particulier est mis en place : les données relatives à l'activité et aux dépenses des spécialités médicales et des prestations facturables supplémentaires transitent par les agences régionales de l'hospitalisation, qui notifient ensuite à la « caisse-pivot » dont relève l'établissement le montant à payer à ce titre ;

- la troisième étape de 2006 permet aux établissements de facturer directement à l'assurance maladie, sans passer par l'agence régionale de l'hospitalisation, leurs prestations d'hospitalisation, ainsi que les spécialités médicales et les prestations facturables supplémentaires.

Durant cette période de transition, les établissements privés factureront les GHS et les autres prestations sur la base d'un tarif national affecté d'un « coefficient correcteur MCO », intégrant à la fois le caractère plus ou moins technique des actes pratiqués, la zone géographique de l'établissement et un coefficient de lissage de la transition dans le temps.

Quant aux établissements publics et aux établissements privés participant au secteur public hospitalier, ils seront financés sur la base d'un tarif national sans coefficient correcteur. La transition s'effectuera par le maintien d'une partie, décroissante dans le temps, des ressources allouées forfaitairement : la « dotation annuelle complémentaire ». Les prestations d'hospitalisation seront donc prises en charge par les organismes d'assurance maladie sous la double forme d'une fraction du tarif et d'une dotation annuelle complémentaire correspondant à la fraction non couverte par le tarif.

B. L'EXÉCUTION DU PLAN « HÔPITAL 2007 » SE POURSUIT

Le plan d'investissement national « Hôpital 2007 » prévoit de réaliser 6 milliards d'euros d'investissements supplémentaires entre 2003 et 2007, correspondant à une augmentation de l'investissement moyen annuel de 30 %. Il concerne aussi bien les établissements publics de santé que les établissements de santé privés, participant ou non au service public hospitalier. Il permet de ramener à cinq ans, le délai de rattrapage du retard d'investissement accumulé.

Afin de poursuivre le mise en oeuvre de ce plan, le Gouvernement s'appuie sur trois instruments mis en place simultanément : des dispositions juridiques nouvelles permettant d'externaliser la réalisation de certaines opérations, des financements supplémentaires et un appui technique et opérationnel fourni par la mission d'appui à l'investissement national hospitalier (MAINH) relayé dans les régions par un réseau de correspondants spécialisés.

1. La sélection des opérations à entreprendre

En réponse à une circulaire du 20 mars 2003, les agences régionales de l'hospitalisation ont proposé au ministère de la santé des listes d'opérations d'investissements susceptibles d'être retenues au titre du plan « Hôpital 2007 », dont le montant total s'établit à 10,2 milliards d'euros, au lieu des 6 milliards prévus initialement par le Gouvernement, et comporte 937 opérations.

Après examen des dossiers, notification a été faite aux agences régionales de l'hospitalisation des aides dont elles pourront disposer. Ces notifications précisent :

- le montant des investissements régionaux qui seront réalisés dans le cadre du plan « Hôpital 2007 » ;

- le montant indicatif des aides allouées pour la durée du plan (en capital et en fonctionnement) ;

- le montant opposable des aides allouées au titre de l'année 2003 ;

- diverses dispositions intéressant la part des aides attribuées aux établissements de santé à but lucratif, le plan cancer ou les investissements liés au systèmes d'information.

2. L'ordonnance du 4 septembre portant simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé.

Dans le même temps, le ministre de la santé a mis à profit les dispositions de la loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit 23 ( * ) , pour entamer les réformes annoncées à l'automne 2003, sous forme d'ordonnance 24 ( * ) .

En effet, l'article 21 de la loi d'habilitation autorisait à prendre, par ordonnance, des mesures dans les domaines suivants :

- le régime des autorisations des activités de soins et équipements matériels lourds ;

- les formules de coopération sanitaire ;

- les alternatives à l'hospitalisation ;

- l'organisation de la permanence des soins et de l'aide médicale urgente en élargissant à la permanence des soins le rôle du comité départemental de l'aide médicale urgente et des transports sanitaires ;

- l'intervention des collectivités territoriales afin de réaliser des opérations immobilières pour le compte des hôpitaux, y compris sur leur domaine public par le biais d'un bail emphytéotique ;

- la possibilité pour les établissements de santé de passer des marchés globaux de conception, réalisation et maintenance, pour les investissements immobiliers et d'équipements ;

- l'autorisation accordée aux sociétés d'économie mixte locales, aux offices publics d'aménagement et de construction et aux sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré de réaliser des opérations de conception, réalisation, entretien ou maintenance ainsi que, le cas échéant, de financement d'équipements hospitaliers ou médico-sociaux pour les besoins d'un établissement public de santé.

L'ensemble de ces mesures permettra de promouvoir les opérations de modernisation indispensables dans le secteur hospitalier.

3. Le soutien à l'investissement s'est accru.

Pour soutenir l'investissement et assurer l'exécution du plan, le Gouvernement a débloqué des financements supplémentaires :

- des aides en capital, à hauteur de 1,5 milliard d'euros pour les cinq ans, versées par le Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP), destinées aux trois catégories d'établissements de santé ;

- des aides en fonctionnement en crédits ONDAM, destinées aux établissements publics et privés sous dotation globale, représentant une dotation moyenne annuelle de 90 millions d'euros, soit 20 millions de plus qu'en 2003. Ces aides financent le surcoût des emprunts mobilisés, ainsi que les dotations aux amortissements. Elles peuvent, en outre, financer les loyers de longue durée induits par les opérations externalisées.

4. Le Plan Urgences, une réponse à la catastrophe sanitaire de l'été

Ce plan, présenté par Jean-François Mattei le 30 septembre dernier, constitue une partie de la réponse au drame de la canicule vécu cet été. Il a été élaboré grâce aux travaux menés, depuis 2002, par un groupe « urgences » créé au sein du ministère de la santé.

Ce plan rappelle que les urgences sont une mission essentielle de l'hôpital, auprès de laquelle trouve place la mission de permanence des soins assurée par les médecins libéraux.

Le ministère a choisi de traiter ce sujet dans sa globalité et a présenté un dispositif qui prend en compte à la fois la spécialisation, avec l'annonce d'un diplôme d'études spécialisées complémentaires de médecine d'urgence, et l'accueil, avec le renforcement des équipes médicales qui seront composées d'un médecin senior, un infirmier organisateur, un travailleur social, pour assurer une orientation adaptée pour chaque patient, et des équipes logistiques.

Le plan Urgences prévoit d'impliquer l'ensemble de l'hôpital avec la mise en oeuvre d'une contractualisation interne avec tous les services, afin de disposer en permanence de capacités d'hospitalisation identifiées.

Au total, environ 900 millions d'euros d'investissement, dont 673 financés grâce à « Hôpital 2007 », seront consacrés aux urgences (locaux et équipements) dans les cinq années qui viennent.

Par ailleurs, afin d'éviter l'engorgement des services, le développement des capacités en aval et l'organisation, en réseau, de la chaîne d'intervention est un élément fondamental. L'accréditation des services d'urgence (SAU) sera désormais conditionnée à leur engagement dans un réseau associant les établissements sanitaires, les établissements médico-sociaux et les médecins libéraux. Le réseau est aussi une réponse médico-sociale coordonnée et pertinente pour la prise en charge des personnes fragiles. Le montant de la dotation nationale des réseaux (DNDR) sera donc adapté pour permettre le développement des réseaux gérontologiques.

*

* *

Votre rapporteur ne peut que se réjouir des mesures arrêtées par le Gouvernement qui s'est attelé au dossier de la médicalisation des dépenses de santé et se déclare déterminé à mener à bien une importante réforme de l'hôpital.

Il estime donc que les dispositions relatives à l'assurance du projet de loi de financement pour 2004 présentent des orientations claires pour la réflexion du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie :

- elles excluent clairement toute tentation de dérive vers une maîtrise purement comptable des dépenses de santé, qui serait déconnectée des besoins réels des assurés ; mais dans le même temps, elles rejettent l'idée d'une croissance incontrôlée du coût des soins, sans vérification ni analyse de leur efficacité et de leur innocuité ;

- elles encadrent « en creux » la réflexion du Haut conseil qui doit, dès lors, considérer ces deux axes comme des points acquis. Le plan « Hôpital 2007 » ne saurait être remis en cause dès lors que la T2A est lancée, de même que la maîtrise médicalisée des dépenses de soins constitue un préalable à tout refinancement de l'assurance maladie.

C'est donc autour de trois aspects essentiels de la réforme de l'assurance maladie que le Haut conseil doit organiser sa réflexion : la gestion de l'assurance maladie, le partage de la prise en charge entre régimes de base et régimes complémentaires, le financement de l'assurance maladie.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE MM. JEAN-FRANÇOIS MATTEI, MINISTRE DE LA SANTÉ, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPÉES, CHRISTIAN JACOB, MINISTRE DÉLÉGUÉ À LA FAMILLE, ET MME MARIE-THÉRÈSE BOISSEAU, SECRÉTAIRE D'ÉTAT AUX PERSONNES HANDICAPÉES

Réunie le mercredi 5 novembre 2003, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission, dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 , a procédé à l'audition de MM. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, Christian Jacob, ministre délégué à la famille, et Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'État aux personnes handicapées.

Après avoir rappelé que la sécurité sociale était au coeur de notre contrat social et constituait un élément essentiel de notre pacte républicain, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , a considéré que le devoir du Gouvernement était de sauvegarder et de renforcer notre sécurité sociale, en l'adaptant aux enjeux d'aujourd'hui et de demain.

Il a affirmé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 s'inscrivait dans cette logique, ce texte visant avant tout à mettre de l'ordre dans la sécurité sociale et à préparer l'avenir, sans pour autant anticiper sur les résultats de la concertation déjà entamée.

Il a d'abord souligné que le régime général, et en particulier l'assurance maladie, traversait une période de difficile tension financière, son déficit devant atteindre 8,9 milliards d'euros en 2003 et les projections tendancielles pour 2004 concluant à un déficit de 13,6 milliards d'euros.

Il a considéré que l'assurance maladie était, pour l'essentiel, à l'origine de ces déficits, les autres branches restant soit excédentaires, soit proches de l'équilibre.

Il a indiqué que cette évolution était le résultat d'un classique effet de ciseau, la faiblesse de la croissance s'accompagnant d'une vive progression des dépenses d'assurance maladie.

Soulignant qu'il fallait accepter d'assumer une part inéluctable d'augmentation des dépenses de santé liée au vieillissement de nos sociétés et au progrès médical, il n'en a pas moins estimé qu'il importait de faire preuve de toute la détermination nécessaire pour mettre en place une maîtrise des dépenses juste et efficace. En effet, l'efficacité de notre système de santé et d'assurance maladie reste perfectible dans la mesure où les dépenses d'assurance maladie croissent à un rythme qui n'est pas soutenable à très long terme pour nos finances publiques.

Il a ainsi observé qu'en 2003, les dépenses d'assurance maladie dans le champ de l'ONDAM devraient progresser de 6,4 %, un chiffre à mettre en regard avec l'objectif initial de 5,3 %. Or, cette évolution était trop rapide, et parfois injustifiée, au regard de l'utilité médicale, des besoins de santé publique et des moyens comptés dont notre assurance maladie dispose. A cet égard, il a jugé que le dérapage de certaines prescriptions, comme les indemnités journalières, l'expliquait pour partie, mais que les cotisants payaient également au prix fort la politique de réduction du temps de travail voulu par le précédent gouvernement au moment même où la démographie médicale s'infléchissait. Il a ainsi évalué le coût de cette politique à 3,4 milliards d'euros sur l'ONDAM, soit 150 euros par cotisant et par an pour les seuls établissements hospitaliers.

Il a toutefois relevé que l'année 2003 marquait une première décélération de la croissance des dépenses de l'assurance maladie et témoignait de l'amorce de changements structurels qui doivent, à l'avenir, produire tous leurs effets. Ceux-ci montrent qu'un partenariat conventionnel avec les professionnels de santé, autour d'une logique de responsabilité partagée, peut permettre d'avoir prise sur le rythme d'évolution des dépenses.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , a ensuite indiqué que, face aux difficultés que connaît la sécurité sociale, l'ambition première du Gouvernement était de préparer l'avenir, et qu'il en allait de la sauvegarde même de notre dispositif de protection sociale.

Rappelant que ce même souci avait déjà conduit son action dans le domaine des retraites, au travers de la loi du 21 août 2003, et dans celui de la politique familiale avec la création, au 1 er janvier prochain, de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), il a déclaré que l'ambition était aussi évidente pour le système de santé et d'assurance maladie, dont la préservation de l'excellence exigeait aujourd'hui sa modernisation.

Il a précisé que cette démarche de modernisation concernait déjà la politique de santé publique, rappelant que l'Assemblée nationale venait d'adopter en première lecture un projet de loi sur ce sujet.

Il a également insisté sur la modernisation de l'hôpital entreprise par le Gouvernement dans le cadre du plan « hôpital 2007 ».

A cet égard, il a indiqué que l'ordonnance de simplification sanitaire de septembre dernier allait permettre d'assouplir les règles d'organisation hospitalière, que le programme d'investissement hospitalier se traduisait dès aujourd'hui par un effort financier exceptionnel à hauteur de 10 milliards d'euros et que la gouvernance hospitalière faisait actuellement l'objet d'une concertation qui pourrait se traduire par un accord d'ici la fin de l'année.

Il a indiqué que le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale accompagnait cette démarche de modernisation de l'hôpital, en prévoyant le passage à la tarification à l'activité. Qualifiant cette réforme de véritable « révolution copernicienne », il a rappelé qu'elle avait été longtemps annoncée mais toujours retardée. Il s'est félicité que le Gouvernement ait choisi de lancer cette réforme indispensable à l'hôpital, dans le cadre d'une démarche pragmatique et progressive, assortie de toutes les précautions nécessaires pour prévenir d'éventuels effets pervers.

S'agissant enfin de l'assurance maladie, et notamment des soins de ville, il a rappelé que le Gouvernement avait initialement prévu d'inclure sa réforme dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Toutefois, les premiers travaux engagés en ce sens et la persistance de divergences fortes sur ses voies et moyens l'ont convaincu de laisser toute sa place à la concertation préalable, en créant un Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Celui-ci regroupe l'ensemble des partenaires concernés, il est chargé d'établir un diagnostic partagé puis, dans le cadre de groupes de travail, de mener la concertation sur les pistes de réforme. Il a indiqué que l'objectif du Gouvernement était de proposer des solutions avant l'été 2004.

A cet égard, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , a précisé que la volonté du Gouvernement était de sauvegarder notre système d'assurance maladie et non de le privatiser. Il a fait observer que même s'il n'était pas illégitime de s'interroger sur l'opportunité d'une évolution plus profonde au regard des difficultés rencontrées, l'expérience récente montrait que tous les pays développés, quel que soit leur système de santé, connaissaient aujourd'hui des difficultés identiques et que l'excellence du système « à la française » s'expliquait notamment par le fait que notre pays était celui où l'égalité d'accès aux soins est la mieux assurée.

Il a exprimé, en outre, le souhait que la modernisation de l'assurance maladie s'accompagne d'une réflexion sur la loi de financement de la sécurité sociale.

Abordant le contenu du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, il a considéré que celui-ci devait être un projet de clarification, préparant la réforme sans la préempter, celui pour 2005 devant ensuite être un projet de responsabilisation.

Il a observé que certains avaient proposé d'augmenter dès à présent les recettes, et notamment la contribution sociale généralisée (CSG), pour faire face à la dégradation des comptes, mais il a considéré qu'une telle fuite en avant constituerait à la fois une solution de facilité et une erreur, tant économique que financière, et qu'une remise en ordre était un préalable indispensable avant d'envisager de nouvelles recettes.

Il a indiqué que le Gouvernement avait choisi de stabiliser le déficit de l'assurance maladie, ce qui représente un effort de 3 milliards d'euros de redressement.

Détaillant les modalités de cette stabilisation, il a tout d'abord insisté sur certaines mesures de cohérence, comme la hausse des droits sur le tabac et la suppression du FOREC.

Il a ainsi précisé que la hausse des droits sur le tabac s'inscrivait dans une logique de santé publique et aboutissait à majorer très significativement la part du produit de ces droits affectée à l'assurance maladie.

S'agissant du FOREC, il a rappelé que la création de ce fonds avait conduit à faire supporter au régime général le coût des allégements de charges liés aux trente-cinq heures et que sa suppression participait à la clarification tant attendue des relations financières entre l'État et la sécurité sociale, l'État prenant désormais à sa charge, dans le budget du travail, l'intégralité des allégements de charges jusqu'à présent financés par le FOREC.

Outre ces mesures de cohérence, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , a présenté plusieurs mesures de remise en ordre, au travers de trois exemples.

Soulignant la forte croissance des indemnités journalières, en particulier sous forme d'arrêts de travail de longue durée pour les personnes de plus de 55 ans, il a indiqué qu'il avait demandé une mission d'inspection à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS).

Il a insisté, en outre, sur la disposition relative aux affections de longue durée, considérant qu'il était indispensable de mieux les maîtriser.

Il a enfin précisé que la politique du médicament engagée par le Gouvernement était poursuivie et amplifiée, afin de permettre aux patients d'avoir plus facilement accès aux nouveaux traitements, tout en recherchant une évolution globale de la dépense compatible avec l'équilibre des comptes sociaux. A cet égard, il a annoncé la poursuite de la politique de déremboursement sur la base du service médical rendu et l'adaptation de la politique du prix du médicament à l'hôpital.

Abordant enfin les mesures préparant l'avenir, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , a indiqué que le projet de loi de financement de la sécurité sociale comprenait un nombre important d'articles relatifs à la maîtrise médicalisée, estimant à cet égard nécessaire de s'appuyer sur les professionnels de santé pour favoriser son développement.

Dans ce cadre, il a précisé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale introduisait la possibilité, pour les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM), de passer des contrats avec les professions de santé, aux termes desquels ceux-ci s'engageraient sur l'amélioration de leurs pratiques, à l'image de l'accord conclu avec les médecins de montagne. Il a également souligné l'importance de la mesure tendant à simplifier les dispositifs d'incitation aux bonnes pratiques, dans le souci d'une conclusion plus rapide et d'une validation par une instance scientifique, et de celle permettant l'expérimentation du dossier médical partagé.

Au total, il a estimé que ce texte était un projet de loi de financement de la sécurité sociale de clarification visant à stabiliser le déficit de l'assurance maladie sans préempter l'essentiel de la réforme à venir.

A titre liminaire, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a considéré que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 concrétisait les annonces faites par le Premier ministre lors de la Conférence de la famille du 29 avril dernier, en créant, à compter du 1 er janvier 2004, la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE). Répondant à un souci de simplification pour les familles, celle-ci regroupera les cinq prestations actuelles en faveur de la petite enfance, auxquelles s'ajoutera l'allocation d'adoption. Il a indiqué que l'instauration de cette prestation unique répondait à la volonté du Gouvernement d'améliorer significativement l'aide apportée aux parents de jeunes enfants pour leur permettre de mieux concilier vie familiale et vie professionnelle.

Il a expliqué que la PAJE comprendrait, d'une part, une prime à la naissance d'un montant de 800 euros versée au septième mois de grossesse, puis une allocation de base de 160 euros servie pendant trois ans à compter de la naissance de l'enfant, d'autre part, un complément de libre choix en fonction de l'activité des parents et du mode de garde sélectionné. Il a fait valoir que 90 % des parents percevraient la prime à la naissance puis l'allocation de base, soit 200.000 familles nouvelles.

Concernant le complément de libre choix du mode de garde, destiné plus particulièrement aux familles à revenus moyens ou modestes, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a indiqué qu'il s'adresserait aux parents qui choisissent de continuer à exercer une activité professionnelle, en leur permettant de financer le mode de garde de leur choix pour leurs enfants.

Quant au complément de libre choix d'activité, il a précisé qu'il bénéficierait à ceux qui font le choix inverse d'arrêter leur activité professionnelle pour élever leurs jeunes enfants et qu'il serait versé dès la première naissance, pendant les six mois suivant le congé de maternité ou de paternité, ce qui constituait un véritable progrès en termes de politique familiale.

M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a déclaré que la PAJE mobiliserait en 2007 environ 850 millions d'euros de crédits supplémentaires, soit une montée en charge rapide puisque son coût était évalué à près de 150 millions d'euros dès 2004.

Il a spécifié, par ailleurs, que six mesures nouvelles s'appliquant à cette prestation venaient d'être décidées par le Premier ministre :

-  la PAJE sera l'occasion de simplifier les relations des familles avec leur caisse d'allocations familiales (CAF). Le complément de garde leur sera, en effet, proposé sous forme d'un « chéquier PAJE », inspiré du chèque emploi-service actuel. Les familles enverront chaque mois leur demande de versement du complément de garde de la PAJE à un centre national de traitement, qui la gérera en liaison étroite avec les CAF. Le versement du complément s'en trouvera accéléré, les formalités imposées aux familles allégées et les risques de rupture des droits supprimés ;

- par souci d'équité, l'allocation d'adoption sera intégrée à la PAJE. Les familles adoptantes auront désormais droit à une prime d'adoption de 800 euros ainsi qu'à l'allocation de base de la PAJE, qui leur sera versée quel que soit l'âge de l'enfant, pendant la même durée de trois ans que pour les enfants naturels. Si l'on prend l'exemple d'une famille adoptant un enfant de quatre ans, ses allocations passeront alors de 3.360 euros (160 euros par mois pendant vingt et un mois) à 6.560 euros (prime d'adoption, soit 800 euros, plus 160 euros par mois pendant trente-six mois) ;

-  la PAJE sera versée dans les DOM dans les mêmes conditions qu'en métropole, grâce à un alignement des plafonds de ressources de son allocation de base, alors qu'il existe aujourd'hui un écart de 10 % au détriment des DOM ;

- l'allocation de base de la PAJE sera versée pour chaque enfant, en cas de naissances multiples, et pourra se cumuler avec le complément de libre choix d'activité. Cette disposition bénéficiera chaque année à près de 12.000 familles ;

- la PAJE autorisera le cumul entre le complément d'activité à temps partiel et le complément de garde qui remplacera l'allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) et l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA), alors qu'aujourd'hui, seul un cumul de l'AGED et d'une allocation parentale d'éducation (APE) à taux partiel est possible. Les familles recourant aux services d'une assistante maternelle, tout en maintenant une activité à temps partiel, seront donc gagnantes, notamment celles qui souhaitent conserver une activité professionnelle élevée (entre 50 et 80 %) puisqu'elles percevront, dans ce cas, le complément de garde à taux plein ;

- enfin, la PAJE sera versée pour tous les enfants nés à compter du 1 er janvier 2004, mais aussi pour les enfants nés prématurément avant cette date mais dont la naissance devait intervenir ultérieurement.

M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a enfin rappelé l'urgente nécessité de développer l'offre de garde qui constituait, de fait, le complément indispensable à la mise en oeuvre de la PAJE.

Il a tout d'abord annoncé le lancement, au 1 er janvier 2004, d'un « plan crèches » pluriannuel de 200 millions d'euros permettant de créer 20.000 places supplémentaires qui sera doté d'une première enveloppe de 50 millions d'euros pour l'année 2004. Il a précisé que cet engagement de l'État figurera dans un avenant à la convention d'objectifs et de gestion (COG), signé d'ici la fin de l'année entre l'État et la CNAF.

Il a fait valoir que cet effort significatif viendrait compléter avantageusement les deux précédents plans mis en oeuvre dans le domaine de l'accueil collectif, en mettant plus particulièrement l'accent sur le financement de projets innovants en matière d'horaires d'ouverture, d'accueil des enfants handicapés et du mode de financement, privé ou public.

Sur ce dernier point, il s'est déclaré favorable à toute disposition permettant d'ouvrir le secteur de la petite enfance à un plus grand nombre d'intervenants, en particulier au secteur privé, considérant que le besoin d'offre de garde était trop élevé pour se priver d'une quelconque source de financement. Il a toutefois reconnu qu'elle impliquerait probablement l'adaptation des règles actuelles de financements publics, afin de concilier des conditions de viabilité économique attractives pour de nouveaux services privés et les exigences d'équité et de mixité qui régissent l'action sociale de la CNAF et que le Gouvernement entend préserver.

Rappelant qu'un véritable statut pour les assistantes maternelles permettrait aussi de développer l'offre de garde, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a annoncé le dépôt d'un projet de loi au début de l'année prochaine. Par ailleurs, dès 2004, la branche famille prendra en charge 10 millions d'euros de cotisations employeurs pour la création d'actions de formation professionnelle et d'un fonds du paritarisme. Il a ajouté que les cotisations sociales de prévoyance seraient prises en charge, en 2005, par la branche famille, avec la création d'une complémentaire « santé et accidents du travail ».

Evoquant le « crédit d'impôt familles » inscrit dans le projet de loi de finances pour 2004, il a indiqué que le taux de 25 % qui lui était appliqué aboutissait à une prise en charge fiscale de 60 % des sommes versées par les entreprises en faveur des familles, ce qui devrait permettre d'augmenter l'offre de garde en faveur des jeunes enfants et favoriser différentes actions à caractère familial. Il a précisé que l'objectif, en termes de dépense fiscale, était de 50 millions d'euros d'ici 2007.

En conclusion, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a rappelé que ces mesures nouvelles représentaient un effort financier supplémentaire d'un milliard d'euros par an à l'horizon 2007, dont 200 millions d'euros dès 2004, et a considéré qu'il était parfaitement finançable tout en laissant la branche famille structurellement excédentaire dans les années à venir.

Il a enfin annoncé que la Conférence de la famille de 2004 serait axée sur l'adolescence et privilégierait, comme l'année précédente, la concertation, comme en témoigne d'ailleurs l'installation prochaine de groupes de travail sur la santé, la découverte de la vie professionnelle ou le temps libre des adolescents.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'État aux personnes handicapées, a précisé les actions qu'elle comptait mener en 2004 sur la base des crédits d'assurance maladie consacrés aux personnes handicapées.

Elle a souligné l'attention portée par le Sénat et sa commission des affaires sociales aux problèmes relatifs aux personnes handicapées. Elle a notamment évoqué le rapport d'information de M. Paul Blanc, publié en juillet 2002, et le rapport de la commission d'enquête sur la maltraitance des personnes handicapées accueillies en établissements et services sociaux et médico-sociaux de juin 2003.

Elle a également salué l'action du président de la commission dans le cadre de la réforme de la loi du 30 juin 1975.

Elle a indiqué que le taux d'évolution des dépenses consacrées au handicap au sein de l'ONDAM pour 2004 traduisait la poursuite de l'engagement du Gouvernement pour mieux répondre aux attentes des familles. Elle a observé que, pour la seconde année consécutive, ce taux serait fixé à 6 %, soit un effort net de 360 millions d'euros en 2004 et 690 millions d'euros en deux ans.

Elle a précisé que, compte tenu de la situation financière générale de la branche maladie, cet effort avait d'ores et déjà été accueilli favorablement par le secteur associatif.

Elle a expliqué qu'elle poursuivait un double objectif : soutenir les opérateurs locaux pour la création de nouvelles places, essentiellement pour adultes handicapés, et, dans le même temps, veiller à ce que se développent des formules plus souples et personnalisées pour soulager les familles sans solution.

Elle a rappelé que l'année 2003 avait marqué la fin d'une programmation pluriannuelle et que l'année 2004 était, pour la politique en faveur des personnes handicapées, une année de transition. Elle a toutefois souligné que l'effort du Gouvernement ne se démentait pas pour autant, en insistant sur le fait que le futur projet de loi réformant la loi de 1975 s'accompagnerait de programmes concrets dès 2005.

S'agissant des créations de places en 2004, elle a indiqué qu'elle comptait fixer aux services déconcentrés deux priorités : achever les opérations jusqu'alors partiellement financées et lancer des opérations nouvelles pour l'accueil des polyhandicapés et des personnes autistes.

Elle a précisé, en outre, que la répartition des dotations régionales tiendrait compte, comme en 2003, des déficits propres à certaines régions, comme l'Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Languedoc-Rousssillon et Nord-Pas-de-Calais.

Elle a indiqué que 2.200 places nouvelles en maisons d'accueil spécialisé (MAS) ou foyers d'accueil médicalisé (FAM) seraient mises en chantier, soit autant qu'en 2003. Elle a d'ailleurs souligné que la mobilisation sans précédent des associations, des élus locaux et des services de l'État avait permis de porter les créations de places financées en 2003 à un taux de réalisation de 75 %. Elle a précisé qu'elle poursuivait un objectif identique pour 2004.

S'agissant des enfants, elle a indiqué que sa priorité était de compenser le retard accumulé pour l'accueil des autistes, retard souligné par M. Jean-François Chossy, député, dans son récent rapport, et d'accompagner le développement de l'intégration scolaire par l'accélération de la création de places de services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD).

Elle a ensuite précisé qu'elle souhaitait promouvoir une diversification des formules d'accueil et d'accompagnement.

Elle a notamment souligné la nécessité, pour les établissements, de travailler en réseau car ils sont appelés, de plus en plus, à coopérer avec les services à domicile, les municipalités, les praticiens libéraux.

Elle a également évoqué le souhait des familles de disposer de places d'accueil temporaire, de services ambulatoires et de pouvoir participer de façon plus importante à la vie des établissements.

Elle a indiqué qu'un décret donnerait, avant la fin de l'année, une base réglementaire à l'accueil temporaire, d'ores et déjà expérimenté, que les textes d'application de la loi du 2 janvier 2002 faciliteraient la mise en place des conseils de la vie sociale et que le conseil national de l'évaluation serait installé début 2004.

Elle a estimé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 témoignait de la volonté du Gouvernement de poursuivre l'action concrète en faveur des personnes handicapées au moment même où se prépare une nouvelle loi.

Elle a enfin insisté sur la nécessité d'une mobilisation de tous et elle a estimé qu'elle avait été amorcée en 2003 et devrait se prolonger en 2004.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a d'abord tenu à souligner les conditions difficiles dans lesquelles la commission devait examiner le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, enserré entre le projet de loi relatif aux responsabilités locales et le projet de loi de finances pour 2004, textes auxquels elle apporte également sa contribution. Il a regretté cette dégradation des conditions de travail du Parlement et a demandé au ministre de la santé de bien vouloir alerter le Gouvernement sur le sujet.

A l'issue de cette intervention liminaire, il a souhaité connaître les éléments pris en compte pour la constitution de l'ONDAM 2004, ainsi que la manière dont s'organisait, à l'intérieur de l'ONDAM, la répartition entre « la reconduction des moyens », les investissements prévus dans le cadre du plan « Hôpital 2007 » et le financement du « plan urgences ».

M. Gilbert Chabroux s'est interrogé sur la validité des éléments présentés par le ministre de la santé comme étant « de clarification », en soulignant l'expérience du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et l'écart constaté, en ce mois de novembre, entre la prévision du taux de progression de l'ONDAM 2003 fixée à 5,3 % et le résultat final qui s'établit à 6,4 %.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , a tout d'abord appelé de ses voeux un consensus politique pour faire aboutir la réforme de l'assurance maladie, à l'instar de l'accord trouvé par les principaux partis politiques allemands à l'occasion de la réforme du système de santé au printemps 2003.

S'agissant de l'ONDAM, il a indiqué que les travaux de la commission des comptes de la sécurité sociale avaient fait apparaître que la progression spontanée de l'ONDAM 2004 serait de 5,5 %. Sur la base de ce constat, le Gouvernement a établi un plan d'économie de 1,85 million d'euros correspondant à 1,5 % d'ONDAM et permettant donc de ramener son taux de progression à 4 % pour 2004.

M. Jean-François Mattei a poursuivi en soulignant que l'ONDAM hospitalier affichait un taux de progression de 4,12 %. Toutefois, compte tenu des mesures annoncées par ailleurs, notamment la hausse du forfait hospitalier, ce taux devrait en réalité s'établir à 4,45 %. Cela correspond à une dotation supplémentaire de 2,1 milliards d'euros au bénéfice de l'hôpital public, dont 80 millions pour le « plan cancer » et 150 millions destinés au financement du « plan urgences ».

M. Guy Fischer a abordé la question de la mise en oeuvre de la tarification à l'activité et s'est interrogé sur les conditions dans lesquelles seraient maintenues les missions de service public assumées par les hôpitaux.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a également souhaité obtenir des informations complémentaires sur les conditions de mise en oeuvre de la tarification à l'activité, notamment par rapport à la santé financière des établissements, à d'éventuels effets pervers comme la sélection des patients, et enfin sur les étapes à franchir pour parvenir au basculement définitif du secteur public vers la tarification à l'activité.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapée s, a rappelé que le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) avait prévu au bout de trente-cinq ans une convergence des tarifs pratiqués dans les secteurs public et privé.

Il a indiqué que le lancement de la réforme avait été précédé de simulations qui ont fait apparaître que deux tiers des établissements retireront des bénéfices immédiats de celle-ci en termes de ressources.

Il a précisé qu'afin d'éviter de trop fragiliser les hôpitaux publics, une dotation annuelle complémentaire leur serait versée durant la période de mise en oeuvre progressive du nouveau système de tarification et qu'elle disparaîtrait en 2012 à l'issue du processus.

Il a assuré que la réforme serait menée avec le plus grand pragmatisme, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle il a été décidé de l'entreprendre sur des activités qui pouvaient être évaluées sans ambiguïté (médecine, chirurgie, obstétrique). Il a indiqué que des mesures étaient prévues pour éviter qu'elle ne débouche sur une sélection des patients en fonction de leurs pathologies.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, s'est interrogé sur les appréciations contradictoires de la Cour des comptes et de la CNAMTS sur le coût des différentes revalorisations tarifaires accordées aux professions de santé, sur l'évaluation financière des compensations qui ont pu être obtenues.

M. Guy Fischer a rappelé que, lors de son audition par la commission des affaires sociales le 29 octobre dernier, la Cour des comptes avait estimé le montant de revalorisation tarifaire à 690 millions d'euros.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , a indiqué que l'accord du 5 juin 2002, signé avec les médecins généralistes pour porter leur tarif de consultation à 20 euros, avait entraîné une dépense estimée à 220 millions d'euros, compensée à hauteur de 150 millions grâce aux économies réalisées par la prescription des médicaments génériques. Il a affirmé que l'évaluation faite par la Cour des comptes portait non pas sur ce seul accord mais sur l'ensemble des augmentations tarifaires accordées aux professions de santé depuis 2001, ce qui explique la différence d'évaluation.

M. Guy Fischer a ensuite interrogé le ministre sur les thèmes susceptibles d'être abordés à l'occasion de la prochaine réforme de l'assurance maladie compte tenu du fait que le Gouvernement avait déjà proposé un plan « hôpital 2007 », de nouveaux schémas régionaux d'organisation sanitaire, une loi relative à la politique de santé publique et un « plan cancer ».

M. Jean-François Mattei a indiqué que le Gouvernement ne souhaitait pas fuir ses responsabilités vis-à-vis du monde hospitalier et qu'il le prouvait par la mise en oeuvre du plan « hôpital 2007 ». En revanche, aucune mesure susceptible de faire obstacle à la prochaine réforme des soins de ville n'avait été proposée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur pour la famille, a indiqué que l'excédent de la branche famille s'était fortement dégradé, passant d'un milliard d'euros en 2002 à 300 millions en 2003, et qu'il devait disparaître en 2004, au moment même de la mise en place de la PAJE pour un coût annuel de 850 millions d'euros d'ici à 2007.

Or, dans ce contexte de détérioration de sa situation financière, la CNAF continuerait à financer, en 2004, 60 % des majorations de pension de retraite consenties aux personnes ayant élevé au moins trois enfants, qui constituaient pourtant un avantage vieillesse. Il a donc interrogé M. Christian Jabob sur l'éventuelle clarification des charges de la branche famille, qui permettrait de dégager, sur le long terme, les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de mesures en faveur des familles.

Il a ensuite fait part de son inquiétude sur les conditions d'activité professionnelle requises pour pouvoir bénéficier du complément de libre choix de la PAJE, notamment à partir du troisième enfant. Il a déploré qu'elles aboutissent à rendre ce complément moins accessible que l'actuelle allocation parentale d'éducation (APE), pour les familles de trois enfants et plus. Il a donc demandé si, pour permettre un véritable libre choix d'activité des familles, il était envisagé d'assouplir ces conditions dans le décret, par exemple en assimilant les périodes d'attribution du complément à des périodes travaillées ou en élargissant les conditions de travail antérieur.

Concernant la prise en charge des majorations de pension pour enfants, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a souligné que le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale maintenait la situation actuelle, considérant qu'il s'agissait bien d'une mesure à caractère familial. Il a d'ailleurs indiqué que si l'on supprimait la précision d'un taux de 60 % de prise en charge par la CNAF, il en résulterait pour elle le paiement de 100 % du dispositif. A l'inverse, si l'on prévoyait d'en transférer la charge sur la branche vieillesse, la dégradation de sa situation financière pourrait remettre en cause cet avantage familial.

Concernant les critères d'activité s'appliquant au complément de libre choix d'activité de la PAJE, il a annoncé que le décret prendrait en compte les temps de congé parental, de congé maternité ou paternité, de maladie ou de formation comme périodes ouvrant droit à ce complément. Il a toutefois rappelé son souci de ne pas voir le congé parental se transformer en une « trappe à chômage », du fait de la difficulté qu'avaient certaines populations plus fragiles à retrouver un emploi à la fin de cette période, considérant que la notion de libre choix d'activité comprenait aussi le libre choix d'exercer pleinement une profession. A cet égard, il a estimé que le recours au temps partiel durant le congé parental était favorisé par les conditions d'attribution de la PAJE.

Il a enfin rappelé que, pour favoriser la constitution de familles nombreuses et encourager les premières maternités à un âge peu avancé, il avait été décidé de verser la PAJE pendant six mois, dès le premier enfant.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, s'est étonné de ce que les associations familiales, qui contestaient à l'époque le transfert des majorations de pension pour enfants en arguant du fait qu'il s'agissait d'un avantage vieillesse, ne voyaient plus aujourd'hui d'inconvénient à ce dispositif et le considéraient comme un avantage famille. Constatant cette incohérence, il a indiqué qu'aller au bout de cette logique devait désormais conduire à transférer totalement le financement de ce dispositif à la branche famille. Il a rappelé la proposition de clarification des comptes de la branche famille qu'il avait présentée avec M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur pour la famille, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. Celle-ci prévoyait le financement de l'allocation de parent isolé (API) par la branche famille, alors que le fonds de solidarité vieillesse (FSV) reprendrait en charge la totalité des majorations de pension pour enfants. Il a considéré que cette clarification aurait été utile et que, sans elle, la CNAF pourrait connaître de réelles difficultés financières s'il n'y avait pas de rapide amélioration de la conjoncture économique.

M. Gilbert Chabroux s'est inquiété des problèmes de financement de la branche famille qui ne dégagera pas d'excédent en 2004. Il a estimé que les mesures nouvelles ne seraient pas financées, comme ne l'avaient pas davantage été, d'ailleurs, celles proposées par la loi famille de 1994. Il s'est interrogé, en outre, sur le revirement de la majorité en matière de transfert de la prise en charge des majorations de pension pour enfants puisque, après l'avoir combattu, elle ne l'avait pas remis en cause, le Gouvernement ayant même porté de 30 % à 60 % la part assumée par la CNAF. Il s'est enfin montré plus que réservé sur le bien-fondé d'une ouverture au secteur privé des structures d'accueil collectives des jeunes enfants.

M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a indiqué que les mesures nouvelles annoncées dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale étaient effectivement financées et que l'équilibre de la branche famille en 2004 en tenait compte. Il a, en outre, confirmé sa foi dans l'amélioration rapide de la conjoncture économique qui confortera la situation financière de la branche. Il a ajouté que le transfert des majorations de pension pour enfants à la branche famille n'avait pas été porté à 100 % cette année pour des raisons d'équilibre financier. Il a enfin déclaré que permettre une offre de garde privée avait pour but de créer des places supplémentaires de crèches et non pas de la substituer aux structures publiques, rappelant à cet égard que le conseil d'administration de la CNAF avait accueilli favorablement ce projet.

II. AUDITIONS

A. AUDITION DE M. MICHEL LAROQUE, PRÉSIDENT, ET DE M. JACQUES LENAIN, DIRECTEUR, DU FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE (FSV) ET DU FONDS DE FINANCEMENT DE LA RÉFORME DES COTISATIONS PATRONALES DE SÉCURITÉ SOCIALE (FOREC)

Réunie le mardi 21 octobre 2003, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a entendu M. Michel Laroque, président, et M. Jacques Lenain, directeur du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC).

A titre liminaire, M. Michel Laroque a indiqué que les perspectives portant sur les résultats du FSV pour l'année 2004 sont meilleures que les chiffres définitifs attendus pour l'année 2003, en raison d'une hausse prévisible importante du produit de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) dont le fonds bénéficie. Mais il a aussitôt précisé que cette amélioration ne serait pas suffisante pour reconstituer les réserves du fonds, et qu'une détérioration de la situation de l'emploi pourrait dégrader la situation. Il a considéré, en tout état de cause, que le maintien ultérieur des ressources au niveau actuel n'était pas acquis et que l'année 2005 risquait de se présenter sous un jour moins favorable.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a rappelé que le récent vote de la loi portant réforme des retraites avait permis d'attribuer au FSV des « recettes de poche » supplémentaires. Plus généralement, il s'est interrogé sur les perspectives d'avenir de ce fonds et a demandé comment il avait fait face aux déficits des dernières années.

Revenant sur l'origine des difficultés actuelles, M. Jacques Lenain a tout d'abord rappelé que, depuis sa création voici dix ans, le FSV avait dégagé, jusqu'à l'année 2000, un résultat équilibré ou excédentaire et que le montant des réserves accumulées s'établissait alors à 1,6 milliard d'euros. Il a constaté qu'après un premier déficit, d'un montant limité en 2001, l'année 2002 avait été marquée par une inversion brutale de tendance : une hausse des dépenses de 6 %, conjuguée à une diminution de 5 % des recettes, avait alors provoqué un déficit de 1,353 milliard d'euros, supérieur aux réserves cumulées du fonds. Il a noté que la situation nette du fonds était ainsi devenue négative, à hauteur de 122 millions d'euros, à la fin de l'année 2002, et que les perspectives pour l'année 2003 semblaient moins favorables que les prévisions initiales, en raison notamment d'un moindre dynamisme des recettes tirées de la CSG.

M. Jacques Lenain a mis en avant l'impact de la conjoncture économique sur l'augmentation de la prise en charge au titre des cotisations chômage et de préretraite, qui constitue la moitié des dépenses du FSV : leur montant devrait, en effet, passer de 6,2 milliards d'euros en 2002 à 6,8 milliards d'euros en 2003. Il a précisé que, grâce à l'apport de la C3S, le montant global des recettes devrait s'accroître de 11 % tandis que le rythme d'accroissement des dépenses serait limité à 6 %. Il a estimé que cette évolution favorable ne permettrait, au demeurant, que de contenir le déficit de l'année 2003 entre 850 et 900 millions d'euros, tandis que le solde négatif des réserves continuerait à se détériorer pour atteindre 984 millions d'euros.

Sur les perspectives du FSV pour l'année 2004, il a estimé que la hausse prévue de 13 % pour les recettes et de 1 % pour les dépenses devrait se traduire par un excédent de 683 millions d'euros permettant, sinon d'apurer la totalité du déficit cumulé, du moins de le limiter à 300 millions d'euros. Il a expliqué que la raison principale de cette amélioration résidait dans le doublement attendu des recettes de la C3S, qui passeraient de 920 millions d'euros en 2003 à 1,9 milliard d'euros en 2004.

Il a ensuite exposé les techniques auxquelles le FSV avait eu recours pour faire face à cette situation de trésorerie très difficile. Il a ainsi rappelé que le fonds était lié aux différentes caisses de retraite, et essentiellement à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), par des conventions fondées sur des systèmes d'acomptes infra-annuels. Il a déclaré que le FSV avait été conduit à minorer ces acomptes et que les régularisations correspondantes, atteignant dans le cas de la CNAV pour l'année 2002 un montant de 570 millions d'euros, seraient versées non pas en 2003 mais en 2004. Il a reconnu que, pour respecter l'interdiction d'afficher une trésorerie négative, il avait fallu en réalité ralentir le rythme des dépenses. Il a également précisé que les versements de la C3S pouvaient intervenir à des dates choisies, ce qui offrait ici aussi une certaine souplesse de gestion.

M. Dominique Leclerc, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a constaté que la situation actuelle de la CNAV permettait au FSV, provisoirement, d'avoir recours à ce qui apparaît comme un « équilibre des déséquilibres ». Mais dans la perspective d'une dégradation attendue, pour l'avenir, des comptes de la CNAV, il s'est interrogé sur la pérennité de ce type de montage.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie, a demandé à MM. Michel Laroque et Jacques Lenain s'il était possible de reconstituer ce que serait aujourd'hui la situation du FSV, si le périmètre de ce dernier était resté conforme à sa vocation initiale et n'avait pas fait l'objet de modifications successives.

M. Jacques Lenain a répondu qu'une telle étude n'avait pas été réalisée, mais que l'on disposait, en revanche, d'un bilan des transferts pour la seule période 2000-2003, réalisé par la direction de la sécurité sociale, qui s'établissait à - 2,7 milliards d'euros.

M. Alain Vasselle a considéré que le FSV avait donc effectivement servi de variable d'ajustement pour les finances sociales.

M. Dominique Leclerc s'est interrogé sur l'impact que pouvait avoir la modification des conditions d'attribution de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) sur le FSV.

M. Jacques Lenain a indiqué que l'incidence exacte de la réforme de l'ASS n'avait pas encore été évaluée. Il a toutefois estimé que cette mesure devrait correspondre, pour le FSV, à une économie de l'ordre de 200 millions d'euros.

M. Michel Laroque a rappelé que les dépenses du FSV relatives à la prise en charge du service national avaient tendance à disparaître.

M. Jacques Lenain a mis en avant le caractère provisoire du niveau attendu, en 2004, pour la recette C3S. Il a considéré qu'il sera en conséquence nécessaire, en 2005, de repenser les équilibres généraux du fonds.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie, a demandé à M. Michel Laroque de préciser le montant du solde cumulé prévisionnel du FOREC au 31 décembre 2003, ainsi que la nature et le montant des principaux écarts en recettes et dépenses enregistrés par ce fonds au cours de l'année par rapport aux prévisions votées lors de la loi de financement initiale. Il a également souhaité savoir comment le FSV, organisme liquidateur du FOREC, procédera pour transférer les droits et obligations de ce fonds à l'Etat, en l'absence du remboursement par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) de la dette du FOREC à l'égard des organismes de sécurité sociale.

M. Michel Laroque a précisé qu'il n'appartenait pas au FSV, effectivement organisme liquidateur du FOREC, de connaître les modalités de son apurement puisque la dette était constituée antérieurement à la création juridique du FOREC en 2001.

M. Jacques Lenain a rappelé que si le FOREC avait été doté de six recettes fiscales la première année de son exercice, il en comptait aujourd'hui huit au total. La plus importante provient d'une large part de la taxe de consommation sur les tabacs, suivie de la taxe de consommation sur les alcools, puis d'une série de taxes ou de fractions de taxes, portant sur les contributions à la prévoyance, les conventions d'assurance, les véhicules terrestres à moteur, les activités polluantes, les véhicules de société et la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés. Il a précisé que les prévisions pour l'année 2003 laissent apparaître une diminution des recettes concomitante à une diminution des dépenses. La première étant toutefois supérieure à la seconde, le FOREC présenterait, en 2003, un résultat déficitaire d'environ 220 millions d'euros, ce qui constitue une situation atypique puisque le solde devrait être équilibré par construction. Il a souligné, toutefois, que les exercices 2001 et 2002 du FOREC ayant été excédentaires, respectivement de 265 et 224 millions d'euros, le solde cumulé de ce fonds au 31 décembre 2003 pourrait s'élever finalement à 266 millions d'euros.

Il a rappelé, à ce titre, que les projets de loi de financement de la sécurité sociale et de finances pour 2004 proposant de transférer, au 1 er janvier 2004, les droits et obligations du FOREC à l'Etat, le solde positif du FOREC sera versé au budget général.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie, s'est interrogé sur la légitimité d'un retour du solde du FOREC au budget général au regard des conditions initiales d'abondement de ce fonds, largement doté par des recettes distraites aux organismes de sécurité sociale. Il a en outre demandé à M. Michel Laroque les raisons justifiant l'absence de références au service de liquidation dans le projet de financement de la sécurité sociale, alors que ces dispositions figuraient dans la version initiale du projet transmise pour avis aux organismes de sécurité sociale.

En réponse à M. Alain Vasselle, rapporteur, M. Michel Laroque a confirmé que le projet transmis aux caisses détaillait les conditions de liquidation du FOREC alors que le projet déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale demeurait très elliptique à ce sujet, laissant sans doute au décret le soin d'en préciser les modalités. Il a toutefois souligné, qu'en l'état, le projet de loi dispose que la liquidation sera effective au 1 er janvier 2004 sans préciser si cette date inclut une période complémentaire d'inventaire.

M. Claude Domeizel a souhaité savoir pourquoi les recettes et les dépenses n'avaient pas évolué conformément aux prévisions retenues lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

M. Jacques Lenain a indiqué que les dépenses correspondant aux allégements de cotisations sociales « Aubry II » avaient été inférieures de 650 millions d'euros aux prévisions, ce qui s'expliquait très logiquement par la baisse des demandes anticipant sur la suppression du FOREC. Dans le même temps, les ressources provenant des droits de consommation sur les tabacs ont été minorées de 850 millions d'euros, en raison d'une baisse non négligeable de la consommation. Par conséquent, le FOREC accuserait un déficit supérieur à 200 millions d'euros.

M. Jean Chérioux a demandé à M. Michel Laroque s'il pouvait évaluer la charge financière totale résultant, pour le FOREC, de la mise en place des 35 heures.

M. Jacques Lenain a estimé la charge des allégements « Aubry I et II » intervenant au titre de la réduction du temps de travail à 25,6 milliards d'euros, soit 8,79 milliards d'euros en 2001, 10,55 milliards d'euros en 2002 et 6,3 milliards d'euros pour le premier semestre 2003.

B. AUDITION DE M. JEAN-MARIE SPAETH, PRÉSIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION, ET M. DANIEL LENOIR, DIRECTEUR, DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAMTS)

Réunie le mercredi 29 octobre 2003, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission, dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 , a procédé à l'audition de M. Jean-Marie Spaeth, président du conseil d'administration, et M. Daniel Lenoir, directeur, de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

A titre liminaire, M. Jean-Marie Spaeth a souligné le caractère peu novateur du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2004, dans l'attente, au cours des mois à venir, des conclusions du débat sur la modernisation de l'assurance maladie.

Il a rappelé qu'un certain nombre de mesures, annoncées par le ministre de la santé, ne figuraient pas dans le PLFSS pour 2004, car elles relèvent soit du pouvoir réglementaire (déremboursement de l'homéopathie, revalorisation du forfait hospitalier), soit du projet de loi de finances pour 2004 (arrêt du remboursement à l'euro près des dépenses engagées par les caisses primaires d'assurance maladie au titre de la couverture maladie universelle complémentaire, article 82). Il a d'ailleurs constaté que ces mesures se traduisaient par des transferts, de l'assurance maladie vers les assureurs complémentaires et les ménages.

Concernant le contenu du PLFSS pour 2004, M. Jean-Marie Spaeth a indiqué que la mise en oeuvre de la tarification à l'activité (T2A) était une évolution prometteuse, qui figurait dans le plan stratégique élaboré par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés en 1999. Il a toutefois regretté que cette réforme ne se fasse pas dans des conditions identiques dans le secteur public et le secteur privé et que, notamment, les honoraires des médecins du secteur privé ne soient pas pris en compte par la réforme.

M. Nicolas About, président, a fait observer que cette réforme devrait être opérée en dix ans, sans que l'on en connaisse le calendrier, les modalités et les raisons qui ont déterminé la longueur de cette période transitoire.

M. Daniel Lenoir , directeur de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), a souligné que la mise en oeuvre de la T2A allait être adossée à un travail de codage des actes médicaux positif pour l'assurance maladie, qui bénéficiera ainsi d'informations plus précises sur les actes pris en charge.

Il a ensuite évoqué trois questions relatives à l'identification, par la CNAMTS, des prestations non remboursables, aux conditions dans lesquelles la caisse peut engager des recours contre les tiers et aux efforts de gestion qui lui ont été demandés, évalués à soixante millions d'euros dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion. Il a précisé que ces efforts de gestion permettraient de procéder à des investissements importants en matière informatique.

A l'issue de cette introduction, M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers et l'assurance maladie , s'est interrogé sur les conséquences de la mise en oeuvre de la tarification à l'activité pour l'assurance maladie, sur les aménagements apportés au dispositif conventionnel entre l'assurance maladie et les médecins (accord de bon usage des soins, contrats de bonne pratique) par les articles 35, 36 et 37 du PLFSS pour 2004, sur la participation financière de l'assurance maladie au plan Biotox relatif à la lutte contre le bio-terrorisme et sur la fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) 2004.

M. Jean-Marie Spaeth n'a pas caché sa circonspection sur le respect de l'ONDAM 2004. Il a souligné que cette situation était provoquée par l'inexistence de moyens de régulation susceptibles d'être mobilisés pour éviter les dépassements de l'objectif et il a présenté la détermination du périmètre de l'ONDAM et la définition des outils de régulation comme des enjeux majeurs de la réforme de l'assurance maladie en préparation.

Puis M. Jean-Marie Spaeth a confirmé le soutien de la CNAMTS vis-à-vis de la mise en oeuvre de la tarification à l'activité.

Concernant les dispositions prévues par les articles 35, 36 et 37, il a tenu à préciser qu'il était partisan d'une intervention de l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) mais que cette intervention, légitime, devait avoir lieu en amont du processus conventionnel. Lui demander d'apprécier l'issue de la négociation la placerait en position de juge et partie. Il a estimé, à ce sujet, que seuls les partenaires sociaux, Caisse nationale d'assurance maladie et professionnels de santé, étaient détenteurs du pouvoir conventionnel.

Sur la question de la participation de la CNAMTS au financement du plan Biotox, M. Jean-Marie Spaeth a indiqué que, s'il n'existait pas de désaccord de principe sur l'existence de ce prélèvement, deux questions restaient en suspens : les modalités pratiques du prélèvement et le devenir des produits stockés en prévision d'une attaque bactériologique, sujet sur lequel la CNAMTS ne disposait d'aucune information.

En complément des propos de M. Jean-Marie Spaeth, M. Daniel Lenoir a tenu à rappeler que les gains de productivité obtenus par la CNAMTS avaient été multipliés par deux depuis dix ans. Il a souligné que la prochaine convention d'objectifs et de gestion comporterait trois volets relatifs respectivement à la recherche d'une plus grande efficacité, à la modernisation du système informatique et à la réorganisation du service médical de la CNAMTS.

Revenant sur les modalités de participation de la CNAMTS au financement du plan Biotox, il a regretté que ce prélèvement soit effectué sur le seul fonds national de prévention d'éducation et d'information sanitaire (FNPEIS) de la CNAMTS et non sur le fonds national d'assurance maladie (FNAM) consacré à la gestion du risque.

M. Gilbert Chabroux a souhaité connaître les raisons qui ont conduit le conseil d'administration de la CNAMTS à rendre un avis négatif sur le PLFSS pour 2004.

Il s'est ému des propos tenus par le Premier ministre à l'occasion de l'installation du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, sur la possibilité d'établir une distinction entre les risques pris en charge par la solidarité nationale et ceux qui relèvent de la responsabilité individuelle.

M. Guy Fischer s'est déclaré intéressé par l'idée de faire de la détermination et de l'opposabilité de l'ONDAM un élément central de la réflexion préparatoire à la modernisation de l'assurance maladie.

Il a ensuite interrogé MM. Jean-Marie Spaeth et Daniel Lenoir sur la part imputable aux soins de ville dans l'augmentation des dépenses de santé, sur les conséquences, pour les assurés, des mesures de déremboursement annoncées par le ministre de la santé et sur l'état des réflexions menées par la CNAMTS pour organiser une collaboration entre le régime obligatoire et les régimes complémentaires.

M. Jean Chérioux a souligné que la question de la responsabilisation des acteurs n'était pas nouvelle et que la création, dès l'origine du système d'assurance maladie, d'un ticket modérateur allait justement dans le sens de cette responsabilisation.

Il a rappelé les propositions du Sénat, lors du vote de la loi créant la couverture maladie universelle (CMU), tendant à créer une allocation de solvabilisation des assurés les plus démunis, pour prendre en charge leur adhésion à un régime complémentaire. Il a déploré que cette proposition n'ait pas été retenue et qu'on ait opté pour le « panier de soins ».

Concernant le problème particulier de la drogue et des substituts, Mme Nelly Olin a souligné les risques spécifiques de surconsommation et de trafic des produits. Elle a souhaité que la délivrance du subutex s'effectue, comme pour la méthadone, dans des centres qui en contrôlent la bonne utilisation.

M. André Lardeux, rapporteur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles (AT-MP) a souhaité connaître la position de la CNAMTS sur les perspectives d'une réforme de la gouvernance de la branche des AT-MP. Il s'est également interrogé sur le montant des transferts de la branche AT-MP vers la branche maladie au titre de la sous-déclaration des AT-MP et sur les conséquences de l'existence de fonds ad hoc, comme le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), pour l'organisation de notre système de sécurité sociale.

M. Gilbert Barbier a interrogé MM. Jean-Marie Spaeth et Daniel Lenoir sur l'augmentation du montant des indemnités journalières (+ 11 %) et il a voulu connaître les moyens de contrôle dont disposent les caisses d'assurance maladie, ainsi que le rôle des médecins contrôleurs.

M. Jean-Pierre Fourcade a posé quatre questions relatives successivement à la détermination d'un périmètre pertinent pour l'ONDAM, aux modalités d'une éventuelle application de la T2A aux hôpitaux de l'assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), à l'utilité du conseil de surveillance de la CNAMTS et à la possibilité de mettre en oeuvre une véritable politique de maîtrise des dépenses de santé.

M. Bernard Cazeau a regretté que la réforme de l'assurance maladie ait été repoussée d'un an. Il a souligné que la question de la responsabilisation devait être posée pour les assurés comme pour les professionnels de santé et il a souhaité connaître le montant des dépenses indues imputables aux médecins.

M. Roland Muzeau a souligné la sous-déclaration chronique des accidents du travail et des maladies professionnelles, conduisant à mettre à la charge de la branche maladie des dépenses imputables sur la branche AT-MP. Il s'est interrogé, en conséquence, sur le montant des transferts financiers de la branche AT-MP vers la branche maladie et vers le FIVA et le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA), se demandant notamment si ceux-ci étaient suffisants pour couvrir les besoins et s'il ne serait pas nécessaire d'augmenter le taux de cotisation.

En réponse aux intervenants, M. Jean-Marie Spaeth a souligné que la situation actuelle de l'assurance maladie était le reflet de la situation économique du pays. Il a rappelé que le taux de progression de l'ONDAM 2004 (+ 4 %) était calculé à partir de l'ONDAM 2003 rebasé, ce qui ne facilite pas la comparaison d'une année sur l'autre.

Il a précisé que les relations entre la CNAMTS et les médecins étaient entrées dans une phase d'apaisement, comme le démontre le respect des engagements pris par les généralistes en juin 2002 (diffusion des médicaments génériques) en contrepartie de la revalorisation du tarif de la consultation porté à 20 euros, ou encore la signature d'un accord transitoire avec la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) en août 2003.

M. Jean-Marie Spaeth a également douté de l'efficacité du ticket modérateur qui, selon lui, était un échec du fait de l'existence de régimes complémentaires. Il a estimé que la responsabilisation par l'argent était inefficace.

Il a indiqué que, selon lui, la création de la CMU complémentaire a eu pour objet de gommer les effets négatifs du ticket modérateur et a rappelé que la CNAMTS avait été, elle aussi en son temps, favorable à un dispositif de solvabilisation de l'accès aux régimes complémentaires, pour éviter de créer une catégorie particulière au sein de la population.

Il a précisé que le périmètre de prise en charge des dépenses de santé devait inclure à la fois le régime obligatoire et les régimes complémentaires, renouvelant, à cette occasion, son opposition à toute séparation verticale et privilégiant la recherche d'une solution de coopération.

Complétant les propos de M. Jean-Marie Spaeth, M. Daniel Lenoir a confirmé que le conseil de surveillance de la CNAMTS était un lieu privilégié pour assurer l'information du Parlement et des associations d'usagers sur les actions de la Caisse.

Il a précisé que, depuis 1998, les dépenses de soins de ville progressaient de 6 % par an, que les arrêts de travail de longue durée étaient en augmentation pour les 55-59 ans, que les contrôles étaient renforcés et qu'il ressortait qu'environ 6 % des arrêts de travail n'étaient pas médicalement justifiés.

En conclusion, il a rappelé que l'assurance maladie ne disposait d'aucun moyen de sanction à l'égard des prescripteurs fautifs et que le pouvoir de sanction appartenait au conseil de l'ordre des médecins.

S'agissant des accidents du travail et des maladies professionnelles, M. Daniel Lenoir a rappelé qu'une commission était chargée d'évaluer le coût de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles pour la branche maladie et que le FIVA connaissait une montée en charge rapide de ses dépenses, mais qu'il serait bientôt en mesure de fixer ses engagements futurs. A cet égard, il a observé que ces transferts financiers témoignaient d'une évolution fondamentale dans la gestion des risques professionnels, liée à la croissance du poids des maladies professionnelles, qui sont le plus souvent multifactorielles, et donc, pas uniquement d'origine professionnelle.

Revenant sur la gouvernance de la branche, il a rappelé qu'une convention d'objectifs et de gestion était actuellement en cours de négociation, parallèlement à celle sur la convention de la branche maladie. Il a estimé que la création éventuelle d'un conseil d'administration propre à la branche AT-MP ne devait pas signifier pour autant une séparation totale des deux branches, le risque professionnel devant continuer à être géré par le réseau de l'assurance maladie.

C. AUDITION DE M. FRANÇOIS LOGEROT, PREMIER PRÉSIDENT, M. BERNARD CIEUTAT, PRÉSIDENT DE LA 6E CHAMBRE, M. CHRISTIAN BABUSIAUX, CONSEILLER MAÎTRE À LA 6E CHAMBRE, MME CATHERINE DÉMIER, CONSEILLÈRE RÉFÉRENDAIRE, SECRÉTAIRE GÉNÉRALE ADJOINTE, ET M. RENAUD SÉLIGMANN, AUDITEUR À LA 6E CHAMBRE

Réunie le mercredi 29 octobre 2003 sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a entendu M. François Logerot, Premier président, M. Bernard Cieutat, président de la 6 e chambre, M. Christian Babusiaux, conseiller maître à la 6 e chambre, Mme Catherine Démier, conseillère référendaire, secrétaire générale adjointe et M. Renaud Séligmann, auditeur à la 6 e chambre, sur le rapport annuel de la Cour des comptes consacré à l'application des lois de financement de la sécurité sociale.

M. Nicolas About, président , a déclaré que l'audition de la Cour des comptes, de son premier président et du président de la 6 e chambre, était un moment important des travaux de la commission sur les lois de financement de la sécurité sociale. Il a remercié la Cour d'avoir bien voulu répondre par écrit aux dix questions qui lui avaient été adressées le 9 octobre dernier. Il a souligné l'intérêt de ces réponses, distribuées aux commissaires et qui seront annexées au rapport de la commission.

M. François Logerot, Premier président de la Cour des comptes , a remercié M. Nicolas About, président, pour ses paroles de bienvenue et s'est réjoui de présenter, pour la 6ème année consécutive, le rapport de la Cour des comptes sur la sécurité sociale devant la commission des affaires sociales.

Il a tout d'abord déclaré que, selon le plan habituel, le rapport de la Cour consacre sa première partie à l'examen de la situation des comptes sociaux pour l'année 2002 et dresse ainsi le bilan de la mise en oeuvre des principales dispositions financières de la loi de financement de la sécurité sociale.

Il a souligné les progrès notables réalisés en matière de normalisation des méthodes comptables puisque, pour la première année, la Cour n'avait pas eu à procéder à la correction des comptes présentés lors de la commission des comptes. Il a précisé, à ce titre, que la mise en place progressive d'une comptabilité en droits constatés pour l'ensemble des organismes sociaux avait représenté un progrès décisif et que l'harmonisation des méthodes de provisionnement et de calcul des charges à payer et des produits à recevoir, présentait également des progrès sensibles, même s'il restait ça et là des marges d'amélioration, la Cour considérant que certains retraitements comptables pratiqués par la direction de la sécurité sociale mériteraient d'être traités plus rigoureusement.

Il a ensuite indiqué que, sur le fond, la caractéristique principale de l'année 2002 consiste en un retour des déficits, puisque les comptes sociaux, après trois années d'excédent, présentent un besoin de financement s'élevant à 3,4 milliards d'euros pour le régime général et 3,8 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes de base obligatoire. Il a insisté sur le fait que le point crucial demeure la persistance d'un rythme excessif de progression des dépenses d'assurance maladie, expliquant la concentration d'un déficit sur cette seule branche à un niveau jusqu'alors inconnu. Il a enfin constaté qu'en 2002, l'ONDAM voté par le Parlement a encore été dépassé de près de 4 milliards d'euros.

M. François Logerot, Premier président , a présenté ensuite  la deuxième partie du rapport de la Cour consacrée, en écho à la crise financière de l'assurance maladie, à l'évolution et à la régulation des dépenses de santé depuis 1996. Il a indiqué que le rapport faisait ainsi le point des facteurs structurels expliquant l'accélération régulière de l'évolution des dépenses d'assurance maladie, notamment la surprescription de médicaments, la progression forte des dépenses d'indemnité journalière et l'accès croissant de certains assurés au bénéfice du statut d'affection de longue durée (ALD). Il a également précisé que certains facteurs conjoncturels peuvent être mis en évidence comme source de surcoûts, notamment la succession des protocoles hospitaliers et les mesures de revalorisation des honoraires.

Il a déclaré que le rapport insiste, au-delà de ces constats, sur le caractère inopérant des mécanismes de régulation des dépenses mis en place depuis le début des années 90, qu'il s'agisse des instruments de maîtrise comptable des dépenses ou de ceux de maîtrise médicalisée dont l'impact demeure des plus limités. Il a précisé que le rapport constatait que notre système de santé apparaît ne plus être régulé, situation intenable à long terme et qui explique, par la gravité de la situation, la création intervenue depuis sa publication d'un Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.

Il a enfin présenté la dernière partie du rapport, consacrée aux effets, pour la sécurité sociale, du vieillissement de la population. Il a ainsi précisé que le rapport met notamment en évidence les grandes disparités du système français de retraite et que, sous l'angle de la santé, il procède à plusieurs développements relatifs aux réseaux de santé, à la prescription de médicaments ou au fonctionnement des urgences qui montrent l'inadaptation du système de santé aux enjeux majeurs du vieillissement.

M. François Logerot, Premier président , a enfin insisté sur le caractère contradictoire de la méthode de travail de la Cour, qui a permis que, dans le cadre de ce rapport, et au-delà des ministres concernés, plus de 140 organismes, administrations ou établissements ont été associés à son élaboration. Il a enfin jugé souhaitable de renforcer les liens existant entre la commission des affaires sociales et la Cour des comptes, cette dernière pouvant, dans ses prochains rapports annuels, voire dans des rapports publics particuliers, examiner certains points spécifiques, pour peu que les demandes de la commission puissent s'insérer dans le programme de travail de la Cour, ce qui suppose qu'elles soient formulées dans des délais raisonnables.

M. Bernard Cieutat a prolongé la présentation exposée par M. François Logerot, Premier président, en indiquant que la situation des comptes sociaux en 2002 se caractérise par la réapparition d'un phénomène de ciseau entre l'évolution des recettes, qui ralentit, et celle des dépenses, qui progresse. Il a précisé que le déficit du régime général, réapparu après quatre années d'excédent, porte sur la seule branche maladie, alors que les branches vieillesse et famille restent excédentaires, en 2002, comme elles l'étaient en 2001. Il a déclaré que ce constat avait invité la Cour à centrer son analyse sur deux points, les causes de l'évolution des dépenses d'assurance maladie, d'une part, et le fonctionnement du système de régulation des dépenses de santé, d'autre part.

Concernant les causes de l'évolution des dépenses, il a déclaré que le rapport met en évidence que l'accélération des dépenses d'assurance maladie ne tient pas à une inflexion particulière de la demande de soins, mais que la Cour a pu relever le poids très lourd de décisions récentes dans l'accélération constatée, ce coût pouvant être évalué à 5,5 milliards d'euros en 2003, à rapprocher du déficit de 11 milliards d'euros prévu pour cet exercice.

M. Bernard Cieutat a détaillé l'essentiel de ces décisions parmi lesquelles figurent les protocoles hospitaliers et le financement de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux, le coût des nouvelles entrées en affection de longue durée, les revalorisations des honoraires des généralistes et le report des mesures de déremboursement des médicaments à service médical rendu insuffisant.

Il a également rappelé que le rapport notait, en 2002, une augmentation plus rapide des indemnités journalières. Celle-ci affectant plus particulièrement la tranche d'âge des 55-59 ans, il a précisé que la Cour avait constaté également que cette hausse s'est produite parallèlement aux restrictions apportées aux dispositifs de préretraite, mais qu'un lien de cause à effet entre les deux phénomènes restait à démontrer.

En ce qui concerne les mécanismes de régulation, il a déclaré que la Cour avait dû prendre acte de leur manque de résultats. Il a donc indiqué que le cadre institutionnel devait être revu pour lui donner plus d'efficacité et permettre, notamment au Parlement et à la loi de financement qu'il vote, de jouer pleinement leur rôle. Il a relevé, à ce titre, que la pratique du rebasage de l'ONDAM était effectuée sur une base assez obscure et que le développement de dépenses d'assurance maladie, hors ONDAM, ôtait à celui-ci beaucoup de sa signification, rendant peu lisible l'information donnée au Parlement et nuisant par lui-même à l'objectif de maîtrise des dépenses.

M. Bernard Cieutat a insisté sur le caractère relativement inopérant des instruments directs de la régulation, la régulation par les prix et les tarifs de remboursement ayant pratiquement disparu avec l'extension de l'assurance complémentaire et la création de la couverture maladie universelle. En outre, il a constaté à la fois la faible progression de la gestion du risque maladie par les caisses et la dispersion de la politique du médicament dans la poursuite d'un trop grand nombre d'objectifs.

Il a rappelé, par ailleurs, que la politique conventionnelle menée avec les professions libérales pour réguler les soins de ville n'avait pas empêché l'accélération du rythme des dépenses.

Il a ensuite déclaré que les instruments d'action à moyen terme, visant à rationaliser les comportements des professionnels et des patients, n'ont pas non plus produit les effets escomptés, la Cour ayant relevé notamment le trop faible développement des pratiques d'accréditation et d'évaluation ou encore un blocage persistant dans la formation et l'information des médecins et des professionnels libéraux de santé. Il a rappelé qu'en définitive, le rapport de la Cour se bornait à démontrer qu'en matière de régulation des dépenses d'assurance maladie, beaucoup d'initiatives avaient été décidées, mais que peu de mesures avaient été réellement appliquées.

M. Bernard Cieutat a déclaré que, dans sa troisième et dernière partie, le rapport de la Cour traitait des problèmes consécutifs au vieillissement de la population, notamment des retraites, c'est-à-dire des revenus des personnes âgées, et des soins qui leur sont apportés, c'est-à-dire de leur santé. Il a rappelé que la loi du 21 août 2003 portant  réforme des retraites améliorait les perspectives de financement, sans épuiser un sujet qui restera d'actualité dans les décennies à venir. S'agissant des soins aux personnes âgées, il a souligné que le rapport abordait, en particulier, trois questions essentielles, celle des réseaux de soins de personnes âgées, celle de la consommation de médicaments par ces derniers et, enfin, prolongeant les analyses de l'année précédente, la question de l'insuffisance de l'accueil des personnes âgées dans les services d'urgence.

En conclusion, il a indiqué que, parmi les principaux travaux envisagés pour les deux prochaines années, dans le domaine des questions sociales, figurent notamment la gestion des risques et l'organisation territoriale de la sécurité sociale, une synthèse sur la politique du médicament, les comptes des organismes de sécurité sociale et leur certification, l'hébergement des personnes âgées, la fonction publique hospitalière, ainsi qu'en matière de politique familiale, une insertion éventuelle sur la politique menée en faveur de la petite enfance dans le prochain rapport public annuel que la Cour présentera devant la commission à l'automne.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres généraux , s'est interrogé sur la divergence entre les évaluations de la Cour des comptes et celles de la CNAM relatives au coût de la revalorisation des honoraires des médecins, la première chiffrant cette mesure à 690 millions d'euros de dépenses supplémentaires, la seconde à seulement 220.

M. Bernard Cieutat, président de la 6 e chambre , a déclaré que la somme de 690 millions d'euros représentait le coût des mesures prises au titre des accords de janvier et de juin 2002, alors que le chiffre avancé par la CNAM ne rendait compte que du coût du protocole du 5 juin. Il a, en outre, précisé que l'économie due au titre des contreparties à ces accords, estimée à 150 millions d'euros par la CNAM, s'élevait, d'après la Cour, au maximum à 70 millions d'euros.

M. Christian Babusiaux, conseiller maître , a rappelé que le chiffre de 690 millions d'euros avait été repris par la Cour et qu'il figurait dans le rapport de la commission des comptes de mai 2003 sans avoir jamais été contesté. Il a souligné, en outre, que ce coût excluait celui des mesures annexes qui était venu les majorer, notamment la hausse des frais de prise en charge des cotisations d'assurance maladie résultant de l'augmentation des honoraires et les mesures relatives à la rémunération des gardes et astreintes, ces deux mesures annexes pouvant être évaluées à 64 millions d'euros. En outre, il a déclaré que l'évaluation des contreparties relatives aux médicaments n'atteint pas la somme avancée par la CNAM et qu'il devait donc être considéré que les accords de juin revêtent, avant tout, un caractère politique dont l'objet central consiste en la restauration d'un dialogue conventionnel depuis longtemps rompu.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres généraux , a demandé au premier président et au président de la 6 e chambre de bien vouloir présenter la réponse formulée à la cinquième question du questionnaire, consacrée au FOREC. Il a demandé si la Cour serait en mesure de fournir un certain nombre de précisions sur l'inscription des recettes du fond de réserve des retraites dans les prévisions de recettes de la loi de financement de sécurité sociale, sur l'opportunité de prévoir le principe d'une exclusivité des lois de financement pour créer des exonérations de cotisations sociales, sur l'articulation entre les règles organiques relatives aux lois de financement et aux lois de finances, sur les conséquences de la double inscription dans les agrégats de la branche famille et vieillesse des dépenses relatives à la majoration de pension pour enfant et, enfin, sur les conséquences de la jurisprudence de la Cour de cassation relative à la contribution sociale de solidarité sur les sociétés (CSSS) pour le régime de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat (TACA). Il s'est enfin interrogé sur les conditions de financement de la trésorerie de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et a demandé si la Cour avait étudié les alternatives aux règles régissant actuellement ce financement, notamment le concours de la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

En réponse à M. Alain Vasselle, M. Bernard Cieutat a précisé que le FOREC n'était pas un instrument de clarification et que sa suppression tirait les conséquences du maintien de la logique du remboursement intégral, à la sécurité sociale, des allégements de cotisations sociales. Sur les autres questions posées par le rapporteur pour les équilibres généraux, M. Bernard Cieutat a précisé qu'en raison de leur caractère technique et précis, la Cour ferait parvenir au rapporteur une réponse détaillée dans les jours prochains.

M. André Vantome a rappelé que le Parlement était le gardien des valeurs résumées par la devise républicaine et qu'il souhaitait, à ce titre, attirer l'attention de la Cour sur le second terme de cette dernière, à savoir l'égalité. Il a constaté qu'aujourd'hui, l'égalité d'accès aux soins sur l'ensemble du territoire est une exigence majeure à laquelle, depuis plusieurs années, les pouvoirs publics se sont attachés. Il a rappelé que des péréquations importantes ont été opérées au profit de régions défavorisées, dont notamment la Picardie, mais que cette politique n'a, semble-t-il, pas obtenu tous les résultats escomptés et que, dès lors, peut être constatée la persistance, voire l'aggravation, des inégalités en liaison avec les problèmes conjoncturels de pénurie de personnels médicaux et paramédicaux.

En outre, il a souligné que la mise en oeuvre de politiques nouvelles, dont la réduction du temps de travail et la prise en compte de certaines priorités, permet aujourd'hui aux établissements hospitaliers de toute région de créer des postes médicaux ou paramédicaux. Il a ainsi constaté que cette situation aboutit à accélérer le processus inégalitaire, d'autant plus que certains établissements n'hésitent pas à déroger au respect des règles de la fonction publique pour recruter plus facilement, notamment par le non-respect des échelons ou l'octroi d'avantages en nature, et ceci sans que les agences régionales d'hospitalisation ne réagissent. Il a demandé, en conséquence, au Premier président de la Cour des comptes si cette dernière pouvait se livrer à un diagnostic précis de ces pratiques pour en obtenir la cessation et ainsi contribuer au rétablissement de l'exigence républicaine que constitue l'accès aux soins, objectif majeur de la loi de financement de la sécurité sociale.

M. François Logerot, Premier président , a déclaré que la Cour avait consacré plusieurs travaux aux fonctionnaires de l'État et qu'une étude sur la fonction publique territoriale et hospitalière pouvait être envisagée, mais qu'elle nécessiterait un concours actif des chambres régionales des comptes. S'il a exclu que puisse être effectué un contrôle sur tous les établissements hospitaliers, il a déclaré qu'un contrôle ciblé sur un échantillon suffisamment représentatif pourrait avoir lieu, de même qu'un diagnostic des inégalités de recrutement auxquelles certains de ces établissements se trouvaient confrontés.

M. Bernard Cieutat a souligné que ce point pourrait être abordé dans le cadre d'une étude sur la fonction publique hospitalière que le programme de la Cour envisagerait pour la fin de l'année 2004.

M. Guy Fischer a demandé à M. Bernard Cieutat si celui-ci pouvait confirmer que 75 % des cotisations des médecins étaient prises en charge par l'assurance maladie. Il s'est également interrogé sur l'évolution des dépenses dues aux médicaments, notamment de la hausse des prix liés à l'arrivée de molécules nouvelles sur le marché et aux pratiques de déremboursement. Il a souhaité savoir dans quelle mesure la Cour des comptes pourrait contribuer à ce qu'une juste idée du prix du médicament puisse être obtenue.

M. Bernard Cieutat a rappelé que la Cour préparait une synthèse sur la politique du médicament pour l'année 2004.

M. Christian Babusiaux a déclaré que les revenus des professionnels de santé ne faisaient pas l'objet d'une politique organisée, que des disparités entre professions étaient constatées, que l'évolution des négociations avait accru ces disparités et que la Cour se prononce, dans le cadre de son rapport, pour une rationalisation des politiques publiques sur ce sujet.

M. Gilbert Barbier a rappelé que la Cour cite les indemnités journalières comme cause importante du dérapage des dépenses d'assurance maladie en 2002 et a demandé si elle avait mieux cerné ce problème. Il a également constaté que la Cour dresse un tableau assez négatif sur les conventions avec les professions de santé et a souhaité savoir, au moment où est abordée la réforme de la sécurité sociale, si elle considère que la politique conventionnelle constitue une mauvaise politique.

M. Bernard Cieutat a déclaré que les indemnités journalières avaient crû brutalement en 2000 et en 2002, laissant suspecter une forte dérive des pratiques relatives à cette dépense. En outre, il a insisté sur le caractère positif de la politique conventionnelle pour le bon usage des soins, mais a déclaré qu'elle comportait des effets pervers et pouvait générer une augmentation sensible des coûts de fonctionnement du système de santé, qui conduisait la Cour à constater qu'en matière de régulation, la politique conventionnelle avait fait long feu.

M. Gilbert Barbier s'est interrogé sur les fruits de la politique conventionnelle menée avec les professions paramédicales.

M. Christian Babusiaux a précisé qu'un distinguo pouvait être établi puisque certains accords avec les professions paramédicales avaient donné de bons résultats, mais que, d'un point de vue plus général, la politique conventionnelle revêtait aujourd'hui des caractères inquiétants, s'étendant à des domaines qui ne sont pas conventionnels par nature, comme par exemple la répartition des tâches entre infirmières et médecins, qui ne peut pas être traitée par des conventions séparées, et le fait que ces conventions soient conclues de plus en plus par des partenaires sociaux minoritaires. Il a, enfin, insisté sur le fait que les problèmes d'assurance maladie demeuraient des problèmes multilatéraux, et ne pouvaient, en général, être traités par des instruments bilatéraux.

D. AUDITION DE M. PIERRE BURBAN, PRÉSIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION, ET M. FRÉDÉRIC VAN ROECKEGHEM, DIRECTEUR GÉNÉRAL, DE L'AGENCE CENTRALE DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE (ACOSS)

Réunie le mercredi 5 novembre 2003, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission, dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 , a procédé à l'audition de M. Pierre Burban, président du conseil d'administration, et M. Frédéric Van Roeckeghem, directeur général, de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS).

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie , a demandé à M. Pierre Burban de préciser la situation de trésorerie de la sécurité sociale en 2003 et 2004, en indiquant notamment le point le plus bas atteint en prévisions pour ces deux années, l'ampleur des frais financiers versés par les différentes branches du régime général et les paramètres retenus pour l'évaluation du plafond d'avance proposée par le projet loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'ACOSS, a tout d'abord rappelé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 est un projet de transition, qui s'inscrit dans l'attente des évolutions du régime d'assurance maladie. Il a indiqué que le point de trésorerie le plus bas avait été atteint le 10 octobre 2003 à - 14,1 milliards d'euros, alors que la loi de financement de la sécurité sociale avait limité le plafond d'avances à 12,5 milliards d'euros. Il a précisé que, dès le mois d'avril, il était apparu au conseil d'administration de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) que ce plafond serait insuffisant et que l'Agence avait porté à la connaissance des pouvoirs publics, par la voix de son représentant à la commission des comptes de la sécurité sociale, qu'un relèvement de ce plafond devrait être envisagé en l'absence d'autres mesures correctrices. Le conseil d'administration a été saisi, le 28 août dernier par le Gouvernement, d'un projet de décret de relèvement dudit plafond.

Concernant le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'ACOSS, a déclaré que l'ACOSS avait réalisé des prévisions tenant compte de la situation de trésorerie pour 2003 et d'éléments de prévisions économiques figurant dans le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2003. Il a indiqué que ces éléments de prévision laissaient apparaître un point bas pour le régime général au 31 décembre 2004, à hauteur de - 29,9 milliards d'euros. Il a toutefois précisé que ces prévisions étaient très sensibles à l'évolution des différents paramètres économiques, notamment la croissance de la masse salariale, ou de l'ONDAM, et qu'il avait semblé nécessaire, au regard de scénarii variants, de fixer le plafond d'avance en tenant compte d'une marge de précaution d'environ 10 %.

Il a enfin indiqué que le montant des frais financiers nets versés par le régime général s'élèverait en 2003 à 180 millions d'euros et à 515 millions d'euros en 2004.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a demandé à M. Pierre Burban de détailler les conditions de financement de l'ACOSS et de préciser si cette dernière avait envisagé un partenariat avec la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) pour améliorer ses conditions de refinancement à court terme.

M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'ACOSS, a précisé que les modalités de financement de l'ACOSS, telles qu'elles figurent dans le rapport de la Cour des comptes de septembre 2003 sur l'exécution de la loi de financement pour 2002, correspondent aux conditions fixées par une convention datant de 1980. Il a indiqué qu'une nouvelle convention avait été signée en octobre 2001, arrêtant de nouvelles modalités de financement plus avantageuses pour l'agence. Celle-ci a obtenu, en effet, la mise en place d'avances prédéterminées, qui diminuent encore le coût de refinancement du régime général. Il a souligné que la direction générale de l'ACOSS s'était enquise du coût de refinancement qui pourrait lui être appliqué par d'autres intermédiaires financiers, en complément à la caisse des dépôts et consignations, mais que celui-ci demeurait beaucoup plus élevé que le taux pratiqué par la caisse. Il a enfin estimé que la CADES, chargée de l'amortissement des dettes de la sécurité sociale, était davantage tournée vers le financement à moyen et long termes et qu'il n'entre pas dans les missions actuelles de ces établissements de financer à court terme le régime général.

M. Alain Vasselle a demandé si l'ACOSS avait déjà passé des écritures comptables, au titre du remboursement de la dette du FOREC par la CADES. Il s'est en outre interrogé sur l'existence de créances de l'ACOSS sur l'État au titre des allégements de cotisations sociales, une fois cette dette remboursée.

M. Pierre Burban a précisé que la CADES avait fait figurer le montant du remboursement prévu par l'article 2 du projet de loi de financement au titre de ses engagements «hors bilan» mais que cela n'avait pas donné lieu à passation d'une écriture comptable par l'ACOSS. Il a précisé que le remboursement de 1,1 milliard d'euros prévu par le projet de loi de financement solde, en quasi-totalité, la créance correspondant au champ FOREC 2000, 267.000 euros restant toutefois à rembourser par ce fonds au titre de la ristourne dégressive et des allégements Aubry 1 et 2. Il a toutefois précisé qu'il demeurait, au titre des allégements de cotisations antérieures à la création du FOREC, une créance à recouvrer s'élevant à environ 771 millions d'euros.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres généraux et l'assurance maladie, a demandé à M. Pierre Burban si, selon lui, la date de suppression du FOREC, fixée par le projet de loi au 1 er janvier 2004, comprenait une période complémentaire de liquidation.

M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'ACOSS, a considéré qu'il lui semblait nécessaire que la suppression du FOREC prévoie soit un allongement de la période complémentaire, soit un exercice 2004 dédié à la liquidation, si les règles de la comptabilité publique le permettent. Il a précisé que les différentes interprétations de la date de suppression comportaient des conséquences financières : en droits constatés, il y aurait maintien des règles de gestion homogène sur l'exercice 2001, mais si la date d'effet devait être interprétée de façon plus stricte, le FOREC pourrait ne pas assumer les exonérations dues au titre du quatrième trimestre 2003, comptabilisées en janvier 2004 et qui devraient, dès lors, être prises en charge par l'État. Il a précisé que la régularisation annuelle du FOREC au titre de 2003 pourrait être arrêtée à décembre 2003 et calculée sur onze mois de référence, les versements de l'État devant alors être anticipés dès le 1 er janvier 2004 dans cette hypothèse.

M. Alain Vasselle a souhaité connaître l'opinion de l'ACOSS sur la création d'un comité des finances sociales.

M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'ACOSS, n'a pas souhaité juger en opportunité une initiative parlementaire, mais a indiqué que cette proposition mériterait peut-être d'être traitée dans le cadre global de la gouvernance de la sécurité sociale.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a fait observer que le projet de loi de financement prévoit plusieurs validations rétroactives touchant à la branche recouvrement. Il a, en outre, noté que l'interprétation du droit relatif aux finances sociales n'est pas toujours uniforme et a souhaité connaître quelle réponse l'ACOSS a déjà apportée à ces difficultés et quelles initiatives peuvent être prises par le législateur sur ce sujet.

M. Pierre Burban a précisé que l'ACOSS avait, d'ores et déjà, mis en oeuvre en direction des URSSAF plusieurs actions, parallèlement au fait que sa direction de la réglementation assure à ces unions une expertise juridique et qu'elle produit des circulaires de référence. Il a précisé, en outre, que l'agence assure le pilotage des contrôles concertés des grandes entreprises pour les URSSAF et qu'avait été lancée une offre de conseils personnalisés dans le cadre de la charte du cotisant.

Il a, par ailleurs, avancé que tout en préservant l'autonomie juridique qui caractérise les URSSAF, deux axes de travail sont possibles sur ce sujet, le premier s'appuyant sur le renforcement des droits des usagers, en instaurant la possibilité d'un recours hiérarchique, le second renforçant le pouvoir de l'ACOSS qui serait en mesure d'imposer le respect du droit aux URSSAF en cas d'erreur manifeste d'interprétation des normes.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a souhaité savoir si un raccourcissement du délai de versement par la direction des douanes du produit des droits de consommation sur le tabac était intervenu ces dernières années et si ce raccourcissement avait eu des effets sur les comptes du régime général.

M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'ACOSS, a précisé que le produit de la taxe sur le tabac est recouvré soit par la recette principale régionale des douanes et des droits indirects de Paris, qui verse directement à l'ACOSS trois fois par mois la fraction de son produit affectée au régime général, soit par les receveurs des douanes, qui versent au fil de l'eau ce produit sur les lignes territoriales. Il a précisé que la répartition des droits sur le tabac avait été modifiée à plusieurs reprises au cours des dernières années et que, pour 2003, la part affectée à la CNAM s'élève à 15,20 %, représentant sur huit mois près d'un milliard d'euros. Il a déclaré n'avoir pas eu connaissance d'une modification significative dans le recouvrement direct, qui aurait entraîné une amélioration des conditions financières.

M. Alain Vasselle a souhaité savoir si le solde résiduel du FOREC, que le projet de loi propose de retourner au budget général, pouvait faire l'objet d'un préciput en faveur de l'apurement des créances de l'ACOSS sur l'État au titre des allégements de cotisations. Il a, en outre, demandé à M. Pierre Burban de préciser, par branche, le montant des frais financiers versés par la sécurité sociale en 2003 et en 2004.

M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'ACOSS, a déclaré qu'il ferait parvenir par écrit au rapporteur plusieurs précisions à ses questions et a indiqué que le législateur pouvait modifier les termes du projet de loi pour prévoir un tel remboursement. Il a enfin indiqué qu'en 2003, les frais financiers débiteurs de l'assurance maladie s'élèvent à 394 millions d'euros, contre un million d'euros seulement pour l'assurance vieillesse, et que les branches famille, vieillesse et accidents du travail présentaient, pour leur part, un solde créditeur respectif de 124, 46 et 45 millions d'euros. Pour 2004, si les branches accidents du travail, vieillesse et famille présentent, comme prévu, des soldes similaires, les frais versés par l'assurance maladie s'élèveraient à 730 millions d'euros.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a déclaré que le complément de réponses apportées par M. Pierre Burban sera annexé au rapport de la commission.

ANNEXE
-
RÉPONSES DE LA COUR DES COMPTES
AU QUESTIONNAIRE DE LA COMMISSION

QUESTION N° 1

Les périmètres comptables des finances sociales

La Cour rappelle dans son rapport, page 70, « que la CADES et le FRR ne font pas partie des administrations de sécurité sociale et sont classés parmi les organismes divers d'administration centrale ».

a) Quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur le classement du FRR en ODAC dès lors que les recettes et les dépenses de ce fonds figurent en loi de financement de la sécurité sociale, sont constituées de recettes provenant essentiellement d'organismes de sécurité sociale, ou de fiscalité affectée à ces derniers, et que ces dépenses, à terme, constitueront des recettes pour lesdits organismes ?

b) Quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur le classement de la CADES en ODAC dès lors que cette caisse assure l'amortissement de la dette de la sécurité sociale. Comparer ce classement au regard de la solution de présentation dans les comptes nationaux retenue pour l'amortissement de la dette du budget général.

c) Figurent parmi les organismes de sécurité sociale dont les comptes sont intégrés au solde des administrations de sécurité sociale en comptabilité nationale, les régimes complémentaires obligatoires de retraite, notamment AGIRC et ARRCO. Ce solde n'intègre par les dépenses des organismes complémentaires couvrant le risque maladie, même si ces derniers sont rendus obligatoires par une disposition réglementaire ou conventionnelle.

Quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur cette distinction ? Si, à l'avenir, ces régimes étaient rendus obligatoires par la loi, conviendrait-il de les intégrer aux comptes nationaux ?

RÉPONSE N° 1

a) Le classement de la CADES et du FRR en ODAC plutôt qu'en Administration de Sécurité Sociale résulte des définitions adoptées par les comptables nationaux dans le cadre européen. Sont considérées comme Administrations de sécurité sociale les organismes qui versent des prestations sociales. Tel n'est pas le cas ni de la CADES ni du FRR qui portent l'un, une dette sociale pour le compte de l'Etat, l'autre, des actifs qui pourront ultérieurement servir à financer des prestations. Ils n'entrent pas en ligne de compte dans la fixation par la LFSS des prévisions de recettes et des objectifs de dépenses.

Toutefois, rien interdit que dans le rapport sur les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier, mention soit faite annuellement de la situation de la CADES et du FRR afin de mieux informer la représentation parlementaire.

b) La situation de la CADES n'est pas identique à celle de l'amortissement de la dette de l'Etat. Dans le cas de la CADES, la dette de la sécurité sociale est cantonnée et financée par une recette affectée qui garantit le remboursement des emprunts - ce qui permet à la CADES d'avoir sur les marchés une excellente notation. Dans le cas du budget de l'Etat, les charges d'intérêt sont dans le budget général et ne sont pas traités de façon différente aux autres dépenses. Le jugement porté par les investisseurs sur l'ampleur du déficit budgétaire et le niveau global d'endettement rejaillit dès lors sur la signature de l'Etat.

c) Les complémentaires maladie ne sont pas des régimes obligatoires. Les cotisations versées aux mutuelles et assurances n'ont donc pas le caractère d'un prélèvement obligatoire. Si à l'avenir ces régimes étaient rendus obligatoires, la conséquence immédiate serait une majoration des prélèvements obligatoires.

QUESTION N° 2

La clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale et le statut des accises

La Cour estime, à la page 62 de son rapport qu'en ce qui concerne les impôts et taxes affectés à la sécurité sociale, « l'ensemble reste complexe et la simplification de ce dispositif, notamment par affectation de l'intégralité des taxes tabac et alcool aux caisses maladie, reste nécessaire ».

a) Préciser les raisons pour lesquelles la Cour estime que l'affectation aux caisses maladie de ces accises, recettes historiques du budget général, constitue une source de simplification.

b) Le projet de suppression du FOREC proposée par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 prévoit ainsi le retour de l'ensemble des dépenses et des recettes de ce fonds au budget général, ce dernier assurant, au moyen d'une dotation budgétaire, ainsi qu'il le faisait antérieurement à la création du FOREC, la compensation intégrale du coût des exonérations de charges sociales. La Cour estime-t-elle que l'économie générale de cette suppression est un facteur de clarification, malgré la non-affectation de l'intégralité des droits tabacs et alcools aux régimes d'assurance maladie ?

c) Une alternative aurait pu constituer en une suppression du FOREC dont les recettes et les dépenses auraient été éclatées entre les différentes branches de sécurité sociale, au prorata du coût des exonérations. La Cour estime-t-elle qu'une telle alternative, qui aurait au moins partiellement autorisé la rétrocession des accises susmentionnées aux régimes d'assurance maladie, aurait constitué une mesure de clarification ? Dans l'affirmative, la Cour estime-t-elle que le suivi effectif de la compensation intégrale aurait été possible, et sous quelles conditions ?

d) Au regard de la structure de l'assiette et des taux de ces accises, ainsi que de la structure des marchés du tabac et des alcools, la Cour estime-t-elle que cette fiscalité sert davantage des objectifs de santé publique, de politique industrielle ou de rentabilité budgétaire ?

RÉPONSE N° 2

La complexité résulte du fait que de nombreuses taxes sont affectées aux régimes sociaux, le plus souvent sans grand rapport avec les dépenses de ces régimes. De plus, ces taxes sont parfois affectées à plusieurs régimes sans qu'il existe d'autres motifs que de couvrir un certain montant de dépenses prévisionnelles. La Cour a notamment regretté que les taxes sur le tabac et les alcools ne soient pas intégralement affectées aux régimes maladie, alors que les liens entre consommation de tabac et d'alcool et certaines pathologies sont parmi les mieux établis.

Il est indiscutable que les majorations successives des taxes sur le tabac concourent à un objectif de santé publique et pas seulement de rentabilité budgétaire. Si ces hausses ont pour effet de réduire la consommation de tabac, arrive logiquement un moment où l'impact budgétaire de la mesure devient négatif pour les recettes sociales. C'est un cas typique où la perte de recettes se constate à court terme alors que l'impact sur les dépenses de santé ne se vérifiera que sur la longue durée.

Le FOREC n'a pas été un instrument de simplification mais simplement un écran entre l'Etat qui collecte ces taxes et les différents régimes. L'idée qui commande cette affectation de taxes de préférence à une subvention globale est la même que celle qui a fondé la substitution de la CSG aux cotisations sociales : il s'agit de trouver des ressources alternatives aux cotisations sociales.

De plus, pour le ministère des finances du moins, la création du FOREC répondait aussi à l'idée qu'à l'avenir les taxes affectées pourraient se substituer à la logique du remboursement des exonérations - et donc à l'abandon du principe posé par la loi de 1994 -. Cette logique n'a finalement pas prévalu. Dès lors que le FOREC est resté dans une logique de remboursement, il n'apporte rien de plus par rapport au versement du montant des exonérations directement à l'ACOSS. Le gouvernement propose d'en tirer les conséquences avec la LFSS pour 2004.

QUESTION N° 3

La protection du « domaine des lois de financement »

A la page 61 de son rapport, la Cour rappelle, que la loi du 20 juillet 2001 a soustrait 0,1 point de CSG affectée au FSV afin de financer le fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie. Plusieurs mesures interviennent ainsi régulièrement en loi ordinaire qui ont une incidence sur les recettes et les dépenses des organismes sociaux.

a) A l'instar des règles prévalant pour les lois de finances, la Cour considère-t-elle qu'il est loisible au législateur d'adopter des dispositions modifiant l'assiette ou les taux de recettes fiscales affectées à la sécurité sociale en dehors d'une loi de financement de la sécurité sociale ? Dans l'affirmative, quelles conditions devraient, selon la Cour, entourer l'adoption de telles dispositions ?

b) Répondre à la même question pour des dispositions modifiant en dehors des lois de financement les régimes d'exonération ou d'allégement de cotisations sociales.

c) Par ailleurs, l'article 35 de la loi de finances pour 2003 a affecté au budget de l'Etat la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat (TACA), antérieurement affectée aux régimes de sécurité sociale ORGANIC et CANCAVA (article 40 II de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997).

• La Cour, estime-t-elle possible à une loi de finances d'abroger une disposition votée dans la loi de financement d'une année précédente hors de toute disposition prise « en miroir » dans la loi de financement de l'année ?

• La Cour estime-t-elle que la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat constitue juridiquement une taxe sur le chiffre d'affaires, à l'instar de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés (CSSS) ?

• Dans l'affirmative, la Cour estime-t-elle que la jurisprudence communautaire applicable aux taxes sur le chiffre d'affaires -rappelée à l'égard de la CSSS- est applicable à la TACA, à savoir que les taxes sur le chiffre d'affaires ne sont « eurocompatibles » que dès lors qu'elles sont affectées à des régimes de protection sociale ? Dans l'affirmative, comment la Cour apprécie-t-elle la budgétisation de la TACA en loi de finances pour 2003 ?

d) Ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 propose de supprimer le FOREC, en renvoyant au budget de l'Etat les recettes et les dépenses de ce fonds. L'article 3 du pré-projet 25 ( * ) précise, à ce titre, les conditions de suppression de ce fonds, tandis que l'article 4 modifie la fiscalité relative au tabac, fiscalité antérieurement affectée au FOREC. En revanche, la nouvelle répartition des droits sur le tabac est fixée par le II de l'article 24 du projet de loi de finances pour 2004, qui affecte le montant de ces droits pour 26,94 % au budget général et pour 73,06 % à des organismes dont les prévisions de recettes figurent, pour leur part, à l'article 13 du pré-projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.

• Quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur l'articulation respective du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Estime-t-elle logique que l'assiette et le taux des droits sur les tabacs soient fixés en loi de financement, de même que ceux-ci figurent dans les prévisions de recettes des organismes sociaux, mais que le partage du produit de ces droits entre lesdits organismes soit réalisé en loi de finances ?

• Plus largement, quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur l'articulation entre les dispositions organiques relatives aux lois de financement et les dispositions organiques relatives aux lois de finances ?

RÉPONSE N° 3

a), b) et d) Du point de vue constitutionnel, il n'existe aucune règle qui interdirait au législateur d'adopter dans une loi ordinaire des dispositions affectant l'assiette ou les taux des recettes fiscales ni même de créer un nouvel impôt. Dans son dernier rapport consacré à la fiscalité dérogatoire, le Conseil des impôts s'est inquiété de cette tendance à utiliser les lois ordinaires pour adopter des mesures fiscales, souvent dans le sens d'allégements qui réduisent les recettes de l'Etat. Il a proposé que soit « posé le principe d'une exclusivité des lois de finances pour créer des dépenses fiscales ». Ce principe devrait évidemment s'étendre à l'assiette et au taux.

Par ailleurs, le Sénat demande si les impôts et taxes affectées à la sécurité sociale doivent être définies dans la loi de finances ou dans la loi de financement de la sécurité sociale.

- Lorsque l'intégralité du produit de l'imposition est affectée, il est logique que l'assiette et le taux, ainsi que la répartition éventuelle entre régimes de la recette, soient définis dans la LFSS ;

- par contre, lorsque le produit est partagé entre l'Etat et la sécurité sociale, la question est plus complexe. C'est le cas de la LFSS pour 2004 à propos des taxes sur le tabac que la Cour n'a pas eu pour l'instant à examiner.

Il appartient sans doute au législateur de fixer la règle ou de saisir le conseil constitutionnel pour connaître son interprétation.

c) La TACA est calculée par m², la surface étant elle-même une fonction du chiffre d'affaires. Elle est donc assimilable à une taxe sur le chiffre d'affaires. La Cour n'a pas eu à ce jour à se prononcer sur le caractère « eurocompatible » ou non de sa rebudgétisation en 2003.

QUESTION N° 4

La construction des agrégats

A la page 74 de son rapport, la Cour rappelle implicitement le principe comptable adopté par la Direction de la sécurité sociale de consolider les transferts entre les différentes branches du régime général. En revanche, dès lors que ces transferts transitent par un organisme de financement de ces régimes, cette consolidation n'est pas effectuée.

Ainsi, tant en 2001 qu'en 2002, l'objectif de la branche vieillesse-veuvage comprend une dépense également enregistrée dans l'objectif de dépenses de la branche famille. Les majorations de pensions pour enfants figurent, en effet, en poste « prestation » au sein de l'agrégat de dépenses vieillesse-veuvage et en poste « transfert » dans l'objectif de dépenses de la branche famille.

Quelle appréciation la Cour porte-t-elle sur cette présentation au regard de la sincérité et de la lisibilité des objectifs prévus par les 1° et 3° de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale ?

RÉPONSE N° 4

La loi de financement de la sécurité sociale :

- fixe des objectifs de dépenses par branche pour les régimes ayant plus de 20.000 cotisants actifs ou retraités de droit propre ;

- évalue l'ensemble des recettes de tous les régimes par grandes catégories (cotisations, impôts etc).

Les périmètres retenus, notamment pour les dépenses, ne sont pas les mêmes que ceux retracés par les comptes de la protection sociale ou par les comptes de la sécurité sociale au sens de la CCSS. Dès lors, la question soulevée ne peut recevoir de réponse au stade de la fixation des objectifs.

Par contre, c'est au stade de l'élaboration des comptes de la sécurité sociale dont est chargée la Mission comptable permanente, sous le contrôle du Haut conseil de la comptabilité des organismes de sécurité sociale, qu'est faite la consolidation des comptes des différents régimes et branches, ce qui permet notamment de procéder aux annulations de doubles comptes.

Au cas d'espèce, les majorations pour enfant restent bien une dépense pour la branche retraite et leur financement partiel est une charge pour la branche famille, même si celle-ci verse sa contribution au FSV.

QUESTION N° 5

La question de la dette FOREC

L'article 14 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 a prévu que la CADES rembourse aux organismes de sécurité sociale une fraction de la dette due par le FOREC au titre des exonérations de charges impayées en 2000. Le II de cet article prévoit explicitement que cette somme est comptabilisée en « déduction des montants inscrits aux comptes de provisions au 31 décembre 2001 ».

La CADES, pour sa part, a inscrit dans ses engagements hors bilan la deuxième moitié du versement.

a) Au regard de cette situation, la Cour considère-t-elle que le principe de prudence a légitimement conduit les organismes de sécurité sociale à conserver le statut de créance irrécouvrable à la moitié de la dette restant ou au contraire, que ces organismes auraient dû considérer que le solde de cette créance devenait recouvrable du fait du remboursement de sa moitié et de l'inscription de l'autre moitié dans les engagements de la CADES ?

b) Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 comprend tout à la fois un article qui transfère à la CADES le règlement du solde de la dette FOREC et un article prévoyant la liquidation du FOREC par transfert de ses avoirs et dettes au budget de l'Etat.

• Sachant que le solde du FOREC est estimé fin 2003 à + 266 millions d'euros, la Cour estime-t-elle compatible la coexistence dans un même texte du transfert de la dette à la CADES et la reprise par le budget du solde positif du FOREC ?

• Un rapprochement avec la situation d'une entreprise « maison mère » qui transfèrerait sur une filiale la dette d'une tierce filiale au moment de la liquidation de cette dernière serait-il hasardeux ? Dans la négative, ce procédé serait-il contestable en comptabilité privée ?

RÉPONSE N° 5

Rappel des données.

La LFSS 2003 (article 14) et le PLFSS 2004 (article 2) comportent des dispositions identiques dans leur objet, qui ont conduit à éteindre la partie de la dette du FOREC (2,2 Md€, en arrondissant) correspondant à des créances des 3 caisses du régime général (CNAM-TS, CNAF et CNAV). Elles correspondent à des exonérations de cotisations liées à la mise en oeuvre de l'ARTT : restées impayées à la clôture des comptes 2000, elles avaient été inscrites dans les comptes de provisions au 31 décembre 2001, puis maintenues inchangées à la clôture des comptes 2002.

Cette dette « principale » à l'égard des trois caisses du régime général a été remboursée par la CADES pour moitié le 1 er avril 2003 et le sera, pour le solde, le 1 er avril 2004.

En outre, la LFSS 2003 a provoqué le remboursement total, dès le 1 er avril 2003, des créances de même nature détenues par la CCMSA (171,5 M€), le CRPCEN (10,5 M€), la CANSSM (2,1 M€) et l'établissement national des invalides de la marine (1,5 M€).

Ainsi, ce sont les créances sur le FOREC constatées dans les comptes de ce fonds et ayant donné lieu à des provisions constituées à la clôture des comptes 2001 des organismes créanciers qui ont été remboursées par la CADES le 1 er avril 2003 (1.283 M€), ou le seront par un versement de 1.097 M€ à intervenir au 1 er avril 2004.

Les provisions constituées à la clôture des comptes 2001 devront être reprises, à hauteur des remboursements intervenus, à la clôture des comptes 2003 puis des comptes 2004.

Les modalités précises de passation des écritures comptables correspondantes ne sont pas encore arrêtées à ce jour.

b) Validité des informations et écritures comptables - exercices 2002 et 2003.

La CADES a fourni une information succincte mais significative sur les opérations prévues par la LFS 2003 et celles envisagées au titre de 2004. Le compte financier 2002 (p. 34) mentionne, dans le « hors-bilan », au titre des engagements donnés, 1.283 M€ de versements à effectuer en 2003 aux organismes de sécurité sociale, avec indication du versement d'un montant voisin (1,2 Md€ sont indiqués) à intervenir en 2004, sous réserve du vote à émettre fin 2003 par le Parlement.

Pour l'ACOSS, le rapport de l'agent comptable sur le compte financier de l'exercice 2002 comporte (pages 74 à 78) des mentions visant les relations comptables avec le FOREC. Il indique en particulier que :

- la création du FOREC (décret du 25 octobre 2001) étant intervenu avec effet au 1er janvier 2001, les exonérations dont l'origine est antérieure, notamment celles de décembre 2000, ont été considérées comme se situant hors du champ des remboursements attendus du FOREC ;

- le mode de calcul des provisions constituées à la clôture de l'exercice 2001, et maintenues à la clôture de l'exercice 2002 ;

- la disposition prévue par la LFSS 2003 visant à faire rembourser, par un versement de la CADES, la moitié de la créance provisionnée du régime général.

Il y a donc lieu de considérer que, compte tenu de la date de publication de la LFSS 2003, (J.O. du 24.12.2002) et de l'aléa qui s'attache, à l'époque de la clôture des comptes (mars 2003) à la présentation et au vote du PLFSS 2004, les informations fournies par les deux principaux organismes concernés étaient certes succinctes mais suffisantes . Les écritures comptables elles-mêmes ne seront passées qu'en février-mars 2004.

Les reprises de provisions seront opérées, en clôture d'exercice, après constatation des remboursements intervenus - ou à intervenir - en provenance de la CADES. Elles auront pour effet d'améliorer, à due concurrence, les résultats d'ensemble, respectivement, des exercices 2003 et 2004, mais à titre de produits exceptionnels.

Ainsi, les 1.283 M€ remboursés le 1er avril 2003 par la CADES ne peuvent pas être considérés, dans les comptes des organismes bénéficiaires, comme des recettes courantes de l'année 2003. De même, le remboursement à intervenir au 1 er avril 2004 ne pourra pas être considéré comme constituant des recettes courantes de l'année 2004.

c) Un reliquat de créance de 118,5 M€ de l'ACOSS sur l'Etat ( au 31 décembre 2001).

Le montant précis de la créance de l'ACOSS sur l'Etat, au titre des remboursements de cotisations à sa charge, dans le cadre de la « RTT - Loi Aubry » avant mise en place du FOREC c'est-à-dire au 31 décembre 2001, a été chiffré à 118,5 M€. Mais ce montant n'a été arrêté qu'à la clôture de 2001.

Ce montant est inclus dans le récapitulatif des créances de l'ACOSS sur l'Etat au titre des « mesures emplois » qui, à fin 2002, s'établit à 1,811 M€.

Si la situation liquidative du FOREC s'établit bien à + 266 M€ comme cela découle des documents actuellement disponibles, l'Etat qui bénéficiera normalement de ce reliquat, ne devrait donc pas rencontrer de difficulté particulière pour acquitter la dette restante de 118,5 M€ évoquée ici.

QUESTION N° 6

Le statut des compensations d'exonérations de charges au regard des prélèvements obligatoires

A la page 115 de son rapport, la Cour précise que « les exonérations continuent d'être comptabilisées comme des cotisations payées par un tiers se substituant aux entreprises, et non comme une contribution du FOREC ou de l'Etat au financement de la sécurité sociale. Dès lors que la créance est détenue par l'ACOSS, elle devrait apparaître en produits dans un compte de branche que devrait tenir l'ACOSS ».

A ce propos, la Cour estime-t-elle que les sommes versées par l'Etat au titre de la compensation des exonérations de cotisations sociales ressortent de « prélèvements sociaux indirects » ou « de dépenses budgétaires relevant de la politique de l'emploi » ?

RÉPONSE N° 6

Les exonérations donnent lieu à une compensation par le budget de l'Etat. Elles constituent une dépense budgétaire relevant à la fois de la politique de l'emploi et de la volonté d'accroître la part du financement de la sécurité sociale provenant de prélèvements fiscaux .

a) Du point de vue des entreprises

La comptabilité nationale n'enregistre que ce qui est payé par le redevable : les exonérations ont donc bien pour effet de réduire les prélèvements obligatoires sur les entreprises. C'est pourquoi la Cour a demandé que dans les comptes de la sécurité sociale elles n'apparaissent plus en cotisations mais soit en impôts et taxes soit en concours de l'Etat, selon le mode de remboursement.

b) Du point de vue des administrations publiques

Ces cotisations exonérées apparaissent toujours comme une recette pour la sécurité sociale. Toutefois, selon que leur remboursement se fait par affectation d'impôts et de taxes ou par une subvention du budget de l'Etat, elles apparaissent en loi de finances :

- soit comme une moindre recette (les taxes ne sont plus considérées comme une recette du budget de l'Etat mais directement comme une recette de la sécu),

- soit comme une dépense à la charge du budget de l'Etat.

Du point de vue des prélèvements obligatoires, le mode de compensation est indifférent : en termes consolidés, les prélèvements obligatoires sont diminués du montant des exonérations, mais la répartition des prélèvements entre cotisations et impôts est modifiée. Selon que la compensation se fait par des taxes prélevées sur les ménages (tabac et alcools) ou par des taxes sur des entreprises (CSSS ou TACA), les exonération se traduisent par un transfert plus ou moins important des entreprises vers les ménages.

Le problème pour le budget de l'Etat est de faire face à cette perte de recettes ou à ce surcroît de dépenses. Trois solutions peuvent être envisagées :

- creuser le déficit du montant des exonérations (environ 20 Milliards d'euros),

- augmenter d'autres impôts pour financer une subvention, ou la perte de recettes qui résulte du transfert d'impôts et taxes à des organismes de sécurité sociale,

- réduire d'autres dépenses du budget de l'Etat pour compenser ces dépenses nouvelles ou moindres recettes.

Comme l'a souligné le Conseil des impôts à propos des dépenses fiscales (mais la situation est ici rigoureusement identique), toute dépense fiscale ou sociale est un transfert de charges vers d'autres contribuables (parfois partiellement vers les mêmes sous une autre forme d'imposition).

QUESTION N° 7

La régulation des dépenses d'assurance maladie

Au début du chapitre VIII de son rapport (p. 199), la Cour écrit, à propos des mécanismes globaux, qu'« aucun de ces systèmes n'a pu fonctionner, en raison soit de problèmes juridiques, soit d'impossibilités techniques, soit de l'impossibilité de les faire fonctionner entre l'Etat et la CNAM et les professions », ou qu'en ce qui concerne les mécanismes sectoriels, « ces dispositifs ont disparu quand la loi de financement pour 2000 a institué l'objectif de dépenses déléguées et le système des rapports d'équilibre. Celui-ci ayant lui-même disparu, ces secteurs échappent à toute régulation ». Elle rappelle en outre, pour les établissements, « l'accroissement des reports de charges », ainsi que « les protocoles hors cadre de régulation en 2000 et 2001 ».

La Cour estime-t-elle ainsi que les principales mesures de régulation envisagées dans le cadre du « plan Juppé » n'ont en réalité pas été appliquées ?

Dans quelle mesure pourrait-on dire, au regard du constat dressé par la Cour, que la majorité parlementaire issue des urnes en 1997 n'a pas utilisé des outils qu'au demeurant elle n'a pu ou voulu ni abroger ni remplacer ?

RÉPONSE N° 7

Certaines des mesures envisagées en 1996 ont effectivement été mises en oeuvre, notamment la création des agences régionales d'hospitalisation et de l'ANAES. D'autres dispositions ont commencé à être mises en oeuvre, mais de façon très insuffisante, par exemple l'accréditation des hôpitaux. D'autres enfin se sont révélées impossibles à mettre en oeuvre, pour des raisons juridiques ou pratiques, par exemple le système des sanctions individuelles ou collectives à l'encontre des médecins. Les difficultés ou les blocages de ces mécanismes sont apparus progressivement dans les années qui ont suivi les ordonnances. Globalement, le rythme de croissance des dépenses d'assurance maladie ne s'est pas ralenti après 1996, comme l'illustre le graphique figurant page 184 du rapport.

QUESTION N° 8

A la page 303 de son rapport, la Cour dresse un tableau critique du statut et du fonctionnement de la Commission de compensation, tout en ayant prévenu (p. 246) que les « analyses des chapitres X et XI ne tiennent pas compte (...) des nouvelles dispositions (de la loi retraite) », notamment au motif que « l'existence de la loi ne rend pas caducs » ces développements.

a) L'article 7 de la loi du 21 août dernier portant réforme des retraites a modifié en profondeur le fonctionnement de la commission de compensation. Selon la Cour, quelles avancées demeurent encore nécessaires afin que cette commission puisse s'acquitter de l'importante mission qui lui est assignée ?

b) Le rapport sur la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2002 faisait état d'une modification profonde des règles de calcul de la compensation généralisée et de la surcompensation mais le décret devant fixer ces règles nouvelles n'a pas été publié antérieurement à la promulgation de la loi portant réforme des retraites précitée. En conséquence, la Cour estime-t-elle que la procédure prévue par l'article 7 précité, c'est-à-dire la consultation préalable de cette commission sur tout projet de réforme des règles touchant à la compensation, est applicable à la promulgation dudit règlement ?

RÉPONSE N° 8

a) L'article 7 de la loi du 21 août 2003 a considérablement étendu et précisé les missions et le mode de fonctionnement de la commission de compensation. Même si la commission continue, comme par le passé, à intervenir à titre consultatif, l'introduction de la règle que ses avis seront transmis au Parlement pour « tout projet de modification des règles affectant les mécanismes de compensation », constitue une novation essentielle.

Sur ce point, il conviendra de veiller que le décret prévu pour « déterminer les modalités d'application de l'article 7 » dispose bien que ce type d'avis doive être recueilli à titre préalable, avant que ne soit prise la (ou les) décision(s) correspondante(s).

Ces dispositions, qui rapprochent le « statut » de la commission de celui d'instances consultatives rendant des avis publics, constitue une clarification utile et un progrès indéniable contribuant à introduire dans ces domaines très techniques les règles de base pour améliorer la transparence dans la prise des décisions.

Le contrôle des informations quantitatives servant aux calculs de compensation, dès lors qu'il est inscrit dans la loi elle-même, devra à l'avenir être réalisé sur des bases objectives et claires. La commission devra définir des méthodes adaptées pour procéder ou faire procéder aux contrôles les plus pertinents sur les éléments de calcul des compensations (effectifs des cotisants, durée et montants des cotisations, effectifs des retraites et des ayants droit, etc...).

L'objectif central sera, d'une part de veiller à l'homogénéité des modes de calcul et d'autre part, de préparer techniquement les évolutions souhaitables pour améliorer l'équité entre les régimes en présence.

La question des moyens humains et financiers dont la commission de compensation aura besoin pour acquitter cette mission va se poser très rapidement.

b) Les textes réglementaires évoqués dans le rapport de la CCSS de septembre 2002 (Tome I, page 100) ont connu des temps de maturation très variables.

1) Pour la compensation spécifique vieillesse :

- le nouveau taux de cotisation CNRACL, applicable au 1 er janvier 2003, a fait l'objet du décret n° 2003-5 du 17 janvier 2003 (JO du 18 janvier, page 1108).

- la diminution de trois points du taux d'application pour le calcul de cette compensation entre les régimes spéciaux de salariés avait donné lieu à un projet de décret valable pour 2003 qui a été repris ultérieurement pour valoir pour trois années (2003 à 2005). Ce second décret est actuellement en instance de publication au J.O.

2) Pour la compensation généralisée vieillesse :

- la prise en compte des effectifs de chômeurs indemnisés par le FSV dans le calcul des effectifs de cotisants et la soustraction des sommes déjà remboursées par le FSV pour le calcul de la prestation de référence, va faire l'objet d'un décret qui est également en instance de publication au J.O.

Nonobstant les délais ainsi observés dans la publication de ces deux décrets, les acomptes fixés au titre de 2003 (arrêtés des 28 février et 25 juin 2003 et 25 juillet 2003 (ce dernier au J.O du 1 er août 2003) ont été calculés en tenant compte de ces mesures.

Dès lors que l'article 7 de la loi sur les retraites prévoit un décret pour fixer les modalités d'application des nouvelles attributions confiées à la Commission de Compensation sa consultation préalable sur les deux décrets en instance de publication a pu apparaître comme non obligatoire.

QUESTION N° 9

Le financement en trésorerie de l'ACOSS

La Cour écrit, page 72 de son rapport, que les taux applicables à l'ACOSS en matière de frais et produits financiers « sont fixés par la convention passée entre l'ACOSS et la CDC : le taux moyen du marché monétaire minoré de 1/8 e pour les intérêts créditeurs et majorés de un point pour les taux débiteurs ».

a) Il apparaît qu'en matière d'intérêt débiteur, le « spread » appliqué à l'ACOSS soit inférieur à 100 points de base dès lors qu'aucun « incident » journalier n'est intervenu. Néanmoins, la Cour considère-t-elle que les conditions de refinancement de l'ACOSS sont avantageuses ?

En particulier, la Cour est-elle en mesure de préciser la marge véritable réalisée par le prêteur, (la Caisse des dépôts et consignations), sur ces opérations, à savoir le « spread » existant entre le coût de refinancement de la Caisse des dépôts - sans doute inférieur au taux du marché monétaire - et le taux appliqué à l'ACOSS ?

b) La Cour s'est-elle livrée à une étude approfondie de ce sujet ? A-t-elle rédigé un document ? Dans l'affirmative, le communiquer.

c) Existe-t-il, selon la Cour, des solutions alternatives à la procédure existant pour le refinancement à court terme de la sécurité sociale ?

RÉPONSE N° 9

a) Jusqu'en 2002, les taux applicables à l'ACOSS par la CDC sont ceux qui figurent dans la convention ( TMMM - 1/8 et TMMM + 1). Suite à l'accord conclu entre l'ACOSS et la CDC le 21 octobre 2001, un nouvel instrument de financement aux avances mobilisables à 24 heures a été mis en place depuis le 10 juin 2003 : il s'agit d'un système d'avances prédéterminées. La rémunération de la CDC est basée sur Eonia plus une marge fixe, plus faible que les 100 points de base.

b) A l'occasion de l'analyse de la situation de trésorerie du régime général en 2003, la Cour examinera de façon détaillée cette question dans son prochain rapport.

c) Compte tenu des besoins de financement de l'ACOSS, la Cour estime qu'il n'y a sans doute pas d'alternative au financement par la CDC, seule capable de mobiliser à moindre coût des montants aussi importants que ceux qui résultent de la non couverture en fin d'exercice du déficit du régime général.

QUESTION N° 10

La gestion du fonds de réserve des retraites

A la page 310 de son rapport, la Cour observe que le FSV, gestionnaire du fonds de réserve des retraites, a obtenu un « rendement réel effectif de l'ordre de 2,8 % en 2000 et 2001 ».

a) Au regard des contraintes de gestions posées au FSV, à savoir un horizon de très court terme (la création d'un établissement public étant annoncée comme imminente, le FSV devait se tenir ainsi prêt à libérer les fonds) et un panel d'instruments financiers fortement encadrés (valeur d'Etat ou garanties par lui), la Cour estime-t-elle ce rendement médiocre ?

b) Une note transmise au conseil de surveillance du fonds de réserve par son directoire précise les objectifs de rendement du fonds sur longue période - ceux-ci étant légèrement inférieurs à 4 %. Un document remis au même conseil le 5 mars 2003 évaluait, pour sa part, cette hypothèse entre 3,5 et 4 %.

La Cour considère-t-elle cet objectif ambitieux au regard des contraintes posées au gestionnaire du F2R (horizon de très long terme et grande variété d'instruments financiers), et en comparaison au rendement réalisé par le FSV, gestionnaire du F2R, pour les années 2000 et 2001 ?

RÉPONSE N° 10

a) Les modalités de placement des fonds du FRR ont connu quatre étapes :

- d'octobre 1999 à janvier 2000 : prise en pensions de valeurs d'Etat ;

- année 2000 et premier semestre 2001 : possibilité d'achat ferme de valeurs d'Etat de maturité résiduelle inférieure ou égale à 2 ans ;

- fin de l'exercice 2001 : retour aux opérations de pensions livrées ;

- à partir du 1er semestre de l'année 2002, rémunération sur la base du taux moyen des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés (BTF 13 semaines) - 0,05 % ;

Compte tenu :

- de la limitation des placements de titres à taux fixe, sans placements en titres à taux variable,

- et de la limitation supplémentaire à des titres à durée très courte (sauf pendant la 2ème étape),

- il paraît difficile d'avancer que des rendements plus élevés auraient pu être atteints.

b) Il n'est pas possible de qualifier a priori un objectif de rendement à long terme de 4 %. On peut néanmoins faire remarquer :

- qu'un tel rendement est cohérent, à partage macro-économique entre salaire et profit inchangé, avec un taux de croissance à long terme de 4 %. Indépendamment même des perspectives conjoncturelles des années de démarrage, la plupart des économistes estiment le potentiel de croissance de la France à un maximum de 2 à 2,5 %, ceci avant la prise en compte des perspectives de baisse de la population active,

- qu'une des administrations de tutelle a effectivement calculé une variante avec un taux de rendement de 2,5 %,

- que les placements nouveaux du fonds ne démarreront pas avant la mi-2004, alors que les cours de bourse ont commencé à se redresser à compter du 2ème trimestre 2003.

Les réponses de la Cour des comptes ont appelé les questions complémentaires suivantes du rapporteur

Sur la question 1

- La Cour écrit que rien n'empêche que mention soit faite de la situation de la CADES et du F2R dans le rapport annexé (article premier). Pourtant, ces fonds sont l'objet d'une annexe qui leur est exclusivement consacrée, l'annexe F. La Cour estime-t-elle cette annexe insuffisante ?

- Plus largement, la Cour avance que le « FRR n'entre pas en ligne de compte dans la fixation par la loi de financement de la sécurité sociale des prévisions de recettes et des objectifs de dépenses ».

L'annexe C relative aux recettes et aux dépenses des organismes de base de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 indique que les prévisions de recettes portent sur l'ensemble des régimes obligatoires et des fonds concourant à leur financement dont le F2R. L'intégration de ces recettes est-elle donc contraire à la loi organique ? Le Parlement a pris l'habitude de voter les recettes du F2R en loi de financement, ce vote était-il « un cavalier » ?

Sur la question 3

- La Cour rappelle la proposition du Conseil des impôts que soit « posé le principe d'une exclusivité des lois de finances pour créer des dépenses fiscales ». La Cour pense-t-elle que cette logique devrait s'appliquer pour la loi de financement et les exonérations de cotisations sociales ?

- Sur le partage des impôts entre État et sécurité sociale, la Cour écrit qu'il appartient au législateur de fixer la règle ou de saisir le Conseil constitutionnel pour connaître son interprétation. On avance souvent que la fixation en lois de finances des recettes partagées entre l'État et la sécurité sociale est imposée par la nouvelle loi organique relative aux lois de finances.

Est ce l'analyse de la Cour ? La Cour estime-t-elle que les dispositions de cette loi organique sont convenablement articulées avec les lois organiques relatives aux lois de financement de la sécurité sociale ?

- Sur la TACA, il semble qu'il existe plusieurs jurisprudences récentes de la Cour de cassation relative à la C3S qui rappellent les conditions dans lesquelles les taxes sur le chiffre d'affaires ne sont pas contraires au droit européen, notamment à la directive sur la TVA. Une de ces conditions est, semble-t-il, que celles-ci constituent, au sens du droit européen, des cotisations sociales c'est-à-dire qu'elles soient affectées à des régimes sociaux.

Quelle est l'analyse de la Cour à ce sujet, au regard de la jurisprudence ABB contre Organic ?

Sur la question 4

Le congé de paternité est financé par la CNAF mais réglé par la CNAM à qui la CNAF rembourse la dépense. Cette dépense figure-t-elle dans les deux objectifs ? L'annexe C du projet de loi de financement de la sécurité sociale laisse entendre que non. En revanche, il semble acquis que les majorations de pension pour enfants figurent dans les objectifs de dépenses de la branche famille et de la branche vieillesse.

Cette différence tient-elle à ce que ce transfert transite par le FSV ?

Comment confronter, d'un point de vue général, les recettes et les dépenses de la sécurité sociale en loi de financement si certaines dépenses figurent deux fois en dépenses, mais que les recettes correspondantes ne sont, elles, comptabilisées qu'une fois ?

Question 9

Lors du dernier conseil de surveillance de l'ACOSS, avait été évoquée l'existence d'un travail par la Cour sur la convention liant l'ACOSS et la CDC en matière de trésorerie. La Cour confirme donc que le travail sur la trésorerie est à venir ?

Plus largement, a-t-elle envisagé l'hypothèse d'un financement en trésorerie par la CADES, au sein d'une section d'activité séparée de l'amortissement de la dette ? Cette solution permettrait-elle un financement meilleur marché pour la sécurité sociale ?

Réponses de la Cour des comptes

Sur la question 1

L'annexe F consacrée aux divers fonds donne une information chiffrée. La Cour évoquait seulement dans sa réponse écrite la possibilité pour le ministre de développer un point de vue sur ces fonds dans le rapport sur les objectifs.

La phrase rapportée, issue de l'annexe C relative aux recettes et aux dépenses des régimes de base de sécurité sociale (p 17 annexe au PLFSS 2003), selon laquelle « les prévisions de recettes portent sur l'ensemble des régimes et des fonds concourant à leur financement (FSV, FOREC et FRR) » comporte une inexactitude car le FRR ne peut être considéré comme concourant au financement des régimes pour l'année concernée. D'ailleurs, la suite du texte le confirme en ne visant que les transferts en provenance du FOREC et du FSV.

Par contre, sous le contrôle du Conseil constitutionnel, il n'est pas interdit à la LFSS de comporter des dispositions autres que celles concourant strictement à l'équilibre financier des régimes. Un parallèle peut être établi avec les dispositions dites permanentes de la loi de finances.

Le Parlement vote certaines recettes du FRR en LFSS, notamment quand il s'agit de recettes partagées avec des régimes ou des fonds (voir la LFSS pour 2002). D'autres recettes sont votées en loi de finances. Ce n'est sans doute pas très clair. L'annexe F permet cependant de rassembler, de manière prévisionnelle pour l'année à venir les recettes dont l'adoption est soumise au vote du Parlement.

Sur la question 3

Normalement, une loi intervenant en cours d'année ne doit pas remettre en cause l'équilibre financier de la sécurité sociale tel qu'adopté dans la LFSS. Cette question est généralement soumise au Conseil constitutionnel (voir la loi créant l'APA). En cas de décision nouvelle ayant un effet sur cet équilibre, qu'il s'agisse d'une loi ou d'une décision gouvernementale, il devrait y avoir une LFSS rectificative (voir le rapport de la Cour sur la sécurité sociale de septembre 2002, p. 67 sur les circonstances justifiant une LFSS rectificative).

La loi de finances et la LFSS n'ont pas la même portée. Les deux lois organiques sont très différentes. Néanmoins, les liens entre le budget de l'Etat, la fiscalité et la sécurité sociale ne sont pas traités avec suffisamment de clarté ainsi que la Cour l'observe chaque année. Par ailleurs, les agrégats de la LFSS ont un contenu mal défini. Pour toutes ces raisons, il serait nécessaire de repenser le contenu de la LFSS, en relation également avec la restructuration du budget de l'Etat en missions, programmes et actions.

La Cour ne peut se substituer au juge pour apprécier la conformité d'une taxe à la directive sur la TVA. N'ayant pas examiné la TACA dans le cadre de ses contrôles récents, elle ne peut répondre à la question posée.

Sur la question 4

La comparaison entre le traitement comptable du congé de paternité et de la majoration de pension pour enfant à charge permet de mettre en lumière une différence de nature entre ces deux prestations.

Le congé de paternité est une charge budgétaire pour la seule branche famille, la branche maladie supportant éventuellement une charge de trésorerie, selon les modalités prévues pour son remboursement. Normalement, la dépense prévisionnelle ne doit apparaître que dans la branche famille, la branche maladie se contentant d'assurer le service des prestations pour le compte de la CNAF.

Les majorations de pension pour enfant figurent en effet dans les objectifs de dépenses des deux branches famille et vieillesse car c'est bien une contribution de la branche famille à une dépense de la branche retraite. Seule la consolidation au niveau du régime général peut faire disparaître le double compte partiel.

Branche famille

Branche retraite

Recettes

Dépenses

Recettes

Dépenses

Cotisations

CSG

Transfert versé à la branche retraite via le FSV

Transfert reçu via le FSV
cotisations

Majorations de pension

Le passage par le FSV est justifié par la nécessité de redistribuer sur plusieurs régimes ce qui est reçu de la CNAF. Cela ne change pas la nature de l'opération.

La Cour a déjà démontré que la confrontation entre recettes et dépenses est impossible puisque le champ des recettes et celui des dépenses ne sont pas les mêmes et que les dépenses sont présentées par branche sans qu'aucune consolidation par régime ou pour l'ensemble de la sécurité sociale soit proposée au vote du Parlement, la loi organique ne le prévoyant pas (voir le rapport de la Cour sur la sécurité sociale de septembre 2003, p. 169 et suivantes).

Il serait très souhaitable que le Parlement obtienne en annexe le détail des agrégats de dépenses et de recettes qu'il vote. L'annexe D sur les ressources est très globale et il n'y a pas d'annexe sur les dépenses par branche explicitant le contenu des objectifs et de l'ONDAM. Le travail de consolidation ne peut être fait qu'au niveau des comptes.

Sur la question 9

Chaque année la Cour examine la situation de la trésorerie de la sécurité sociale et les solutions apportées en cours d'année en cas d'insuffisance de ressources. Elle a déjà évoqué la convention entre l'ACOSS et la CDC et ne manquera pas d'y revenir.

La Cour n'a pas examiné la question d'un élargissement des missions de la CADES dans le sens évoqué. Les ressources actuellement affectées à la CADES contribuent à lui assurer une bonne notation. Toute mission nouvelle devrait s'accompagner d'une ressource nouvelle.

Rapport sur le projet de loi de financement
de la sécurité sociale pour 2004

Sommaire abrégé

Tome I - Équilibres financiers généraux et assurance maladie
( Rapporteur : M. Alain Vasselle)

Exposé général sur les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie

Travaux de la commission - Auditions de :

- MM. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , Christian Jacob, ministre délégué à la famille et Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées ;

- MM. François Logerot, Premier président de la Cour des comptes , Bernard Cieutat, président de la 6 e chambre et Christian Babusiaux, conseiller maître à la 6 e chambre ; Mme Catherine Démier , conseillère référendaire, secrétaire générale adjointe et M. Renaud Séligmann, auditeur à la 6 e chambre ;

- M. Jean-Marie Spaeth, président du conseil d'administration de la CNAMTS ;

- MM. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'ACOSS et Frédéric Van Roeckeghem , directeur général ;

- MM. Michel Laroque, président du conseil d'administration du FSV et du FOREC et Jacques Lenain , directeur.

Annexe :

- Réponses de la Cour des comptes au questionnaire de la commission

Tome II - Famille
( Rapporteur : M. Jean-Louis Lorrain )

Exposé général sur la famille

Travaux de la commission - Audition de :

- Mme Nicole Prud'homme, présidente du conseil d'administration de la CNAF

Tome III - Assurance vieillesse
( Rapporteur : M. Dominique Leclerc)

Exposé général sur l'assurance vieillesse

Travaux de la commission - Auditions de :

- MM. Michel Laroque, président du conseil d'administration du FSV et du FOREC et Jacques Lenain , directeur ;

- MM. Marcel Lesca, vice-président du conseil d'administration de la CNAVTS et Patrick Hermange, directeur.

Tome IV - Accidents du travail et maladies professionnelles
( Rapporteur : M. André Lardeux)

Exposé général sur les accidents du travail et les maladies professionnelles

Tome V - Examen des articles
( Rapporteur : M. Alain Vasselle)

Commentaire des articles et propositions d'amendements

Travaux de la commission - Examen du rapport

Tome VI - Tableau comparatif
( Rapporteur : M. Alain Vasselle)

* 1 Cf., en annexe, audition de MM. Pierre Burban, président du conseil d'administration, et Frédéric Van Roeckeghem, directeur général, de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale - le 5 novembre 2003.

* 2 Cf. audition précitée de MM. Pierre Burban, président du conseil d'administration, et Frédéric Van Roeckeghem, directeur général, de l'ACOSS.

* 3 Décret du 26 août 1998.

* 4 Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

* 5 Alain Vasselle, Assurance maladie, Une réflexion dans l'urgence.

* 6 Cf. infra.

* 7 Cf. avis n° 1156 de M. François Goulard au nom de la commission des Finances de l'Assemblée nationale.

* 8 Cf. commentaire de l'article 2.

* 9 Alain Vasselle, Les prélèvements sociaux : quelles ressources pour quelle protection sociale - Sénat n° 44 (2003-2004).

* 10 Cf. en annexe, réponse au questionnaire de votre rapporteur.

* 11 Cette évaluation est celle de l'annexe E du projet de loi de financement.

* 12 Cf. commentaire article 2 du présent projet de loi (cf. Tome V).

* 13 Le Conseil constitutionnel a en effet déjà examiné une proposition de prise en charge par la CNAM du plan Biotox, et ne l'avait semble-t-il tolérée qu'à titre « exceptionnel ». De même, on peut s'interroger sur la faculté laissée aux législateurs d'inscrire dans les agrégats de dépenses de la branche maladie, des dépenses d'assurance maladie d'ordre complémentaire, l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale interdisant en principe que de telles mesures figurent dans les objectifs de dépenses retracés par la loi de financement de la sécurité sociale (ce que le Conseil constitutionnel a confirmé dans sa jurisprudence sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001).

* 14 Cf. Alain Vasselle, PLFSS pour 2003, rapport du Sénat n° 58, session 2002-2003 tome I).

* 15 En réalité, il l'a été d'une part, par la consommation des réserves du fonds, d'autre part, par des aménagements de trésorerie avec la CNAVTS.

* 16 Commission des comptes, rapport mai 2003.

* 17 Audition devant la commission des Affaires sociales, 7 mai 2003.

* 18 Alain Coulomb : la médicalisation de l'ONDAM, rapport au ministre de la santé, avril 2003.

* 19 Entretien publié par le Figaro du 7 avril 2003

* 20 Audition devant la commission des Affaires sociales de MM François Logerot, Premier président et Bernard Cieutat, président de la 6 e chambre, accompagnés de plusieurs magistrats, sur le rapport annuel de la Cour des comptes consacré à l'application de la loi de financement de la sécurité sociale ; 29 octobre 2003.

* 21 Ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé, ainsi que des procédures de création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation.

* 22 Assemblée nationale, 2ème séance du jeudi 30 octobre.

* 23 Loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le gouvernement à simplifier le droit.

* 24 L'ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation.

* 25 Projet soumis aux différentes caisses de sécurité sociale.

Page mise à jour le

Partager cette page